Bohuslav Martinu (original) (raw)

Il est peut-�tre compr�hensible que quelqu'un venu au monde aux sons des cloches devienne un grand musicien. C'est en tout cas ce qui advint du compositeur Tch�que Bohuslav MARTINU. Son p�re �tait le sonneur de cloches et le gardien de la petite ville de Policka, en Boh�me. Son travail consistait � avertir le village en cas d'incendie, et � faire sonner les cloches de l'�glise lors de pri�res et de c�l�brations. C'est ainsi que dans la petite salle de la tour de l'�glise St James, o� vivaient les MARTINU, Bohuslav est n� le 8 d�cembre 1890 (jour f�ri�), entour� du son joyeux des cloches.

Le jeune Bohuslav, grand, mince et de faible constitution, devait souvent �tre port� par son p�re dans l'escalier de la tour, totalisant 193 marches. Il passa les douze premi�res ann�es de sa vie � regarder son village depuis cette haute perspective. Le souvenir de cette vision du monde resta ancr� dans l'esprit du jeune Bohuslav et l'accompagna pendant toute sa vie, influen�ant fortement ses id�es de compositions. Comme il devait l'�crire plus tard, ce n'�tait pas �les petits int�r�ts des gens, les soucis, les souffrances ou les joies� qu'il voyait depuis cette hauteur, mais �l'espace, qui est toujours devant moi.�

Alors que Bohuslav venait � peine de commencer l'�cole, ses parents le confi�rent au professeur de musique de Policka. Celui-ci fut le premier � reconna�tre le g�nie du jeune gar�on et l'encouragea � essayer de composer. Bohuslav n'oubliera jamais ce premier professeur, � la base de sa grande carri�re de compositeur.

Lorsqu'il avait seize ans, sa m�re emmena Bohuslav � Prague, afin de le pr�senter � de v�ritables professionnels de la musique. Il prit avec lui son violon et son premier quatuor � cordes. Cette premi�re visite fut encourageante, et quelques mois plus tard, l'adolescent entrait au conservatoire de Prague. Mais les choses se pass�rent assez mal pour lui. En effet, � la fin de la deuxi�me ann�e, il �choua aux examens. Il finit par quitter le conservatoire, et poursuivit ses �tudes en autodidacte. Il lisait beaucoup, �tudiait des partitions, assistait � de nombreux concerts, et composait quotidiennement. Cette intense autodiscipline et ce dur travail lui permirent de devenir un excellent compositeur. Plus tard, dans une lettre adress�e aux professeurs de l'�cole de musique de Policka, MARTINU rappela aux �tudiants qu'il �tait, lui aussi, �un jeune gar�on, un �l�ve comme eux, et que tout est possible si l'on y croit vraiment et si l"on sait �tre patient.� En d'autres termes, le secret pour r�aliser ses r�ves est le travail acharn�.

Le jeune compositeur eut de la chance, car � cette �poque, Prague �tait un carrefour de la culture. On �coutait les oeuvres de STRAUSS, BRUCKNER, DEBUSSY. STRAVINSKY, SCHOENBERG et BARTOK eux-m�mes donnaient des concerts dans les salles de la ville. Au m�me moment, les compositions de MARTINU recevaient un accueil favorable chez la plupart des musiciens de Prague.

Apr�s la Premi�re Guerre Mondiale, MARTINU devint second violoniste � l'orchestre philharmonique tch�que. L�, il apprit � ma�triser la composition musicale pour un grand orchestre. Sa Rhapsodie tch�que pour solo, choeur et orchestre fut interpr�t�e par le philharmonique en 1919, et re�ut de bonnes critiques.

Par la suite, on offrit � MARTINU l'opportunit� de se rendre � Paris pour �tudier avec le c�l�bre compositeur Fran�ais Albert ROUSSEL. Pendant ses ann�es parisiennes, il composa un grand nombre d'oeuvres, parmi lesquelles Polocas ('Mi-temps') et La Bagarre, deux morceaux pour orchestre, mais aussi un op�ra, Vojak a tanecnice('Le soldat et la danseuse'), plusieurs ballets et de la musique de chambre. En 1935, il re�ut le Prix de l'Etat Tch�coslovaque pour un autre op�ra, Hry o Marii ('Le miracle de Notre Dame'). L'un de ses plus c�l�bres op�ras, Julietta aneb Snar ('Juliette ou la cl� des songes') fut pr�sent� pour la premi�re fois au public praguois cette m�me ann�e.

Les ann�es parisiennes de MARTINU s'achev�rent avec le d�clenchement de la Deuxi�me Guerre Mondiale. Le compositeur alla tout d'abord en Suisse pour une courte p�riode, puis d�cida de se rendre en Am�rique. Il dut cependant attendre avec angoisse pendant plusieurs mois avant de trouver un moyen de transport. M�me durant ces moments �prouvants, MARTINU continua de composer quotidiennement, mais il r�ussit �galement � �crire une musique pleine de force, de vitalit�, d'espoir et de joie. Parmi les oeuvres de cette �poque, nous pouvons citer sa Sinfonietta giocosa pour piano et orchestre et Fantasia et Toccata pour piano solo.

Arriv� en Am�rique en 1941, MARTINU dut travailler dur pour s'�tablir dans le Nouveau Monde. Mais c'est l�-bas qu'il apprit � ma�triser l'�criture symphonique. Cinquante ans plus t�t, un autre compositeur Tch�que, du nom d'Antonin DVORAK, avait gagn� le coeur des Am�ricains. MARTINU, surtout gr�ce � ses symphonies d'une grande virtuosit�, gagna � son tour le respect de l'Am�rique. Ernest ARNSERMET d�clara un jour que de tous les musiciens de sa g�n�ration, MARTINU �tait �le grand �crivain de la symphonie.�

Pendant les quelques ann�es suivantes, MARTINU �crivit un nombre presque incalculable de compositions. Mais, succombant finalement � un cancer qui le rongeait depuis pr�s d'un an, Bohuslav MARTINU d�c�da le 28 ao�t 1959 � Liestal, en Suisse. Lors de ses fun�railles, le pan�gyriste caract�risa l'oeuvre du compositeur en disant: �Sa musique est la musique de notre temps, car elle exprime des probl�mes de base profonds; elle porte le sceau de l'individualit�, ce qui lui permet de se distinguer des autres musiques, et garantit sa m�moire.�