Fr37 (original) (raw)
Continue � briller, � Cuba : introduction illustr�e
par Isra�l Shamir
(1er f�vrier 2008)
traduit de l�anglais par Marcel Charbonnier
J�ai prononc� cette conf�rence dans la d�licieuse ville de La Havane. Cette ville, que je n�avais pas vue depuis longtemps, s�est beaucoup embellie, beaucoup de maisons et de rues ont �t� r�par�es, les drogues et la prostitution ne sont pas visibles, il y a des voitures plus neuves, mais le charme d�antan demeure. M�me dans les quartiers d�glingu�s, on ne trouve ni le d�sespoir, ni la violence et l�abattement que vous trouverez, par exemple, dans le sud du Bronx, � New York. Les gens, � La Havane, chantent, dansent, fument leurs longs cigares l� o� �a leur chante : c�est �a, la libert� ! Celui qui aux petits des oiseaux assure la p�ture l�assure aux Cubains, aussi : les magasins sont d�garnis, mais les gens semblent correctement nourris, et ils sont bien habill�s.
Ils ont fait de Central Park un Hyde Park Corner, bien que l�on y dispute essentiellement de sport. Les Cubains voyagent � l��tranger, aussi, m�me s�il n�est pas facile, pour eux, d�obtenir des visas d�entr�e dans les pays qui se plaignent depuis toujours de la politique cubaine de restriction de l�immigration. Cette amie est all�e � trois reprises � Miami voir sa famille, mais, la quatri�me, elle s�est vu refuser le visa am�ricain. Beaucoup de Cubains vont dans les pays d�Am�rique latine pour y combattre l�illettrisme ou pour y apporter leurs comp�tences m�dicales, apr�s quoi, ils rentrent chez eux. Les restaurants sont g�n�reux, mais la nourriture varie, d�horrible � passable. Les boissons, en revanche, sont aussi d�licieuses qu�aux temps d�Ernest Hemingway. Il y a peu d�anxi�t�, et beaucoup d�espoir en un avenir meilleur, toutefois, sans changements notables. Les peintres, les musiciens, les artistes cubains, de mani�re g�n�rale, vivent bien, et ils produisent des �uvres originales. Les �glises sont enfin restaur�es, apr�s avoir �t� n�glig�es beaucoup trop longtemps, bien que leur fr�quentation soit encore plut�t faible. Le Vatican est tout � fait n�gatif � l��gard de la r�volution et du socialisme ; l�Eglise ne veut pas sortir de sa r�clusion, m�a dit un pr�tre mod�r�.
Pendant ce temps, la Santeria, un culte indig�ne d�origine africaine se r�pand de plus en plus. Il n�est pas rare de voir des gens enti�rement v�tus de blanc ; ce sont des adeptes de la Santeria. L�Etat ne se pr�occupe pas plus de l�Eglise catholique que de cette Santeria.
Dans les campagnes, �a ne va pas mal non plus. Le pays est vert, et propre ; en particulier quand on a d�pass� les faubourgs de La Havane. J�ai habit� chez un cultivateur de caf�, dans les montagnes, � environ cent kilom�tres de la capitale. Co�ncidence incroyable, il se pr�nommait, lui aussi, Israel (j�ai appris que �a n�est pas particuli�rement rare, ici). Un type impressionnant, qui fait tout, sur son exploitation de cinq hectares, de ses deux mains, avec l�aide de deux journaliers, il �tait tr�s satisfait du socialisme : l�Etat lui ach�te tous les ans sa production, et il le paie correctement (l�Etat lui ach�te son caf� � 20, et le revend � 25 dans les commerces de d�tail). Sa fille est m�decin, et son fils l�aide, � la ferme. La seule chose qui les g�ne, c�est que l�Etat les paie en monnaie locale, alors qu�il doit payer en peso lourd et convertible, pour tous ses achats personnels. C�est certainement d�sagr�able, mais il est difficile d��viter la sp�culation sur une monnaie, d�s lors qu�elle est n�gociable. Il obtient des devises fortes en louant des chambres � des �trangers qui viennent se baigner dans les eaux de Soroa, un lieu isol� et idyllique, situ� dans une vall�e dissimul�e dans la montagne. Vous serez les bienvenus chez lui : il n�y a pas le t�l�phone, mais il vous installera confortablement, pour un prix raisonnable, ce qui n�emp�che que c�est chez lui que j�ai le mieux mang�, de tout mon s�jour dans l��le.
Le pays est plut�t en bon �tat, m�me s�il est tr�s cher pour le visiteur. Ils ont un taux de change du dollar quasi dissuasif ; allez-y donc avec d�autres devises. Toutefois, les posters � George Bush = Adolph Hitler �, et les drapeaux noirs devant l�ambassade des Etats-Unis font plus que compenser ces petits inconv�nients. Fidel continue � gouverner personnellement, et le journal publie ses lettres, �crites de sa propre main. Certes, tout cela est �trange, mais Cuba s�efforce de vaincre la Cupidit�, et c�est l� une t�che � combien hardie ! L�avidit� et la luxure sont les p�ch�s les plus difficiles � combattre, nous enseigne le Talmud, au cas o� nous ne le saurions pas ! J
Les Russes n�ont jamais retrouv� leur statut perdu. Fidel ne leur pardonne pas l��re Gorbachev, durant laquelle le KGB [anti-]sovi�tique livra un Etat socialiste apr�s l�autre aux Am�ricains. Le tour de Cuba aurait normalement d� venir, quelque part entre la R�publique D�mocratique Allemande et la Roumanie. La RDA �tait un pays tout � fait viable, et les Ossies continuent � en regretter le d�mant�lement. Mais le KGB �tait acharn� � �radiquer totalement le socialisme. A Cuba, les forces de Gorbachev utilis�rent le g�n�ral Ochoa en vue d�un coup d��tat et de la restauration totale du pouvoir des Etats-Unis, mais Fidel en a tir� la le�on, et il a fait ex�cuter les tra�tres, a indiqu� r�cemment le site russehttp://www.left.ru
Poutine a lui aussi commenc� son mandat en bradant la base russe � Cuba. Celle-ci a �t� condamn�e, au pr�texte que la location annuelle (afin de mettre sur �coute la totalit� du trafic des t�l�communications de l�ensemble de l�Am�rique du Nord). Il est vrai que Poutine et la Russie ont �norm�ment chang�, depuis l�an 2000, mais ils devront travailler d�arrache-pied s�ils veulent faire oublier leurs erreurs pass�es.
Le Venezuela est le grand ami de Cuba, actuellement. Les deux pays entretiennent des relations multiples, et pas seulement commerciales. Des personnalit�s cubaines et latino-am�ricaines (des r�volutionnaires et des dignitaires) ont assist� � la conf�rence ; l�espagnol �tait de rigueur, et j�ai �t� sauv� par Mme le professeur Maria Poumier, notre amie, notre coll�gue, �crivaine et traductrice tr�s introduite dans la soci�t� cubaine.
Comme beaucoup de Cubains, elle se veut plut�t martienne que marxiste. Pourtant, elle n�est pas particuli�rement passionn�e par la guerre, et elle n�a pas �t� transform�e en petit homme vert. Explication : Jose Marti, un �crivain cubain du dix-neuvi�me si�cle, a supplant� Marx dans la conscience publique. Ce n�est pas une mauvaise id�e : � bas le culte de ces grosses t�tes de penseurs allemands ! Marx, Freud ou Einstein : No ! Cuba Libre : Si ! Ou plut�t : Mojito (s�il vous pla�t).
Entre autres personnes int�ressantes, j�ai rencontr� Celia Hart, avec laquelle j�avais pol�miqu� [ voirhttp://www.left.ru/inter/2004/shamir.html ] � propos de Staline (mon pr�f�r�) et de Trotsky (le sien), voici de cela quelques ann�es : nous avons fait la paix en trinquant au Ronkoli (le Rhum Collins, en cubain).
Un autre Cubain avec lequel je m��tais engueul�, Otero, vient de dispara�tre : pris de court, nous n�avons pas pu nous r�concilier.
Je suis pass� � la t�l� cubaine, et j�ai donn� des interviews aux deux quotidiens nationaux, faisant la promo de notre id�e d�un unique Etat d�mocratique en lieu et place de l�apartheid en Palestine/Isra�l. L�apartheid sud-africain a �t� d�truit par le courage des Cubains en Angola : je les en ai f�licit�s. Ils m�ont r�pondu d�un ton cassant qu�ils n�envisageaient pas d�envoyer des troupes � Gaza�
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Continue � briller, � Cuba !
[Conf�rence prononc�e par Isra�l Adam Shamir lors de la Deuxi�me Conf�rence pour l�Equilibre Mondial, tenue � La Havane, Cuba, le 29 janvier 2008]
Isra�l Shamir en compagnie de Maria Poumier, �crivain, traductrice
et sp�cialiste de la soci�t� cubaine.
C�est pour moi un grand honneur que de me trouver � Cuba et de m�exprimer devant vous, car, pour les gens de ma g�n�ration, Cuba restera � jamais une composante importante de notre jeunesse romantique. J��tais encore un adolescent quand, voici, de cela, quarante-cinq ans, le jeune Fidel Castro jura d�apporter la r�volution et la libert� aux habitants de l�ensemble des Am�riques, de la Terre de Feu aux glaces de l�Alaska, en passant par Washington, et son appel r�sonne encore � mes oreilles. Ce furent l� des journ�es glorieuses, mais elles appartenaient au pass�, et durant tr�s longtemps, les gens eurent le sentiment que cela n�arriverait plus jamais, que nous devrions nous contenter de ce dernier refuge de libert�, survivant de nos jours. Je vous ai apport� de bonnes nouvelles : ne soyez pas abattus ! Ce n�est pas demain la veille que votre dernier nid de r�sistance � la loi de l�Empire risquera d��tre balay�. La vague de l�histoire mondiale est en train de tourner, et nous sommes pr�ts � passer � la contre-attaque. Ceux qui s�opposent � l�Empire N�o-Lib�ral sentent bien qu�ils ne sont pas les derniers bisons dans la prairie, l�arm�e victorieuse, demain, ce sera : nous !
La r�volution est n�cessaire, et quiconque l�aurait oubli�, se le serait vu rappeler, voici quelques jours de cela, par les �v�nements dans ma Palestine ch�rie. Les habitants de Gaza ont fait une v�ritable r�volution : ils ont vot� contre la volont� de l�occupant, ils ont expuls� le gang de collaborateurs dirig� par Dahlan, ils ont bris� le si�ge, ils sont sortis, ils ont risqu� leur vie, ils ont d�bord� l�arm�e, retourn� la barri�re, travers� les fils de fer barbel�s, effac� la fronti�re entre deux pays, commis tant et tant d�actes h�ro�ques, subi des pertes. Sans cette r�volution, ils n�auraient m�me pas �t� autoris�s � acheter du pain pour leurs enfants. C�est l� un bon exemple, pour nous tous : rien n�est possible si l�on se cantonne aux limitations l�gales que nous imposent nos ennemis. Il y a besoin de cette pouss�e que l�on appelle la R�volution !
Le sujet de la conf�rence, c�est l�Equilibre, car, � mon avis, l��quilibre est le nom de la victoire que nous obtiendrons demain. En effet, l��quilibre est ce dont notre monde a douloureusement besoin � l��quilibre entre l�opulence et la modestie, entre droits et devoirs, entre besoins de la majorit� et d�sirs des minorit�s, entre masculinit� et f�minit�, entre d�sir de changement et besoin de stabilit�, entre interventionnisme et souverainet�, entre superpuissances et petits pays, entre la�cit� et �glises. Tout r�gime politique tente d�atteindre une certaine forme d��quilibre, mais notre Equilibre doit �tre l�harmonie, seule �quilibre stable.
En tant qu��crivain isra�lien de langue russe, je partage mon temps entre Tel Aviv et Moscou, et je m�exprime � la fois du point de vue russe et du point de vue juif. J�ai grandi en Union sovi�tique, dans un pays socialiste, et comme vous le savez sans doute, le mot � Soviet � signifie � conseil �, � avis �. C�est sans doute la raison pour laquelle je suis incapable d�arr�ter de donner mon avis sur tout !JL�Union sovi�tique avait ses probl�mes ; la Russie post-sovi�tique a les siens. Je suis d�accord avec ce que dit Maxim Kantor, un merveilleux �crivain russe : si cinquante ans de communisme ont d�montr� l��chec du communisme, les vingt ans de capitalisme qui leur ont succ�d� ont d�montr� que l��chec du capitalisme est encore bien pire. Ce n�est pas les probl�mes mat�riels qui ont entra�n� la chute de l�Union sovi�tique (les Russes vivaient bien mieux que les Cubains), ni les p�nuries, mais les probl�mes id�ologiques : c�est sur le front des id�es que les id�ologues sovi�tiques ont �t� battus.
La bataille des id�es ne s�est pas d�roul�e dans le mental de quelque ermite isol�, mais dans les esprits de millions de personnes, connect�es entre elles par les moyens du discours, � partir d�une conversation, autour de la table familiale, � propos d�une �mission de t�l�. Le discours fa�onne le champ de bataille, et ce champ de bataille, comme tout champ de bataille, n�est pas une �tendue �tale, sans reliefs qui lui soient propres ; non : vous devez imaginer des collines, des rochers escarp�s, des vall�es encaiss�es, avec des torrents, au fond, qui rendent ce champ de bataille aussi difficultueux que n�importe quel champ de bataille, dans la vraie vie.
Cette bataille a chang� de nature, �tant donn� que nos ennemis, qui sont aussi ceux de la libert�, ont invent� et assembl� une machine unique, absolument in�dite dans l�histoire de l�humanit�. Cette machine, c�est un appareil enti�rement int�gr� de formatage de l�opinion publique ; elle consiste en des mass media, des experts et des universit�s ; elle poss�de pratiquement toutes les cha�nes de t�l�vision et tous les journaux ; elle produit une narration unique, et elle r�ussi � laver le cerveau des braves gens. Les propri�taires de cette machine, ce sont les Ma�tres, les Propri�taires du Discours. Ce sont eux, qui d�cident ce que les gens sauront et quelle opinion sera ou non acceptable, et quelle opinion sera bannie. C�est gr�ce (ou plut�t, � cause) de cette machine que les dirigeants imp�rialistes sont devenus tellement accros � la d�mocratie : ils savent bien, eux, que cette machine infernale fait de la d�mocratie un slogan creux.
Voici un exemple. Il y a, de cela, quelques jours, se d�roulaient les primaires, dans l�Etat am�ricain du Nevada. Le deuxi�me en lice �tait Ron Paul, un candidat anti-establishment, anti-guerre, libertarien. Nous ne d�battrons pas ici de la question de savoir si ce Ron Paul est bon, ou mauvais, pour notre cause ; ce qui importe, en l�occurrence, c�est le fait que les media am�ricains, int�gr�s dans leur machine � d�cerveller unique, n�ont strictement rien dit de son succ�s. J�ai v�rifi� des dizaines de reportages : son nom n�a m�me pas �t� mentionn�, bien que le troisi�me candidat ait �t� mentionn�, lui, plus qu�abondamment. Autrement dit : les media, aujourd�hui, sont capables de saper jusqu�� la d�mocratie bourgeoise qu�ils �taient suppos�s prot�ger et alimenter.
Cela n�a rien de nouveau : Vladimir L�nine, dans son ouvrage Etat et R�volution, �crit en 1916, disait que la d�mocratie, y compris la d�mocratie bourgeoise, ne peut �tre r�alis�e tant que les media appartiennent � des personnes priv�es susceptible d�en limiter l�acc�s. Ce qui est nouveau, en revanche, c�est le niveau atteint par l�int�gration : les journaux priv�s d�antan pouvaient �tre bons ou mauvais, libres ou pas. Mais, aujourd�hui, les media sont concentr�s entre les mains d�une poign�e de propri�taires et de trusts, qui d�cident de ce qui arrive, ou non, et de ce que leurs lecteurs peuvent lire, ou non.
La machine m�diatique est tellement bien int�gr�e qu�elle alimente aussi bien la gauche que la droite. Certes, il y a une diff�rence entre les media de droite et les media de gauche, entre, disons, le Guardian et le Telegraph, en Angleterre, ou entre The Nation et le New York Post, aux Etats-Unis, voire m�me entre Lib�ration et Le Figaro, en France. Mais cette diff�rence n�est pas aussi importante qu�il le semblerait car, en d�finitive, tous ces journaux sont des media bourgeois. On est confront�s, ici, � une diff�rence mod�r�e, subtile. Tous les trente-six du mois, un canard de gauche publie un article de gauche, mais en temps ordinaire, les journaux, qu�ils soient r�put�s de gauche ou de droite, aux Etats-Unis et en Europe, sont profond�ment anticommunistes, et ne cessent de d�noncer Staline, d��reinter les musulmans, de soutenir Isra�l, de ressasser l�Holocauste et d�oublier Hiroshima.
N�anmoins, ils veulent vous donner une impression de libert�, une impression de choix. Aussi offrent-ils quelques fausses alternatives � l�opinion publique. Ainsi, par exemple, au sujet de Cuba, ils vous proposent certains choix : la droite bourgeoise dit que Cuba devrait �tre conquis ou ostracis�, tandis que la gauche bourgeoise affirme que Cuba doit �tre trait� en douceur, afin d�y encourager un changement de r�gime politique. Les gens, automatiquement, choisissent le moyen sexy. Le troisi�me choix � voir en Cuba un laboratoire d�une soci�t� d�avenir � n�est jamais, au grand jamais, envisag�
C�est �a, le r�el changement : jusqu�� pr�sent, il y avait une vraie diff�rence d�opinions, qui s�exprimait m�me dans les medias bourgeois ; d�sormais � �a n�est qu�une mascarade. Tandis que le r�gime socialiste s�efforce de cr�er un consensus, de former une opinion correcte unique, les techniques modernes d�endoctrinement appliquent le principe de l��quilibre et du juste milieu. Ces techniques sont fond�es sur un trait psychologique : confront�e � deux id�es, tout individu recherche automatiquement, instinctivement, un �quilibre entre les deux, puis il choisit le juste milieu.
Prenons l�Iran ; ils offrent un choix : les Etats-Unis et/ou Isra�l doivent-ils bombarder l�Iran, ou ce pays doit-il �tre d�sarm�, au moyen de sanctions ? L�Allemagne demande plus de sanctions, les Etats-Unis ont du mal � r�fr�ner leur prurit de bombardement. Un choix bien pr�f�rable � celui de laisser les Iraniens faire ce qu�ils entendent faire � n�est, bien entendu, jamais pris en consid�ration. Les diplomates russes disent g�n�ralement qu�ils conviennent du fait qu�un Iran dot� de capacit� nucl�aire est inacceptable, bien qu�ils pensent qu�il y a des moyens soft de convaincre les Iraniens, autres que les sanctions ou les tapis de bombes. Ont-ils raison ? Mettons de c�t�, pour l�instant, le c�t� non-agressif de l�Iran. M�me si le programme nucl�aire iranien devait �tre men� � bien, l�Iran n�a pas les moyens de livrer la bombe atomique � domicile. Il ne dispose pas de missiles � m�me de v�hiculer une charge nucl�aire o� que ce soit. Sur ces entrefaites, le quotidien isra�lien Haaretzhttp://www.haaretz.co.il/hasite/images/printed/P180108/a.a.1801.1.1.9.jpg
a publi� une carte, le mardi 17 janvier, qui montre que les nouveaux missiles isra�liens, les Jericho-3, peuvent atteindre Moscou et Berlin, et qu�ils sont parfaitement capables de livrer � domicile certains des multiples engins nucl�aires que d�tient Isra�l dans ces capitales. Contrairement � l�Iran, Isra�l est un pays g�n�ralement tr�s agressif. Le grand �ditorialiste isra�lien Matti Golan r�ve de rayer l�Allemagne de la carte, tandis que les n�ocons juifs, tel Max Boot, pr�sentent la Russie comme une menace majeure.
Toutefois, il est interdit de d�battre de ce danger pesant sur la Russie et l�Allemagne, mais le danger qu�est cens� incarner l�Iran peut � que dis-je, doit � �tre ressass� sans fin. Les Russes peuvent souligner la menace isra�lienne ; et fournir � l�Iran des moyens balistiques de se d�fendre, ou, gr�ce au savoir-faire nucl�aire, de cr�er un nouvel �quilibre au Moyen-Orient. Mais l�appareil occidental de formatage de l�opinion les en dissuade.
En fin de parcours, le probl�me est celui des intellectuels. Nagu�re, les intellectuels occidentaux avaient de fortes sympathies communistes, mais ce n�est plus le cas, aujourd�hui. Ils sont si nombreux � avoir �t� s�duits, et � soutenir aujourd�hui le capitalisme, � l�admettre, que beaucoup d�entre nous sommes devenus des collaborateurs z�l�s de l�imp�rialisme. Aux Etats-Unis, en Europe et en Russie, le sionisme a jou� un r�le tr�s important dans ce changement climatique.
Au d�but des ann�es 1960, les jeunes juifs � des hippies de San Francisco aux kibbutz isra�liens � soutenaient la gauche. Certains propri�taires de journaux et certains banquiers juifs avaient des sympathies pour le courant de gauche. Mais c�est � partir de cette �poque-l� que les juifs am�ricains commenc�rent � consid�rablement am�liorer leur position dans la soci�t� am�ricaine. En 1965, les juifs am�ricains avaient des revenus un peu au-dessous de la moyenne, ils �taient tenus � l��cart des positions �minentes au sein de la soci�t�, et ils �taient favorables � la r�volution et au changement ; en 2008, les juifs des Etats-Unis gagnent en moyenne trois fois plus que l�Am�ricain goy moyen, occupent dix fois plus de postes �minents que la moyenne, et ils sont, aujourd�hui, tr�s majoritairement � droite.
Les juifs de gauche d�hier sont devenus des n�ocons, ce sont des enfants de trostkistes qui ont aid� Ronald Reagan � d�truire l�Union sovi�tique et qui imposent, aujourd�hui, le blocus � Cuba. La juiverie organis�e a gliss� vers la droite, et elle y a emmen�, avec elle, la machine m�diatique, devenue plus prosioniste, et plus monolithique.
Vous pourrez l�observer ais�ment avec cette question cl� qu�est la question palestinienne. Il est dans l�int�r�t des peuples isra�lien et palestinien d��liminer l�apartheid de la mani�re dont cela a �t� obtenu en Afrique du Sud (gr�ce aux efforts des Cubains), c�est-�-dire en cr�ant un seul et unique pays d�mocratique, dans lequel les juifs et les non-juifs soient �gaux, aux yeux de la loi. Mais, au lieu de cela, dans le meilleur des cas, la Palestine est une collection de bantoustans tels que ceux qui ont �t� � juste titre �limin�s en Afrique du Sud. C�est pour cette raison, que l�effroyable crime consistant � affamer un peuple tout entier, le peuple palestinien, a pu se produire, sans que cela ne suscite trop de protestations, bien que Fidel ait condamn� le si�ge impos� � Gaza en des termes tr�s clairs. Il est impossible, m�me de seulement �voquer l�alternative de l��galit�, l�option sud-africaine, dans les journaux am�ricains et europ�ens. C�est la raison pour laquelle l�apartheid sud-africain fut universellement condamn� et �radiqu�, tandis que l�apartheid en Isra�l/Palestine continue � �tre florissant.
Le sionisme est l�ennemi de Cuba et de tout pays sud-am�ricain libre : Isra�l, perp�trateur de l�apartheid, vote syst�matiquement contre Cuba dans tout scrutin, � l�ONU et dans toutes les autres instances. Les meilleurs amis d�Isra�l, aux Etats-Unis, ce sont Bush et Giuliani, les archi-ennemis de Cuba. Isra�l a fourni des armes aux Contras, pour les aider � combattre les Sandinistes. Isra�l et la juiverie organis�e am�ricaine participent activement � la cabale contre Hugo Chavez.
Beaucoup d�hommes et de femmes, en Isra�l, aiment Cuba, �coutent votre musique et porte des tee-shirts � l�effigie du Che, mais le pouvoir, dans l�Isra�l de l�apartheid, appartient � quelqu�un d�autre : il appartient aux ennemis de Cuba et aux ennemis du socialisme. De la m�me mani�re, il y a beaucoup de juifs am�ricains qui aiment Cuba, mais les puissantes organisations juives sont contre Cuba, et contre Chavez. La gauche prosioniste est devenue un � bon flic �, qui joue son petit jeu avc le sale flic de la droite, mais en poursuivant le m�me but. Ce bon flic de gauche a fait de son pire afin de saper l�Union sovi�tique. Le magnat des media britanniques Robert Maxwell, qui �tait l�ami des dirigeants sovi�tiques et publiait leurs livres dans le monde entier, �tait un agent du Mossad, le service secret isra�lien. Avec des amis comme �a, l�Union sovi�tique n�avait certes pas besoin d�ennemis�
Nos ennemis disent que des m�dias contr�l�s par l�Etat ne sont pas des m�dias libres. Pour eux, des � m�dias libres � ne sauraient �tre que des m�dias d�tenus par d�opulents magnats. Je n�ai jamais pu comprendre pour quelle raison un journal appartenant � un Rotshchild (comme Lib�ration, dans le cas fran�ais), serait automatiquement plus libre qu�un journal appartenant � un peuple tout entier, fusse � travers son Etat ?
Les m�dias � capital public sont un important atout, qu�il convient de conserver, dans l�int�r�t du peuple. Les m�dias priv�s seront, t�t ou tard, contr�l�s par un riche magnat, et int�gr�s � la machine dont nous avons parl�. Mais les m�dias � capital majoritairement public doivent apprendre � offrir le choix. Nous savons qu�il existe une opposition pro-occidentale, chez vous, � Cuba. Nous l�entendons s�exprimer, dans les m�dias occidentaux. Mais il y a aussi des dissidents de l�opinion exactement oppos�e, il y a des gens, � Cuba, qui veulent PLUS de communisme. J�ai cru comprendre que leurs opinions �taient consid�r�es comme quelque peu vieillottes. Mais pourquoi ne pas les laisser exprimer leur opinion, afin que leur voix puisse contrebalancer celle des intellectuels pro-occidentaux. Alors, notre opinion personnelle pourra, � juste titre, �tre consid�r�e comme le juste milieu !
L�Union sovi�tique s�est effondr�e PARCE QUE les m�dias d�tenus par l�Etat avaient �t� pris sous leur contr�le par des apparatchiks pro-occidentaux, et que ceux-ci avaient effectivement bloqu� l�acc�s d�opinions autres au peuple. Internet doit �tre adopt�, avec enthousiasme et empressement : tout d�abord, nos positions sont fortes, sur le ou�be. Les Ma�tres du Discours ne le contr�lent pas encore. On y trouve des milliers de sites favorables � Cuba et aux id�es d��galit�, des sites qui d�masquent les mensonges du n�olib�ralisme. Ensuite, Internet est tr�s abordable. De nos jours, il n�est plus besoin de c�bles, l�internet mobile est en mesure de parvenir dans le village le plus recul�, et tout �tudiant peut y acc�der. Pour Cuba, o� les livres sont chers et difficiles � trouver, Internet offre la solution id�ale. Les Cubains �duqu�s deviendront un �l�ment important dans la bataille des id�es, et ils devraient �tre form�s � tenir ce r�le. Internet le permet, d�s lors que s�y d�roulent des milliers de d�bats, simultan�ment.
L�effondrement de l�URSS a �t� caus�, dans une large mesure, par les classes russes �duqu�es, l�intelligentsia, qui �tait tr�s pro-occidentale aux derniers jours de l��re sovi�tique. Une des raisons �tait que le style de discours propre � l�Union sovi�tique ne permettait pas des d�bats ouverts. Ils n�avaient jamais lu Chomsky, ils n�avaient jamais entendu Fidel ; � l��poque, Internet n�existait pas. Ils ignoraient l�existence des puissants groupes et expressions anti-imp�rialistes, en Occident. Ils �taient innocents : ils pensaient que nous allions vivre comme des profs � Harvard, tandis que tous les Russes vivraient comme les Suisses, apr�s le grand revirement vers le capitalisme. R�sultat des courses : la Russie a �norm�ment souffert ; ses biens nationaux ont �t� pill�s, et le pays �tait au bord de l�effondrement total. L�intelligentsia a souffert le martyre. Son sort a �t� r�sum� par Viktor Pelevin, dont je vous recommande chaudement de lire les livres.
Il a �crit ceci : � l��poque communiste, l�intelligentsia russe �tait suppos�e baiser le cul du Dragon Rouge, et elle �tait pay�e � coups de noyaux de p�che pour ce faire. Les intellectuels ha�ssaient donc le Dragon, et ils l�empoisonn�rent avec le b�ton de rouge � l�vre que leur avait offert le Crapaud Vert. Mais ils apprirent, tr�s vite, que le Crapaud Vert n�avait que faire de millions d�intellectuels, il avait besoin, en tout et pour tout, de trois intellectuels capables de fellationner le Crapaud vingt-quatre heures sur vingt-quatre, tout en souriant avec d�lice.
La majorit� du peuple russe est profond�ment m�contente du capitalisme � non pas seulement parce que son sort personnel a empir�, mais parce que le capitalisme a rendu la Russie d�pendante de l�Ouest. Aujourd�hui, le pr�sident Poutine, qui est un nationaliste mod�r�, a adopt� une orientation plus patriotique, et les choses se sont un peu am�lior�es, mais m�me aujourd�hui, s�il y avait une d�mocratie authentique et ouverte, les Russes opteraient pour une politique antiyankee plus �nergique et plus anti-n�o-lib�rale. Actuellement, le capitalisme traverse une crise d�une profondeur qu�il ne connaissait plus depuis bien longtemps, les dollars si recherch�s �tant devenus de vulgaires morceaux ce papier d�nu�s de valeur. La vision socialiste de la situation doit �tre autoris�e � �tre pr�sent�e activement dans les m�dias. Et pas seulement socialiste : les opinions non-lib�rales, anti-bourgeoises, de mani�re g�n�rale, doivent pouvoir s�exprimer publiquement.
Tout en se pr�tendant sans opinion, sans engagement, les Ma�tres du Discours sont les d�vots d�un paradigme pseudo-lib�ral, ou n�olib�ral. Celui-ci pr�ne la libert� individuelle, l�exclusion de l�Eglise de la vie active, les droits de l�homme, les droits des femmes. Tout cela semble bel et bon. Mais ces dogmes doivent �tre contrebalanc�s, pour �tre acceptables. A d�faut, c�est la soci�t� dans son ensemble qui sera d�s�quilibr�e.
Consid�rons, par exemple, les droits de l�Homme. N�est-ce pas l� un noble concept ? Mais c�est au nom de ce concept, pr�cis�ment, que des pays ont �t� conquis, et que des centaines de milliers de personnes ont �t� massacr�es. On attaque fr�quemment Cuba en raison de ses � violations des droits de l�Homme �, car Cuba, en effet, limite lesdits droits quand ceux-ci transgressent les droits de la soci�t�. Nos adversaires d�nient que la soci�t� puisse avoir, elle aussi, des droits ; pour eux, seuls des individus, et de pr�f�rence ceux qui ont un tas d�argent, sont susceptibles d�avoir des droits. On m�a interrog�, sur une t�l� russe, � propos des droits de l�Homme � Cuba, et j�ai r�pondu : c�est vrai, il y a, � Cuba, d�horribles violations des droits de l�homme, et il faut les d�noncer. A Guantanamo, Cuba. Mais, curieusement, ils ne voulaient pas en entendre parler� J Le concept de droits de l�homme doit �tre contrebalanc� par des obligations envers la soci�t�, a dit une importante philosophe communiste, Simone Weil, dans son livre intitul� L�Enracinement, ou D�claration des Devoirs envers l�Humanit�. A ses yeux, les droits �taient � subordonn�s et relatifs � aux devoirs. Si Simone Weil a pu donner cette r�ponse correcte, c�est parce qu�elle avait refus� de tomber dans le pi�ge du lib�ralisme. Elle refusa cat�goriquement de se plier aux dogmes lib�raux, fusse du bout des l�vres.
Consid�rons les droits des minorit�s sexuelles. Le droit, pour les homosexuels, d�adopter des enfants, doit �tre �quilibr� par le droit des enfants � avoir un vrai p�re et une vraie m�re. Leur droit � se � marier � devrait �tre �quilibr� par le droit des hommes et des femmes de s�engager dans une union sacramentelle unique, appel�e commun�ment mariage. De m�me, le droit, pour un homme, de manger du porc, devrait �tre limit� par le droit, pour un collectif de juifs ou de musulmans, de disposer d�un lieu qui n�ait pas �t� profan� par la pr�sence d�un porc. Ce n�est pas l� une question sans importance : les gens ordinaires, l�immense majorit� des gens, partout dans le monde, sont contre la priorit� donn�e aux droits de minorit�s sexuelles sur leurs propres droits � une vie familiale. Aux Etats-Unis, cette question est utilis�e afin de cr�er un schisme entre les militants progressistes et la population.
La libert� religieuse. L�animosit� entre socialistes ou communistes et l�Eglise n�est pas quelque chose d�in�luctable ; elle s�est produite dans certains contextes historiques, et elle peut, aujourd�hui, �tre d�pass�e. Au plus fort de la R�volution, en 1918, le grand po�te russe Alexander Block eut la vision de soldats de l�Arm�e rouge guid�s par un J�sus Christ invisible. Si les communistes russes avaient su cr�er l�harmonie avec l�Eglise, le communisme aurait surv�cu. Il est bien qu�� Cuba, les �glises soient ouvertes ; vous avez de bonnes relations avec l�Eglise catholique, avec sa tendance dite de la th�ologie de la lib�ration, et vous �tes attach�s � votre propre tradition si color�e, de la Santeria.
Mais une situation apais�e avec l�Eglise, cela signifie plus d�interaction, dans les deux sens. Au XIX�me si�cle, le gouvernement colonial de Cuba d�porta les pr�tres catholiques en masse, parce qu�ils soutenaient la r�volution. Le gouvernement actuel peut renverser la tendance. En Am�rique latine, il y a beaucoup de pr�tres et d��v�ques prosocialistes, et on pourrait les faire venir � Cuba, tandis que les pr�lats antisocialistes pourraient, quant � eux, �tre invit�s � prendre leur retraite.
Enfin, une derni�re chose, que je tiens � vous dire : soyez s�rs de votre bon droit. Vous �tes dans le droit chemin. La vie, � Cuba, ne cesse de s�am�liorer, depuis les ann�es 1990. Vous avez toujours le leader avis�, Fidel Castro, qui est l��quivalent de Noam Chomsky, pour sa pens�e radicale ; il a une forte volont�, et le soutien des masses populaires � c�est un roi-philosophe comme en r�vait Platon... Vous avez toujours ceux qui ont repouss� l�agression am�ricaine, qui ont abattu le cadavre blind� de l�apartheid, dans les savanes de l�Angola ; vous avez beaucoup de gens dot�s du meilleur niveau scientifique dans le monde.
Vous �tes la lumi�re du monde !
Continue � briller, �, Cuba !