INDECHIFFRABLES : le nouveau thème du séminaire SEMPER (original) (raw)

Le séminaire SEMPER sur l’écriture en dehors du monde manuscrit reprend cette année 2022-23 sous forme de séminaire/webinaire transversal, réunissant tous les projets de recherche en épigraphie liés au CESCM. Il aura lieu une fois par mois sous une forme hybride, alternant les webinaires de 2h en ligne et les séminaires d’une journée au CESCM de Poitiers. Le thème choisi cette année est : indéchiffrables.

Un tel sujet permet en premier lieu de reconnaître que, si l’inscription a pour fonction de porter un message pour tous et sur la longue durée, elle n’en reste pas moins parfois difficile à déchiffrer, à lire, à comprendre. Cette résistance à donner d’emblée les clés de sa compréhension et de son interprétation fait sans doute partie de ses stratégies de communication. Une inscription demande un travail herméneutique, du plus basique au plus complexe.

Tous ceux qui tentent de lire une inscription ou un graffiti aujourd’hui font souvent l’expérience d’un déchiffrement tâtonnant ; outre les compétences personnelles, les conditions de lecture ne sont pas toujours excellentes pour un texte juché à plusieurs mètres de haut, pas plus que l’état de conservation et les conditions de préservation. Le texte épigraphique se fait pierre d’achoppement. Ces problèmes concrets de lecture posent la question de la réception de ces textes au Moyen Âge, souvent évoquée en termes de visibilité et lisibilité, mais peut-être faut-il chercher ailleurs.

S’il faut déchiffrer, c’est aussi parce que les inscriptions peuvent être “chiffrées”, cryptées, encodées, voilées. C’est évident au niveau graphique, par les abréviations, par les jeux de lettres, jusque dans les monogrammes, ou encore par des formes de lettres originales (comme celle de l’inscription de Saint-Seurin, à Bordeaux, en tête de cette page); les recherches sur l’illisible volontaire en paléographie (voir la conférence de Marc Smith ici) ont mis en évidence la complexité de cette notion également dans les écritures documentaires et livresques, ainsi que pour les typographes contemporains.

C’est aussi vrai par leur langage, la compacité stylistique des inscriptions pouvant obscurcir le sens, mais celui-ci peut aussi être embrouillé à dessein, au travers une opacité volontaire, comme dans les textes poétiques. Réussir à décoder l’énigme, percer le mystère à l’instar de Champollion devant les hiéroglyphes, n’est pas sans un caractère ludique. Mais, pour les hommes et femmes du Moyen Âge, le travail de déchiffrement que demande l’inscription, tel un microcosme, peut s’appliquer au macrocosme qu’est le monde, à comprendre et interpréter.

Indéchiffrables, les inscriptions le sont aussi quand elles sont dans une écriture autre, différente de sa propre culture. Tel est le cas dans l’Orient latin face aux écritures grecques, arabes, arméniennes, syriaques rassemblées dans les lieux saints. Comment cette altérité graphique est-elle perçue ? Cherche-t-on même à la comprendre ? En tous les cas, on cherche parfois à l’imiter, à travers les pseudo-écritures.

Le thème des “indéchiffrables”, comme en écho aux “intraduisibles” de Barbara Cassin, se propose donc d’ouvrir un vaste espace de réflexion sur l’interprétation des inscriptions, ses obstacles et ses clés. Ce séminaire est ouvert à tous.

Programme prévisionnel :

Lien Zoom: https://cnrs.zoom.us/j/99895575475?pwd=bWVjWS9KMWRZcll6dit1VUIzdTRHUT09

ID de réunion : 998 9557 5475
Code secret : FSt39w

Pour tout renseignement : estelle.ingrand.varenne@univ-poitiers.fr


OpenEdition vous propose de citer ce billet de la manière suivante :
Estelle Ingrand-Varenne (22 septembre 2022). INDECHIFFRABLES : le nouveau thème du séminaire SEMPER. LA MAISON DE L'EPIGRAPHIE. Consulté le 1 octobre 2024 à l’adresse https://doi.org/10.58079/oge1