L'invasion prussienne de 1870 (original) (raw)
Le 19 juillet 1870, la France déclare la guerre à la Prusse. Le 31 août, l'armée française capitule à Sedan et Napoléon III est fait prisonnier. Le 4 septembre, la IIIe République est proclamée ; un gouvernement de la Défense nationale est alors mis en place sous la présidence du général Trochu. Paris est assiégée et les troupes prussiennes avancent sur le territoire français, l'occupant peu à peu. Le 7 octobre, Gambetta quitte Paris pour Tours en ballon.
Dans la soirée du 19 décembre 1870, l'armée prussienne entre en Indre et Loire par Château-Renault. Munis d'une cinquantaine de canons, plus de 20 000 soldats ennemis prennent position dans la ville.
Le 20 décembre, les soldats de Brunswick, au nombre de 2 000, font halte avec leur artillerie dans les rues de Reugny et s'y installent pour déjeuner.
Un témoignage nous décrit les évènements "... Mardi matin, le corps d'armée ne tarda pas à défiler muni de cinq pièces de canons avec leurs caissons et fourgons qui ont stationné environ 2 heures devant notre porte et pendant ce temps on entendait gronder les canons et la fusillade car un combat avait lieu [...]. Et pendant ce temps-là les soldats allaient voler partout où ils pouvaient jusqu'à se permettre de déchausser les hommes afin de prendre leurs souliers. Enfin, ils sont partis en annonçant qu'ils devaient en venir 1 500 le même soir."
Le capitaine Sansas, qui se trouvait à Vouvray le 20 décembre, écrit dans son rapport "qu'une colonne ennemie composée d'un régiment bavarois avec six pièces d'artillerie et 150 cavaliers occupait Reugny".
Sur ordre du général Pisani, les troupes françaises se mettent en route vers Monnaie où est engagée la bataille qui ouvre la route de Tours à l'armée prussienne, livrant les villages alentours à l'ennemi. Après la bataille de Monnaie, l'armée prussienne se dirigeant vers Tours cherche des campements pour la nuit du 20 au 21 décembre 1870.
Le témoin écrit que "vers 6 heures on frappe à toutes les portes. Ceux qui n'ouvraient pas, on les défonçaient." Il s'agit du bataillon de Westphalie, qui séjourne à Reugny jusqu'au matin du 22 décembre.
Au matin, une partie de l'armée ennemie gagne le haut de la Tranchée d'où la ville de Tours est bombardée sans sommation. Cette attaque fait une dizaine de victimes. Cependant, la canonnade est interrompue par l'intervention courageuse du maire de Tours, Eugène Gouïn.
L'invasion redoutée n'a pas lieu ce jour-là car l'armée prussienne reçoit l'ordre de se concentrer dans la région de Blois pour faire face à une offensive de la garnison de Paris."Jeudi matin, tout est parti pour Blois et tous ceux qui étaient à Monnaie ont passé par le rue du pont. Pendant au moins 5 à 7 heures durant, cela n'a pas cessé ; on évalue au moins à 25 mille hommes. À la fin tous les pillards [...] ont passé volant toutes les maisons, cherchant dans les meubles, prenant tout ce qui leur convenait...".
Cependant, un mois plus tard, le 19 janvier 1871, les prussiens entrent à Tours qui restera occupée pendant sept semaines.
Les reugnois ne sont pas au bout de leurs peines : la veille de l'occupation de Tours, la brigade du général Hartman, composée de 4 000 hommes, fait halte dans le village pour y déjeuner avant de se diriger du Tours par la route de Vouvray. Jusqu'au 8 mars, après la capitulation de Paris le 29 janvier 1871 immédiatement suivie de la signature de l'armistice à Versailles, les troupes ennemies établissent à plusieurs reprises leur cantonnement à Reugny qui paiera un lourd tribut pour cette guerre : l'occupation prussienne aura été de 30 jours et les habitants de Reugny auront fourni 8 595 journées de nourriture aux soldats. Le montant de la somme allouée à la commune, à titre de dédommagement, s'élève à 9 147, 32 F de l'époque.
On trouve aux archives toutes les demandes de dédommagement des habitants, avec la liste de ce qui a été volé ou pillé par les prussiens. Par exemple au château de la Vallière, on dénombre "60 bouteilles de vin de Bordeaux à 1f l'une, 800 bouteilles de vin bouché rouge et blanc de 1858 et 1861, une pendule et deux tableaux, foncé une persienne et la glace pour entrer au château, huit couvertes de lit..." pour un total de 1606 francs. À Colas Sylvain Brossillon : "une vache de 5 ans, un mouton, 4 poules", du pain, des pommes de terre et deux chemises, pour un total de 244 francs...
Bibliographie :
- Ingo Fellrath et Francine Fellrath-Bacart, La guerre de 1870-1871 en Touraine, un nouvel éclairage, L’Harmattan, 2011.
Archives :
Archives départementales d'Indre et Loire :
- E dépôt H14
- "En Touraine, Je me souviens. Reugny.", brochure éditée par le Conseil Général d'Indre-et-Loire en 1996.