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Papers by Chirine Raveton
Communio (Paris), Sep 20, 2022
Cahiers de philosophie de l’Université de Caen, 2019
Fondements anthropologiques et théologiques de l'idéal communautaire des chanoines de Saint-Victo... more Fondements anthropologiques et théologiques de l'idéal communautaire des chanoines de Saint-Victor ∂ O n peut lire une affirmation à première vue surprenante dans les Grandes règles de saint Basile, rédigées au IV e siècle par l'évêque de Césarée, qui demeurent aujourd'hui la règle monastique de référence dans les Églises d'Orient, orthodoxes comme catholiques : l'homme n'est pas un animal monastique. « Qui ignore que l'homme est un animal sociable [en grec : koinonikon] et doux, et non pas solitaire [monastikon] et sauvage ? » 1. L'idéal de la vie religieuse n'est pas, comme pour Antoine et les autres Pères du désert, la solitude du prophète Élie sur le mont Horeb, mais la communauté chrétienne primitive de Jérusalem décrite dans les Actes des Apôtres : « La multitude de ceux qui avaient cru n'avait qu'un coeur et qu'une âme ; nul n'appelait son bien propre rien de ce qui lui appartenait, mais tout leur était commun [koinos] » 2. La règle de saint Basile définit, avec un militantisme remarquable, une vie religieuse non monastique mais communautaire, centrée non pas sur la solitude du face-à-face avec Dieu, mais sur la charité et les relations interpersonnelles. Le pendant latin de cette règle de saint Basile est la règle de saint Augustin, qui dès avant sa conversion eut le projet d'une communauté consacrée à l'étude de la philosophie et à « une vie de loisir » 3 , réunissant des amis mettant en commun toutes leurs possessions. Il réalisa ce projet, dans un cadre chrétien, après sa conversion, dans la villa de Cassiciacum, où il mena la vie commune avec sa mère et des amis, au rythme des échanges intellectuels, de la prière, du chant des psaumes et du travail manuel. De retour en Afrique,
Http Www Theses Fr, Dec 4, 2014
Cahiers de philosophie de l’Université de Caen, 2016
Les Cahiers de philosophie de l'université de Caen sont mis à disposition selon les termes de la ... more Les Cahiers de philosophie de l'université de Caen sont mis à disposition selon les termes de la Licence Creative Commons Attribution-Pas d'Utilisation Commerciale 4.0 International. Cahiers de philosophie de l'université de Caen, n o 53, 2016, p. 95-114 L'élaboration de la notion de totalité dans les textes théologiques de Bonaventure et de Thomas d'Aquin : vers un sens transcendant ∂ L es textes théologiques de saint Bonaventure et saint Thomas d'Aquin sont le lieu d'une élaboration discrète, mais profonde, de la notion de totalité, dont ils mettent à jour un sens transcendant, alliant la plénitude et la simplicité, à rebours du régime créé de la totalité, où le tout procède de la composition des parties. La totalité-qui n'est pas dans nos textes distinguée philosophiquement du tout, d'où l'équivalence totum sive totalitas-n'est pas considérée par nos auteurs comme un attribut divin, mais elle intervient dans une démarche d'élucidation de la foi trinitaire chrétienne : Dieu est trois Personnes, le Père, le Fils et le Saint-Esprit, distinctes réellement l'une de l'autre. Faut-il alors comprendre que ces Personnes sont les parties de Dieu et forment un tout ? La Trinité est-elle une totalité ? La clarification de cette question est l'objet d'un article de la distinction 19 du premier livre de leur Commentaire des sentences, et dans ce cadre la totalité est radicalement exclue de Dieu, au nom de sa simplicité, qui interdit de le penser comme un tout fait de parties. Mais Bonaventure et Thomas d'Aquin sont confrontés à des formules patristiques qui appliquent à Dieu l'idée de totalité-chez saint Augustin, « totius divinitatis […] principium Pater est » 1 , mais surtout chez le Pseudo-Denys, « in tota et perfecta et integra et prima Deitate […] universae
Communio (Paris), Sep 20, 2022
Cahiers de philosophie de l’Université de Caen, 2019
Fondements anthropologiques et théologiques de l'idéal communautaire des chanoines de Saint-Victo... more Fondements anthropologiques et théologiques de l'idéal communautaire des chanoines de Saint-Victor ∂ O n peut lire une affirmation à première vue surprenante dans les Grandes règles de saint Basile, rédigées au IV e siècle par l'évêque de Césarée, qui demeurent aujourd'hui la règle monastique de référence dans les Églises d'Orient, orthodoxes comme catholiques : l'homme n'est pas un animal monastique. « Qui ignore que l'homme est un animal sociable [en grec : koinonikon] et doux, et non pas solitaire [monastikon] et sauvage ? » 1. L'idéal de la vie religieuse n'est pas, comme pour Antoine et les autres Pères du désert, la solitude du prophète Élie sur le mont Horeb, mais la communauté chrétienne primitive de Jérusalem décrite dans les Actes des Apôtres : « La multitude de ceux qui avaient cru n'avait qu'un coeur et qu'une âme ; nul n'appelait son bien propre rien de ce qui lui appartenait, mais tout leur était commun [koinos] » 2. La règle de saint Basile définit, avec un militantisme remarquable, une vie religieuse non monastique mais communautaire, centrée non pas sur la solitude du face-à-face avec Dieu, mais sur la charité et les relations interpersonnelles. Le pendant latin de cette règle de saint Basile est la règle de saint Augustin, qui dès avant sa conversion eut le projet d'une communauté consacrée à l'étude de la philosophie et à « une vie de loisir » 3 , réunissant des amis mettant en commun toutes leurs possessions. Il réalisa ce projet, dans un cadre chrétien, après sa conversion, dans la villa de Cassiciacum, où il mena la vie commune avec sa mère et des amis, au rythme des échanges intellectuels, de la prière, du chant des psaumes et du travail manuel. De retour en Afrique,
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Cahiers de philosophie de l’Université de Caen, 2016
Les Cahiers de philosophie de l'université de Caen sont mis à disposition selon les termes de la ... more Les Cahiers de philosophie de l'université de Caen sont mis à disposition selon les termes de la Licence Creative Commons Attribution-Pas d'Utilisation Commerciale 4.0 International. Cahiers de philosophie de l'université de Caen, n o 53, 2016, p. 95-114 L'élaboration de la notion de totalité dans les textes théologiques de Bonaventure et de Thomas d'Aquin : vers un sens transcendant ∂ L es textes théologiques de saint Bonaventure et saint Thomas d'Aquin sont le lieu d'une élaboration discrète, mais profonde, de la notion de totalité, dont ils mettent à jour un sens transcendant, alliant la plénitude et la simplicité, à rebours du régime créé de la totalité, où le tout procède de la composition des parties. La totalité-qui n'est pas dans nos textes distinguée philosophiquement du tout, d'où l'équivalence totum sive totalitas-n'est pas considérée par nos auteurs comme un attribut divin, mais elle intervient dans une démarche d'élucidation de la foi trinitaire chrétienne : Dieu est trois Personnes, le Père, le Fils et le Saint-Esprit, distinctes réellement l'une de l'autre. Faut-il alors comprendre que ces Personnes sont les parties de Dieu et forment un tout ? La Trinité est-elle une totalité ? La clarification de cette question est l'objet d'un article de la distinction 19 du premier livre de leur Commentaire des sentences, et dans ce cadre la totalité est radicalement exclue de Dieu, au nom de sa simplicité, qui interdit de le penser comme un tout fait de parties. Mais Bonaventure et Thomas d'Aquin sont confrontés à des formules patristiques qui appliquent à Dieu l'idée de totalité-chez saint Augustin, « totius divinitatis […] principium Pater est » 1 , mais surtout chez le Pseudo-Denys, « in tota et perfecta et integra et prima Deitate […] universae