Sur l’entropie et le paysage : à propos de Robert Smithson (original) (raw)
La deuxième guerre mondiale a laissé au coeur de l'histoire européenne un trop vaste désert. Du Havre à Dresde et Stalingrad, ce ne sont que champs de ruines à la surface du sol et dans les esprits, la bombe de Hiroshima a fait renaître l'hypothèse de l'Apocalypse. Les activités artistiques occupent une place singulière du mouvement politique et intellectuel, littéraire et esthétique qui construisit, sinon des réponses, du moins des attitudes face à ces interrogations extrêmes auxquelles chacun eut sa manière de répondre. Dans ces circonstances, les artistes ont souvent cherché dans l'effervescence des avantgardes du début du siècle l'inspiration et le vocabulaire susceptibles de les aider à réanimer une scène sinistrée dans le climat délétère des années de guerre. En adoptant un regard historien surplombant, tout semble se passer, dans les années qui suivent, comme si la grande parenthèse ouverte par la première guerre mondiale se refermait avec la fin de la seconde, et que l'esprit de 1913-1915 réapparaissait avec sa gouaille et son invention, son radicalisme et ses questionnements. D'un côté fleurit une abondante production sur l'héritage du formalisme et de l'abstraction, dans laquelle Clement Greenberg verra l'accomplissement de la modernité picturale, de l'autre, des profondeurs de la catastrophe, remonte une interrogation radicale sur la tradition du tableau elle-même, où se précipite, dans une alchimie complexe, l'esprit dada et duchampien et les vapeurs de l'inconscient sur les braises duquel souffle toujours l'esprit surréaliste. Sur l'entropie et le paysage : à propos de Robert Smithson Images Revues , Hors-série 5 | 2016