Inondations en novembre 1892 (original) (raw)

De nombreux dégâts suite aux inondations de la Têt et de l'Agly

Le département des Pyrénées-Orientales, de par sa configuration, est propice aux crues catastrophiques ; on a parfois tendance à l'oublier. L'événement de l'Aiguat de 1940 est resté dans toutes les mémoires et les crues récentes de 1992 et 1999 sont venues nous rappeler que l'on est jamais à l'abri de ce genre de risque.

Avec au moins trois bassins versants, l'Agly, la Têt et le Tech, de la montagne vers la mer sur le seul territoire du département, les crues et inondations diverses continueront toujours à rythmer la vie de notre région.

J'ai choisi de publier aujourd'hui pour mémoire un bref compte-rendu d'un épisode moins connu, mais néanmoins dévastateur, celui des inondations de 1892. La Têt et l'Agly sont concernés, avec un niveau de 4 mètres 20 à Millas pour la Têt.

Vieux papiers des Pyréénes-Orientales
Crue de la Têt en novembre 2011 (Perpignan)

Le Figaro, 10 novembre 1892

Les inondations

Perpignan. - La Tet, l'Agly et tous les cours d'eau qui descendent des montagnes ont débordé à la suite des pluies torrentielles tombées cette nuit. Ce matin, toute la plaine de la Salanque était inondée, le train de Perpignan à Prades restait en panne et les riverains affolés abandonnaient leurs maisons, emportant leurs meubles et fuyant l'eau qui montait avec une effrayante rapidité. Bientôt, tout le faubourg de Notre-Dame est submergé; la garnison s'emploie avec un dévouement admirable au sauvetage des habitants de la banlieue qui se servent des fourgons d'artillerie pour déménager. Les communications télégraphiques sont interrompues avec douze bureaux du département. Le préfet, M. Bonhoure, accompagné de M. Varenne, chef de division à la préfecture, parcourt les points menacés et s'enquiert des secours à accorder aux inondés.

Un jeune homme, Jean Cadéne, habitant Castel-Roussillon, près de Perpignan, ayant voulu retourner à son domicile cerné par les eaux, afin de prendre de l'argent qu'il y avait oublié, a été emporté par le courant. Son cadavre a été retrouvé, à six heures, sur la plage du Canet. Détail horrible : la famille Cadène assistait impuissante à la noyade du jeune Cadéne.

Au collège de Perpignan, la toiture de l'infirmerie, minée par les pluies, s'est affaissée subitement. Trois élèves malades ont eu à peine le temps, dès qu'ils ont entendu de sinistres craquements, de sauter du lit et de se sauver en chemise au premier étage. La ligne de Perpignan à Prades est coupée. Ce soir, un pont prés de Boulternère a été emporté. Le soir, la Tet décroît considérablement à Perpignan, mais une dépêche de Millas, 4 h. du soir, porte que l'eau atteint au pont de Millas 4 mètres 20. La culée Nord est menacée. On mande de Prades que les eaux viennent d'emporter le canal faisant fonctionner l'usine d'éclairage électrique d'Estagel à 4 h. 50 du soir. De mémoire d'homme, on n'a jamais vu pareille inondation de l'Agly. Les dégâts sont immenses.

Le Figaro, 11 novembre 1892

Les inondations

Perpignan. Les eaux de la Têt et de l'Agly commencent à baisser, mais l'inondation a été terrible. Hier soir, à Saint-Laurent-la-Salanque, deux jeunes gens de dix-neuf ans prenaient du bois au pont de Saint-Laurent lorsqu'ils sont tombés dans l'Agly. Ils se sont accrochés à un arbre et ont été entraînés jusqu'à la mer où ils ont disparu. Les ponts de Claira, canton de Rivesaltes et de Caramany, canton de Latour-de-France, viennent de s'écrouler.

A Perpignan, au quartier de la route de Bompas, il y a 39 maisons écroulées. Plus de soixante familles sont sans abri. La municipalité fait distribuer des secours.

Sources :
Articles du Figaro [domaine public] via Gallica (cf. liens)
bassintet.fr
Photo : Fabricio Cardenas (CC-BY-SA)