Jeanne d'Arc - H.Wallon - Appendice : Si Jeanne a �t� trahie � Compi�gne (original) (raw)

Jeanne d'Arc par Henri Wallon - 5° éd. 1879 Appendice 54 : Si Jeanne a été trahie à Compiègne

Quand Gérard d'Épinal la vit à Châlons pendant le voyage de Reims, elle lui disait, nous l'avons vu, qu'elle ne craignait rien qu'un traître, t. II, p. 423. Voyez M. J. Quicherat, Aperçus nouveaux, §§ 8-10, p. 77 et suiv. Vallet de Viriville (Bibliothèque de l'École des Chartes, 1855, 4e série, t. I, p. 151 et suiv.) a signalé un autre témoignage sur cette crainte de trahison exprimée par la Pucelle à Compiègne; mais ici ses appréhensions sont surtout pour la ville. Jean Le Féron, héraldiste et historien du seizième siècle, a écrit sur un exemplaire des Annales d'Aquitaine de Jehan Bouchet (Bibl. nat. réserve, in-fol. L, 359), en marge du chapitre intitulé : La Pucelle trahie et vendue : « Ladite Pucelle estoit logée au logis du procureur du roy dudit Compiègne, à l'enseigne du Boeuf, et couchoit avec la femme dudit procureur, mère-grand de maistre Jehan Le Féron, appelée Marie le Boucher, et faisoit souvent lever de son lit ladite Marie, pour aller avertir ledit procureur que se donnast de garde de plusieurs trahisons des Bourguignons, l'espace de sept mois sept jours, et fut ladite Pucelle prinse sur le pont de Marigny par ledit de Luxembourg. » Les souvenirs de l'auteur de la note peuvent n'avoir pas été bien fidèles sur plusieurs points. Il semble donner au séjour de Jeanne à Compiègne une durée de sept mois et sept jours. Or, Jeanne, partie de Sullyà la fin de mars, et qui était encore vers le 15 avril à Melun, fut prise le 24 mai.
M. du Fresne de Beaucourt, en publiant quelques pièces du procès fait à Flavy en 1444, a fort bien prouvé que la pensée de l'accuser ne s'était pas produite pour la première fois après sa mort, comme l'avait dit M. Quicherat (Aperçus, p. 95); mais c'est tout ce qui résulte de cette publication (voy. Bulletin de la Société de l'hist. de France (1861), p. 173 et suiv.). Vallet de Viriville, qui dans son article Flavy (Biographie générale de MM. Didot) déclarait l'accusation dont le capitaine de Compiègne avait été l'objet « dépourvue de preuves et même de vraisemblance, » soutient au contraire dans son Histoire de Charles VII, que Jeanne d'Arc, « on n'en saurait, dit-il, douter actuellement, » fut trahie et livrée par Guillaume de Flavy (t. II, p. 155). Je ne lui reproche pas d'avoir changé si radicalement d'opinion : mais comme il ne l'a fait que sur les raisons discutées dans mon texte, je demeure fort éloigné de croire avec lui cette assertion « définitivement acquise à l'histoire. »


Source : Jeanne d'Arc - Henri Wallon - 5° éd. 1879.

Notes :
Ndlr : la date communément admise pour la capture de Jeanne est bien le 23 mai 1430.