Anissa Maâ | Université libre de Bruxelles (original) (raw)
Papers by Anissa Maâ
Cahiers d'études africaines, 2024
Revue Européenne des Migrations Internationales, 2023
En s’appuyant sur des données récoltées durant des terrains de recherche ethnographiques conduits... more En s’appuyant sur des données récoltées durant des terrains de recherche ethnographiques conduits entre 2016 et 2018, cet article s’intéresse au rôle des intermédiaires issus des communautés migrantes dans la mise en œuvre des retours volontaires de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) depuis le Maroc. L’article explore plus précisément les héritages coloniaux et les effets contrastés de cette forme singulière d’intermédiation dans le contexte des migrations. Pour ce faire, il développe le concept d’« intermédiation indigène » en faisant dialoguer données empiriques, études migratoires et travaux historiques sur l’intermédiation coloniale. L’article interroge alors l’« indigénéité » des intermédiaires vis-à-vis de leur public cible et met en lumière les conditions d’émergence de cette forme d’intermédiation, les dynamiques de catégorisation et d’identification racialisées qui la sous-tendent, ainsi que la diversité des pratiques qui en résultent.
Journal of Borderlands Studies, 2023
Migration information campaigns and awareness-raising activities are increasingly used by Western... more Migration information campaigns and awareness-raising activities are increasingly used by Western governments as a “soft” tool of border enforcement in countries of origin, transit, and destination. Acting upon perceptions and aspirations, these information provision initiatives aim at convincing (potential) migrants to remain in or “voluntarily” return to their country of origin. As they rely on security and humanitarian rationales, they gather heterogenous actors whose practices oscillate between migration control and assistance. Yet, despite their apparently consensual nature, these initiatives bring out conflicting interests and generate contestations on the ground. In this perspective, this SI approaches information as a highly crowded and disputed field to grasp the complexity of power relationships in a restrictive migration context. Drawing on an interdisciplinary perspective, it investigates the discourses and norms conveyed by governmental initiatives that use information as a tool to control mobilities; the communication strategies defined by state and non-state actors to reach (potential) migrants; and the everyday practices deployed by migrants themselves to navigate this disputed information landscape.
Métropolitiques, 2023
Le rôle ambivalent des migrants et des intermédiaires dans les « retours volontaires » depuis le ... more Le rôle ambivalent des migrants et des intermédiaires dans les « retours volontaires » depuis le Maroc Anissa Maâ Alors que le gouvernement français a reporté l'examen de son projet de loi controversé sur l'immigration, censé « faciliter les expulsions », Anissa Maâ revient sur les ambivalences du programme d'« aide au retour volontaire » des Nations unies au Maroc. On aurait tort de réduire l'éloignement des migrants aux seules expulsions. Une de ses formes, plus discrète, se joue en effet dans le cadre des programmes d'« aide au retour volontaire et à la réintégration » de l'Organisation internationale pour les migrations (OIM) 1. Le caractère volontaire de ces retours a été largement remis en cause par la littérature académique, étant donné la multitude de contraintes sur lesquelles repose la décision de rentrer au pays (Scalettaris et Gubert 2018). Les programmes de l'OIM reposent donc sur un « idéal pragmatique de la résignation », dans lequel l'éloignement s'impose comme la moins pire des solutions, pour des migrants confrontés à des politiques débilitantes et parfois mortelles (Maâ 2023).
Environment and Planning D: Society and Space, 2023
The intricate relationship between border control and migrations is the core puzzle of this paper... more The intricate relationship between border control and migrations is the core puzzle of this paper, which takes voluntary returns from Morocco as a case study and autonomy of migration (AoM) as a theoretical framework. More precisely, the paper examines voluntary returns from the perspective of migrants themselves to grasp border control through the lens of its disputed, distorted and sometimes subverted implementation. The paper draws on data collected during fieldwork conducted between 2016 and 2018 in Morocco, including ethnographic observations and interviews with staff from the International Organisation for Migration (IOM), migrants and local intermediaries. It focuses on the case of sub-Saharan migrants leaving Morocco through "Assisted Voluntary Return and Reintegration" programmes led by IOM and confronts empirical data with the AoM theoretical framework. The paper demonstrates that migrants' entangled appropriations of return are defined in close relationship with a wide range of actors intervening during the process of return. Ultimately, migrants reformulate the meaning of their involvement in voluntary return into strategic, moral, relative, and symbolic terms. However, these entangled appropriations of a deportation device simultaneously reinforce social norms and institutional regulations underlying migration dynamics and border control. Eventually, the paper draws conclusions on the political effects of migrants' entangled appropriation of a deportation device on the production of intertwined im/mobility regimes between the Mediterranean and sub-Saharan Africa.
Les Cahiers d'EMAM - Études sur le Monde Arabe et la Méditerranée, 2022
À travers l’observation ethnographique de trois espaces singuliers dans le nord du Maroc – une mo... more À travers l’observation ethnographique de trois espaces singuliers dans le nord du Maroc – une morgue, une « forêt » et un presbytère – l’article explore les articulations entre expérience migratoire et violence des frontières à partir de la perspective des migrants eux-mêmes. Il démontre que les migrants font l’expérience d’au moins trois formes de violence en frontière, émergeant à la fois du contrôle étatique, des réseaux de la circulation irrégulière, et de l’assistance humanitaire. Cependant, plutôt que de s’articuler dans un rapport cumulatif, ces différentes formes de violence convergent et se renforcent respectivement au sein d’un continuum qui irrigue la trajectoire migrante. Les migrants pour leur part, ne sont pas de simples objets de ce continuum. Non seulement ils définissent des pratiques pour contrer ses effets – quitte à générer ce faisant de la violence à l’égard de leurs pairs – mais de plus, ils réinterprètent l’expérience de la violence dans un registre moral qui valorise le risque en migration, sans pour autant naturaliser leur exposition à la mort en frontière. Ils sont donc des acteurs à part entière de la « fabrique » de la frontière et des violences qui la composent, et ce, qu’ils s’opposent à, ou se réapproprient ses effets.
Critique Internationale, 2022
Au Maroc, à la suite de l'installation croissante depuis les années 2000 de migrants d'origine su... more Au Maroc, à la suite de l'installation croissante depuis les années 2000 de migrants d'origine subsaharienne, les organisations confessionnelles ont été redynamisées et les acteurs religieux en particulier chrétiens ont endossé de nouveaux rôles. Ce faisant, ces acteurs ont intégré une véritable « industrie migratoire » et se sont retrouvés dans une position ambigüe : s'ils sont bien une ressource spirituelle et matérielle pour les migrants, du fait de leur légitimité religieuse, ils capitalisent simultanément sur la relation privilégiée dont ils bénéficient avec ces derniers pour servir des objectifs majoritairement orientés vers le contrôle. Leurs discours et leurs pratiques révèlent ainsi une imbrication de logiques compassionnelles et de logiques sécuritaires dans le gouvernement international des mobilités africaines, comme le démontre particulièrement le cas des programmes de retours volontaires. Cette imbrication potentiellement contradictoire mais toujours négociée est renforcée par des stratégies d'adaptation visant à répondre avec peu de moyens à une demande d'assistance croissante. Loin de s'exclure l'un l'autre, assistance et contrôle se renforcent réciproquement dans un contexte de banalisation de la violence des frontières, et convergent vers une injonction à la sédentarité prononcée à l'égard des ressortissants africains.
Journal of Borderlands Studies, 2022
Since the 1990s, the European Union (EU) and its Member States have been funding information and ... more Since the 1990s, the European Union (EU) and its Member States have been funding information and awareness-raising initiatives to deter irregular immigration. These programmes increasingly rely on the involvement of intermediaries with a migration background in so-called “peer-to-peer” information dissemination activities. Their “peerness” is considered an efficient tool to gain (potential) migrants’ trust, and ultimately enforce migration and border control. However, while “peerness” between migrants and intermediaries is generally taken for granted by migration and border studies, it is crossed by conflicting dynamics and generates contrasted effects on the ground. This paper interrogates how various migration experiences are captured and defined as “peerness” for control purposes, and, simultaneously, how it is mobilized and enacted by migrant actors in different contexts. Empirical insights from three case studies are brought together, each of which engaging with an emblematic figure of “migrant intermediation”: the Senegalese “diaspora” in the EU, “transit migrants” in Morocco, and “returnees” in Senegal. The paper argues that “peer-to-peer” information dissemination entails inherent tensions and contradictions which can ultimately come to challenge borderwork. Finally, it demonstrates that beyond the question of its efficiency, “migrant intermediation” transforms and reinforces both social hierarchies and relations of power within local migration industries.
Journal of North African Studies, 2021
In Morocco, the implementation of the 'Assisted Voluntary Return and Reintegration' programmes (A... more In Morocco, the implementation of the 'Assisted Voluntary Return and Reintegration' programmes (AVRR) run by the International Organisation for Migration (IOM) counts on the widespread collaboration of governmental and humanitarian migration practitioners and of migrants themselves. How come that actors occupying such heterogeneous positions in the migration field ultimately agree on their daily participation to IOM's AVRR programmes? What power rationales structure this collaborative network on return? The article draws on documentary sources and fieldwork conducted between 2016 and 2018 in Morocco. It adopts a socio-historical perspective that denaturalises the institutionalisation of AVRR programmes and combines the relevant empirical data with a theoretical discussion on collaboration in the deportation field. It argues that the institutionalisation of AVRR programmes in Morocco results from power rationales of intermediation and collaboration amongst different actorsboth at an institutional level and on the ground. This gives rise to non-homogenous and sometimes seemingly contradictory forms of appropriation of voluntary return by third actors within the migration field.
Emulations. Revue de sciences sociales, 2020
Les « retours volontaires » mis en oeuvre par l’Organisation internationale pour les migrations (... more Les « retours volontaires » mis en oeuvre par l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) sont une forme contemporaine d’éloignement qui a la particularité de s’appuyer sur la « volonté » des migrants eux-mêmes. Tandis que la littérature a largement souligné la dimension contrainte de cette « volonté », il convient cependant de s’interroger sur le processus non linéaire et en partie contingent, qui amène les personnes migrantes à s’engager dans une procédure de retour auprès de l’OIM. À partir de la trajectoire de retour d’Aya et de son fils Prince, tous deux en instance de départ depuis le Maroc, cet article s’intéresse aux interactions entre les pratiques des intermédiaires migratoires et l’agencéité migrante dans la production d’une volonté au retour. Il observe les balbutiements d’une décision émergente de retour, le rôle d’acteurs intermédiaires dans la transformation de cette dernière en une demande d’assistance auprès de l’OIM, et l’incertitude qui persiste dans l’issue et les modalités d’une procédure de retour volontaire. Ainsi, l’article démontre que le retour volontaire se façonne au sein d’un espace relationnel d’intermédiation qui se positionne à l’interface de la violence des frontières et de la capacité d’action des migrants. C’est précisément dans ce noeud d’indétermination que convergent, s’opposent et se déforment, mécanismes de contrôle d’une part, et agencéité migrante d’autre part.
Émulations-Revue de sciences sociales 2020, n° 34, « Transnationaliser le retour. Vers une révision du regard sur les migrations de retour contemporaines ».
Terrain. Anthropologie et sciences humaines, 2019
Peut-on vraiment parler de « retours volontaires » dans un contexte de fermeture aux migrations i... more Peut-on vraiment parler de « retours volontaires » dans un contexte de fermeture aux migrations irrégulières ? Partant d’une séquence particulière d’un terrain de recherche au Maroc, circonscrite au seuil de la mission de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) à Rabat, devant laquelle des « aventuriers » camerounais et guinéens s’étaient installés en attendant de se voir attribuer l’aide au retour proposée par l’agence, l’article interroge la dialectique de l’agencéité migrante et du retour volontaire en dehors des termes dichotomiques de la contrainte et de la volonté. Venus jusqu’à l’OIM pour « signer la déportation », les étrangers-migrants définissent des formes hétérogènes d’agencéité face aux contraintes de la procédure institutionnelle d’une part, et en faveur de leur retour d’autre part : usage de la vulnérabilité et de l’incertitude, protestations collectives, détournement symbolique du décor sécuritaire de l’éloignement. Au-delà de la contrainte et de la volonté, ce sont donc avant tout les modalités du retour – et en particulier sa temporalité – qui mobilisent les aventuriers aux prises avec une procédure de l’OIM.
Communications by Anissa Maâ
Appel à communications-date limite 18 mars 2022 ATELIER 9 : Intermédiaires, courtiers et passeurs... more Appel à communications-date limite 18 mars 2022 ATELIER 9 : Intermédiaires, courtiers et passeurs. Penser l'intermédiation en contexte migratoire africain, au-delà de la dichotomie entre autonomie et contrôle.
Cahiers d'études africaines, 2024
Revue Européenne des Migrations Internationales, 2023
En s’appuyant sur des données récoltées durant des terrains de recherche ethnographiques conduits... more En s’appuyant sur des données récoltées durant des terrains de recherche ethnographiques conduits entre 2016 et 2018, cet article s’intéresse au rôle des intermédiaires issus des communautés migrantes dans la mise en œuvre des retours volontaires de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) depuis le Maroc. L’article explore plus précisément les héritages coloniaux et les effets contrastés de cette forme singulière d’intermédiation dans le contexte des migrations. Pour ce faire, il développe le concept d’« intermédiation indigène » en faisant dialoguer données empiriques, études migratoires et travaux historiques sur l’intermédiation coloniale. L’article interroge alors l’« indigénéité » des intermédiaires vis-à-vis de leur public cible et met en lumière les conditions d’émergence de cette forme d’intermédiation, les dynamiques de catégorisation et d’identification racialisées qui la sous-tendent, ainsi que la diversité des pratiques qui en résultent.
Journal of Borderlands Studies, 2023
Migration information campaigns and awareness-raising activities are increasingly used by Western... more Migration information campaigns and awareness-raising activities are increasingly used by Western governments as a “soft” tool of border enforcement in countries of origin, transit, and destination. Acting upon perceptions and aspirations, these information provision initiatives aim at convincing (potential) migrants to remain in or “voluntarily” return to their country of origin. As they rely on security and humanitarian rationales, they gather heterogenous actors whose practices oscillate between migration control and assistance. Yet, despite their apparently consensual nature, these initiatives bring out conflicting interests and generate contestations on the ground. In this perspective, this SI approaches information as a highly crowded and disputed field to grasp the complexity of power relationships in a restrictive migration context. Drawing on an interdisciplinary perspective, it investigates the discourses and norms conveyed by governmental initiatives that use information as a tool to control mobilities; the communication strategies defined by state and non-state actors to reach (potential) migrants; and the everyday practices deployed by migrants themselves to navigate this disputed information landscape.
Métropolitiques, 2023
Le rôle ambivalent des migrants et des intermédiaires dans les « retours volontaires » depuis le ... more Le rôle ambivalent des migrants et des intermédiaires dans les « retours volontaires » depuis le Maroc Anissa Maâ Alors que le gouvernement français a reporté l'examen de son projet de loi controversé sur l'immigration, censé « faciliter les expulsions », Anissa Maâ revient sur les ambivalences du programme d'« aide au retour volontaire » des Nations unies au Maroc. On aurait tort de réduire l'éloignement des migrants aux seules expulsions. Une de ses formes, plus discrète, se joue en effet dans le cadre des programmes d'« aide au retour volontaire et à la réintégration » de l'Organisation internationale pour les migrations (OIM) 1. Le caractère volontaire de ces retours a été largement remis en cause par la littérature académique, étant donné la multitude de contraintes sur lesquelles repose la décision de rentrer au pays (Scalettaris et Gubert 2018). Les programmes de l'OIM reposent donc sur un « idéal pragmatique de la résignation », dans lequel l'éloignement s'impose comme la moins pire des solutions, pour des migrants confrontés à des politiques débilitantes et parfois mortelles (Maâ 2023).
Environment and Planning D: Society and Space, 2023
The intricate relationship between border control and migrations is the core puzzle of this paper... more The intricate relationship between border control and migrations is the core puzzle of this paper, which takes voluntary returns from Morocco as a case study and autonomy of migration (AoM) as a theoretical framework. More precisely, the paper examines voluntary returns from the perspective of migrants themselves to grasp border control through the lens of its disputed, distorted and sometimes subverted implementation. The paper draws on data collected during fieldwork conducted between 2016 and 2018 in Morocco, including ethnographic observations and interviews with staff from the International Organisation for Migration (IOM), migrants and local intermediaries. It focuses on the case of sub-Saharan migrants leaving Morocco through "Assisted Voluntary Return and Reintegration" programmes led by IOM and confronts empirical data with the AoM theoretical framework. The paper demonstrates that migrants' entangled appropriations of return are defined in close relationship with a wide range of actors intervening during the process of return. Ultimately, migrants reformulate the meaning of their involvement in voluntary return into strategic, moral, relative, and symbolic terms. However, these entangled appropriations of a deportation device simultaneously reinforce social norms and institutional regulations underlying migration dynamics and border control. Eventually, the paper draws conclusions on the political effects of migrants' entangled appropriation of a deportation device on the production of intertwined im/mobility regimes between the Mediterranean and sub-Saharan Africa.
Les Cahiers d'EMAM - Études sur le Monde Arabe et la Méditerranée, 2022
À travers l’observation ethnographique de trois espaces singuliers dans le nord du Maroc – une mo... more À travers l’observation ethnographique de trois espaces singuliers dans le nord du Maroc – une morgue, une « forêt » et un presbytère – l’article explore les articulations entre expérience migratoire et violence des frontières à partir de la perspective des migrants eux-mêmes. Il démontre que les migrants font l’expérience d’au moins trois formes de violence en frontière, émergeant à la fois du contrôle étatique, des réseaux de la circulation irrégulière, et de l’assistance humanitaire. Cependant, plutôt que de s’articuler dans un rapport cumulatif, ces différentes formes de violence convergent et se renforcent respectivement au sein d’un continuum qui irrigue la trajectoire migrante. Les migrants pour leur part, ne sont pas de simples objets de ce continuum. Non seulement ils définissent des pratiques pour contrer ses effets – quitte à générer ce faisant de la violence à l’égard de leurs pairs – mais de plus, ils réinterprètent l’expérience de la violence dans un registre moral qui valorise le risque en migration, sans pour autant naturaliser leur exposition à la mort en frontière. Ils sont donc des acteurs à part entière de la « fabrique » de la frontière et des violences qui la composent, et ce, qu’ils s’opposent à, ou se réapproprient ses effets.
Critique Internationale, 2022
Au Maroc, à la suite de l'installation croissante depuis les années 2000 de migrants d'origine su... more Au Maroc, à la suite de l'installation croissante depuis les années 2000 de migrants d'origine subsaharienne, les organisations confessionnelles ont été redynamisées et les acteurs religieux en particulier chrétiens ont endossé de nouveaux rôles. Ce faisant, ces acteurs ont intégré une véritable « industrie migratoire » et se sont retrouvés dans une position ambigüe : s'ils sont bien une ressource spirituelle et matérielle pour les migrants, du fait de leur légitimité religieuse, ils capitalisent simultanément sur la relation privilégiée dont ils bénéficient avec ces derniers pour servir des objectifs majoritairement orientés vers le contrôle. Leurs discours et leurs pratiques révèlent ainsi une imbrication de logiques compassionnelles et de logiques sécuritaires dans le gouvernement international des mobilités africaines, comme le démontre particulièrement le cas des programmes de retours volontaires. Cette imbrication potentiellement contradictoire mais toujours négociée est renforcée par des stratégies d'adaptation visant à répondre avec peu de moyens à une demande d'assistance croissante. Loin de s'exclure l'un l'autre, assistance et contrôle se renforcent réciproquement dans un contexte de banalisation de la violence des frontières, et convergent vers une injonction à la sédentarité prononcée à l'égard des ressortissants africains.
Journal of Borderlands Studies, 2022
Since the 1990s, the European Union (EU) and its Member States have been funding information and ... more Since the 1990s, the European Union (EU) and its Member States have been funding information and awareness-raising initiatives to deter irregular immigration. These programmes increasingly rely on the involvement of intermediaries with a migration background in so-called “peer-to-peer” information dissemination activities. Their “peerness” is considered an efficient tool to gain (potential) migrants’ trust, and ultimately enforce migration and border control. However, while “peerness” between migrants and intermediaries is generally taken for granted by migration and border studies, it is crossed by conflicting dynamics and generates contrasted effects on the ground. This paper interrogates how various migration experiences are captured and defined as “peerness” for control purposes, and, simultaneously, how it is mobilized and enacted by migrant actors in different contexts. Empirical insights from three case studies are brought together, each of which engaging with an emblematic figure of “migrant intermediation”: the Senegalese “diaspora” in the EU, “transit migrants” in Morocco, and “returnees” in Senegal. The paper argues that “peer-to-peer” information dissemination entails inherent tensions and contradictions which can ultimately come to challenge borderwork. Finally, it demonstrates that beyond the question of its efficiency, “migrant intermediation” transforms and reinforces both social hierarchies and relations of power within local migration industries.
Journal of North African Studies, 2021
In Morocco, the implementation of the 'Assisted Voluntary Return and Reintegration' programmes (A... more In Morocco, the implementation of the 'Assisted Voluntary Return and Reintegration' programmes (AVRR) run by the International Organisation for Migration (IOM) counts on the widespread collaboration of governmental and humanitarian migration practitioners and of migrants themselves. How come that actors occupying such heterogeneous positions in the migration field ultimately agree on their daily participation to IOM's AVRR programmes? What power rationales structure this collaborative network on return? The article draws on documentary sources and fieldwork conducted between 2016 and 2018 in Morocco. It adopts a socio-historical perspective that denaturalises the institutionalisation of AVRR programmes and combines the relevant empirical data with a theoretical discussion on collaboration in the deportation field. It argues that the institutionalisation of AVRR programmes in Morocco results from power rationales of intermediation and collaboration amongst different actorsboth at an institutional level and on the ground. This gives rise to non-homogenous and sometimes seemingly contradictory forms of appropriation of voluntary return by third actors within the migration field.
Emulations. Revue de sciences sociales, 2020
Les « retours volontaires » mis en oeuvre par l’Organisation internationale pour les migrations (... more Les « retours volontaires » mis en oeuvre par l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) sont une forme contemporaine d’éloignement qui a la particularité de s’appuyer sur la « volonté » des migrants eux-mêmes. Tandis que la littérature a largement souligné la dimension contrainte de cette « volonté », il convient cependant de s’interroger sur le processus non linéaire et en partie contingent, qui amène les personnes migrantes à s’engager dans une procédure de retour auprès de l’OIM. À partir de la trajectoire de retour d’Aya et de son fils Prince, tous deux en instance de départ depuis le Maroc, cet article s’intéresse aux interactions entre les pratiques des intermédiaires migratoires et l’agencéité migrante dans la production d’une volonté au retour. Il observe les balbutiements d’une décision émergente de retour, le rôle d’acteurs intermédiaires dans la transformation de cette dernière en une demande d’assistance auprès de l’OIM, et l’incertitude qui persiste dans l’issue et les modalités d’une procédure de retour volontaire. Ainsi, l’article démontre que le retour volontaire se façonne au sein d’un espace relationnel d’intermédiation qui se positionne à l’interface de la violence des frontières et de la capacité d’action des migrants. C’est précisément dans ce noeud d’indétermination que convergent, s’opposent et se déforment, mécanismes de contrôle d’une part, et agencéité migrante d’autre part.
Émulations-Revue de sciences sociales 2020, n° 34, « Transnationaliser le retour. Vers une révision du regard sur les migrations de retour contemporaines ».
Terrain. Anthropologie et sciences humaines, 2019
Peut-on vraiment parler de « retours volontaires » dans un contexte de fermeture aux migrations i... more Peut-on vraiment parler de « retours volontaires » dans un contexte de fermeture aux migrations irrégulières ? Partant d’une séquence particulière d’un terrain de recherche au Maroc, circonscrite au seuil de la mission de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) à Rabat, devant laquelle des « aventuriers » camerounais et guinéens s’étaient installés en attendant de se voir attribuer l’aide au retour proposée par l’agence, l’article interroge la dialectique de l’agencéité migrante et du retour volontaire en dehors des termes dichotomiques de la contrainte et de la volonté. Venus jusqu’à l’OIM pour « signer la déportation », les étrangers-migrants définissent des formes hétérogènes d’agencéité face aux contraintes de la procédure institutionnelle d’une part, et en faveur de leur retour d’autre part : usage de la vulnérabilité et de l’incertitude, protestations collectives, détournement symbolique du décor sécuritaire de l’éloignement. Au-delà de la contrainte et de la volonté, ce sont donc avant tout les modalités du retour – et en particulier sa temporalité – qui mobilisent les aventuriers aux prises avec une procédure de l’OIM.
Appel à communications-date limite 18 mars 2022 ATELIER 9 : Intermédiaires, courtiers et passeurs... more Appel à communications-date limite 18 mars 2022 ATELIER 9 : Intermédiaires, courtiers et passeurs. Penser l'intermédiation en contexte migratoire africain, au-delà de la dichotomie entre autonomie et contrôle.