Camille Froidevaux-Metterie | Université de Reims Champagne-Ardenne (original) (raw)
Articles et chapitres d'ouvrages / papers by Camille Froidevaux-Metterie
Camille Froidevaux-Mettetie, 2021
La sororité résulte d’un processus volontaire, elle se décide et elle s’apprend. Il faudrait pouv... more La sororité résulte d’un processus volontaire, elle se décide et elle s’apprend. Il faudrait pouvoir l’enseigner aux filles, dès la puberté, en les accompagnant dans le moment de la sexuation de leurs corps. Leur indiquer qu’elles ne se transforment pas d’un coup en objets appropriables mais qu’elle s deviennent ce qu’elles sont, des sujets d’action et de désir. En détruisant ainsi le socle de la rivalité entre femmes, on sapera l’un des ressorts les plus puissants du système patriarcal et on se débarrassera de cette posture quasi réflexe par laquelle les femmes s’interdisent de se considérer les unes les autres comme des sœurs.
Camille Froidevaux-Metterie, 2022
Penser le corps des femmes au prisme de l’expérience vécue, c’est révéler et déplier tous les méc... more Penser le corps des femmes au prisme de l’expérience vécue, c’est révéler et déplier tous les mécanismes par lesquels la domination masculine se perpétue, mais c’est aussi mettre au jour les ressorts incarnés de l’émancipation. La reviviscence actuelle des combats « corporels » témoigne d’une aspiration puissante à se réapproprier nos corps par le renversement de l’injonction patriarcale à en faire des corps « à disposition ». Il se trouve que cet élan s’est concentré sur les thématiques génitales et ce n’est pas un hasard. La sexualité et la maternité sont les vecteurs historiques de l’assignation des femmes au domestique et de leur condition sociale subordonnée. Réinvestir ces sujets au prisme phénoménologique de l’aliénation et de la libération, c’est se donner les moyens d’approfondir et, pourquoi pas, de parachever le projet beauvoirien : permettre aux femmes d’accomplir leur destinée de liberté dans toutes les dimensions incarnées de leur existence.
Camille Froidevaux-Metterie, 2020
From the start, the woman’s body has been at the center of feminist struggles. However, it has gr... more From the start, the woman’s body has been at the center of feminist struggles. However, it has gradually been increasingly ignored and has now totally disappeared as an object of struggle. The #MeToo movement has had an explosive effect precisely because it has highlighted the scandal that, despite their emancipation, women have remained “available bodies.” Today we find ourselves at a decisive moment for the reappropriation of corporeality in its most intimate dimensions: it is time to relaunch the project of a phenomenological (i.e., embodied) feminism initiated by Simone de Beauvoir.
Publié le 23/06/2020 sur le site du média en ligne AOC En faisant disparaître les visages et en m... more Publié le 23/06/2020 sur le site du média en ligne AOC
En faisant disparaître les visages et en maintenant l’éloignement des corps, le déconfinement progressif retarde douloureusement le retour à la normalité relationnelle de nos existences, dont nous avons été privés au début de la crise. L’intersubjectivité, rendant possible notre propre subjectivité, est entravée. Nous réalisons alors intimement que, n’en déplaise au mythe néo-libéral, nos corps ne sont pas de simples outils, mais bien le lieu et la condition même de notre être-au-monde.
Publié le 21/04/2020 sur le site du média en ligne AOC L’épidémie de Covid-19 est l’occasion de ... more Publié le 21/04/2020 sur le site du média en ligne AOC
L’épidémie de Covid-19 est l’occasion de mettre en évidence le « travail émotionnel » effectué au quotidien par les femmes, que ce soit professionnellement ou dans la sphère privée. C’est à elles qu’incombe presque exclusivement la gestion de ces émotions qui ont été marchandisées et standardisées à mesure que les métiers du care se sont développés. Les conséquences de la crise sanitaire sur la santé mentale de toutes celles qui supportent le poids des émotions risquent d’être incommensurables.
Pouvoirs, 2020
Dès l’origine, le corps des femmes a été placé au cœur des combats féministes. Il a toutefois été... more Dès l’origine, le corps des femmes a été placé au cœur des combats féministes. Il a toutefois été progressivement désinvesti jusqu’à disparaître comme objet de luttes. Si le mouvement #metoo a fait l’effet d’une déflagration, c’est parce qu’il a mis au jour ce scandale que les femmes étaient restées des corps à disposition par-delà leur émancipation. Le moment important où nous sommes de réappropriation de la corporéité dans ses dimensions le plus intimes nous impose de relancer le projet d’un féminisme phénoménologique (c’est-à-dire incarné) initié par Simone de Beauvoir.
Revue Philosophique de Louvain, 2018
En 2005, Iris Marion Young publie On Female Body Experience. « Throwing like a girl » and other e... more En 2005, Iris Marion Young publie On Female Body Experience. « Throwing like a girl » and other essays. L’ouvrage rassemble huit textes rédigés entre 1980 et 2005 qui forment ensemble le corpus de son féminisme phénoménologique. Il s’agit pour elle d’explorer « ces expériences corporelles ordinaires par lesquelles la plupart des femmes s’identifient spécifiquement en tant que femmes », tout en repérant et dénonçant les contraintes qui pèsent sur les femmes et qui limitent tout à la fois leurs opportunités et leur liberté. Toute l’originalité de la démarche de Iris Marion Young se condense dans ce défi : tenir ensemble l’analyse de la subjectivité féminine (concept de corps vécu) et la compréhension des mécanismes sociaux qui entretiennent la domination masculine (notion de genre).
Article paru dans la revue Cités, dossier thématique sur le féminisme, n° 73, mars 2018.
Commentaire des travaux de Orna Donath sur le regret maternel.
Chapitre du Manuel de Science politique, Éric Savarese, Christophe Roux (dir.), Bruxelles, Bruyl... more Chapitre du Manuel de Science politique, Éric Savarese, Christophe Roux (dir.), Bruxelles, Bruylant, 2017.
La notion englobante de commun a longtemps renvoyé au monde des seuls hommes, les femmes demeuran... more La notion englobante de commun a longtemps renvoyé au monde des seuls hommes, les femmes demeurant cantonnées dans la sphère privée des affaires du foyer en vertu d’une division sexuée qui a résisté à la refondation démocratique des sociétés occidentales. Ce n’est qu’après le virage de la deuxième vague féministe que nous sommes entrés pour de bon dans l’ère du commun sur fond de désexualisation des ordres de l’existence. C’est cette tension entre universalité de l’individu de droits et singularité du sujet incarné qui nous impose de repenser une sociologie du commun au travers du prisme inédit de la dualité générique de notre condition contemporaine.
Camille FROIDEVAUX-METTERIE Le Philosophoire -n° 38 "La beauté" -décembre 2012 La beauté des femm... more Camille FROIDEVAUX-METTERIE Le Philosophoire -n° 38 "La beauté" -décembre 2012 La beauté des femmes se montre et s'admire, elle ravit ou elle irrite, mais elle ne se pense pas. Quand il s'agit de comprendre ce qu'est le beau, soit la référence aux objets est présentée comme inutile, aucun exemple particulier ne permettant de saisir le sens de la beauté, soit ce sont les merveilles de la nature qui sont invoquées pour renseigner sur la nature du plaisir esthétique, soit l'attention se porte exclusivement sur les oeuvres d'art 1 . Tout se passe comme si la beauté incarnée était, de toutes les formes de beauté, la moins susceptible d'une appréhension philosophique. Quant à penser la beauté des femmes... on frôle l'oxymore : la femme belle se désire, sa beauté s'éprouve et se ressent, elle ne se réfléchit pas. Et ce jusque dans la tradition phénoménologique laquelle, tout en conférant à la dimension corporelle de l'existence une pleine légitimité philosophique, ignore ou contourne la question de la sexuation des corps. Interrompu avec Simone de Beauvoir qui fait de la corporéité féminine une notion-clef de sa réflexion, ce déni laisse la place à une interprétation critique et négative destinée à devenir hégémonique : le corps des femmes les enferme dans l'immanence et les prive de la liberté transcendante réservée aux hommes.
Raisons politiques, n°1, février 2001. Observateur avisé de la « démocratie pure » telle qu’el... more Raisons politiques, n°1, février 2001.
Observateur avisé de la « démocratie pure » telle qu’elle se présente à lui aux États- Unis, Tocqueville trouve aussi dans ce pays les conditions d’une coexistence harmo- nieuse de la religion chrétienne et des exigences de la modernité politique. Au-delà de la séparation des ordres temporel et spirituel, c’est au niveau plus profond de la convergence des principes qu’il situe l’accord théologico-politique américain. Cette interprétation a servi de fondement à toutes les analyses ultérieures qui ont fait de la nation américaine le cadre exemplaire de l’intime imbrication du politique et du reli- gieux. Il convient pourtant de revenir sur ce qui constitue à l’évidence une illusion rétrospective : la puissance explicative du puritanisme des premiers colons nous a caché la difficulté avec laquelle le fameux « mur de séparation » avait été édifié, elle permet aujourd’hui de rendre compte de résurgences du religieux au sein de la vie publique américaine sans se laisser abuser par leur efficacité politique.
Tocqueville is not only the observer of pure democracy as it is in the United States. He also finds in this country the conditions of an harmonious coexistence between christian religion and the demands of modernity. He places the American theologico-political agreement beyond the separation of temporal and spiritual orders, and more deeply on the level of. a convergence of principles. This interpretation has been the model of all subsequent analyses which take the American nation to examplify a framework where politics and religion intimately overlap. One has to go back over what is certainly a retrospective illusion. The strengh of the setller’s puritarism has hidden from us the dif- ficulty with which the “famous” wall of separation had been erected. It now helps to describe the reappearance of religion within American public life without overestima- ting its political efficiency.
Article synthétisant l'ouvrage : Camille Froidevaux, "Ernst Troeltsch. La religion chrétienne et ... more Article synthétisant l'ouvrage : Camille Froidevaux, "Ernst Troeltsch. La religion chrétienne et le monde moderne", PUF, "Sociologies", 1999.
Books by Camille Froidevaux-Metterie
Camille Froidevaux-Metterie, 2023
Agréable ou pénible, exaltante ou angoissante, intime et sociale, la grossesse est une aventure à... more Agréable ou pénible, exaltante ou angoissante, intime et sociale, la grossesse est une aventure à la fois profondément individuelle et éminemment politique.
La philosophe Camille Froidevaux-Metterie a passé du temps en immersion dans une maternité, elle y a rencontré des femmes enceintes qu’elle a interrogées sur leur expérience vécue du corps enceint. À travers ces paroles singulières qui disent la troublante transformation physique, les sentiments de joie ou de rejet, les innombrables injonctions – au silence, au bonheur, au poids idéal –, c’est le double mouvement de l’aliénation et de la réappropriation du corps des femmes qui se déploie.
En pensant ce qui ne se pense pas, en questionnant ce qui est considéré comme naturel, Camille Froidevaux-Metterie poursuit son travail d’élaboration d’un féminisme incarné qui place l’intime des corps sur le chemin de la libération.
Camille Froidevaux-Metterie, 2021
Longtemps, les femmes n’ont été que des corps, définies par leurs fonctions sexuelle et maternell... more Longtemps, les femmes n’ont été que des corps, définies par leurs fonctions sexuelle et maternelle. La révolution féministe les a délivrées de ce carcan, mais elle a aussi dévalorisé le corps féminin. N’est-il pas pourtant le nœud singulier de notre rapport à nous-même et au monde ?
Nourrie de la pensée de Simone de Beauvoir, la philosophe Camille Froidevaux-Metterie propose de le saisir pour ce qu’il est : le socle de la domination masculine et le lieu possible d’une pleine émancipation. Sa pensée progresse au fil d’une exploration de ces événements corporels qui scandent la vie des femmes, de l’enfance empêtrée à la ménopause invisibilisée, de la honte adolescente à la découverte de la jouissance, de l’épreuve du réel maternel aux ravages de la violence sexuelle. Au fil de ces étapes, où l’écriture en première personne résonne avec les voix plurielles des femmes, l’autrice pose les jalons qui leur permettront de reprendre possession de leurs corps, jusqu’au plus intime d’elles-mêmes. Son féminisme incarné s’attaque au socle même du patriarcat et renouvelle, à l’écoute des luttes les plus contemporaines, les fondements théoriques du féminisme.
Camille Froidevaux-Metterie, 2020
Après avoir été dans les années 1970 au cœur de tous les combats, le corps des femmes a ensuite q... more Après avoir été dans les années 1970 au cœur de tous les combats, le corps des femmes a ensuite quasiment disparu du champ féministe. Tout s'est un peu passé comme si les femmes avaient dû payer leur émancipation du prix de l'oubli des conditions incarnées de leur existence. Jusqu’à ce que, au début des années 2010, une nouvelle génération de féministes entreprenne de réinvestir le corps des femmes dans ses dimensions les plus intimes (règles, clitoris, violences sexuelles). Curieusement, les seins sont restés en dehors de cette dynamique alors même qu'ils condensent toutes les grandes problématiques sexistes et patriarcales. À partir d’une enquête auprès d’une quarantaine de filles et de femmes, j’ai exploré l’expérience vécue de le corporéité féminine au prisme des seins. Abordant tous les thèmes qui y sont associés (puberté, apparence, sexualité, grossesse, maladie), je montre que la condition contemporaine des femmes occidentales est faite des fils mêlés de l’objectivation-aliénation d’un côté, de la réappropriation-libération de l’autre. Ma démarche est celle d'un féminisme phénoménologique inscrit dans le sillage de Simone de Beauvoir et de Iris Marion Young.
Le féminisme a produit bien plus qu'une dynamique d'égalisation des conditions féminine et mascul... more Le féminisme a produit bien plus qu'une dynamique d'égalisation des conditions féminine et masculine, il a profondément transformé nos sociétés occidentales en initiant un double processus de féminisation du social et de masculinisation de l’intime.
Par-delà les mécanismes qui nourrissent les inégalités, les discriminations et les violences, il faut ainsi pouvoir repérer que nous sommes en train de vivre une mutation à l'échelle de l'histoire humaine : la convergence des genres se dessine qui annonce l’advenue d’un individu générique.
Dans l’horizon d’un monde devenant neutre et égalitaire, la condition incarnée de nos existences revêt un nouveau sens. Affranchie des déterminismes tant naturels que culturels, la sexuation des corps se conçoit désormais au prisme de la singularité, comme un projet relevant de la libre volonté individuelle.
Pour les femmes qui n’ont longtemps été que des corps, il s’agit d’éprouver une condition paradoxale, écartelée entre aliénation et libération. Analyser les modalités de l’expérience vécue du féminin, c’est alors définir ce dernier comme un rapport à soi, au monde et aux autres qui passe spécifiquement par le corps.
Il s'agit de penser le corps des femmes au prisme de la double expérience vécue de l’aliénation e... more Il s'agit de penser le corps des femmes au prisme de la double expérience vécue de l’aliénation et de l’émancipation selon une démarche phénoménologique inscrite dans le sillage de Iris Marion Young. Camille Froidevaux-Metterie analyse notamment le mouvement #metoo comme une étape de la dynamique de réappropriation par les femmes de leur corps dans ses dimensions intimes qu'elle appelle le "tournant génital du féminisme".
Explorant les thématiques corporelles féminines (maternité et non-désir d’enfant, menstruations et ménopause, seins et normes esthétiques, organes génitaux, sexualité et plaisir), elle montre que le temps est venu de réclamer pour tous ses sujets la liberté et l’égalité qui forment le cœur du projet féministe.
Les États-Unis présenteraient le cas unique, dans le monde occidental, d’une démocratie ayant rés... more Les États-Unis présenteraient le cas unique, dans le monde occidental, d’une démocratie ayant réservé à la religion une place à part dans la vie politique : voici une affirmation qui fait aujourd’hui figure de lieu commun. En ne retenant que les manifestations d’une certaine religiosité publique, on oublie de rappeler que la République américaine est fermement laïque, le Premier amendement garantissant la séparation des Églises et de l’État. Surtout, on passe à côté de la spécificité de ce pays qui explique le sentiment d’étrangeté qu’il nous inspire.
Deux forces contradictoires y coexistent : un esprit de religion que l’on peut ramener à la volonté de placer l’ordre civil sous tutelle chrétienne, et un esprit de laïcité qui tend à l’inverse à cantonner la religion dans la sphère privée. Au cours de l’histoire, ces deux forces ont alterné par vagues successives, sans que jamais l’édifice laïque ne soit véritablement menacé. La synthèse a longtemps été assurée par la notion de « religion civile » qui associe idéal libéral et parrainage divin de la nation en une sorte de credo civil commun.
Camille Froidevaux-Mettetie, 2021
La sororité résulte d’un processus volontaire, elle se décide et elle s’apprend. Il faudrait pouv... more La sororité résulte d’un processus volontaire, elle se décide et elle s’apprend. Il faudrait pouvoir l’enseigner aux filles, dès la puberté, en les accompagnant dans le moment de la sexuation de leurs corps. Leur indiquer qu’elles ne se transforment pas d’un coup en objets appropriables mais qu’elle s deviennent ce qu’elles sont, des sujets d’action et de désir. En détruisant ainsi le socle de la rivalité entre femmes, on sapera l’un des ressorts les plus puissants du système patriarcal et on se débarrassera de cette posture quasi réflexe par laquelle les femmes s’interdisent de se considérer les unes les autres comme des sœurs.
Camille Froidevaux-Metterie, 2022
Penser le corps des femmes au prisme de l’expérience vécue, c’est révéler et déplier tous les méc... more Penser le corps des femmes au prisme de l’expérience vécue, c’est révéler et déplier tous les mécanismes par lesquels la domination masculine se perpétue, mais c’est aussi mettre au jour les ressorts incarnés de l’émancipation. La reviviscence actuelle des combats « corporels » témoigne d’une aspiration puissante à se réapproprier nos corps par le renversement de l’injonction patriarcale à en faire des corps « à disposition ». Il se trouve que cet élan s’est concentré sur les thématiques génitales et ce n’est pas un hasard. La sexualité et la maternité sont les vecteurs historiques de l’assignation des femmes au domestique et de leur condition sociale subordonnée. Réinvestir ces sujets au prisme phénoménologique de l’aliénation et de la libération, c’est se donner les moyens d’approfondir et, pourquoi pas, de parachever le projet beauvoirien : permettre aux femmes d’accomplir leur destinée de liberté dans toutes les dimensions incarnées de leur existence.
Camille Froidevaux-Metterie, 2020
From the start, the woman’s body has been at the center of feminist struggles. However, it has gr... more From the start, the woman’s body has been at the center of feminist struggles. However, it has gradually been increasingly ignored and has now totally disappeared as an object of struggle. The #MeToo movement has had an explosive effect precisely because it has highlighted the scandal that, despite their emancipation, women have remained “available bodies.” Today we find ourselves at a decisive moment for the reappropriation of corporeality in its most intimate dimensions: it is time to relaunch the project of a phenomenological (i.e., embodied) feminism initiated by Simone de Beauvoir.
Publié le 23/06/2020 sur le site du média en ligne AOC En faisant disparaître les visages et en m... more Publié le 23/06/2020 sur le site du média en ligne AOC
En faisant disparaître les visages et en maintenant l’éloignement des corps, le déconfinement progressif retarde douloureusement le retour à la normalité relationnelle de nos existences, dont nous avons été privés au début de la crise. L’intersubjectivité, rendant possible notre propre subjectivité, est entravée. Nous réalisons alors intimement que, n’en déplaise au mythe néo-libéral, nos corps ne sont pas de simples outils, mais bien le lieu et la condition même de notre être-au-monde.
Publié le 21/04/2020 sur le site du média en ligne AOC L’épidémie de Covid-19 est l’occasion de ... more Publié le 21/04/2020 sur le site du média en ligne AOC
L’épidémie de Covid-19 est l’occasion de mettre en évidence le « travail émotionnel » effectué au quotidien par les femmes, que ce soit professionnellement ou dans la sphère privée. C’est à elles qu’incombe presque exclusivement la gestion de ces émotions qui ont été marchandisées et standardisées à mesure que les métiers du care se sont développés. Les conséquences de la crise sanitaire sur la santé mentale de toutes celles qui supportent le poids des émotions risquent d’être incommensurables.
Pouvoirs, 2020
Dès l’origine, le corps des femmes a été placé au cœur des combats féministes. Il a toutefois été... more Dès l’origine, le corps des femmes a été placé au cœur des combats féministes. Il a toutefois été progressivement désinvesti jusqu’à disparaître comme objet de luttes. Si le mouvement #metoo a fait l’effet d’une déflagration, c’est parce qu’il a mis au jour ce scandale que les femmes étaient restées des corps à disposition par-delà leur émancipation. Le moment important où nous sommes de réappropriation de la corporéité dans ses dimensions le plus intimes nous impose de relancer le projet d’un féminisme phénoménologique (c’est-à-dire incarné) initié par Simone de Beauvoir.
Revue Philosophique de Louvain, 2018
En 2005, Iris Marion Young publie On Female Body Experience. « Throwing like a girl » and other e... more En 2005, Iris Marion Young publie On Female Body Experience. « Throwing like a girl » and other essays. L’ouvrage rassemble huit textes rédigés entre 1980 et 2005 qui forment ensemble le corpus de son féminisme phénoménologique. Il s’agit pour elle d’explorer « ces expériences corporelles ordinaires par lesquelles la plupart des femmes s’identifient spécifiquement en tant que femmes », tout en repérant et dénonçant les contraintes qui pèsent sur les femmes et qui limitent tout à la fois leurs opportunités et leur liberté. Toute l’originalité de la démarche de Iris Marion Young se condense dans ce défi : tenir ensemble l’analyse de la subjectivité féminine (concept de corps vécu) et la compréhension des mécanismes sociaux qui entretiennent la domination masculine (notion de genre).
Article paru dans la revue Cités, dossier thématique sur le féminisme, n° 73, mars 2018.
Commentaire des travaux de Orna Donath sur le regret maternel.
Chapitre du Manuel de Science politique, Éric Savarese, Christophe Roux (dir.), Bruxelles, Bruyl... more Chapitre du Manuel de Science politique, Éric Savarese, Christophe Roux (dir.), Bruxelles, Bruylant, 2017.
La notion englobante de commun a longtemps renvoyé au monde des seuls hommes, les femmes demeuran... more La notion englobante de commun a longtemps renvoyé au monde des seuls hommes, les femmes demeurant cantonnées dans la sphère privée des affaires du foyer en vertu d’une division sexuée qui a résisté à la refondation démocratique des sociétés occidentales. Ce n’est qu’après le virage de la deuxième vague féministe que nous sommes entrés pour de bon dans l’ère du commun sur fond de désexualisation des ordres de l’existence. C’est cette tension entre universalité de l’individu de droits et singularité du sujet incarné qui nous impose de repenser une sociologie du commun au travers du prisme inédit de la dualité générique de notre condition contemporaine.
Camille FROIDEVAUX-METTERIE Le Philosophoire -n° 38 "La beauté" -décembre 2012 La beauté des femm... more Camille FROIDEVAUX-METTERIE Le Philosophoire -n° 38 "La beauté" -décembre 2012 La beauté des femmes se montre et s'admire, elle ravit ou elle irrite, mais elle ne se pense pas. Quand il s'agit de comprendre ce qu'est le beau, soit la référence aux objets est présentée comme inutile, aucun exemple particulier ne permettant de saisir le sens de la beauté, soit ce sont les merveilles de la nature qui sont invoquées pour renseigner sur la nature du plaisir esthétique, soit l'attention se porte exclusivement sur les oeuvres d'art 1 . Tout se passe comme si la beauté incarnée était, de toutes les formes de beauté, la moins susceptible d'une appréhension philosophique. Quant à penser la beauté des femmes... on frôle l'oxymore : la femme belle se désire, sa beauté s'éprouve et se ressent, elle ne se réfléchit pas. Et ce jusque dans la tradition phénoménologique laquelle, tout en conférant à la dimension corporelle de l'existence une pleine légitimité philosophique, ignore ou contourne la question de la sexuation des corps. Interrompu avec Simone de Beauvoir qui fait de la corporéité féminine une notion-clef de sa réflexion, ce déni laisse la place à une interprétation critique et négative destinée à devenir hégémonique : le corps des femmes les enferme dans l'immanence et les prive de la liberté transcendante réservée aux hommes.
Raisons politiques, n°1, février 2001. Observateur avisé de la « démocratie pure » telle qu’el... more Raisons politiques, n°1, février 2001.
Observateur avisé de la « démocratie pure » telle qu’elle se présente à lui aux États- Unis, Tocqueville trouve aussi dans ce pays les conditions d’une coexistence harmo- nieuse de la religion chrétienne et des exigences de la modernité politique. Au-delà de la séparation des ordres temporel et spirituel, c’est au niveau plus profond de la convergence des principes qu’il situe l’accord théologico-politique américain. Cette interprétation a servi de fondement à toutes les analyses ultérieures qui ont fait de la nation américaine le cadre exemplaire de l’intime imbrication du politique et du reli- gieux. Il convient pourtant de revenir sur ce qui constitue à l’évidence une illusion rétrospective : la puissance explicative du puritanisme des premiers colons nous a caché la difficulté avec laquelle le fameux « mur de séparation » avait été édifié, elle permet aujourd’hui de rendre compte de résurgences du religieux au sein de la vie publique américaine sans se laisser abuser par leur efficacité politique.
Tocqueville is not only the observer of pure democracy as it is in the United States. He also finds in this country the conditions of an harmonious coexistence between christian religion and the demands of modernity. He places the American theologico-political agreement beyond the separation of temporal and spiritual orders, and more deeply on the level of. a convergence of principles. This interpretation has been the model of all subsequent analyses which take the American nation to examplify a framework where politics and religion intimately overlap. One has to go back over what is certainly a retrospective illusion. The strengh of the setller’s puritarism has hidden from us the dif- ficulty with which the “famous” wall of separation had been erected. It now helps to describe the reappearance of religion within American public life without overestima- ting its political efficiency.
Article synthétisant l'ouvrage : Camille Froidevaux, "Ernst Troeltsch. La religion chrétienne et ... more Article synthétisant l'ouvrage : Camille Froidevaux, "Ernst Troeltsch. La religion chrétienne et le monde moderne", PUF, "Sociologies", 1999.
Camille Froidevaux-Metterie, 2023
Agréable ou pénible, exaltante ou angoissante, intime et sociale, la grossesse est une aventure à... more Agréable ou pénible, exaltante ou angoissante, intime et sociale, la grossesse est une aventure à la fois profondément individuelle et éminemment politique.
La philosophe Camille Froidevaux-Metterie a passé du temps en immersion dans une maternité, elle y a rencontré des femmes enceintes qu’elle a interrogées sur leur expérience vécue du corps enceint. À travers ces paroles singulières qui disent la troublante transformation physique, les sentiments de joie ou de rejet, les innombrables injonctions – au silence, au bonheur, au poids idéal –, c’est le double mouvement de l’aliénation et de la réappropriation du corps des femmes qui se déploie.
En pensant ce qui ne se pense pas, en questionnant ce qui est considéré comme naturel, Camille Froidevaux-Metterie poursuit son travail d’élaboration d’un féminisme incarné qui place l’intime des corps sur le chemin de la libération.
Camille Froidevaux-Metterie, 2021
Longtemps, les femmes n’ont été que des corps, définies par leurs fonctions sexuelle et maternell... more Longtemps, les femmes n’ont été que des corps, définies par leurs fonctions sexuelle et maternelle. La révolution féministe les a délivrées de ce carcan, mais elle a aussi dévalorisé le corps féminin. N’est-il pas pourtant le nœud singulier de notre rapport à nous-même et au monde ?
Nourrie de la pensée de Simone de Beauvoir, la philosophe Camille Froidevaux-Metterie propose de le saisir pour ce qu’il est : le socle de la domination masculine et le lieu possible d’une pleine émancipation. Sa pensée progresse au fil d’une exploration de ces événements corporels qui scandent la vie des femmes, de l’enfance empêtrée à la ménopause invisibilisée, de la honte adolescente à la découverte de la jouissance, de l’épreuve du réel maternel aux ravages de la violence sexuelle. Au fil de ces étapes, où l’écriture en première personne résonne avec les voix plurielles des femmes, l’autrice pose les jalons qui leur permettront de reprendre possession de leurs corps, jusqu’au plus intime d’elles-mêmes. Son féminisme incarné s’attaque au socle même du patriarcat et renouvelle, à l’écoute des luttes les plus contemporaines, les fondements théoriques du féminisme.
Camille Froidevaux-Metterie, 2020
Après avoir été dans les années 1970 au cœur de tous les combats, le corps des femmes a ensuite q... more Après avoir été dans les années 1970 au cœur de tous les combats, le corps des femmes a ensuite quasiment disparu du champ féministe. Tout s'est un peu passé comme si les femmes avaient dû payer leur émancipation du prix de l'oubli des conditions incarnées de leur existence. Jusqu’à ce que, au début des années 2010, une nouvelle génération de féministes entreprenne de réinvestir le corps des femmes dans ses dimensions les plus intimes (règles, clitoris, violences sexuelles). Curieusement, les seins sont restés en dehors de cette dynamique alors même qu'ils condensent toutes les grandes problématiques sexistes et patriarcales. À partir d’une enquête auprès d’une quarantaine de filles et de femmes, j’ai exploré l’expérience vécue de le corporéité féminine au prisme des seins. Abordant tous les thèmes qui y sont associés (puberté, apparence, sexualité, grossesse, maladie), je montre que la condition contemporaine des femmes occidentales est faite des fils mêlés de l’objectivation-aliénation d’un côté, de la réappropriation-libération de l’autre. Ma démarche est celle d'un féminisme phénoménologique inscrit dans le sillage de Simone de Beauvoir et de Iris Marion Young.
Le féminisme a produit bien plus qu'une dynamique d'égalisation des conditions féminine et mascul... more Le féminisme a produit bien plus qu'une dynamique d'égalisation des conditions féminine et masculine, il a profondément transformé nos sociétés occidentales en initiant un double processus de féminisation du social et de masculinisation de l’intime.
Par-delà les mécanismes qui nourrissent les inégalités, les discriminations et les violences, il faut ainsi pouvoir repérer que nous sommes en train de vivre une mutation à l'échelle de l'histoire humaine : la convergence des genres se dessine qui annonce l’advenue d’un individu générique.
Dans l’horizon d’un monde devenant neutre et égalitaire, la condition incarnée de nos existences revêt un nouveau sens. Affranchie des déterminismes tant naturels que culturels, la sexuation des corps se conçoit désormais au prisme de la singularité, comme un projet relevant de la libre volonté individuelle.
Pour les femmes qui n’ont longtemps été que des corps, il s’agit d’éprouver une condition paradoxale, écartelée entre aliénation et libération. Analyser les modalités de l’expérience vécue du féminin, c’est alors définir ce dernier comme un rapport à soi, au monde et aux autres qui passe spécifiquement par le corps.
Il s'agit de penser le corps des femmes au prisme de la double expérience vécue de l’aliénation e... more Il s'agit de penser le corps des femmes au prisme de la double expérience vécue de l’aliénation et de l’émancipation selon une démarche phénoménologique inscrite dans le sillage de Iris Marion Young. Camille Froidevaux-Metterie analyse notamment le mouvement #metoo comme une étape de la dynamique de réappropriation par les femmes de leur corps dans ses dimensions intimes qu'elle appelle le "tournant génital du féminisme".
Explorant les thématiques corporelles féminines (maternité et non-désir d’enfant, menstruations et ménopause, seins et normes esthétiques, organes génitaux, sexualité et plaisir), elle montre que le temps est venu de réclamer pour tous ses sujets la liberté et l’égalité qui forment le cœur du projet féministe.
Les États-Unis présenteraient le cas unique, dans le monde occidental, d’une démocratie ayant rés... more Les États-Unis présenteraient le cas unique, dans le monde occidental, d’une démocratie ayant réservé à la religion une place à part dans la vie politique : voici une affirmation qui fait aujourd’hui figure de lieu commun. En ne retenant que les manifestations d’une certaine religiosité publique, on oublie de rappeler que la République américaine est fermement laïque, le Premier amendement garantissant la séparation des Églises et de l’État. Surtout, on passe à côté de la spécificité de ce pays qui explique le sentiment d’étrangeté qu’il nous inspire.
Deux forces contradictoires y coexistent : un esprit de religion que l’on peut ramener à la volonté de placer l’ordre civil sous tutelle chrétienne, et un esprit de laïcité qui tend à l’inverse à cantonner la religion dans la sphère privée. Au cours de l’histoire, ces deux forces ont alterné par vagues successives, sans que jamais l’édifice laïque ne soit véritablement menacé. La synthèse a longtemps été assurée par la notion de « religion civile » qui associe idéal libéral et parrainage divin de la nation en une sorte de credo civil commun.
Si l’égalité entre les sexes définit l’horizon des femmes et des hommes de notre temps, il demeur... more Si l’égalité entre les sexes définit l’horizon des femmes et des hommes de notre temps, il demeure que les unes et les autres s’assument comme des sujets féminins ou masculins. L’expression de leur sexuation paraît ainsi relever autant, sinon plus, de leur inclination personnelle que d’une quelconque fatalité sociale ou naturelle. Dans les sociétés où prime l’individualisme démocratique, l’incarnation dans une singularité sexuée devient la marque même de l’individualité.
C’est cette expérience subjectivement vécue que le présent ouvrage, fruit d’une collaboration entre chercheurs du Québec et de France, se propose d’étudier, dans un esprit pluridisciplinaire.
Abordant la question sous ses deux versants théorique et empirique, il met au jour un rapport à soi et au monde inédit, orienté vers l'horizon de l'égalité de sexes, déterminé par le primat social de l'individualisme, mais portant toujours une certaine incarnation de la différence de sexe.
Marc Chevrier est professeur de science politique à l’Université du Québec à Montréal et Camille Froidevaux-Metterie est professeure de science politique à l’Université de Reims Champagne-Ardenne et membre depuis 2010 de l’Institut Universitaire de France.
Ont aussi contribué à cet ouvrage :
Delphine Cézard, Daniel Dagenais, Isabelle Gusse, Denis Jeffrey, Justine Marillonnet, Christina Morar, Agnès Pelage et Olivia Samuel (avec Sara Brachet, Carole Brugeilles, Anne Paillet et Catherine Rollet).