Shoichiro IWAKIRI - Academia.edu (original) (raw)
Papers by Shoichiro IWAKIRI
Né en 1951 à Saitama, préfecture voisine de Tokyo, Kiwao Nomura a fait des études de littérature ... more Né en 1951 à Saitama, préfecture voisine de Tokyo, Kiwao Nomura a fait des études de littérature japonaise à l’Université Waseda de Tokyo (licence) et des études de littérature française à l’Université Meiji de Tokyo (maîtrise et doctorat) où il s’est consacré aux études rimbaldiennes. Depuis plus de vingt-cinq ans, il est l’un des principaux poètes japonais contemporains, lauréat de presque tous les prix importants de poésie japonaise. Ses poèmes sont traduits en plusieurs langues. Incorpora..
AmeriQuests, Mar 11, 2017
Kunio TSUKAMOTO (1920-2005), l'une des figures les plus importantes dans l'histoire du tanka mode... more Kunio TSUKAMOTO (1920-2005), l'une des figures les plus importantes dans l'histoire du tanka moderne et contemporain, opéra un changement profond et radical dans la notion et la pratique du genre, tout en choisissant le thème du mal comme terrain de prédilection dans sa création littéraire. Baudelaire constitue un anneau de ce qu'il appelle « la chaîne du mal » d'écrivains occidentaux, et il ne cessa de manifester son admiration pour le poète du mal en plusieurs endroits dans ses écrits en prose. Cela nous ferait penser que la notion baudelairienne du mal ait aussi fonctionné dans l'économie de sa poésie, alors que, en réalité, la référence explicite à Baudelaire est assez rare dans ses ouvrages de tanka. Quelle relation spirituelle et poétique Kunio noua-t-il avec la poésie du mal de Baudelaire ? Nous tenterons de définir ce que Kunio entend par mal, afin de voir plus clairement la part réelle de l'héritage de Baudelaire sur son oeuvre. Le tanka visionnaire Depuis le septième siècle, la forme poétique régulière appelée tanka ou waka 1 occupe une place centrale et noble dans la poésie japonaise. Il y a à peu près cent ans, il connut une grande réforme et prit pour principe esthétique la notion de 'shasei' qui signifie l'objectivité du croquis sur le vif d'après nature. Or, cette objectivité, qui consiste en la notation d'instants poétiques et singuliers saisis dans la vie quotidienne, requiert, par définition, l'identité du « je » du poème avec le « je » du poète, ce qui ne permet pas au tanka d'être d'une conception fictive. C'est contre cette poétique que se révolta Kunio Tsukamoto avec ses tanka avant-gardistes qu'il commença à faire connaître au public japonais après la deuxième guerre mondiale. Il publia son premier recueil intitulé Roman de l'immersion funéraire en 1951 2 , qui porte en épigraphe la citation de phrases de Rimbaud tirées de « Adieu » d'Une saison en enfer. C'était une citation en français, accompagnée de la traduction japonaise. « J'ai créé toutes les fêtes, tous les triomphes, tous les drames. J'ai essayé d'inventer de nouvelles fleurs, de nouveaux astres, de nouvelles chairs, de nouvelles langues. » Pour la traduction japonaise, Kunio se servit de celle de Hidéo Kobayashi, grand critique littéraire japonais et traducteur de Rimbaud. En la citant, il apporta une modification apparemment minime, mais en fait très significative. Pour désigner la première personne du singulier en français, Kunio choisit le pronom « watashi » au lieu du « oré » 3 qu'avait choisi Kobayashi, ce qui a pour effet d'investir le « je » du poème d'un caractère plus raisonnable qu'émotif et éclaté. Et c'est sous l'égide de Rimbaud, non du Rimbaud de Kobayashi qui assumait une certaine brutalité, mais d'un Rimbaud rendu plus conscient, que Kunio déclara la nécessité de l'invention d'un nouveau langage poétique dont la réalisation serait sa quête poétique. Dans la postface du recueil, Kunio tentait de justifier la méthode qu'il prétendait avoir inventée et appliquée à la création de ses poèmes. En relatant de façon métaphorique son projet de faire renaître le tanka conçu avec son ami Kazushi Sugihara, mort depuis quelques années, il le comparait à la construction d'un palais. Lui et moi, nous avions autrefois dessiné le premier plan d'un palais qui aurait des fenêtres splendidement claires et des lignes fraîches. […] Aucune glace dans chaque chambre ne serait ternie ni souillée de lyrisme, et tous les escaliers auraient des marches au nombre juste de trente-et-un 4 ; chaque étage serait bien revenu de l'ivresse métrique et les lampes sur les murs brilleraient de la lumière
Né en 1951 à Saitama, préfecture voisine de Tokyo, Kiwao Nomura a fait des études de littérature ... more Né en 1951 à Saitama, préfecture voisine de Tokyo, Kiwao Nomura a fait des études de littérature japonaise à l’Université Waseda de Tokyo (licence) et des études de littérature française à l’Université Meiji de Tokyo (maîtrise et doctorat) où il s’est consacré aux études rimbaldiennes. Depuis plus de vingt-cinq ans, il est l’un des principaux poètes japonais contemporains, lauréat de presque tous les prix importants de poésie japonaise. Ses poèmes sont traduits en plusieurs langues. Incorpora..
AmeriQuests, Mar 11, 2017
Kunio TSUKAMOTO (1920-2005), l'une des figures les plus importantes dans l'histoire du tanka mode... more Kunio TSUKAMOTO (1920-2005), l'une des figures les plus importantes dans l'histoire du tanka moderne et contemporain, opéra un changement profond et radical dans la notion et la pratique du genre, tout en choisissant le thème du mal comme terrain de prédilection dans sa création littéraire. Baudelaire constitue un anneau de ce qu'il appelle « la chaîne du mal » d'écrivains occidentaux, et il ne cessa de manifester son admiration pour le poète du mal en plusieurs endroits dans ses écrits en prose. Cela nous ferait penser que la notion baudelairienne du mal ait aussi fonctionné dans l'économie de sa poésie, alors que, en réalité, la référence explicite à Baudelaire est assez rare dans ses ouvrages de tanka. Quelle relation spirituelle et poétique Kunio noua-t-il avec la poésie du mal de Baudelaire ? Nous tenterons de définir ce que Kunio entend par mal, afin de voir plus clairement la part réelle de l'héritage de Baudelaire sur son oeuvre. Le tanka visionnaire Depuis le septième siècle, la forme poétique régulière appelée tanka ou waka 1 occupe une place centrale et noble dans la poésie japonaise. Il y a à peu près cent ans, il connut une grande réforme et prit pour principe esthétique la notion de 'shasei' qui signifie l'objectivité du croquis sur le vif d'après nature. Or, cette objectivité, qui consiste en la notation d'instants poétiques et singuliers saisis dans la vie quotidienne, requiert, par définition, l'identité du « je » du poème avec le « je » du poète, ce qui ne permet pas au tanka d'être d'une conception fictive. C'est contre cette poétique que se révolta Kunio Tsukamoto avec ses tanka avant-gardistes qu'il commença à faire connaître au public japonais après la deuxième guerre mondiale. Il publia son premier recueil intitulé Roman de l'immersion funéraire en 1951 2 , qui porte en épigraphe la citation de phrases de Rimbaud tirées de « Adieu » d'Une saison en enfer. C'était une citation en français, accompagnée de la traduction japonaise. « J'ai créé toutes les fêtes, tous les triomphes, tous les drames. J'ai essayé d'inventer de nouvelles fleurs, de nouveaux astres, de nouvelles chairs, de nouvelles langues. » Pour la traduction japonaise, Kunio se servit de celle de Hidéo Kobayashi, grand critique littéraire japonais et traducteur de Rimbaud. En la citant, il apporta une modification apparemment minime, mais en fait très significative. Pour désigner la première personne du singulier en français, Kunio choisit le pronom « watashi » au lieu du « oré » 3 qu'avait choisi Kobayashi, ce qui a pour effet d'investir le « je » du poème d'un caractère plus raisonnable qu'émotif et éclaté. Et c'est sous l'égide de Rimbaud, non du Rimbaud de Kobayashi qui assumait une certaine brutalité, mais d'un Rimbaud rendu plus conscient, que Kunio déclara la nécessité de l'invention d'un nouveau langage poétique dont la réalisation serait sa quête poétique. Dans la postface du recueil, Kunio tentait de justifier la méthode qu'il prétendait avoir inventée et appliquée à la création de ses poèmes. En relatant de façon métaphorique son projet de faire renaître le tanka conçu avec son ami Kazushi Sugihara, mort depuis quelques années, il le comparait à la construction d'un palais. Lui et moi, nous avions autrefois dessiné le premier plan d'un palais qui aurait des fenêtres splendidement claires et des lignes fraîches. […] Aucune glace dans chaque chambre ne serait ternie ni souillée de lyrisme, et tous les escaliers auraient des marches au nombre juste de trente-et-un 4 ; chaque étage serait bien revenu de l'ivresse métrique et les lampes sur les murs brilleraient de la lumière