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Research paper thumbnail of De quoi parlons-nous lorsque l’on s’intéresse au mal-être des étudiants ?

Regards croisés sur les expériences étudiantes, 2019

Pourquoi la santé mentale des étudiants représente-t-elle un enjeu social important ? Nous all... more Pourquoi la santé mentale des étudiants représente-t-elle un enjeu social important ? Nous allons présenter en introduction quelques points synthétiques pour l’illustrer. Premièrement, la population étudiante représente plus de 2,6 millions de personnes en France (Algava et al., 2017 ; Insee, 2016). De plus, cette tranche d’âge correspond à l’émergence de près des trois quarts des troubles mentaux qui sont diagnostiqués au cours de la vie (Kessler et al., 2015 ; Rajji, Ismail, Mulsant, 2009). On peut ainsi estimer qu’un étudiant sur quatre en France a présenté au moins un trouble mental au cours de l’année écoulée (Verger et al., 2010 ; Auerbach et al., 2017). Deuxièmement, la présence d’un trouble mental a souvent un retentissement important sur le travail, les relations sociales et avec les proches ainsi que sur l’adaptation à l’environnement universitaire (Verger et al., 2010). Il a été estimé qu’environ deux tiers des étudiants présentant des troubles mentaux ne reçoivent pas de prise en charge médicale et/ou psychothérapeutique. Or, un trouble mental non pris en charge conduit à une baisse significative des résultats universitaires ainsi qu’à l’abandon prématuré des études (Hysenbegasi, Hass, Rowland, 2005 ; Van Ameringen, Mancini, Farvolden, 2003). En conséquence, la présence d’un trouble mental avec un échec scolaire associé peut conduire à un infléchissement des trajectoires et à des difficultés d’intégration sociale sur le long terme telles que l’obtention ou le maintien d’un emploi (Reavley, Jorm, 2010 ; Patel et al., 2007). Troisièmement, au-delà de l’impact personnel, les troubles mentaux représentent un poids important (près de 20 %) dans l’ensemble des années de vie vécues avec une maladie (Patel et al., 2016). Les troubles mentaux représentent un coût économique non négligeable qui est évalué à 19,3 milliards d’euros en 2015 en France pour les simples coûts directs (hospitalisations, remboursement de soins médicaux et consommation de médicaments) (Cnam, 2017). Les coûts indirects, plus
difficiles à évaluer, tels que les conséquences économiques qu’engendrent les troubles mentaux sur les proches, l’entourage, le travail ou encore en termes de perte de chances socio-économiques, doivent également s’ajouter à ces 19,3 milliards (Shaughnessy et al., 2017). Il a pourtant été montré que des programmes de prévention ou d’intervention précoce pourraient diminuer les coûts à long terme : par exemple un euro investi dans un plan de prévention de la dépression au travail permettrait d’économiser cinq euros à long terme (Knapp, McDaid, Parsonage, 2011).

Research paper thumbnail of Perceptions différenciées des étudiants face à la précarité économique

Regards croisés sur les expériences étudiantes, 2019

La précarité économique rencontrée par un nombre important d’étudiants fait régulièrement l’actua... more La précarité économique rencontrée par un nombre important d’étudiants fait régulièrement l’actualité. De nombreux travaux issus notamment des enquêtes Conditions de vie de l’Observatoire national de la vie étudiante (Grignon, 2003 ; Giret et al., 2016) ou d’enquêtes menées localement (Landrier et al., 2016) mettent en évidence la complexité du sujet et les incidences sur les parcours de formation. La grande précarité de certains étudiants se traduit par des renoncements aux soins, ou à l’alimentation, un travail contraint, mais aussi des expériences de sans domiciliation (Cordazzo et Sembel, 2016). Elle s’inscrit dans des parcours de vie (Galland, 2012) et interroge les solidarités familiales (Le Pape et Tenret, 2016).

Research paper thumbnail of Les conditions de logement des étudiants dans la diversité des territoires. Le poids des inégalités sociales

Regards croisés sur les expériences étudiantes, 2019

Massivement locataires de petits logements du parc privé des principales villes du pays, les étud... more Massivement locataires de petits logements du parc privé des principales villes du pays, les étudiants figurent parmi les populations les plus touchées par la cherté des loyers. Ils sont donc fortement demandeurs des aides personnelles destinées à les solvabiliser. Cette situation suscite de nombreux débats. Un rapport de l'Inspection générale des affaires sociales (Igas, 2012) estimait que les 700 000 allocataires étudiants (près de 12 % de l'ensemble des allocataires du pays) représentaient une dépense publique de plus de 1,3 milliard d'euros par an, alors que moins d'un tiers de ces étudiants étaient boursiers et que 65 % restaient fiscalement à la charge de leur famille. Le rapport concluait au caractère « inéquitable » et à « l'inefficience » (Igas, 2012, p. 7) d'une aide sociale plus favorable aux étudiants intégralement soutenus par leurs parents qu'à ceux contraints de travailler pour financer leurs études.

Research paper thumbnail of Salariat étudiant et rapport aux études dans les premiers cycles universitaires

Regards croisés sur les expériences étudiantes, 2019

Combien d’étudiants sont aussi des travailleurs ? Avec ou sans contrat de travail, le nombre d’ét... more Combien d’étudiants sont aussi des travailleurs ? Avec ou sans contrat de travail, le nombre d’étudiants salariés fait régulièrement débat. Nous les définissons ici très largement comme l’ensemble de ceux qui déclarent une activité rémunérée parallèle à leurs études. Il est cependant vain de chercher à produire une mesure unique pour appréhender un phénomène aussi saisonnier et hétérogène. En outre, les raisons du travail à côté des études sont multiples et peuvent changer au fil des parcours étudiants (Pinto, 2010). L’enquête Conditions de vie permet ainsi d’éclairer ce fait social en se concentrant dans ce chapitre sur les étudiants en formation initiale des premiers cycles universitaires.

Research paper thumbnail of Être financé par sa famille ou pas : modalités, variations et conséquences de l’aide familiale apportée aux étudiants

Regards croisés sur les expériences étudiantes, 2019

L’émancipation de la famille constitue l’une des dimensions du passage à l’âge adulte. Devenir au... more L’émancipation de la famille constitue l’une des dimensions du passage à l’âge adulte. Devenir autonome reste pourtant largement conditionné par le soutien des parents, et notamment par les aides qu’ils sont en mesure de lui apporter. Ces aides sont multiples car elles s’adaptent aux besoins du jeune et à sa situation spécifique, qui évolue parfois très vite pendant cette période de transition vers la vie adulte. Selon qu’il soit étudiant, en recherche d’emploi ou salarié, les modalités du soutien familial sont très différentes. Depuis les années 1990, les recherches montrent, par exemple, que les étudiants, en lien avec leur statut, restent de façon stable et persistante les principaux bénéficiaires de l’aide parentale (pour une synthèse des principaux résultats, voir notamment Le Pape, Portela et Tenret, 2016). Les trois quarts des ressources des étudiants sans activité, décohabitants ou non, proviendraient ainsi de leurs parents.

Research paper thumbnail of Les revenus étudiants : un poids toujours important de l’aide familiale mais une progression du travail salarié

Regards croisés sur les expériences étudiantes, 2019

Comme le soulignait déjà Louis Gruel, dans un chapitre sur l'économie étudiante d'un ouvrage de s... more Comme le soulignait déjà Louis Gruel, dans un chapitre sur l'économie étudiante d'un ouvrage de synthèse sur les étudiants en France (Gruel, 2009), le statut économique des étudiants n'est pas assimilable à celui des ménages ordinaires. Il y a en réalité « deux budgets de la vie étudiante », celui que Louis Gruel appelle « le budget propre de l'étudiant », constitué des ressources monétaires directes qu'il reçoit et des dépenses qu'il effectue lui-même, et le « budget d'entretien de la vie étudiante » constitué d'aides en nature et de dépenses effectuées pour le compte de l'étudiant par sa famille. La prise en compte de ces deux budgets, dont un peut être en partie invisible dans la statistique publique ordinaire, est évidemment capitale pour avoir une appréhension juste du budget étudiant. Elle est importante notamment pour les politiques publiques en direction des étudiants qui à travers les bourses et les aides au logement, visent à compenser des inégalités de revenu préjudiciables à la réussite des études, ou simplement à favoriser un développement harmonieux de cette période d'études supérieures qui combine le maintien fréquent d'une dépendance économique à l'égard des parents et des premières formes d'autonomie (notamment résidentielle). C'est précisément ce que permet, depuis plusieurs éditions, l'enquête sur les conditions de vie des étudiants de l'OVE qui recense de manière détaillée les différents types de ressources, directes, indirectes, monétaires, en nature, dont bénéficient les étudiants.

Research paper thumbnail of Le non-recours à la mobilité internationale d’études : hétérogénéité des publics et diversité des obstacles

Regards croisés sur les expériences étudiantes, 2019

Les séjours à l’étranger dans le cadre des études apportent de nombreux bénéfices aux étudiants, ... more Les séjours à l’étranger dans le cadre des études apportent de nombreux bénéfices aux étudiants, notamment en accroissant les compétences linguistiques et culturelles. Ils offrent également aux apprenants les moyens de gagner en maturité ou en autonomie (Erlich, 2012). Avoir réalisé une mobilité serait vu comme un signal positif sur le marché concurrentiel de l’éducation ou du travail (Ballatore et Blöss, 2008). Néanmoins, seule une minorité d’étudiants français réalise un séjour à l’étranger dans le cadre de ses études (période d’études, de stage, séjours linguistiques, activités de recherche, école d’été). Il convient alors de comprendre pourquoi certains étudiants n’envisagent pas de participer à une mobilité internationale au cours de leurs études alors qu’ils pourraient en bénéficier. Notre analyse portera essentiellement sur cette population de non mobiles qui n’envisagent pas de mobilité d’études (encadré 1), les non-mobiles qui déclarent le prévoir plus tard dans leur cursus pouvant être considérés comme de potentiels « futurs mobiles ».

Research paper thumbnail of Du sentiment d’intégration à sa réalisation et à sa réalité chez les étudiants de l’université

Regards croisés sur les expériences étudiantes, 2019

L'enquête Conditions de vie 2016 montre que le sentiment d'intégration des étudiants inscrits à l... more L'enquête Conditions de vie 2016 montre que le sentiment d'intégration des étudiants inscrits à l'Université n'est pas aussi faible que nous aurions pu l'imaginer, lorsqu'on le rapporte au degré d'encadrement, réputé supérieur dans d'autres filières telles que les grandes écoles. Le sentiment et la réalité de l'intégration (à l'établissement et au groupe de pairs) semblent ne pas relever seulement du seul lien social ou académique institutionnalisé. Le sentiment d'intégration se nourrit d'une pluralité d'ingrédients qui se déploient sur des plans aussi variés que la perception par l'étudiant de son parcours d'études ou la plus ou moins grande satisfaction retirée quotidiennement du temps passé sur le campus. Ensemble, toutes ces dimensions participent de la « motivation » et, de manière indirecte mais supplémentaire (Berthaud, 2017), des conditions de la réussite.

Research paper thumbnail of Intégration sociale et académique des étudiants au début de leur parcours dans le supérieur

Regards croisés sur les expériences étudiantes, 2019

L’objet de ce chapitre, qui s’appuie sur les données de l’enquête Conditions de vie des étudiants... more L’objet de ce chapitre, qui s’appuie sur les données de l’enquête Conditions de vie des étudiants 2016 (CdV) de l’OVE, est de s’interroger sur la manière dont les étudiants inscrits en première et deuxième année de l’enseignement supérieur vivent et apprécient leur environnement d’études. Il s’agit d’examiner l’intégration sociale et académique en tenant compte du point de vue étudiant sur les conditions pédagogiques, sociales et matérielles de leur lieu d’études. Les données de l’enquête CdV 2016 montrent que le jugement des étudiants sur le contexte général de leur formation, la qualité de la pédagogie et l’accompagnement offerts par leur formation tendent à considérablement varier en fonction de la filière d’études et de certaines caractéristiques individuelles. Les analyses permettent de montrer l’existence effective d’un « effet filière » et/ou d’un « effet établissement » dans la mesure où les étudiants inscrits dans le secteur sélectif éprouvent une expérience intégratrice fortement différente de ceux qui se trouvent dans les filières universitaires.

Research paper thumbnail of L’utilisation des MOOC par les étudiants : une pratique encore marginale mais distincte selon les caractéristiques sociales et formatives

Regards croisés sur les expériences étudiantes, 2019

En France, les Massive Open Online Courses (MOOC) connaissent un essor important depuis la créati... more En France, les Massive Open Online Courses (MOOC) connaissent un essor important depuis la création en 2013 d’une plateforme nationale publique de MOOC France université numérique (FUN), initiative unique en son genre à travers le monde. Ces cours en ligne sont accessibles à tous sur Internet gratuitement depuis des plateformes. Ils rassemblent de grandes cohortes d’individus pendant une durée déterminée (quelques semaines). Les inscrits accèdent à des contenus produits par des institutions de formation, présentés pour la plupart au format vidéo, et peuvent échanger avec les autres à l’aide des forums. Des quiz et des évaluations permettent d’obtenir une attestation de réussite à l’issue de leur suivi.

Research paper thumbnail of Les temps étudiants, des articulations variées selon les disciplines pour des socialisations distinctes

Regards croisés sur les expériences étudiantes, 2019

Les étudiants appartiennent à une catégorie de population ayant plusieurs caractéristiques commun... more Les étudiants appartiennent à une catégorie de population ayant plusieurs caractéristiques communes. Il s’agit d’individus inscrits dans une temporalité particulière, celle de la jeunesse, marquée, au sein de notre population étudiée, par une activité significative qui est celle de la formation. Le temps de la jeunesse est une construction sociale qui prend ancrage pour eux dans la prolongation de la scolarité et elle est définie par Olivier Galland comme une période de socialisation particulière préparant à l’exercice des rôles adultes (Galland, 2012). Être étudiant c’est aussi, dans cette période particulière, articuler divers temps d’activités entre eux, effectuer des choix sur les volumes horaires à y consacrer, tout en étant soumis à des obligations de nature et de degré variés. En clair, si les étudiants observés ici ont pour point commun d’étudier au sein de formations diplômantes, tous ne jonglent pas avec les mêmes contraintes et les mêmes ressources, qu’elles soient liées à la formation, à la position sociale de l’individu, ou aux dispositions plus ou moins acquises antérieurement (dans la scolarité ou ailleurs). L’organisation des temps renvoie donc à la fois à des contraintes institutionnelles (organisation pédagogique de la formation…) et à des arbitrages individuels. Dans cette perspective, à travers la question des rythmes, l’enquête Conditions de vie 2016 permet de faire ressortir, d’une part, les différences marquées concernant les rythmes de formation proposés par les établissements qui composent l’enseignement supérieur en France et, d’autre part, l’influence de certaines caractéristiques sociodémographiques et d’études sur la gestion par les étudiants de leur emploi du temps.

Research paper thumbnail of Mobilité des étudiants et territoires : des disparités maintenues entre grandes régions

Regards croisés sur les expériences étudiantes, 2019

Au lendemain des réformes territoriales de 2016, cet article étudie la mobilité interrégionale de... more Au lendemain des réformes territoriales de 2016, cet article étudie la mobilité interrégionale des étudiants après le baccalauréat. L’objectif est de montrer si des disparités régionales existent et affectent l’égalité des chances des futurs étudiants.

Research paper thumbnail of Aspirer à la poursuite d’études : une caractéristique des licences générales et professionnelles ?

Regards croisés sur les expériences étudiantes, 2019

Depuis la mise en oeuvre du LMD, le niveau licence est le premier niveau de sortie du supérieur. ... more Depuis la mise en oeuvre du LMD, le niveau licence est le premier niveau de sortie du supérieur. Les sorties au niveau bac + 2 sont donc amenées à s’estomper, les jeunes poursuivant leurs études une année de plus au moins. Par exemple, parmi les détenteurs de DUT, neuf étudiants sur dix poursuivent déjà leurs études, dont un tiers en licence professionnelle (source MESRI, enquête IUT 2014). Cette licence est destinée a priori au marché du travail, alors que les filières dites générales invitent à la poursuite d’études. Pour autant, les effectifs de sortants de filière générale et professionnelle diplômés de licence sont comparables, même si les effectifs de sortants de licences professionnelles ne cessent de croître, après avoir plus que doublé au cours des dix premières années du xxie siècle (Ménard, 2014). En effet, pour une génération de sortants du système éducatif, tout de même un étudiant sur dix de licence générale quitte le système éducatif à ce niveau de diplôme. Comme les effectifs de licence générale demeurent très supérieurs à ceux de licence professionnelle, ces 10 % représentent un effectif proche du nombre de diplômés de la filière professionnelle qui quittent le système éducatif après l’obtention de leur diplôme. Toutefois, déjà près de deux étudiants sur dix diplômés de licence professionnelle poursuivent leurs études dans certaines Universités (Gautié, 2016). La poursuite d’études n’est donc pas l’apanage des filières générales et la sortie au niveau licence celui des filières professionnelles.

Research paper thumbnail of Les bacheliers technologiques et professionnels dans l’enseignement supérieur

Regards croisés sur les expériences étudiantes, 2019

Le développement des scolarités, au cours des années 1980, a profondément recomposé le paysage de... more Le développement des scolarités, au cours des années 1980, a profondément recomposé le paysage de l'enseignement secondaire, amenant une diversification des diplômes du baccalauréat et une transformation des profils des bacheliers (Duru-Bellat et Kieffer, 2008). Ce mouvement au long court poursuit ses effets sur une période plus récente : entre 2010 et 2016, la proportion de bacheliers dans une génération est passée de 65 % à 79 % (MENESR-DEPP, 2017). Si les bacheliers généraux restent majoritaires (51 % en 2016), les bacheliers professionnels ont connu une relative progression sur la période (29 % en 2016 contre 22 % en 2010), au détriment des bacheliers techno-logiques (25,1 % en 2010 et 19,9 % en 2016). Ces deux derniers baccalauréats ont été, à deux périodes distinctes, la voie d'accès privilégiée des classes populaires à l'enseignement secondaire. Si, en ce sens, il s'est agi d'une démocratisation, celle-ci peut être qualifiée de ségrégative (Merle, 2000) dans la mesure où l'augmentation de l'accès au baccalauréat s'est faite par un accès différencié à des séries inégalement rentables dans la poursuite des études. La progression de la réussite des bacheliers technologiques et professionnels s'est logiquement traduite par un accroissement des entrées dans l'enseignement supérieur, l'accès au baccalauréat ouvrant, pour cette nouvelle population, la légitimité d'une poursuite des études et permettant le report de l'entrée sur le marché du travail. Ces nouveaux étudiants (Erlich, 1998) présentent des profils sociaux spécifiques, avec notamment une nette représentation des étudiants issus des catégories sociales populaires (en 2016, 34,4 % des bacheliers professionnels et 19,5 % des bacheliers technologiques sont d'origine sociale ouvrière contre 11,2 % des bacheliers généraux (MENESR-DEPP, 2017) et des bacheliers de « première géné-ration » (Caille et Le maire, 2009). Dans le cadre de cette contribution, nous nous intéresserons tout d'abord aux orien-tations différenciées dans les filières de l'enseignement supérieur et aux profils socio-académiques des étudiants selon le type de baccalauréat possédé. Dans un second temps, nous nous centrerons sur les conditions d'études et la manière dont se construisent les expériences de l'enseignement supérieur de ces étudiants a priori scolairement et socialement les plus éloignés de cet univers (Blöss et Erlich, 2000). Ces étudiants sont-ils préparés à des études supérieures ? Quelles expériences ont-ils de l'enseignement supérieur en comparaison des bacheliers généraux, dont c'est la poursuite logique de la trajectoire secondaire ? Ces expériences diffèrent-elles selon la filière dans laquelle ils entrent ?

Research paper thumbnail of Les classes préparatoires aux grandes écoles : sélectivité sociale et diversité territoriale

Regards croisés sur les expériences étudiantes, 2019

Les classes préparatoires, au même titre que les grandes écoles auxquelles elles préparent, occup... more Les classes préparatoires, au même titre que les grandes écoles auxquelles elles préparent, occupent une position particulière dans l’enseignement supérieur français : d’une part, parce que, distinctes du système universitaire, elles constituent une spécificité française sans équivalent dans les autres pays européens. D’autre part, parce que les étudiants de ces formations sont essentiellement recrutés dans les catégories sociales favorisées. Dès 1989 dans La Noblesse d’État, Pierre Bourdieu montrait le rôle joué par les grandes écoles, mais aussi les classes préparatoires et les concours auxquels elles préparent, dans la reproduction sociale et la consécration d’une élite. Cette clôture sociale, qui s’est maintenue en dépit de la démocratisation quantitative de l’enseignement supérieur, peut s’expliquer tant par l’évolution très modérée des effectifs des élèves recrutés dans ces filières, que par une information imparfaitement distribuée sur l’existence de ces formations ou encore par une forme d’autosélection des élèves issus de catégories sociales moins favorisées.

Research paper thumbnail of Des étudiants en ESPE moins satisfaits ?

Regards croisés sur les expériences étudiantes, 2019

Dans l'enseignement supérieur, les facteurs susceptibles d'influencer la satisfaction des étudian... more Dans l'enseignement supérieur, les facteurs susceptibles d'influencer la satisfaction des étudiants sont souvent complexes à appréhender. En effet, de nombreuses causes, souvent non-exclusives, peuvent affecter la satisfaction ou l'insatisfaction par rapport aux études (Benjamin et Hollings, 1995). Celle-ci peut, par exemple, dépendre des conditions de vie, du logement, de la restauration ou du transport, qui vont influencer le bien-être des étudiants au sein d'une vie de campus. Elle est aussi étroitement corrélée aux conditions d'études (Paivandi, 2016) : la qualité perçue des modes d'enseigne-ment, des moyens pédagogiques mis à disposition par l'Université ou les emplois du temps sont autant de facteurs susceptibles de favoriser l'intégration et la satisfaction des étudiants (Thomas et Galambos, 2004). Elle est également liée à la situation plus personnelle des étudiants et à certaines difficultés qu'ils ont pu rencontrer : la diffi-culté à s'intégrer dans des groupes de pairs (Benjamin et Hollings, 1997), le manque de ressources financières (Xiao et al., 2009), l'éloignement géographique ou le temps de transport notamment lorsque le campus est excentré (Dubet et Sembel, 1994), la nécessité de cumuler leurs études avec un emploi salarié (Béduwé et al., 2017) ou la maternité (Régnier-Loilier, 2016) peuvent conduire à une augmentation des contraintes dans l'activité étudiante. Elle peut enfin dépendre des parcours scolaires, universitaires ou même parfois professionnels, des choix d'orientations plus ou moins subis mais également de la réussite aux différents examens qui ont jalonné le parcours. Au total, cette large gamme de déterminants susceptibles d'influencer la satisfaction montre qu'il convient de ne pas résumer la satisfaction ou l'insatisfaction à un plaidoyer ou à une critique de l'étudiant par rapport à sa formation ou son établissement, mais d'analyser celle-ci en considérant la manière dont différents facteurs s'imbriquent les uns dans les autres. Ce chapitre se propose plus particulièrement de comparer la satisfaction des étudiants des Écoles supérieures du professorat et de l'éducation (ESPE) avec celle d'autres étu-diants de niveau master, inscrits dans différentes filières universitaires de l'enseignement supérieur 1. Les données de l'enquête Conditions de vie n'étant pas longitudinales, il ne s'agit pas d'étudier l'entrée dans le métier suivant une perspective de long terme, de la formation professionnelle aux premières années d'exercice (Broccolichi, Joigneaux et Mierzejewski, 2018), ni de mettre en lien la satisfaction quant à la formation et le vécu des premières expériences professionnelles (Périer 2014), mais d'essayer de mieux comprendre les déterminants de cette satisfaction étudiante en la comparant à celle d'autres étudiants de même niveau. 1 Compte tenu de la spécificité des formations de santé, celles-ci ne sont pas prises en compte dans les estimations portant sur les formations de niveau master en Université.

Research paper thumbnail of Les bons lycéens dans l’enseignement supérieur en France : réussite et difficultés d’une population scolairement triée

Regards croisés sur les expériences étudiantes, 2019

Depuis les constats faits par Bourdieu et Passeron (1964) d’une élimination massive des classes p... more Depuis les constats faits par Bourdieu et Passeron (1964) d’une élimination massive des classes populaires de l’enseignement supérieur, la recherche sur l’enseignement supérieur abandonne progressivement cette interprétation de la réussite dans l’enseignement supérieur massifié après l’explosion des effectifs étudiants dès le milieu des années 1990. Alors, les « nouveaux lycéens » dont l’expérience scolaire révèle une difficile appropriation du métier d’élève et des exigences intellectuelles associées, deviennent des « nouveaux étudiants » et font l’objet de plusieurs recherches dès le milieu des années 1990 et le début des années 2000. On cherche alors à expliquer l’échec de masse à l’Université par le constat d’une rupture importante entre les exigences académiques du secondaire et celles du supérieur, principalement de l’Université. En d’autres termes, l’entrée dans l’enseignement supérieur, où les
règles d’affiliation au métier d’élève (Perrenoud, 1994) laissent leur place à celles très différentes du métier d’étudiant. Ainsi les travaux de Coulon (2005) et ceux de Erlich (1998), sur les « nouveaux étudiants », vont s’atteler à invoquer des interprétations des difficultés des étudiants dans les premières années de leur parcours en termes d’affiliation au monde universitaire et à ses nouveaux usages.

Research paper thumbnail of Les étudiants étrangers, entre intégration et repli

Regards croisés sur les expériences étudiantes, 2019

La croissance du nombre des étudiants étrangers est devenue l'une des dimensions du développement... more La croissance du nombre des étudiants étrangers est devenue l'une des dimensions du développement de l'enseignement supérieur en France et plus généralement dans les pays de l'OCDE. Au niveau mondial, au cours des deux dernières décennies, le nombre de jeunes faisant des études supérieures (universitaires et non-universitaires) dans un pays étranger a été multiplié par 2,5 : ils étaient près d'un million en 1985, 2,5 millions en 2004 et plus de 4,6 millions en 2015 (avec un taux de croissance moyen annuel de 5 %). Plus de 80 % des étudiants étrangers dans le monde s'inscrivent dans l'un des établissements d'enseignement supérieur des pays de l'OCDE, et 67 % d'entre eux sont originaires des pays du « Sud » (OCDE, 2017). Les États-Unis, la Grande-Bretagne, l'Australie et la France sont respectivement les quatre premiers pays d'accueil des étudiants étrangers dans le monde.

Research paper thumbnail of Quelles expériences de discriminations dans l’enseignement supérieur ? Diversité migratoire et traitements institutionnels différenciés

Regards croisés sur les expériences étudiantes, 2019

Si depuis plus de vingt ans, plusieurs études ont permis de mieux connaître les caracté-ristiques... more Si depuis plus de vingt ans, plusieurs études ont permis de mieux connaître les caracté-ristiques et la situation des étudiants étrangers dans l'enseignement supérieur français, grâce notamment aux enquêtes Conditions de vie des étudiants de l'OVE, la place des étudiants originaires de parents immigrés reste en revanche moins bien connue, alors qu'elle a été intégrée dans les recherches sur l'enseignement primaire et secondaire depuis plusieurs années. Ces jeunes ont pourtant été partie prenante de la massification scolaire des années 1990 et ils ont représenté une composante essentielle de ceux que l'on qualifiait alors de « nouveaux lycéens », « nouveaux étudiants » ou « enfants de la démocratisation scolaire ». À n'en pas douter, l'édition 2016 de l'enquête Conditions de vie vient combler une lacune en permettant de repérer le statut et les origines migratoires des étudiants, c'est-à-dire à la fois leur nationalité et leur pays de naissance, mais aussi ceux de leurs parents pour pouvoir déterminer leur ascendance. Pour le droit et l'état civil, lorsque l'on est de nationalité française, l'origine migratoire ne compte pas, mais dans la vie sociale où en principe elle ne devrait pas compter, il en est autrement. L'existence des stigmatisations et des discriminations liées aux origines migratoires pour accéder à l'emploi, par exemple, est aujourd'hui un fait établi.
Ce chapitre vise à interroger les liens supposés entre les origines migratoires et les traitements différentiels à caractère discriminatoire dans l'enseignement supérieur. Il affiche un double objectif. Dans sa première partie, il s'attache à présenter la morphologie sociale et scolaire des étudiants étrangers et des descendants d'immigrés dans l'enseignement supérieur français en détaillant autant que possible le statut migratoire à partir de la nationalité française ou non et les origines géographiques en remontant aux parents. La deuxième partie est plus particulièrement dédiée à l'étude du sentiment d'injustice et de discrimination selon les origines migratoires. Elle est centrée sur la perception qu'ont les étudiants eux-mêmes des traitements différentiels et négatifs d'ordre institutionnel dont ils feraient l'objet dans le cadre de leurs études. Ces questions font aujourd'hui débat, cela d'autant plus que, dans l'enquête conditions de vie des étudiants 2016, les étudiants ont été interrogés quelques mois seulement après la fin de la terrible année 2015 marquée par une série de tueries et d'attentats qui ont eu pour effets secondaires de renforcer la parole et les actes racistes dans la société française (CNCDH, 2016).

Research paper thumbnail of Dépasser les mécanismes d’autosélection et s’affranchir des normes de genre dans l’enseignement supérieur : le coût d’une transgression

Regards croisés sur les expériences étudiantes, 2019

Malgré un accès généralisé, massif, prolongé et une meilleure réussite des femmes dans la sphère ... more Malgré un accès généralisé, massif, prolongé et une meilleure réussite des femmes dans la sphère éducative, les cursus dans l’enseignement supérieur restent des espaces ségrégués en fonction du sexe. Seuls un quart des étudiant·e·s sont inscrit·e·s dans une filière « mixte », c’est-à-dire composée entre 40 % et 60 % de l’un et l’autre des sexes. La féminisation de l’enseignement supérieur (les femmes représentent 58 % des étudiant·e·s à l’Université en 2016 n’a donc pas débouché sur une véritable mixité des cursus, les étudiant·e·s se concentrant dans un nombre limité de segments et de disciplines de l’enseignement supérieur dominés par leur genre. Les femmes s’orientent massivement vers des filières plus ouvertes, moins sélectives, moins prestigieuses et moins « rentables » sur le marché du travail. Elles sont ainsi sous-représentées dans les grandes écoles, dans les formations sélectives (DUT, écoles d’ingénieurs, CPGE scientifiques) de même que dans les filières professionnelles industrielles et, à l’Université, dans celles de sciences, sciences de l’ingénieur (en particulier dans les disciplines « électrique, électronique », « télécom et réseaux » et « mécanique, énergétique ») ; elles sont a contrario largement majoritaires en langues, lettres-arts, sciences humaines et sociales, droit-sciences politiques, sciences de la nature, médecine, pharmacie ; et à parité en économie-gestion, biologie, histoire-géographie et odontologie.

Research paper thumbnail of De quoi parlons-nous lorsque l’on s’intéresse au mal-être des étudiants ?

Regards croisés sur les expériences étudiantes, 2019

Pourquoi la santé mentale des étudiants représente-t-elle un enjeu social important ? Nous all... more Pourquoi la santé mentale des étudiants représente-t-elle un enjeu social important ? Nous allons présenter en introduction quelques points synthétiques pour l’illustrer. Premièrement, la population étudiante représente plus de 2,6 millions de personnes en France (Algava et al., 2017 ; Insee, 2016). De plus, cette tranche d’âge correspond à l’émergence de près des trois quarts des troubles mentaux qui sont diagnostiqués au cours de la vie (Kessler et al., 2015 ; Rajji, Ismail, Mulsant, 2009). On peut ainsi estimer qu’un étudiant sur quatre en France a présenté au moins un trouble mental au cours de l’année écoulée (Verger et al., 2010 ; Auerbach et al., 2017). Deuxièmement, la présence d’un trouble mental a souvent un retentissement important sur le travail, les relations sociales et avec les proches ainsi que sur l’adaptation à l’environnement universitaire (Verger et al., 2010). Il a été estimé qu’environ deux tiers des étudiants présentant des troubles mentaux ne reçoivent pas de prise en charge médicale et/ou psychothérapeutique. Or, un trouble mental non pris en charge conduit à une baisse significative des résultats universitaires ainsi qu’à l’abandon prématuré des études (Hysenbegasi, Hass, Rowland, 2005 ; Van Ameringen, Mancini, Farvolden, 2003). En conséquence, la présence d’un trouble mental avec un échec scolaire associé peut conduire à un infléchissement des trajectoires et à des difficultés d’intégration sociale sur le long terme telles que l’obtention ou le maintien d’un emploi (Reavley, Jorm, 2010 ; Patel et al., 2007). Troisièmement, au-delà de l’impact personnel, les troubles mentaux représentent un poids important (près de 20 %) dans l’ensemble des années de vie vécues avec une maladie (Patel et al., 2016). Les troubles mentaux représentent un coût économique non négligeable qui est évalué à 19,3 milliards d’euros en 2015 en France pour les simples coûts directs (hospitalisations, remboursement de soins médicaux et consommation de médicaments) (Cnam, 2017). Les coûts indirects, plus
difficiles à évaluer, tels que les conséquences économiques qu’engendrent les troubles mentaux sur les proches, l’entourage, le travail ou encore en termes de perte de chances socio-économiques, doivent également s’ajouter à ces 19,3 milliards (Shaughnessy et al., 2017). Il a pourtant été montré que des programmes de prévention ou d’intervention précoce pourraient diminuer les coûts à long terme : par exemple un euro investi dans un plan de prévention de la dépression au travail permettrait d’économiser cinq euros à long terme (Knapp, McDaid, Parsonage, 2011).

Research paper thumbnail of Perceptions différenciées des étudiants face à la précarité économique

Regards croisés sur les expériences étudiantes, 2019

La précarité économique rencontrée par un nombre important d’étudiants fait régulièrement l’actua... more La précarité économique rencontrée par un nombre important d’étudiants fait régulièrement l’actualité. De nombreux travaux issus notamment des enquêtes Conditions de vie de l’Observatoire national de la vie étudiante (Grignon, 2003 ; Giret et al., 2016) ou d’enquêtes menées localement (Landrier et al., 2016) mettent en évidence la complexité du sujet et les incidences sur les parcours de formation. La grande précarité de certains étudiants se traduit par des renoncements aux soins, ou à l’alimentation, un travail contraint, mais aussi des expériences de sans domiciliation (Cordazzo et Sembel, 2016). Elle s’inscrit dans des parcours de vie (Galland, 2012) et interroge les solidarités familiales (Le Pape et Tenret, 2016).

Research paper thumbnail of Les conditions de logement des étudiants dans la diversité des territoires. Le poids des inégalités sociales

Regards croisés sur les expériences étudiantes, 2019

Massivement locataires de petits logements du parc privé des principales villes du pays, les étud... more Massivement locataires de petits logements du parc privé des principales villes du pays, les étudiants figurent parmi les populations les plus touchées par la cherté des loyers. Ils sont donc fortement demandeurs des aides personnelles destinées à les solvabiliser. Cette situation suscite de nombreux débats. Un rapport de l'Inspection générale des affaires sociales (Igas, 2012) estimait que les 700 000 allocataires étudiants (près de 12 % de l'ensemble des allocataires du pays) représentaient une dépense publique de plus de 1,3 milliard d'euros par an, alors que moins d'un tiers de ces étudiants étaient boursiers et que 65 % restaient fiscalement à la charge de leur famille. Le rapport concluait au caractère « inéquitable » et à « l'inefficience » (Igas, 2012, p. 7) d'une aide sociale plus favorable aux étudiants intégralement soutenus par leurs parents qu'à ceux contraints de travailler pour financer leurs études.

Research paper thumbnail of Salariat étudiant et rapport aux études dans les premiers cycles universitaires

Regards croisés sur les expériences étudiantes, 2019

Combien d’étudiants sont aussi des travailleurs ? Avec ou sans contrat de travail, le nombre d’ét... more Combien d’étudiants sont aussi des travailleurs ? Avec ou sans contrat de travail, le nombre d’étudiants salariés fait régulièrement débat. Nous les définissons ici très largement comme l’ensemble de ceux qui déclarent une activité rémunérée parallèle à leurs études. Il est cependant vain de chercher à produire une mesure unique pour appréhender un phénomène aussi saisonnier et hétérogène. En outre, les raisons du travail à côté des études sont multiples et peuvent changer au fil des parcours étudiants (Pinto, 2010). L’enquête Conditions de vie permet ainsi d’éclairer ce fait social en se concentrant dans ce chapitre sur les étudiants en formation initiale des premiers cycles universitaires.

Research paper thumbnail of Être financé par sa famille ou pas : modalités, variations et conséquences de l’aide familiale apportée aux étudiants

Regards croisés sur les expériences étudiantes, 2019

L’émancipation de la famille constitue l’une des dimensions du passage à l’âge adulte. Devenir au... more L’émancipation de la famille constitue l’une des dimensions du passage à l’âge adulte. Devenir autonome reste pourtant largement conditionné par le soutien des parents, et notamment par les aides qu’ils sont en mesure de lui apporter. Ces aides sont multiples car elles s’adaptent aux besoins du jeune et à sa situation spécifique, qui évolue parfois très vite pendant cette période de transition vers la vie adulte. Selon qu’il soit étudiant, en recherche d’emploi ou salarié, les modalités du soutien familial sont très différentes. Depuis les années 1990, les recherches montrent, par exemple, que les étudiants, en lien avec leur statut, restent de façon stable et persistante les principaux bénéficiaires de l’aide parentale (pour une synthèse des principaux résultats, voir notamment Le Pape, Portela et Tenret, 2016). Les trois quarts des ressources des étudiants sans activité, décohabitants ou non, proviendraient ainsi de leurs parents.

Research paper thumbnail of Les revenus étudiants : un poids toujours important de l’aide familiale mais une progression du travail salarié

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Comme le soulignait déjà Louis Gruel, dans un chapitre sur l'économie étudiante d'un ouvrage de s... more Comme le soulignait déjà Louis Gruel, dans un chapitre sur l'économie étudiante d'un ouvrage de synthèse sur les étudiants en France (Gruel, 2009), le statut économique des étudiants n'est pas assimilable à celui des ménages ordinaires. Il y a en réalité « deux budgets de la vie étudiante », celui que Louis Gruel appelle « le budget propre de l'étudiant », constitué des ressources monétaires directes qu'il reçoit et des dépenses qu'il effectue lui-même, et le « budget d'entretien de la vie étudiante » constitué d'aides en nature et de dépenses effectuées pour le compte de l'étudiant par sa famille. La prise en compte de ces deux budgets, dont un peut être en partie invisible dans la statistique publique ordinaire, est évidemment capitale pour avoir une appréhension juste du budget étudiant. Elle est importante notamment pour les politiques publiques en direction des étudiants qui à travers les bourses et les aides au logement, visent à compenser des inégalités de revenu préjudiciables à la réussite des études, ou simplement à favoriser un développement harmonieux de cette période d'études supérieures qui combine le maintien fréquent d'une dépendance économique à l'égard des parents et des premières formes d'autonomie (notamment résidentielle). C'est précisément ce que permet, depuis plusieurs éditions, l'enquête sur les conditions de vie des étudiants de l'OVE qui recense de manière détaillée les différents types de ressources, directes, indirectes, monétaires, en nature, dont bénéficient les étudiants.

Research paper thumbnail of Le non-recours à la mobilité internationale d’études : hétérogénéité des publics et diversité des obstacles

Regards croisés sur les expériences étudiantes, 2019

Les séjours à l’étranger dans le cadre des études apportent de nombreux bénéfices aux étudiants, ... more Les séjours à l’étranger dans le cadre des études apportent de nombreux bénéfices aux étudiants, notamment en accroissant les compétences linguistiques et culturelles. Ils offrent également aux apprenants les moyens de gagner en maturité ou en autonomie (Erlich, 2012). Avoir réalisé une mobilité serait vu comme un signal positif sur le marché concurrentiel de l’éducation ou du travail (Ballatore et Blöss, 2008). Néanmoins, seule une minorité d’étudiants français réalise un séjour à l’étranger dans le cadre de ses études (période d’études, de stage, séjours linguistiques, activités de recherche, école d’été). Il convient alors de comprendre pourquoi certains étudiants n’envisagent pas de participer à une mobilité internationale au cours de leurs études alors qu’ils pourraient en bénéficier. Notre analyse portera essentiellement sur cette population de non mobiles qui n’envisagent pas de mobilité d’études (encadré 1), les non-mobiles qui déclarent le prévoir plus tard dans leur cursus pouvant être considérés comme de potentiels « futurs mobiles ».

Research paper thumbnail of Du sentiment d’intégration à sa réalisation et à sa réalité chez les étudiants de l’université

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L'enquête Conditions de vie 2016 montre que le sentiment d'intégration des étudiants inscrits à l... more L'enquête Conditions de vie 2016 montre que le sentiment d'intégration des étudiants inscrits à l'Université n'est pas aussi faible que nous aurions pu l'imaginer, lorsqu'on le rapporte au degré d'encadrement, réputé supérieur dans d'autres filières telles que les grandes écoles. Le sentiment et la réalité de l'intégration (à l'établissement et au groupe de pairs) semblent ne pas relever seulement du seul lien social ou académique institutionnalisé. Le sentiment d'intégration se nourrit d'une pluralité d'ingrédients qui se déploient sur des plans aussi variés que la perception par l'étudiant de son parcours d'études ou la plus ou moins grande satisfaction retirée quotidiennement du temps passé sur le campus. Ensemble, toutes ces dimensions participent de la « motivation » et, de manière indirecte mais supplémentaire (Berthaud, 2017), des conditions de la réussite.

Research paper thumbnail of Intégration sociale et académique des étudiants au début de leur parcours dans le supérieur

Regards croisés sur les expériences étudiantes, 2019

L’objet de ce chapitre, qui s’appuie sur les données de l’enquête Conditions de vie des étudiants... more L’objet de ce chapitre, qui s’appuie sur les données de l’enquête Conditions de vie des étudiants 2016 (CdV) de l’OVE, est de s’interroger sur la manière dont les étudiants inscrits en première et deuxième année de l’enseignement supérieur vivent et apprécient leur environnement d’études. Il s’agit d’examiner l’intégration sociale et académique en tenant compte du point de vue étudiant sur les conditions pédagogiques, sociales et matérielles de leur lieu d’études. Les données de l’enquête CdV 2016 montrent que le jugement des étudiants sur le contexte général de leur formation, la qualité de la pédagogie et l’accompagnement offerts par leur formation tendent à considérablement varier en fonction de la filière d’études et de certaines caractéristiques individuelles. Les analyses permettent de montrer l’existence effective d’un « effet filière » et/ou d’un « effet établissement » dans la mesure où les étudiants inscrits dans le secteur sélectif éprouvent une expérience intégratrice fortement différente de ceux qui se trouvent dans les filières universitaires.

Research paper thumbnail of L’utilisation des MOOC par les étudiants : une pratique encore marginale mais distincte selon les caractéristiques sociales et formatives

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En France, les Massive Open Online Courses (MOOC) connaissent un essor important depuis la créati... more En France, les Massive Open Online Courses (MOOC) connaissent un essor important depuis la création en 2013 d’une plateforme nationale publique de MOOC France université numérique (FUN), initiative unique en son genre à travers le monde. Ces cours en ligne sont accessibles à tous sur Internet gratuitement depuis des plateformes. Ils rassemblent de grandes cohortes d’individus pendant une durée déterminée (quelques semaines). Les inscrits accèdent à des contenus produits par des institutions de formation, présentés pour la plupart au format vidéo, et peuvent échanger avec les autres à l’aide des forums. Des quiz et des évaluations permettent d’obtenir une attestation de réussite à l’issue de leur suivi.

Research paper thumbnail of Les temps étudiants, des articulations variées selon les disciplines pour des socialisations distinctes

Regards croisés sur les expériences étudiantes, 2019

Les étudiants appartiennent à une catégorie de population ayant plusieurs caractéristiques commun... more Les étudiants appartiennent à une catégorie de population ayant plusieurs caractéristiques communes. Il s’agit d’individus inscrits dans une temporalité particulière, celle de la jeunesse, marquée, au sein de notre population étudiée, par une activité significative qui est celle de la formation. Le temps de la jeunesse est une construction sociale qui prend ancrage pour eux dans la prolongation de la scolarité et elle est définie par Olivier Galland comme une période de socialisation particulière préparant à l’exercice des rôles adultes (Galland, 2012). Être étudiant c’est aussi, dans cette période particulière, articuler divers temps d’activités entre eux, effectuer des choix sur les volumes horaires à y consacrer, tout en étant soumis à des obligations de nature et de degré variés. En clair, si les étudiants observés ici ont pour point commun d’étudier au sein de formations diplômantes, tous ne jonglent pas avec les mêmes contraintes et les mêmes ressources, qu’elles soient liées à la formation, à la position sociale de l’individu, ou aux dispositions plus ou moins acquises antérieurement (dans la scolarité ou ailleurs). L’organisation des temps renvoie donc à la fois à des contraintes institutionnelles (organisation pédagogique de la formation…) et à des arbitrages individuels. Dans cette perspective, à travers la question des rythmes, l’enquête Conditions de vie 2016 permet de faire ressortir, d’une part, les différences marquées concernant les rythmes de formation proposés par les établissements qui composent l’enseignement supérieur en France et, d’autre part, l’influence de certaines caractéristiques sociodémographiques et d’études sur la gestion par les étudiants de leur emploi du temps.

Research paper thumbnail of Mobilité des étudiants et territoires : des disparités maintenues entre grandes régions

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Au lendemain des réformes territoriales de 2016, cet article étudie la mobilité interrégionale de... more Au lendemain des réformes territoriales de 2016, cet article étudie la mobilité interrégionale des étudiants après le baccalauréat. L’objectif est de montrer si des disparités régionales existent et affectent l’égalité des chances des futurs étudiants.

Research paper thumbnail of Aspirer à la poursuite d’études : une caractéristique des licences générales et professionnelles ?

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Depuis la mise en oeuvre du LMD, le niveau licence est le premier niveau de sortie du supérieur. ... more Depuis la mise en oeuvre du LMD, le niveau licence est le premier niveau de sortie du supérieur. Les sorties au niveau bac + 2 sont donc amenées à s’estomper, les jeunes poursuivant leurs études une année de plus au moins. Par exemple, parmi les détenteurs de DUT, neuf étudiants sur dix poursuivent déjà leurs études, dont un tiers en licence professionnelle (source MESRI, enquête IUT 2014). Cette licence est destinée a priori au marché du travail, alors que les filières dites générales invitent à la poursuite d’études. Pour autant, les effectifs de sortants de filière générale et professionnelle diplômés de licence sont comparables, même si les effectifs de sortants de licences professionnelles ne cessent de croître, après avoir plus que doublé au cours des dix premières années du xxie siècle (Ménard, 2014). En effet, pour une génération de sortants du système éducatif, tout de même un étudiant sur dix de licence générale quitte le système éducatif à ce niveau de diplôme. Comme les effectifs de licence générale demeurent très supérieurs à ceux de licence professionnelle, ces 10 % représentent un effectif proche du nombre de diplômés de la filière professionnelle qui quittent le système éducatif après l’obtention de leur diplôme. Toutefois, déjà près de deux étudiants sur dix diplômés de licence professionnelle poursuivent leurs études dans certaines Universités (Gautié, 2016). La poursuite d’études n’est donc pas l’apanage des filières générales et la sortie au niveau licence celui des filières professionnelles.

Research paper thumbnail of Les bacheliers technologiques et professionnels dans l’enseignement supérieur

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Le développement des scolarités, au cours des années 1980, a profondément recomposé le paysage de... more Le développement des scolarités, au cours des années 1980, a profondément recomposé le paysage de l'enseignement secondaire, amenant une diversification des diplômes du baccalauréat et une transformation des profils des bacheliers (Duru-Bellat et Kieffer, 2008). Ce mouvement au long court poursuit ses effets sur une période plus récente : entre 2010 et 2016, la proportion de bacheliers dans une génération est passée de 65 % à 79 % (MENESR-DEPP, 2017). Si les bacheliers généraux restent majoritaires (51 % en 2016), les bacheliers professionnels ont connu une relative progression sur la période (29 % en 2016 contre 22 % en 2010), au détriment des bacheliers techno-logiques (25,1 % en 2010 et 19,9 % en 2016). Ces deux derniers baccalauréats ont été, à deux périodes distinctes, la voie d'accès privilégiée des classes populaires à l'enseignement secondaire. Si, en ce sens, il s'est agi d'une démocratisation, celle-ci peut être qualifiée de ségrégative (Merle, 2000) dans la mesure où l'augmentation de l'accès au baccalauréat s'est faite par un accès différencié à des séries inégalement rentables dans la poursuite des études. La progression de la réussite des bacheliers technologiques et professionnels s'est logiquement traduite par un accroissement des entrées dans l'enseignement supérieur, l'accès au baccalauréat ouvrant, pour cette nouvelle population, la légitimité d'une poursuite des études et permettant le report de l'entrée sur le marché du travail. Ces nouveaux étudiants (Erlich, 1998) présentent des profils sociaux spécifiques, avec notamment une nette représentation des étudiants issus des catégories sociales populaires (en 2016, 34,4 % des bacheliers professionnels et 19,5 % des bacheliers technologiques sont d'origine sociale ouvrière contre 11,2 % des bacheliers généraux (MENESR-DEPP, 2017) et des bacheliers de « première géné-ration » (Caille et Le maire, 2009). Dans le cadre de cette contribution, nous nous intéresserons tout d'abord aux orien-tations différenciées dans les filières de l'enseignement supérieur et aux profils socio-académiques des étudiants selon le type de baccalauréat possédé. Dans un second temps, nous nous centrerons sur les conditions d'études et la manière dont se construisent les expériences de l'enseignement supérieur de ces étudiants a priori scolairement et socialement les plus éloignés de cet univers (Blöss et Erlich, 2000). Ces étudiants sont-ils préparés à des études supérieures ? Quelles expériences ont-ils de l'enseignement supérieur en comparaison des bacheliers généraux, dont c'est la poursuite logique de la trajectoire secondaire ? Ces expériences diffèrent-elles selon la filière dans laquelle ils entrent ?

Research paper thumbnail of Les classes préparatoires aux grandes écoles : sélectivité sociale et diversité territoriale

Regards croisés sur les expériences étudiantes, 2019

Les classes préparatoires, au même titre que les grandes écoles auxquelles elles préparent, occup... more Les classes préparatoires, au même titre que les grandes écoles auxquelles elles préparent, occupent une position particulière dans l’enseignement supérieur français : d’une part, parce que, distinctes du système universitaire, elles constituent une spécificité française sans équivalent dans les autres pays européens. D’autre part, parce que les étudiants de ces formations sont essentiellement recrutés dans les catégories sociales favorisées. Dès 1989 dans La Noblesse d’État, Pierre Bourdieu montrait le rôle joué par les grandes écoles, mais aussi les classes préparatoires et les concours auxquels elles préparent, dans la reproduction sociale et la consécration d’une élite. Cette clôture sociale, qui s’est maintenue en dépit de la démocratisation quantitative de l’enseignement supérieur, peut s’expliquer tant par l’évolution très modérée des effectifs des élèves recrutés dans ces filières, que par une information imparfaitement distribuée sur l’existence de ces formations ou encore par une forme d’autosélection des élèves issus de catégories sociales moins favorisées.

Research paper thumbnail of Des étudiants en ESPE moins satisfaits ?

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Dans l'enseignement supérieur, les facteurs susceptibles d'influencer la satisfaction des étudian... more Dans l'enseignement supérieur, les facteurs susceptibles d'influencer la satisfaction des étudiants sont souvent complexes à appréhender. En effet, de nombreuses causes, souvent non-exclusives, peuvent affecter la satisfaction ou l'insatisfaction par rapport aux études (Benjamin et Hollings, 1995). Celle-ci peut, par exemple, dépendre des conditions de vie, du logement, de la restauration ou du transport, qui vont influencer le bien-être des étudiants au sein d'une vie de campus. Elle est aussi étroitement corrélée aux conditions d'études (Paivandi, 2016) : la qualité perçue des modes d'enseigne-ment, des moyens pédagogiques mis à disposition par l'Université ou les emplois du temps sont autant de facteurs susceptibles de favoriser l'intégration et la satisfaction des étudiants (Thomas et Galambos, 2004). Elle est également liée à la situation plus personnelle des étudiants et à certaines difficultés qu'ils ont pu rencontrer : la diffi-culté à s'intégrer dans des groupes de pairs (Benjamin et Hollings, 1997), le manque de ressources financières (Xiao et al., 2009), l'éloignement géographique ou le temps de transport notamment lorsque le campus est excentré (Dubet et Sembel, 1994), la nécessité de cumuler leurs études avec un emploi salarié (Béduwé et al., 2017) ou la maternité (Régnier-Loilier, 2016) peuvent conduire à une augmentation des contraintes dans l'activité étudiante. Elle peut enfin dépendre des parcours scolaires, universitaires ou même parfois professionnels, des choix d'orientations plus ou moins subis mais également de la réussite aux différents examens qui ont jalonné le parcours. Au total, cette large gamme de déterminants susceptibles d'influencer la satisfaction montre qu'il convient de ne pas résumer la satisfaction ou l'insatisfaction à un plaidoyer ou à une critique de l'étudiant par rapport à sa formation ou son établissement, mais d'analyser celle-ci en considérant la manière dont différents facteurs s'imbriquent les uns dans les autres. Ce chapitre se propose plus particulièrement de comparer la satisfaction des étudiants des Écoles supérieures du professorat et de l'éducation (ESPE) avec celle d'autres étu-diants de niveau master, inscrits dans différentes filières universitaires de l'enseignement supérieur 1. Les données de l'enquête Conditions de vie n'étant pas longitudinales, il ne s'agit pas d'étudier l'entrée dans le métier suivant une perspective de long terme, de la formation professionnelle aux premières années d'exercice (Broccolichi, Joigneaux et Mierzejewski, 2018), ni de mettre en lien la satisfaction quant à la formation et le vécu des premières expériences professionnelles (Périer 2014), mais d'essayer de mieux comprendre les déterminants de cette satisfaction étudiante en la comparant à celle d'autres étudiants de même niveau. 1 Compte tenu de la spécificité des formations de santé, celles-ci ne sont pas prises en compte dans les estimations portant sur les formations de niveau master en Université.

Research paper thumbnail of Les bons lycéens dans l’enseignement supérieur en France : réussite et difficultés d’une population scolairement triée

Regards croisés sur les expériences étudiantes, 2019

Depuis les constats faits par Bourdieu et Passeron (1964) d’une élimination massive des classes p... more Depuis les constats faits par Bourdieu et Passeron (1964) d’une élimination massive des classes populaires de l’enseignement supérieur, la recherche sur l’enseignement supérieur abandonne progressivement cette interprétation de la réussite dans l’enseignement supérieur massifié après l’explosion des effectifs étudiants dès le milieu des années 1990. Alors, les « nouveaux lycéens » dont l’expérience scolaire révèle une difficile appropriation du métier d’élève et des exigences intellectuelles associées, deviennent des « nouveaux étudiants » et font l’objet de plusieurs recherches dès le milieu des années 1990 et le début des années 2000. On cherche alors à expliquer l’échec de masse à l’Université par le constat d’une rupture importante entre les exigences académiques du secondaire et celles du supérieur, principalement de l’Université. En d’autres termes, l’entrée dans l’enseignement supérieur, où les
règles d’affiliation au métier d’élève (Perrenoud, 1994) laissent leur place à celles très différentes du métier d’étudiant. Ainsi les travaux de Coulon (2005) et ceux de Erlich (1998), sur les « nouveaux étudiants », vont s’atteler à invoquer des interprétations des difficultés des étudiants dans les premières années de leur parcours en termes d’affiliation au monde universitaire et à ses nouveaux usages.

Research paper thumbnail of Les étudiants étrangers, entre intégration et repli

Regards croisés sur les expériences étudiantes, 2019

La croissance du nombre des étudiants étrangers est devenue l'une des dimensions du développement... more La croissance du nombre des étudiants étrangers est devenue l'une des dimensions du développement de l'enseignement supérieur en France et plus généralement dans les pays de l'OCDE. Au niveau mondial, au cours des deux dernières décennies, le nombre de jeunes faisant des études supérieures (universitaires et non-universitaires) dans un pays étranger a été multiplié par 2,5 : ils étaient près d'un million en 1985, 2,5 millions en 2004 et plus de 4,6 millions en 2015 (avec un taux de croissance moyen annuel de 5 %). Plus de 80 % des étudiants étrangers dans le monde s'inscrivent dans l'un des établissements d'enseignement supérieur des pays de l'OCDE, et 67 % d'entre eux sont originaires des pays du « Sud » (OCDE, 2017). Les États-Unis, la Grande-Bretagne, l'Australie et la France sont respectivement les quatre premiers pays d'accueil des étudiants étrangers dans le monde.

Research paper thumbnail of Quelles expériences de discriminations dans l’enseignement supérieur ? Diversité migratoire et traitements institutionnels différenciés

Regards croisés sur les expériences étudiantes, 2019

Si depuis plus de vingt ans, plusieurs études ont permis de mieux connaître les caracté-ristiques... more Si depuis plus de vingt ans, plusieurs études ont permis de mieux connaître les caracté-ristiques et la situation des étudiants étrangers dans l'enseignement supérieur français, grâce notamment aux enquêtes Conditions de vie des étudiants de l'OVE, la place des étudiants originaires de parents immigrés reste en revanche moins bien connue, alors qu'elle a été intégrée dans les recherches sur l'enseignement primaire et secondaire depuis plusieurs années. Ces jeunes ont pourtant été partie prenante de la massification scolaire des années 1990 et ils ont représenté une composante essentielle de ceux que l'on qualifiait alors de « nouveaux lycéens », « nouveaux étudiants » ou « enfants de la démocratisation scolaire ». À n'en pas douter, l'édition 2016 de l'enquête Conditions de vie vient combler une lacune en permettant de repérer le statut et les origines migratoires des étudiants, c'est-à-dire à la fois leur nationalité et leur pays de naissance, mais aussi ceux de leurs parents pour pouvoir déterminer leur ascendance. Pour le droit et l'état civil, lorsque l'on est de nationalité française, l'origine migratoire ne compte pas, mais dans la vie sociale où en principe elle ne devrait pas compter, il en est autrement. L'existence des stigmatisations et des discriminations liées aux origines migratoires pour accéder à l'emploi, par exemple, est aujourd'hui un fait établi.
Ce chapitre vise à interroger les liens supposés entre les origines migratoires et les traitements différentiels à caractère discriminatoire dans l'enseignement supérieur. Il affiche un double objectif. Dans sa première partie, il s'attache à présenter la morphologie sociale et scolaire des étudiants étrangers et des descendants d'immigrés dans l'enseignement supérieur français en détaillant autant que possible le statut migratoire à partir de la nationalité française ou non et les origines géographiques en remontant aux parents. La deuxième partie est plus particulièrement dédiée à l'étude du sentiment d'injustice et de discrimination selon les origines migratoires. Elle est centrée sur la perception qu'ont les étudiants eux-mêmes des traitements différentiels et négatifs d'ordre institutionnel dont ils feraient l'objet dans le cadre de leurs études. Ces questions font aujourd'hui débat, cela d'autant plus que, dans l'enquête conditions de vie des étudiants 2016, les étudiants ont été interrogés quelques mois seulement après la fin de la terrible année 2015 marquée par une série de tueries et d'attentats qui ont eu pour effets secondaires de renforcer la parole et les actes racistes dans la société française (CNCDH, 2016).

Research paper thumbnail of Dépasser les mécanismes d’autosélection et s’affranchir des normes de genre dans l’enseignement supérieur : le coût d’une transgression

Regards croisés sur les expériences étudiantes, 2019

Malgré un accès généralisé, massif, prolongé et une meilleure réussite des femmes dans la sphère ... more Malgré un accès généralisé, massif, prolongé et une meilleure réussite des femmes dans la sphère éducative, les cursus dans l’enseignement supérieur restent des espaces ségrégués en fonction du sexe. Seuls un quart des étudiant·e·s sont inscrit·e·s dans une filière « mixte », c’est-à-dire composée entre 40 % et 60 % de l’un et l’autre des sexes. La féminisation de l’enseignement supérieur (les femmes représentent 58 % des étudiant·e·s à l’Université en 2016 n’a donc pas débouché sur une véritable mixité des cursus, les étudiant·e·s se concentrant dans un nombre limité de segments et de disciplines de l’enseignement supérieur dominés par leur genre. Les femmes s’orientent massivement vers des filières plus ouvertes, moins sélectives, moins prestigieuses et moins « rentables » sur le marché du travail. Elles sont ainsi sous-représentées dans les grandes écoles, dans les formations sélectives (DUT, écoles d’ingénieurs, CPGE scientifiques) de même que dans les filières professionnelles industrielles et, à l’Université, dans celles de sciences, sciences de l’ingénieur (en particulier dans les disciplines « électrique, électronique », « télécom et réseaux » et « mécanique, énergétique ») ; elles sont a contrario largement majoritaires en langues, lettres-arts, sciences humaines et sociales, droit-sciences politiques, sciences de la nature, médecine, pharmacie ; et à parité en économie-gestion, biologie, histoire-géographie et odontologie.