Miroir de la Préhistoire ; en croisant le regard de l'Homme de Spy. Analyse sémio-pragmatique d'une reconstitution anatomique en archéologie (original) (raw)

La reconstitution de l'Homme préhistorique et de son habillement dans la muséographie en France

On aurait tort de sous-estimer le rôle des images dans la médiation scientifique. D’autant plus lorsqu’il s’agit de la représentation humaine d’hommes et de femmes du passé. Dès les origines de l’archéologie, puis dès les premiers ossements découverts, des reconstitutions ont été proposées. Cette question de la reconstitution de la figure humaine n’est pas propre à la Préhistoire. On pourrait la poser pour d’autres périodes historiques et elle pourrait s’étendre sans mal à d’autres aspects de la culture matérielle, comme l’habitat par exemple. Cependant, s’il est bien une période de l’Histoire où l’on manque de preuves visuelles pour se figurer nos « semblables lointains » et où l’humain justement est en jeu, c’est bien celle de la Préhistoire. Ici, la question de ces images de reconstitution est cruciale et pose une véritable problématique pour plusieurs raisons. Dans un premier temps, c’est d’abord son impossibilité qu’il faut évoquer. Il est impossible de proposer une image parfaitement juste de ces périodes, pour le Paléolithique Supérieur, et a fortiori pour les périodes plus anciennes. Les preuves sont ténues et par nature parcellaires. C’est même un point polémique pour certains chercheurs, gênés par ces reconstitutions qui les dérangent éthiquement parlant, préférant un certain flou, une évocation de silhouettes ou des ombres chinoises... Pourtant, du fait de la « consommation de l’image » actuelle, on ne peut se contenter de cette réponse. Car il continuera d’y avoir des images de reconstitutions humaines pour illustrer des articles scientifiques. C’est une certitude. Si les scientifiques s’en désintéressent, cela suppose qu’ils laissent la place à des gens moins scrupuleux qui proposeront des reconstitutions sur la seule base de leur profonde conviction – souvent grandement héritée des images du XIXème siècle. Il sera toujours bon de critiquer après coup... La caricature de l’Homme des Cavernes est encore bien indéboulonnable aujourd’hui dès qu’on sort du milieu des spécialistes et des amateurs éclairés, sans aucun doute du fait de la force d’oeuvres de fiction comme Rahan ou La guerre du feu qui marquèrent pour longtemps l’imaginaire du grand public. Mais écartons nous de la fiction à laquelle les scientifiques laissent toute licence, et revenons à notre étude a priori moins complexe, celle de la muséographie. Ici, il devrait d’emblée y avoir les « meilleurs résultats », puisque les plus proches de la connaissance scientifique, les plus « neutres » peut-être en terme de prise de position artistique ? Rien n’est moins vrai. Au-delà d’une vision critique des images proposées du XIXème siècle jusqu’à aujourd’hui, y a-t-il des bases sur lesquelles travailler pour être au plus juste des connaissances scientifiques ? Quelle méthodologie employer ? L’archéologie peut-elle donner des outils plus faciles d’accès aux illustrateurs pour permettre de meilleures reconstitutions ? Peut-on définir des impossibilités ? Des incohérences ? Des hypothèses « honnêtes » ? Quels sont les indices dont devraient se servir les illustrateurs travaillant sur des reconstitutions pour la médiation scientifique ? Comment ne pas arriver à des « arlequins » de la préhistoire, selon le terme d’André Leroi Gourhan, composés de petits morceaux de connaissances récoltés sur des temps très longs et des espaces très éloignés ? Pourrait-on définir une image reconstituée juste d’une image fausse ? Sur quels critères ? A l’échelle de ce mémoire, nous prendrons pour exemple les sépultures avec parure des grottes Balzi Rossi (dites parfois Grottes de Grimaldi ou Grottes de Menton), à 200m de la frontière italienne (côté italien), datées pour la plupart du Gravettien, et nous essayerons de voir comment, à partir d’un exemple précis, on peut envisager la reconstitution du vêtement et de l’apparence d’hommes, de femmes ou d’enfants préhistoriques. A travers cette étude, nous essayerons de définir une nouvelle méthodologie pour produire des fiches explicatives documentées, détaillées et très visuelles à l’intention des illustrateurs et des personnes voulant faire de la reconstitution.

Le point de vue de l’archéologie préventive

Marcigny C. et Fontaine S., 2021 – Le point de vue de l’archéologie préventive, in. Daire M.-Y., Lopez-Romero E. et Motte E. (dir.), Threat to the coastlines and their cultural heritage: What are the challenges in the face of climate change? / Menace sur les littoraux et leur patrimoine culturel : quels enjeux face aux changements climatiques ? », CReAAH, UMR 6566 ed., Rennes, p. 52