Fic + Art : Printemps, été, automne, hiver… Et printemps. - Pomona/Poppy - pour Gredoune (original) (raw)

Chère gredoune, nous sommes très heureuses d'ouvrir ce nouvel échange de cadeaux sous_le_sapin par le présent que ton lutin de Noël t'a destiné, joliment poétique et coloré :)

Titre : Printemps, été, automne, hiver… Et printemps.
Auteur : picadillly
Disclaimer : cette histoire n’a fait que s’inspirer de faits irréels relatés par JKR. Grâce lui soit rendue. Grâce soit rendu également à Kim Ki-duk, à qui j’ai volé le titre de son film. Je ne l’ai pas vu, je ne sais pas de quoi ça parle, donc toute ressemblance avec ce film serait totalement fortuite. Petit clin d’œil à Maurice Druon et à son Tistou les Pouces Verts, qui m’ont aidé à construire Pomona.
Pairing : Pomona Sprout/Poppy Pomfrey
Rating : G, femslash discret.
Nombre de mots : ~ 1500
Mot de l'auteur : Joyeux Noël, Gredoune ! J’espère que ce cadeau te plaira, puisque j’ai travaillé sur deux personnages à propos desquels je ne savais presque rien, et pour lesquels les livres sont finalement assez avares en information… J’ai donc inventé avec bonheur des caractères qui j’espère ne déformeront pas trop ce que tu avais pu t’imaginer. En tout cas, grand merci à toi de me les avoir fait découvrir avec ce prompt !

Printemps, été, automne, hiver… Et printemps.

C’est un gros bouquin en cuir, qui sent la poussière et les feuilles séchées – sans doute parce que tous les livres de la maison sont utilisés comme herbiers par Pomona. Un cliché s’en échappe, et c’est ça qu’il y a de merveilleux avec les appareils photo du monde magique, c’est qu’ils ont cette formidable tendance à se mettre en route sans que personne ne leur demande rien. La photographie n’appartient qu’à elles, tout comme l'instant que l’autonome appareil à saisi : elles sont seules au monde, et dans les souvenirs qui remontent dans l’esprit de Poppy, il y a des odeurs d’été et de sol brulé par le soleil, de chaleur aride, et la peau fraiche de Pom contre sa peau, sa main verte dans la sienne. Pom avait 28 ans et elle 24, et c’était le premier été qu'elles passaient à Poudlard.

Elle se souvient du jour où elles se sont véritablement rencontrées. Elles ne se croisaient qu’en de très rares circonstances, parce que Poppy n’était présente que pour venir en aide à Miss Mercuroboss, l’infirmière de Poudlard, débordée par l’épidémie de scrofulite manticoresque qui sévissait dans l’école. Mais Poppy était jeune, et son passé de Serpentard faisait d’elle quelqu’un d’assez peu compatissant avec son entourage (surtout quand l’entourage en question semblait avoir une bouée à la place du cou, et une langue à la fois violette et gonflée dégageant une dérangeante odeur d'andouillette brulée), aussi quand à la fin d’un repas, le professeur McGonnagall avait proposé à qui le désirait une partie de Bavboules, elle sauta sur l’occasion. Elle avait été, après tout, capitaine pendant trois ans d’affilée du Club de l’école, et elle suivait avec attention les résultats de la Ligue Amateur qui paraissaient mensuellement dans le Sportier, le magazine des sports amateurs et oubliés du monde sorcier.
Poppy n’était à Poudlard que depuis peu de temps, sinon elle aurait sû que jamais Minerva McGonnagall n’aurait proposé à quiconque un jeu aussi dépassé que les Bavboules. Mais la jeune infirmière n’était dans le château que depuis trois semaines, et quand elle rattrapa enfin les deux sorcière qui étaient allées se fourrer dans la tour Est (quelle drôle d’idée), la surprise fut de taille – et son appareil photo, qui l’avait suivit jusque là, se déclencha aussitôt.

Prise en flagrant délit comme deux collégiennes, Minerva McGonnagall et Pomona Chourave étaient en train de fumer une cigarette, tout en se lançant régulièrement des sortilèges Pchiiitpchiiit pour chasser toute odeur de tabac.
« Vous ne jouez pas aux Bavboules ? » avait demandé avec déception Poppy, ce qui avait laissé Minerva toute crachotante (elle avait éclaté de rire tout en aspirant de la fumée), et Pomona avait paru intéressée : qui en ce monde pouvait bien s’intéresser aux Bavboules ? (non pas que le jeu soit impopulaire, mais il n’était joué véritablement que par les enfants)
Plus tard, Poppy découvrirait que jouer au Sautebuisson avec Minerva n’avait rien à voir avec le sport sorcier, et impliquait généralement une bouteille de Whisky Pur-Feu ou de Kir du Kelpi ; le jeu prendrait également un sens différent avec Pomona. Mais elle apprit également que si le professeur de Métamorphose proposait une partie d’Échecs ou de Quidditch, il ne fallait rien espérer d'autre. Minerva n’était pas du genre à plaisanter avec les Échecs ou le Quidditch.

C’était l’époque où l’on s’était mis à bien rigoler à Poudlard (enfin, plus encore que d'habitude), quand le vieux Dippet avait décidé d’aller manger les Mandragore par la racine, et que Dumbledore était devenu directeur de l’école.
Peut-être que l’homme qui semblait toujours tout savoir devinait les sombres années à venir ; toujours est-il que Poudlard sembla devenir pendant quelques temps une cour de récréation géante — Dumbledore avait fait rapidement connaître sa passion pour le bowling, et il n’était pas inhabituel alors de voir des quilles dégringoler les escaliers de l'école (ou, dans certains cas, des élèves changés en quilles).

La page suivante de l’album est une photo de Pom bébé. Avec cette image vient une histoire que Poppy a mit un certain temps à obtenir, non sans difficulté : supplications, cadeaux, prières… La Poufsouffle a finalement fini par céder.

D’aucun aurait dit que l’on avait bien de la chance d’être loti d’un tel don ; mais comme bien des gens touchés par ce genre d’attention, Pomona avait fini par considérer cela comme une malédiction. Parce qu’une fée un peu idiote – et totalement ivre – avait décidé de s’intéresser à son berceau le jour de sa naissance, il fallait qu’elle souffre au quotidien de ce que chacun s’accorde à appeler une bénédiction. Foutaises !

Fabula sa marraine la fée s’était penchée avec extase sur ses draps blancs, et s’était pâmée avec émoi auprès de sa mère : « Graciella, chérie, celle-ci en est une, j’en suis sûre ! Cette merveilleuse petite citrouille est une sorcière ! » À cette annonce, sa famille avait rugi de joie. Après les déceptions engendrées par les naissances de Sylvestre et Palès, ses frères aînés, plus personne n’avait espéré revoir jaillir dans le sang des Chourave la moindre étincelle de magie. Aussi, à l’annonce de cette réjouissante –et étonnante – nouvelle, chacun s’était félicité, s’était embrassé, riant et pleurant de joie à la fois, papillonnant autour du couffin dans lequel Pomona dormait. Fabula, toute à son bonheur d’avoir été l’heureux messager d’une si bonne nouvelle, avait alors retroussé les longues manches de sa robe scintillante, et avait brandit sa (ridiculement) longue baguette, et après quelques moulinets qui avait produit un effet certain sur l’assemblé, elle avait annoncé d’une voix chantante que puisqu’il était ainsi, elle allait offrir un cadeau à l’enfant. On rugit de plaisir à nouveau : le cadeau d’une fée ! Quel présage merveilleux ! Qu’est-ce que la petite Chourave allait donc recevoir ? Grâce ? Sagesse ? Bonté ? Fabula avait fait encore un moulinet avant de se retourner brusquement vers le berceau en pointant sa baguette sur le bébé assoupi, tout en prononçant la formule magique. Se faisant, elle s’était prit les pieds dans sa robe bien trop grande pour elle (les fées n’étaient pas connues pour leur haute taille), et sa baguette lui avait échappé des mains, pour tomber sur la tête de Pomona. Sans doute était-ce à cause de la liqueur de Pipaillon qu’elle avait ingurgité pendant la fête, et sans doute aussi parce que Pomona ressemblait réellement à une citrouille, avec ses joues rebondies et sa robe orange ; toujours était-il que Fabula s’était embrouillée dans sa formule. Au lieu d’énoncer, comme elle l’avait désirée, « Reçois ce sortilège de Beauté, et puisses-tu toujours avoir d’être bien svelte » – la formule n’était pas formidable, mais c’était la toute première fois que Fabula en inventait une –, elle avait baragouiné « Reçois ce florilège en beauté, et puisse-tu toujours avoir la main verte ».

Le vent avait soufflé, les robes de ses dames s’étaient soulevées, l’enfant avait gémi dans son sommeil, la magie avait flamboyé ; la baguette fit « poc » en heurtant la tête de Pomona, il y eu une gerbe d’étincelles roses, et le sortilège de la fée prit forme. Et depuis ce jour, Pomona avait des mains vertes.

Le cadeau de Fabula n’impliquait pas seulement une coloration des pigments de la peau de Pomona ; dès que la jeune sorcière ressentait une émotion plus accentuée qu’en temps normal, tout autours d’elle jaillissaient des plantes aux formes diverses, des fleurs de taille anormale, des arbustes étranges. Avec le temps, elle avait réussi à contrôler son étrange pouvoir, mais il avait fallu des années de patience et bon nombre d’accidents pour maîtriser le présent envahissant de la fée (elle avait notamment appris à l’âge de trois ans à ne plus mettre ses doigts dans son nez, après s’être retrouvé hospitalisée d’urgence à Ste Mangouse avec deux palmiers dans l’appendice nasale).

La photo suivante est amère, pleine de souvenirs de l’époque où tout à basculer. La Guerre, avec une majuscule parce qu’elle est dramatique, effrayante, quelle détruit sans que l’on comprenne ce qu’elle veut. Poppy ne sait plus qui a pris la photo, mais elle sait que Pom voulait la conserver, pour ne pas oublier dit-elle. Poppy la trouve cruelle, parce que c’était juste après l’enterrement des deux frères de Pom, morts parce la magie n’avait pas voulu d’eux. Pour parler de la guerre, des guerres – parce qu’une seule n’était pas assez ! il ne leur ai resté que les larmes.

À quoi bon, avait hurlé Pom, à quoi bon ? Et la neige de l’hiver froid et sordide était la seule réponse qu’elle avait obtenue.

On se reconstruit. On forge de nouveaux souvenirs. Poppy referme l’album. La guerre est finie, tandis que les photographies s’empilent dans la bibliothèque, attendant d’être classées, parce que quand la souffrance s’arrête, la vie autour d’elle continue. Poudlard est toujours debout, et sur une pierre de la tour Est, il y a toujours gravé « Pom aime Pop », et c'est tout ce qui compte.
Poppy sourit.

Dehors, c’est déjà le printemps.

Fin.