Au-delà du modèle linguistique en tant que paradigme structurel et expressif de la musique : Perspectives esthétiques, historiques et socioculturelles (original) (raw)

2012, Par Frédérick Duhautpas

L'idée de comparer, voire de rapprocher la musique du langage n'est pas nouvelle. Les rapports qu'ils entretiennent ont fait l'objet de nombreuses réflexions au cours de l'histoire. Cette question continue encore aujourd'hui d'occuper les esprits. Il n'est pas rare de trouver la métaphore langagière employée dès qu'on aborde des questions d'écriture. Ne parle-t-on pas de « syntaxe musicale », de « phrase », de « citation », ou encore de « dialogue entre les instruments » ? Ne parle-t-on pas souvent de langage pour désigner le style d'écriture d'un compositeur ? Et même d'une façon générale, la métaphore langagière fait partie du vocabulaire musicologique lorsqu'on parle de systèmes harmoniques, on parle souvent de langage tonal, atonal, polytonal ou modal. Mais la comparaison ne s'arrête pas là. Elle a aussi et surtout été employée pour rendre compte de certains caractères expressifs qu'on prête à la musique. L'idée selon laquelle la musique serait porteuse de significations est souvent allée de pair avec une conception langagière. Le verbal demeurant le modèle signifiant de référence, il fut souvent tentant de se tourner vers lui pour aborder la musique — d'autant que l'histoire des liens entre les deux a largement ancré ce type de rapprochement au niveau culturel. Il fut d'autant plus tentant de le faire que la musique présente en outre certaines ressemblances structurelles avec le langage. Mais la musique fonctionne-t-elle pour autant comme un langage ? Peut-elle être pensée en dehors des références au modèle linguistique ? Je me propose de revenir sur cette problématique et d'examiner la question des similitudes, mais aussi les différences fondamentales qui existent entre les deux. Car, précisons-le dès à présent, s'il existe des parentés et des ressemblances, ma position sera plutôt de me distancier des conceptions qui tendent à assimiler trop littéralement la musique à un langage. Comme le soulignait Adorno :

La musique offre une similitude avec le langage. […] Mais la musique ne se confond pas avec le langage. Sa similitude avec lui mène au cœur du problème, mais aussi dans le vague. Celui qui prendrait la musique à la lettre pour un langage s'égarerait. (Adorno, 1982, p. 3)

La métaphore langagière peut s'avérer problématique tout particulièrement dans le cadre d'une réflexion plus générale sur la question de l'expressivité. Cette dernière ne se réduit d'ailleurs pas à des problématiques d'ordre linguistique, comme on va le voir. En outre, ce type de métaphore tend parfois à obscurcir la compréhension de certaines particularités culturelles ou esthétiques propres au musical. Si ces deux formes d'expression entretiennent des analogies, celles-ci s'avèrent parfois trompeuses et peuvent conduire à transférer des modèles linguistiques qui ne sont pas adaptés aux spécificités de la musique.

Les rapports entre musique et langage ont, certes, déjà été largement débattus. Mais au vu de la prégnance encore marquée des conceptions langagières dans les réflexions sur la musique, il me paraît intéressant de réinvestir la question. On notera, par ailleurs, que la question de ces comparaisons a souvent été abordée avant tout à partir du modèle tacite de la musique tonale. Or, j'aimerais élargir la réflexion en tenant compte aussi des problématiques qu'introduisent notamment la question de la modernité en musique qui souvent s'éloigne de ce modèle. J'aimerais également examiner plus clairement les différentes significations que recouvrent ces rapprochements avec le langage. Car s'il est facile de rapprocher la musique du langage, tout le monde n'entend pas forcément la même chose derrière cette image.

En premier lieu, on abordera le rapport entre musique et langage à la lumière des différents paradigmes et conceptions esthétiques au cours de l'histoire. Cette mise en perspective permettra de prendre un peu mieux la mesure de la diversité, mais aussi de la relativité des conceptions en fonction des contextes historiques. On traitera ensuite des parentés et des relations paradoxales qu'entretiennent musique et langage. Au-delà des rapports concrets et historiques qu'ils entretiennent, il faut également tenir compte des emplois métaphoriques et métonymiques liés au terme « langage » souvent employés de façon informelle pour décrire certains aspects complexes de la musique. Ce faisant, on cherchera également à cerner plus précisément les différents sens et nuances que peuvent recouvrir les métaphores et les métonymies langagières dans les discours sur la musique. Car quand on parle de langage à propos de la musique, on n'entend pas toujours la même chose. Le but étant de mettre en lumière les confusions potentielles qu'elles peuvent entraîner.

1. Aperçu historique

1.1. Avant le vingtième siècle

Bien que la musique fût intimement liée à la poésie dans l'antiquité, la question du pouvoir expressif de la musique ne s'expliquait pas encore à travers une conception langagière (Vanhandel, 2006, p. 14-16 ; Dahlhaus, 1997, p. 15). Cette dimension de la musique trouvait plutôt ses fondements dans une conception mythologique, mathématique et cosmologique : la théorie de la musique des sphères (Vanhandel, 2006, p.14 ; Nattiez, 2004, p. 259). Le caractère psychologique et moral de la musique était déterminé par des rapports numériques reflétant l'harmonie céleste (l'harmonie des sphères) et influant sur celle de l'individu, ainsi que sur son comportement. Mais en tant que support au message verbal, la musique participait à travers ses effets au rapport communicationnel et à l'impact affectif du texte.

À la Renaissance, certaines conceptions antiques furent reprises par la Camerata dei Bardi. (Nattiez, 2004, p. 264) Celle-ci préconisait, en réaction à la complexité de la polyphonie, un retour à la simplicité de l'accompagnement et un assujettissement de la musique au texte qu'elle accompagnait, pour en renforcer la charge affective. Les théoriciens de la Camerata n'attribuaient pas de caractère linguistique à la musique (Fubini, 2007b, p. 51). Il s'agissait seulement de faire ressortir l'état d'esprit du texte en épousant son rythme et en mettant en valeur les sonorités des mots afin d'exalter son potentiel affectif. Mais cet assujettissement de la musique au texte favorisera indéniablement par la suite les assimilations langagières. Comme l'explique Christine Esclapez :

« La relecture de l'antiquité et de la tragédie par la Camerata Fiorentina a pris ainsi, dans l'histoire de l'esthétique musicale jusqu'au XXe siècle, une place symbolique : la musique a été inféodée au langage parlé, au texte et par extrapolation sa fonction principale est devenue l'expression des sentiments et des affects. Cette position se trouve confirmée par la création du théâtre à l'italienne, lieu clos, fortement hiérarchisé, où la production et la réception du message sont univoques et directionnelles. L'invention de la mélodie accompagnée où la musique est censée mettre exclusivement en valeur les inflexions du texte et adopter une linéarité phraséologique proche du déroulement syntaxique permettra concrètement le rapprochement esthétique ». (Esclapez, 2009, p. 150)

Ces préoccupations auront une large répercussion sur l'essor esthétique de la musique baroque et sa conception rhétorique. Dès le début du XVIIe siècle, les analogies entre musique et rhétorique vont imprégner toute la pensée musicale, aussi bien au niveau du style, de la forme, de l'expression que des méthodes compositionnelles ou des questions relatives à l'interprétation (Buelow, 1980, p. 793-802). Des théoriciens de la rhétorique musicale comme Mersenne au XVIIe siècle ou Mattheson au XVIIIe siècle contribueront largement à cette idée (Mersenne, 1636 ; Buelow, 1980, p. 793-802 ; Lenneberg et Mattheson, 1958a, p. 47-84 ; Lenneberg et Mattheson, 1958b, p. 193-236 ; Lescourret, 2007, p. 61-63). Pour Mersenne, la musique est une forme de langage, qui doit épouser les inflexions du langage verbal pour renforcer la force affective du texte qu'elle accompagne. Comme l'explique Brigitte Van Mymeersch :

« La musique [selon Mersenne] ne doit pas seulement imiter l'esprit d'un texte, mais en tant que langage porteur de sens et d'émotion, doit aussi s'inspirer des principes de la rhétorique classique » (VAN WYMEERSCH, 2001, p.16).

Le théoricien envisage la musique comme « l'Art de l'Orateur Harmonique qui doit connoistre tous les degrez, les temps, les mouvemens, et les accents propres pour exciter ses auditeurs à tout ce qu'il veut » (Mersenne, 1636, p. 365). C'est aussi en ce sens que Johann Mattheson envisage la composition musicale. Pour lui, la musique doit être conçue comme un discours persuasif qui doit affecter l'auditeur. Dans son livre Der Vollkommer Cappelmeister (1739)1, il préconise d'organiser la composition selon les lois de la rhétorique classique et d'en appliquer les différentes étapes argumentatives (Lenneberg et Mattheson, 1958a, p.47-84 ; Lenneberg et Mattheson, 1958b, p. 193-236, Lescourret, 2007, p. 61-63). Il établit pour ce faire un lexique de figures musicales associées à des catégories d'affects qui sont censés susciter les mêmes émotions chez l'auditeur. La démarche de ces théoriciens est assez représentative des conceptions de l'époque :

À la période baroque, la passion est […] passivité, émotivité, subjectivité, humanité : autant de qualités à la fois spirituelles et corporelles, transmissibles aux productions humaines et, par leurs entremises aux âmes humaines. Elle contribue à faire de la musique un genre discursif, quasi-intelligible, au contenu sémantique précisément repérable : selon que les passions s'y étendent ou bien y sont représentées. Elle est le vecteur du sens sensible (Lescourret, 2007, p. 61-63).

Si la musique est envisagée comme langage, elle reste encore soumise au verbal. La conception langagière de la musique autonome ne se développera que progressivement avec l'émancipation de la musique instrumentale à partir du XVIIe siècle jusqu'à son triomphe au XIXe siècle. En effet, jusqu'au XVIIe siècle l'instrument avait pour rôle essentiel d'accompagner ou de doubler la voix (Pernon,1998, p. 58). La musique restait essentiellement vocale. C'est à partir des préludes et des interludes exécutés au luth au XVIIe siècle, que la musique instrumentale va commencer à se développer (Pernon,1998, p. 58). Quand les genres de musique instrumentale comme le concerto, la sonate ou la suite commencèrent à concurrencer la musique vocale, au XVIIIe siècle, ils trouvèrent leur justification esthétique dans l'idée que la musique était un support pouvant communiquer par lui-même sans le soutien des paroles qui accompagneraient (Bonds, 2006, p. 13). Mais comme le remarque Fubini, c'est au moment où la musique gagnait son autonomie en tant que mode d'expression à part entière « qu'ont surgi les plus gros problèmes et que s'est représentée, en termes plus âpres que jamais, la question du rapport au langage verbal. La musique instrumentale posait le problème d'une redéfinition de son pouvoir expressif et sémantique – pour autant qu'elle en fût dotée – maintenant qu'elle renonçait à l'appui qui avait été le sien pendant des siècles » (Fubini, 2007b, p. 47).

Déjà au XVIIIe siècle, la question posait de nombreux problèmes par rapport à l'impossibilité de dénoter ou d'exprimer des idées. Et même par la suite, l'esthétique musicale occidentale a souvent considéré « le système musical comme inférieur au système linguistique, sous prétexte que le signe musical signifie moins bien ou en tout cas moins précisément que le signe linguistique » (Esclapez, 2009, p. 147). Certains auteurs ont contourné les difficultés que posait la conception langagière en envisageant plutôt la musique, non comme un idiome véhiculant des concepts, mais plutôt comme le langage des passions. Kant, par exemple, parlait de « langue des affections » (« Sprache der Affecten ») (Kant, 1965, p. 156 ; Kant, 1872, p. 195) à propos des intonations vocales que « la musique seule emploie dans toute sa force » (Kant, 1965, p.156). Rameau, dans son Code de musique pratique insistait sur le fait que « la vraie musique est le langage du cœur » (Rameau, 1760, p.93).

Rousseau, lui aussi, bien qu'opposé aux conceptions de Rameau quant aux fondements harmoniques et mathématiques de la musique (cf. Dahlhaus, 1997, p. 48-53), rejoint cette conception. Il va même plus loin en postulant l'origine commune entre langage et musique (Rousseau, 1993). J'aurai l'occasion de revenir sur ses conceptions un peu plus bas, je me contenterai ici de mentionner brièvement son idée : la musique serait le mode d'expression privilégié des passions, comme l'étaient les langages primitifs. C'est à ce titre qu'il refuse l'idée d'une musique instrumentale autonome, car il la considère limitée et inférieure par rapport à la précision du modèle verbal. Il préconise donc le maintien d'une association entre musique et verbe. Par conséquent, cette approche relève encore d'une conception ancienne du rôle de la musique, tout particulièrement en France au XVIIIe siècle, dans laquelle son autonomie n'est pas encore reconnue.

Le XIXe siècle, au contraire, va consacrer le triomphe de la musique instrumentale (Fubini, 2007b, p. 47). Comme l'explique Fubini :

« Les romantiques inversant les critères de l'esthétique du XVIIIe, ont vu cette absence même d'images, de but, de concepts et d'objet, la raison profonde de la supériorité de la musique instrumentale pure » (2007a, p. 25).

On assiste, en effet, à un véritable renversement des paradigmes esthétiques – phénomène qui se manifeste même dès la fin du XVIIIe siècle – Comme l'écrit Dahlhaus :

[L]a musique harmonique détachée de la langue et même de l'expression des affects, cette musique absolue instrumentale tant méprisée par Rousseau, apparaît soudain, par un renversement abrupt du jugement esthétique comme la véritable « musique » […] l'indétermination du contenu n'est donc plus un manque, mais le signe d'un style « sublime », et que la distance prise par rapport au simple langage du cœur est ressentie comme pressentiment de l'infini et non comme une spéculation absurde et vide qui se perd dans l'abstraction (1997, p.53).

La musique détachée du langage et des fonctions s'élève par-dessus les limitations terrestres vers le pressentiment de l'infini […] On opposa à l'affirmation de la symphonie qui n'atteint pas le sentiment et restant "sans parole " la thèse contraire d'une "langue au-delà du langage" et la symphonie s'élevant au-dessus des sentiments terrestres. […] ce qui avait été ressenti comme manque, le vague et l'indéfinition de la musique instrumentale, fut réinterprété comme une qualité (1997, p. 58-59.).

C'est l'idée d'une « musique absolue » en tant que fondement de l'esthétique romantique, à savoir une quête métaphysique de l'absolu et du sacré où se joue la signification même de l'art. Il ne s'agit plus de prendre pour modèle les accents naturels du langage pour renforcer le caractère affectif de paroles chantées. La musique instrumentale est désormais vue comme un langage à part, capable d'exprimer à sa manière tout un pan de l'expérience sensible de l'ordre de l'indicible (Dahlhaus, 1997, p. 95) ou plus exactement de l'ineffable comme le soulignait Jankélévitch, c'est-à-dire toute une dimension du vécu que la finitude du langage verbal, trop conceptuel, ne saurait exprimer (1983, p. 92). Pour E.T.A Hoffmann,

La musique ouvre à l'homme un royaume inconnu totalement étranger au monde sensible qui l'entoure, et où il se dépouille de tous les sentiments qu'on peut nommer pour plonger dans l'indicible. Cette profonde originalité a été gravement méconnue par les auteurs de musique instrumentale qui ont essayé de peindre des sensations définissables, voire des événements traitant comme un art plastique le moins plastique de tous les arts.

[….] Dans la musique vocale, où la poésie suggère par des mots les mouvements de l'âme, le sortilège de la musique opère comme cet élixir philosophale, dont quelques gouttes transforment chaque breuvage en un nectar divin. Toute passion - amour, haine, fureur, désespoir - représentée à l'opéra, la musique la revêt de l'éclat d'une pourpre romantique, et même les sentiments que nous éprouvons dans la vie nous la font quitter pour le royaume de l'infini. Tel est le pouvoir magique de la musique (Hoffmann, 1990, p. 39).

1.2. Le vingtième siècle

Au XXe siècle, bien que les questions d'expression aient été parfois battues en brèche, les rapports tourmentés qu'entretiennent musique et langage ont continué d'alimenter la réflexion musicale à plusieurs niveaux et de nombreux auteurs se sont penchés sur la question2. Celle-ci fait d'ailleurs encore l'objet de colloques comme le récent Musique, langage, cerveau de Dijon3 ou encore le symposium d'Aix-en-Provence en 1998 : la musique comme langage : Courants actuels de la recherche dans les sciences du langage, dont les actes sont parus en 20094.

Mais les réponses, non seulement loin d'être unanimes quant à la question du rapport au langage, se complexifient. Pour se situer dans la diversité de ces approches, on pourrait reprendre la distinction de Davies en trois grandes catégories (1994, p. 3-6) . Cette distinction n'a pas pour but d'enfermer la position parfois très différente des uns et des autres dans des cases hermétiques, mais seulement de se donner des repères pratiques pour se situer dans la diversité des points de vue. En premier lieu, on distinguera les approches qui tendent à assimiler la musique plus ou moins littéralement à un langage. C'est la position que j'attribue à des ouvrages comme Musical Languages (1997) de Joseph Swain qui constitue un exemple encore récent de ce type d'approche. Mais cette conception était déjà présente dans d'autres écrits plus anciens comme ceux de Hermann Kretzschmar (1903-1990, p. 31-45), Colin McAlpin (1925, p. 427-443), Deryck Cooke (1959-2001). Selon Joseph Swain, cette conception serait même en train de reprendre de la vigueur (1997, p. 4). Ces auteurs ne vont pas jusqu'à dire que la musique est en tout point semblable à un langage – chacun, à sa manière, précise que la musique a ses spécificités et fonctionne parfois différemment du langage verbal. Mais leur approche reste malgré tout ancrée dans une vision quasi-linguistique du musical. Swain, par exemple, cherche à établir diverses équivalences musicales des niveaux phonologique, syntaxique et sémantique du langage. McAlpin et Kretzschmar, encore très influencés par les doctrines du romantisme, reprennent les conceptions passées selon lesquelles la musique serait une sorte de langage des émotions. Cooke a tenté d'établir une sorte de répertoire de figures lexicales. Bernstein (1982) cherche à transposer les modèles de la grammaire générative de Chomsky à la musique en s'appuyant sur certaines analogies apparentes au niveau structurel5. Ce genre de conception est aussi largement répandu dans le grand public et parfois même chez certains musiciens. On utilise souvent la comparaison avec le langage pour rendre compte des significations que semble leur inspirer la musique, sans pouvoir approfondir faute de connaissances techniques. On affirme alors que la musique est un langage sans trop qu'on sache où se pose la limite entre le littéral et le métaphorique.

À ce type de conception langagière, on pourrait aussi rattacher les approches sémiologiques ou sémiotiques de la musique, si l'on considère qu'elles ont souvent cherché à appliquer à la musique des outils linguistiques et qu'elles envisagent la musique comme un système de signes. Des musicologues sémioticiens de la première génération comme Wilson Coker comparaient d'ailleurs la musique de façon très étroite au modèle linguistique (1972, p.127-128). Et l'influence du structuralisme héritée de Saussure (1907-1995) a largement favorisé ces rapprochements. Il n'est donc pas rare de voir des auteurs considérer globalement les travaux de sémiologie ou de sémiotique comme autant d'approches langagières de la musique. Ce point de vue doit pourtant être nuancé. Si certaines approches musicologiques sont issues des conceptions structuralistes, elles ont cherché progressivement à s'en distancier pour mieux souligner les spécificités musicales. Il faut aussi préciser que les approches sémiotiques ne dérivent pas toutes de la linguistique. C'est notamment le cas des théories de Charles Sanders Peirce (1978) qui n'ont pas particulièrement pris le langage pour objet d'étude exclusif. Selon Peirce, tout objet est susceptible d'être utilisé comme signe. La sémiotique musicale reprend d'ailleurs de nombreux éléments de sa théorie.

C'est là qu'il est important de faire la distinction dans les approches sur ce type de comparaison, car quand on parle de comparaison avec le langage, il n'y a pas toujours une assimilation totale. Le fait de travailler sur certains parallèles entre musique et langage n'implique pas toujours que la musique est envisagée comme un langage au sens strict. On rattachera donc dans une seconde catégorie, les approches qui se veulent plus nuancées et plus souples par rapport au modèle verbal. Beaucoup d'auteurs comme Adorno (1982), Imberty (1979), Baroni (2004), Nattiez (1987), Fubini (2006, 2007a), Escal (1979 ; 2007), Sloboda (1988), Brown (2000), Tagg (2007), Esclapez (2009) et d'autres ont, chacun à leur manière, abordé la question du rapport au langage, en insistant sur les spécificités marquantes qui peuvent les différencier. Ces auteurs n'abordent pas forcément la question sous le même angle mais ils ont en commun de prendre en compte un certain nombre de différences cruciales qui existent entre les deux. Cette approche considère la musique comme un mode d'expression qui possède sa manière propre de s'exprimer et « dont les règles et la syntaxe ne peuvent être comparées à celle du langage » (Fubini, 2007b, p. 51), tout en notant malgré tout les similitudes qui peuvent parfois la rapprocher et éclairer certains phénomènes expressifs.

La troisième approche est plus radicale : bien que n'écartant pas les considérations expressives de la musique, elle tend à repousser les assimilations ou les comparaisons. C'est la position que j'attribue à des auteurs comme Susanne Langer (1942), Stephen Davies (1994), Peter Kivy (2007), Iannis Xenakis (1978, p. 8 ; LYON, 1974, p. 133), François-Bernard Mâche (1998, p. 103-108 ; 2001, p. 91-109), Luciano Berio (Muhler, 1997, p. 16-20) et d'autres compositeurs contemporains. Bien que leur approche et leurs motivations diffèrent, ces auteurs ont en commun de considérer les similitudes potentielles entre langage et musique comme peu signifiantes au regard des différences qui les en distinguent, pour pouvoir vraiment rendre compte des phénomènes expressifs de la musique. En ce qui concerne Langer, la comparaison avec le langage est rejetée au profit d'une conception où la musique fonctionnerait comme un symbole (1942). Dans le cas des philosophes anglo-saxons comme Davies ou Kivy, ce positionnement s'explique par une approche cognitiviste des phénomènes affectifs (Davies, 1994 ; Kivy, 2007) de leur théorie dite du « contour » (Davies, 2001, p. 23-44). Cette théorie ne nécessite pas de se référer au modèle du langage, ni à des questions de signification. Pour des compositeurs comme Mâche et Berio, compositeurs qui se sont pourtant largement intéressés à la linguistique, la question est différente. Bien qu'ils reconnaissent certaines similitudes, voire des parentés entre le langage et la musique, tout particulièrement dans la musique mozartienne (Muhler, 1997, p. 16 ; Mâche, 1998, p. 104), leur position met, avant tout, l'accent sur les différences fondamentales entre musique et langage. Berio remarquait à ce propos :

[L]a musique n'est pas un langage. Bien sûr, ça dépend de ce qu'on inclut dans la notion de "langage", ce qui peut être immense. […] Mais si l'on examine le langage plus en détail, on y trouve maintes choses qui n'ont pas d'équivalents en musique. Le langage a un élément rationnel, signifiant qui diffère de sa fonction représentative. En musique, cependant, on ne peut pas distinguer un niveau profond d'un niveau de surface, vous ne pouvez pas séparer le signifiant du signifié. Cela constitue un gros problème lorsqu'on essaie de comparer le langage et la musique (Muhler, 1997, p.16)6.

Beaucoup d'autres compositeurs contemporains rejettent ce type de rapprochement. Ce positionnement est aussi le reflet d'une distanciation par rapport aux conceptions traditionnelles. On entend par là qu'une partie importante de la musique contemporaine cherche à échapper au déroulement linéaire, discursif et temporel qui la rapprochait du langage, pour développer des conceptions spatiales ou multidirectionnelles. Dans ces cas de figure, la question de l'expression n'est donc pas tributaire d'un rapprochement au langage. Il ne s'agit pas de savoir si la musique est proche ou non du modèle linguistique, mais de s'en éloigner. En outre, ces compositeurs cherchent à s'écarter de la conception subjectiviste souvent liée à l'approche langagière. C'est, entre autres, pour cette raison que Xenakis affirmait :

La musique n'est pas langage, et elle n'est pas message. […] Si l'on réfléchit vraiment à ce qu'est la musique, c'est la chose qui échappe le plus à la définition du langage et si on veut appliquer les techniques de la linguistique, je crois qu'on se trompe, on ne va rien trouver du tout, ou très peu : de la tautologie (Lyon, 1974, p.133).

Dans la diversité de ces positions, j'aurais tendance à me situer dans la seconde et la troisième catégories, selon les cas. Si la musique tonale, de par ses liens historiques, se rapproche de certains aspects linguistiques, elle ne se confond pourtant pas avec le langage. La présence de parentés ou de similitudes entre les deux n'implique pas nécessairement qu'ils fonctionnent de la même façon. Il paraît donc impératif de tenir compte des différences qui font la spécificité de la musique. C'est en cela que je rejoins la seconde position. Mais dès lors qu'on entend mettre en perspective cette question en rapport à celle de l'expression en musique, je tends à rejoindre la position d'auteurs comme Davies ou Esclapez, entre autres, considérant que les questions d'expression ne se réduisent pas forcément à des similitudes de type linguistique, mais aussi et surtout que celles-ci peuvent être abordées sans nécessairement avoir recours au modèle langagier. Je rejoins tout particulièrement la troisième position, quand il s'agit de rendre compte du cas de certaines musiques modernistes qui cherchent justement à échapper au modèle du langage. Il paraît, en effet, impératif d'ajuster son angle d'approche, si l'on veut saisir correctement la démarche expressive de ce type de musique. C'est là qu'il faut être attentif au sens du mot « musique » dans ce type de comparaison. Il est fréquent qu'on généralise ces similitudes en parlant de la « musique » (au sens général), alors que souvent on parle avant tout de musique tonale7 — ce qui, à mon sens, peut fausser l'abord de la question.

2. Les différents emplois du terme « langage »

Il faut également être attentif au sens du mot « langage » qui peut être source de malentendus. Un des problèmes qui se posent quand on aborde ce type de comparaison, c'est que ce terme peut recouvrir plusieurs sens. Selon le contexte, il peut tout aussi bien être utilisé dans un sens strict que dans un sens large ou métaphorique. Or, ces différents sens n'impliquent pas toujours les mêmes considérations et peuvent être cause de nombreux malentendus.

2.1. Relations structurelles et parentés avec le modèle verbal

Si l'on veut comparer, voire identifier, la musique à un langage au sens strict du terme, cela présuppose que les caractéristiques de la musique puissent répondre à l'ensemble des critères qui définissent généralement le langage verbal, que cela soit au niveau de sa structure, de sa dimension sémantique ou encore de ses fonctions, etc. Or, sur bien des plans, la musique, ne répond pas à ces critères. La musique ne constitue pas, en soi, un système linguistique comme le français ou l'anglais. Mais cela ne veut pas dire pour autant que ces deux formes d'expression n'ont aucun lien. Bien au contraire, il est probable que musique et langage partagent une origine commune lointaine. C'est une thèse que soutenait Jean-Jacques Rousseau dans son fameux Essai sur l'origine des langues. Selon lui, les premières langues devaient certainement être chantées et seraient apparues, à l'origine, non pas pour raisonner ou pour exprimer des besoins8, mais pour exprimer les passions.

La passion fait parler tous les organes, et pare la voix de tout leur éclat ; ainsi les vers, les chants, la parole, ont une origine commune […][I]l n'y eut point d'abord d'autre musique que la mélodie, ni d'autre mélodie que le son varié de la parole ; les accents formaient le chant, les quantités formaient la mesure, et l'on parlait autant par les sons et par le rythme que par les articulations et les voix. Dire et chanter étaient autrefois la même chose […] (Rousseau, 1993, p.10).

C'est une hypothèse que rejoignent aujourd'hui de nombreux auteurs comme Enrico Fubini (2007b), Steven Brown (2001), Patrick Juslin (2001), Petri Laukka (Juslin et Laukka, 2003), Alf Gabrielson (2003, p. 506-508 et p. 525-529) ou encore François-Bernard Mâche (1998 ; 2001 ; Lou-Matignon, 2000) . Ce dernier a exploré la question de façon très intéressante en prenant appui sur des observations ethnologiques, éthologiques et zoomusicologiques . Selon lui, « si les rapports entre la langue et la musique peuvent offrir autant d'aspects, et si leur affrontement même prend souvent la tournure d'une scène de ménage, c'est bien que depuis toujours il s'agit de sœurs ennemies » (2001, p. 108). Brown (2001, p. 178) et Mâche tout particulièrement considèrent que le langage n'est en fait, qu'une forme de musique qui aurait évolué et se serait spécialisée dans la communication :

Si la musique peut aussi aisément prétendre emprunter à la langue des modèles […] c'est sans doute qu'au départ les deux activités sont imbriquées ou même confondues. Plusieurs exemples poétiques, ludiques ou mystiques, conservent des traces de cette communauté originelle. En tournant le dos à la répétition, le langage s'est peu à peu spécialisé dans la communication pratique et efficace. La prose utilitaire est son état le plus évolué, et du même coup le plus limité, alors que la poésie n'a pas voulu au même degré se résoudre à limiter les significations (Mâche, 2001, p. 108).

La musique et les différentes formes de communication sonores dériveraient donc toutes d'une forme de signalisation sonore primitive. Elles auraient évolué en fonction des nécessités et des adaptations à l'environnement. Selon lui :

[T]outes les populations humaines ont pu développer, à partir d'une forme de signalisation sonore primitive, trois types d'organisations inégalement répandues : une musique, communiquant des états émotionnels globaux ; un langage sifflé ou instrumenté, communiquant des messages en général simples, mais à partir d'éléments combinables ; un langage parlé enfin (ou crié, ou chuchoté...), développant considérablement la relation signifiant (sonore)-signifié, et ne conservant la communication émotionnelle qu'à l'état de traces dans les aspects dits suprasegmentaux (comme le contour intonatif, les accents, le rythme), ou encore les onomatopées. Si ces trois formes de vocalisation n'ont pas partout subsisté, c'est peut-être que leurs fonctions étaient en partie redondantes, et que l'évolution a avantagé les plus efficaces, c'est-à-dire les moins ambiguës, en développant le langage. La musique, elle, aurait subsisté comme pour compenser par sa libre polysémie, et par le plaisir spécifique de la répétition, la discipline de la spécialisation linguistique. (Mâche, 2001, p. 107).

Pour Mâche, les parentés entre langage et musique remontent même vraisemblablement jusqu'aux origines de l'homme.

La musique est une forme de vocalisation proche des trilles animales d'où on peut imaginer que le langage s'est développé à partir de ce fonds commun en se spécialisant pour la communication (Lou-Matignon et Mâche, 2000).

Les rapports entre les oiseaux et la musique sont loin de se limiter à une source d'inspiration dont les compositeurs auraient depuis toujours aimé se saisir. Au-delà des formes sonores analogues : rythmes, mélodies, ornementations, citations, refrains, strophes, l'étude des chants d'oiseaux met en évidence des convergences avec les musiques humaines dans la syntaxe, les techniques de développement, l'agencement polyphonique, qui nous interrogent tout autrement que comme un simple répertoire de belles formes (Lou-Matignon et Mâche, 2000).

Les édifices de l'imaginaire musical semblent bâtis sur des fondations simples et robustes fournies par des réseaux neuronaux précâblés dont une part est sans doute commune à tous les vertébrés (Lou-Matignon et Mâche, 2000).

De ces origines communes, il resterait donc un fonds commun entre musique et langage, tout particulièrement dans la dimension suprasegmentale du langage, c'est-à-dire la part prosodique du discours (le rythme, l'accent, l'intonation). Le langage conserverait à travers cette dimension une part de musicalité qui, comme le souligne Fubini, se fond avec le pouvoir dénotatif de la parole, tandis que la musique, quand elle « se fait autonome, conserve encore le souvenir d'un certain renvoi au monde des sentiments et des émotions, un renvoi perceptible, quoique "polysémique", vague et parfois ambigu. Une sorte de langage qui vient avant le langage » (Fubini, 2007b, p. 55). Selon lui, quand la musique s'unit avec le langage, « [elle] révèle, met en évidence, souligne et fait émerger ce qui dans le langage est étouffé ou demeure à l'état latent. Si elle peut exercer ce rôle, c'est justement parce qu'il existe une parenté originelle entre le son de la musique et le son du langage » (Fubini, 2007b, p. 55). Précisons que cette hypothèse n'est pas forcément admise partout, mais elle paraît assez convaincante. Mais cela ne légitime pas pour autant un rapprochement entre les deux.

2. 2. Relations métaphoriques et métonymiques avec le modèle verbal

Au-delà d'un rapprochement littéral, le terme peut aussi prendre un sens élargi et s'appliquer métaphoriquement à d'autres systèmes non linguistiques. Utilisé dans le contexte d'une réflexion sur la musique, il ne s'agit pas nécessairement de mettre en évidence des parentés effectives avec le modèle linguistique, mais d'utiliser le terme langage en tant que métaphore (ou en tant que synecdoque) pour éclairer un aspect spécifiquement musical. Avant de développer cet aspect, revenons brièvement sur les différents sens que peut recouvrir le mot « langage ». Son emploi amène parfois à réduire son sens à un aspect ou à un sème particulier du mot : sa dimension sémantique, discursive, syntaxique, phonologique ou encore sa fonction communicationnelle, etc. Ce genre de réduction est très fréquent (notamment avec la composante communicationnelle). Bien qu'il soit toujours question du système linguistique, il s'opère mentalement un glissement sémantique par le biais de synecdoques qui en réduisent le sens à un aspect spécifique. Ainsi en focalisant sur l'aspect communicationnel, le sens du mot « langage » tend parfois à devenir presqu'un synonyme de communication et même un sens second admis du mot. Si le mot est employé pour désigner une forme de communication, il devient concevable de l'employer pour désigner des systèmes communicationnels autres que le langage verbal. On voit dès lors un élargissement métaphorique ou « synecdoctique » du sens du mot. Inversement dans d'autres cas, le terme ne se confond pas avec la notion de communication. On pense notamment à Adorno, qui reconnaît à la musique un certain caractère langagier, mais en rejette toute idée communicationnelle.

a. La musique envisagée comme système syntaxique

Ce glissement sémantique peut aussi bien s'appliquer aux autres aspects cités plus haut. Un des glissements métaphoriques les plus fréquents est celui qui s'appuie sur l'existence commune d'une dimension syntaxique9. Il arrive très souvent qu'on emploie le terme « langage » à propos des systèmes d'écriture musicaux. Ces systèmes constituent un corpus de règles régissant l'écriture de la musique un peu à la manière de la syntaxe d'une langue. Et c'est par le biais de cette analogie qu'est réalisé ce rapprochement. On pourrait être a priori troublé du nombre d'auteurs, tel Boucourechliev qui rejettent l'idée d'une nature linguistique à la musique (1993, p. 9-12) et qui parlent pourtant de « langage musical » à longueur de pages. Et combien d'ouvrages théoriques généraux comportent le terme « langage musical » dans leur titre sans pour autant traiter de sémantique ou d'expressivité musicale ? L'emploi du terme « langage » ne fait pas un parallèle strict au sens linguistique du terme. Ce terme désigne avant tout une « syntaxe » musicale ou plus exactement un système d'écriture lié à une théorie compositionnelle; parler de « langage musical » en ce sens n'implique pas forcément qu'on l'entend en termes de sémantique. La métaphore du langage peut donc tout aussi bien être utilisée dans une perspective purement formelle sans impliquer de considérations expressives.

S'il s'agit de comparer musique et langage par rapport à la présence commune d'un système de règles, on peut voir une similitude assez marquante. La musique occidentale, s'est largement appuyée sur des systèmes de règles organisationnelles (contrapunctiques, tonales, modales, dodécaphoniques, sérielles, etc.) qui organisent d'une façon ou d'une autre les événements sonores de la surface musicale. On pourrait pourtant objecter que toutes les musiques ne sont pas organisées selon un système de règles prédéfinies comme la tonalité ou le dodécaphonisme. On pense, par exemple, à l'atonalité libre qui ne s'appuie justement pas sur l'observance de règles prédéterminées, mais, au contraire, sur un évitement plus ou moins systématique des règles tonales. C'est donc une musique qui se définit non par l'affirmation de règles, mais par leur négation. D'autre part, certaines musiques ne s'appuient pas sur des systèmes de règles prédéfinies, mais plutôt sur des modèles inspirés de disciplines comme les sciences biologiques et zoologiques (par exemple François-Bernard Mâche), les sciences acoustiques (Gérard Grisey), les sciences physiques ou encore les mathématiques (Iannis Xenakis). Ces modes d'organisation ne constituent pas un corpus de règles prédéterminées, comme la tonalité, mais simplement des modèles structurels — ce qui les éloigne sensiblement de la comparaison linguistique. On pourrait tolérer la comparaison au regard du fait que ces modèles constituent malgré tout un mode d'organisation événementiel. La similitude s'arrête là, car la « syntaxe » musicale en elle-même, quelle qu'elle soit, reste très différente de celle du langage. Comme le soulignait Nicholas Cook, « on ne peut parler de syntaxe en musique que dans un sens métaphorique, bien qu'il soit avéré que certaines cultures ont, en quelque sorte, intégré cette métaphore dans leur musique » (2004, p. 113). Étant donné que la musique n'a pas vraiment d'équivalents comparables aux unités du langage comme les lexèmes ou les morphèmes, il paraît difficile d'envisager des similitudes plus poussées avec le modèle syntaxique du langage – et en gardant à l'esprit que la musique ne se structure pas à partir de fonctions grammaticales comparables aux groupes nominaux, sujets, verbes, compléments, adverbes, etc.

André Martinet définissait le langage comme un phénomène construit autour de la double articulation (1970-1996, p. 17-21). Il se caractérise, en effet, par sa capacité à construire une infinité de phrases à partir d'un nombre (élevé mais) fini d'unités sémantiques : les monèmes. C'est la première articulation. Ces monèmes sont eux-mêmes formés à partir d'un petit nombre de phonèmes (une trentaine en français) ou de lettres (26 lettres en français) : c'est la seconde articulation. Si l'on pouvait trouver des équivalents musicaux au monème et au phonème, la musique répondrait à un critère essentiel qui définit le langage. Or cette double articulation ne semble pas trouver d'équivalent en musique. La musique en général, ne dispose pas d'une première articulation comparable au monème. Telle ou telle association de notes n'engendre pas d'unités minimales signifiantes comparables au modèle verbal. La musique tonale organise son système « syntaxique » directement à partir de la première articulation, là où le langage l'organise à partir des monèmes. La musique, comme le soulignait Jean-Jacques Nattiez, ne relie donc pas les significations selon une logique propre au langage verbal (2004, p. 258) – ce qui, au niveau « sémantique », a une répercussion non négligeable sur la possibilité de produire des énoncés musicaux comparables. Les règles de syntaxe, dans un contexte linguistique, ont un parti pris sémantique (Baylon et Fabre, 1990, p. 105) en ce qu'elles organisent la combinaison des unités significatives les unes par rapport aux autres dans le but de coordonner et d'articuler avec précision le sens global d'un énoncé. Il n'en est rien en musique, même dans le cas de styles qui ont privilégié des rapprochements avec le modèle langagier. Ce caractère imprécis et ambigu du discours musical résulte, en grande partie, de cette différence. On remarquera aussi, sur un plan diachronique, que la « syntaxe » musicale n'est pas aussi stable que celle du langage parlé. Comparées à celles du langage, les règles musicales sont, en effet, exposées à une évolution extrêmement rapide au cours de l'histoire.

b. La musique envisagée comme système sémantique et communicationnel

Ce sont surtout les métaphores en rapport avec la dimension signifiante ou la fonction communicationnelle qui sont les plus fréquemment usitées – au point d'être fixées en tant que sens seconds possibles du terme. On le voit, par exemple, dans cette définition tirée du dictionnaire de linguistique de Dubois.

Le nom langage a été étendu à tout système de signes socialement codifiés qui ne fait pas appel à la parole (ex : le langage des sourds-muets) il se confond parfois avec communication, ainsi le langage des abeilles met en œuvre des moyens physiques (positions par rapport au soleil, battements d'ailes, etc.) pour communiquer des informations sur des gisements de nectar (Dubois, 1994, p. 264).

Ne parle-t-on pas de « langage des couleurs » ou encore de « langage des fleurs » ? Dans ces exemples, il est évident qu'on n'entend pas parler de langage au sens strict du terme. Et c'est dans ce sens que le terme « langage » a pu aussi être appliqué à la musique. Dès lors, l'emploi du terme ne se trouve plus tenu de répondre en tout point aux caractères spécifiques qui définissent la nature du langage parlé. C'est par exemple, dans ce sens, que Françoise Escal (1979) ou Anne-Marie Green (Green, 2006) emploient le terme à propos de la musique. Bien que conscientes que la musique n'a pas de forme strictement linguistique, elles considèrent qu'en tant que fait de culture, elle est un langage, en ce qu'elle assume une fonction communicationnelle et sociale – et ce, même si elle n'épouse pas le modèle verbal. On le voit : il y a un glissement dans l'emploi du mot « langage », qui n'est plus envisagé au sens linguistique du terme.

D'une façon générale, le mode d'écoute occidental a été largement orienté par l'idée que la musique était porteuse de significations extramusicales, qui en outre pouvaient être communiquées. Cette idée a souvent conduit à analyser cette dimension à la lumière des références linguistiques – le modèle sémantique du langage constituant souvent dans les esprits le système de référence en termes de signification. C'est là que cette idée conduit à certains malentendus, car comme l'ont montré des travaux comme ceux de Robert Francès et Michel Imberty, les auditeurs n'appréhendent généralement pas la signification musicale de la même façon qu'un énoncé linguistique (Francès, 1972 ; Imberty, 1979). Il paraît donc nécessaire de souligner en quoi la musique se distingue du langage au niveau sémantique. Comme l'ont souligné de nombreux auteurs, la musique, du moins occidentale, ne s'appuie pas sur des unités comparables au signe linguistique (Imberty, 1979, p. 5 ; Baroni, 2004, p. 679 ; Escal Françoise, 1979, p. 23 ; Benveniste, 1980, p. 58 ; Davies, 1994, p. 7 ; Adorno, 1982, p. 3). Michel Imberty remarquait à cet égard :

On ne peut trouver en musique de signes dénotatifs, c'est-à-dire des signes dont on peut, dans les conditions d'emploi déterminées, dire s'ils entraînent la justesse ou la fausseté d'un énoncé par rapport à la réalité qu'ils désignent (Imberty, 1979, p. 5).

Encore que l'on pourrait toujours discuter de la capacité effective d'un énoncé linguistique à rendre compte de la « réalité » objective avec « justesse », si l'on considère que notre façon de percevoir et de penser le « réel » est de toute façon conditionnée par les concepts et les catégories du langage. Toujours est-il qu'au regard du modèle linguistique, « la musique, "mot à mot", phrase à phrase, ne dit rien » comme l'écrivait Françoise Escal (1979, p. 24). C'est aussi pour cette raison que Mario Baroni discute la notion de « sémantique » appliquée à la musique :

Si, par sémantique, on entend la référence à des concepts et si la fonction des concepts est de catégoriser les événements du monde et de les distinguer les uns des autres, il faut reconnaître que ce qu'on nomme "sémantique musicale" ne possède ni l'une, ni l'autre de ces fonctions et donc qu'elle n'est pas une sémantique (Baroni, 2004, p. 679).

On pourrait pourtant remarquer que la musique tonale a développé un ensemble de procédés figuralistes, symboliques ou rhétoriques qui ont parfois été vus comme le pendant du signe linguistique. Mais déjà le comportement de cette symbolique est assez différent du signe linguistique. De plus, ce symbolisme est relativement limité par rapport à la précision conceptuelle du langage verbal. Il ne s'agit pas d'un lexique stable qu'on pourrait consigner dans un dictionnaire. Baroni remarquait aussi à ce propos :

Nous sommes […] bien loin d'entités de nature lexicale, car le lexique est constitué d'un nombre fini de termes qui possèdent une signification prédéterminée, tandis que les agrégats musicaux sont librement inventés par le compositeur ; leur nombre est donc potentiellement infini (Baroni, 2004, p. 680).

Donc on reste malgré tout loin du modèle du langage verbal au sens propre. Si l'on a pu l'assimiler à un langage, c'est parce qu'elle est, souvent, un vecteur de communication qui s'inscrit dans un contexte social et culturel précis. Seulement s'il est indéniable que la musique s'appuie parfois sur des systèmes de signification socialement codifiées permettant plus ou moins la transmission intersubjective de certaines intentions, la question de l'expressivité ne saurait pourtant se réduire à cela. Si expression il y a, elle se joue aussi en deçà des systèmes de signification et au-delà de la communication univoque et unilatérale d'un message. J'entends par là que les questions d'expression en musique sont irréductibles à des théories communicationnelles basées sur l'idée d'un code commun. L'auditeur n'est pas un récepteur passif se contentant de décoder un message contenu dans la matière musicale, il s'investit au contraire dans un dialogue interprétatif actif avec l'œuvre. J'entends aussi que la question de l'expression ne se réduit pas forcément à des questions d'ordre sémiotique. Même s'il est vrai que la catégorie d'expression s'est parfois confondue avec des considérations purement sémantiques sous la plume de certains théoriciens, on s'accorde aujourd'hui à reconnaître que cette dimension ne constitue pas forcément l'essentiel de ce qu'on ressent comme « expressif » dans la musique. Cette dimension se joue en effet aussi à un niveau immanent, « pré-sémiotique » pourrait-on dire, dans les sensations et les ressentis ineffables dont l'auditeur fait l'expérience à travers le dialogue qu'il engage avec la matière musicale et la spécificité du jeu musicien, que ce soit à travers le jeu des dynamiques rythmiques, des flux, des densités, des phénomènes de tension, de détente, du grain, des jeux d'intonation. Dans la musique contemporaine, on pourrait également tenir compte de la question d'espace – celle-ci jouant souvent un rôle significatif.

Toujours est-il qu'il reste souvent commode d'utiliser des raccourcis imagés rapprochant la musique au langage lorsqu'il s'agit d'expliquer simplement l'idée que la musique véhicule des significations ou qu'elle se structure selon certains modes d'organisation. Ce n'est pas faux en soi. Ce genre d'image est d'autant plus parlant que musique et langage ont en plus en commun d'intéresser « au niveau de l'audition, le même organe sensoriel, l'ouïe » (Escal, 1979, p. 10). Ils s'appuient par ailleurs sur une organisation séquentielle d'événements s'échelonnant dans le temps. Ces points communs, sans parler de leur origine commune probable, facilitent donc d'autant plus ce type de comparaison. Cependant ce type de métaphore (ou de synecdoque) est souvent à l'origine de malentendus. Car la limite entre les comparaisons littérales et métaphoriques est toujours difficile à démarquer10. Par exemple, les critiques de Davies vis-à-vis des conceptions langagières sont justifiées, mais il semble qu'il n'aborde la question que sous l'angle d'une comparaison stricte avec le modèle linguistique, sans tenir compte des usages élargis ou métaphoriques du terme. Le problème avec l'emploi de la métaphore langagière, c'est que les approximations sur lesquelles elle repose, peuvent conduire à certaines confusions entre sens large et sens littéral – des confusions qui sont souvent entretenues du fait que l'un dérive de l'autre. Comme le soulignait Mâche, « cette formule est une métaphore commode, et devenue si usuelle qu'on a parfois perdu de vue son caractère très approximatif » (1998, p. 91). Il paraît donc toujours risqué d'utiliser ce genre d'expression, car les nombreuses similitudes que la musique entretient avec le langage peuvent facilement basculer dans une comparaison trop littérale si l'on ne situe pas clairement les limites de ces parentés.

Conclusion

En définitive, il n'est pas faux en soi de dire que la musique présente certaines similitudes, voire parentés, avec le langage. Il est vrai que la musique a souvent entretenu des rapports étroits avec le modèle verbal du fait des liens historiques qu'elle a tissés avec lui. Dans le contexte de la musique tonale, tout particulièrement, les différentes conceptions de l'expression ont été souvent guidées par les conceptions langagières et communicationnelles. Mais si la musique s'en rapproche, à certains égards, elle ne se confond pourtant pas avec celui-ci. Il paraît donc nécessaire de tenir compte des différences spécifiques, surtout lorsqu'on entend aborder une question aussi ambigüe que l'expression en musique. Même s'il est souvent commode d'utiliser ce genre de raccourci, surtout lorsqu'il s'agit d'expliquer à des non-spécialistes certains phénomènes musicaux, cette métaphore n'est pas sans poser certains problèmes. Car non seulement, il y a toujours le risque qu'elle soit prise trop littéralement, mais aussi celui d'obscurcir la compréhension de certaines particularités musicales se distinguant de ce modèle.

Par ailleurs, ce type de corrélation présuppose parfois l'universalité du modèle tonal. Or, on l'a vu, certaines musiques échappent aux normes et aux fonctionnements de ce modèle. Il paraît, donc, impératif d'ajuster l'angle d'approche selon les cas. À de nombreux égards, la musique, en général, fonctionne différemment du modèle linguistique. Si l'on peut parler de langage à propos de la musique, c'est donc avant tout au sens métaphorique – une métaphore qui, si elle est prise trop littéralement, peut conduire à une impasse lorsqu'on cherche à en cerner la spécificité en termes linguistiques. La musique ne dispose pas de structures phonologiques, syntaxiques ou sémantiques comparables au modèle linguistique. Si la musique tonale a notamment développé un ensemble de figures symboliques plus ou moins codifiées, elle ne connaît pourtant pas vraiment d'unités comparables au signe linguistique. Son sens est irréductible au décodage littéral de telles entités. Il est polysémique et connotatif, ce qui rend généralement son « discours » ambigu. C'est là toute la spécificité du sens en musique : il échappe à toute saisie conceptuelle et intelligible et rend toute tentative de traduction littérale impossible. Il se déploie en de multiples directions connotatives. Mais on l'a vu, la question de l'expressivité se joue aussi à un niveau immanent, en deçà de la sphère des systèmes de signification socialement codifiés. On sort dès lors du domaine de la comparaison linguistique pour rentrer dans le domaine de la singularité musicale.

Frédérick Duhautpas 2012 musicologie.org facebook

Notes

1. Mattheson Johann. Der vollkommene Cappelmeister, Hamburg, Herold, 1739. Je m'appuie ici sur les traductions de Hans Lenneberg. Ses articles traduisent toute la partie du livre consacrée à la rhétorique et aux affects (Lenneberg Hans et Mattheson Johann, 1958a, p.47-84 ; Lenneberg Hans et Mattheson Johann, 1958b » p.193-236).

2. Parmi les nombreux auteurs qui ont abordé la question, on citera entre autres Colin McAlpin (1925), Deryck Cook (1959-2001), Theodor Adorno (1982), Roman Jakobson (1973), Claude Lévi-Strauss (1964 ; 1971), Wilson Coker (1972), Enrico Fubini (1973 ; 2006 ; 2007), Jean-Jacques Nattiez (1987), Leonard Bernstein (1982), Françoise Escal(1979), Fred Lerdahl, Ray Jackendorf, Philip Tagg (1982 ; 2007), John Sloboda (1988), Malcom Budd (1985), Mario Baroni (2004), Diana Raffman (1993), Stephen Davies (1994), André Boucourechliev (1993), François-Bernard Mâche (2001), Joseph Swain (1997), David Lidov (2005), Anne-Marie Green(2006), Christine Esclapez (2009).

3. Le colloque s'est déroulé au Musée de la Vie Bourguignonne à Dijon les 17 et 18 janvier 2008. Colloque «.Musique, langage, cerveau » [en ligne], site de l'Université de Bourgogne, 2008. Disponible sur : https://www.u-bourgogne.fr/IFR100/ archives/Col_1718jan08.pdf [consulté en janvier 2010].

4. Le symposium s'est déroulé à l'université Aix-Marseille I, le 15 et 16 mai 1998 ; (VECCHIONE et HAUER, 2009, p.7).

5. À propos de la théorie générative, des auteurs comme Fred Lerdahl ou Ray Jackendorf sont bien connus eux aussi pour avoir appliqué ce type de théorie à la musique, mais leur approche, entend tenir compte des spécificités musicales et ne présuppose pas la musique comme un langage : « On ne doit pas se laisser méprendre par le fait que musique et langage gèrent des structures sonores. Il n'y a pas d'équivalent aux paramètres phonologiques comme la phonation, la nasalité, le degré d'aperture, et la labialisation ». « One should not be misled by the fact that both music and language deal with sound structures. There are no musical counterparts of such phonological parameters as voicing, nasality, tongue height, and lip rounding ». (Lederahl & Jackendorf, 1983, p. 5)

6. […] music is not a language. Of course it depends on what you include in the notion 'language', which can be so immense. [...]. But if you look at language in more detail, you find many things that don't have an equivalent in music. Language has a rational, signifying element which differs from its representative function. In music, though, you cannot distinguish a deep level from a surface level, you cannot separate the signifying from the signifier. This creates a big problem when you try to compare language and music ».

7. Des auteurs comme Cooke (1958-2001), Coker (1972) ou Swain (1997) prennent essentiellement des exemples issus du répertoire traditionnel occidental pour illustrer leur conception langagière. Swain étend ses comparaisons à la musique sérielle (1997, p.119). Mais la musique sérielle conserve encore un aspect linéaire et narratif qui facilite la comparaison avec le langage. Cependant, ce type d'écriture n'est pas forcément représentatif de toute la production contemporaine.

8. Il considère que ce sont les premiers gestes qui furent dictés par les besoins.

9. Je reprends, ici, par commodité le terme « syntaxe » pour désigner les systèmes d'écriture mais il va sans dire que l'emploi du terme en musique est aussi métaphorique. Car les règles musicales ne sont pas des règles syntactiques au sens linguistique du terme.

10. Nos discours sont de toute façon constamment émaillées de métaphores qu'elles soient explicites ou sous-jacentes (métaphores mortes). Le simple fait d'utiliser un terme comme « emaillé » est déjà une métaphore.

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Jeudi 1 Février, 2024