2023. Communication d’entreprise et bien-être animal (original) (raw)

M. Friant-Perrot et N. de Grove-Valdeyron (eds.), Les 20 ans du règlement sur la législation et la sécurité alimentaire dans l’Union européenne : Bilan et perspectives, 2023

Abstract

Le foisonnement d’informations aux consommateurs sur les conditions de traitement des animaux d’élevage aurait théoriquement de quoi susciter de l’espoir. En France, l’industrie des productions animales est aujourd’hui plus opaque que celle du nucléaire. Or une transparence accrue sur l’état des pratiques du secteur rendrait possible l’exercice, sur les entreprises concernées, de pressions de nature à la fois politique (risque de renforcement de la réglementation) et marchande (risque de remise en cause de certains partenariats commerciaux, de boycott des consommateurs ou de désinvestissement par certains investisseurs éthiques), susceptibles de déboucher sur une amélioration progressive du traitement des animaux. Toutefois, la communication sur le bien-être animal des entreprises s’apparente aujourd’hui plus souvent à un plaidoyer pro domo vague et non justifié qu’à une réelle mise en transparence des pratiques. Nous sommes ainsi bien loin de l’information précise, objective et comparable qui rendrait possible une authentique régulation par l’information. Nous n’en sommes pas même au stade où l’on pourrait espérer que l’information suscite une vraie prise de conscience de l’importance des enjeux de protection animale jusqu’aux niveaux les plus élevés de la hiérarchie des entreprises. Bref, il reste beaucoup à faire pour rendre possible une régulation par l’information en matière de bien-être animal. Une telle régulation par l’information ne constituerait certes pas la panacée : la priorité devrait être, plutôt, à des transformations substantielles de la réglementation sur le bien-être des animaux d’élevage, afin que celle-ci protège mieux les animaux qu’elle ne le fait aujourd’hui. Bien que l’Union européenne soit souvent présentée parmi les « bons élèves » de la protection animale, la législation européenne reste, en effet, très en deçà de ce qui serait nécessaire pour garantir le bien-être animal3. D’une part, quantité de mauvais traitements et mutilations sont autorisés. D’autre part, les moyens à la disposition des services d’inspection sont très insuffisants. Cependant, l’équilibre des forces politiques en présence n’est pas favorable à une amélioration globale et significative de la législation sur le bien-être animal dans le secteur agroalimentaire4. Dans ce contexte, il faut se résoudre à ne pas désespérer trop vite des potentialités de la régulation par l’information : peut-être que c’est la meilleure option dont nous disposions dans le contexte institutionnel actuel. Qui plus est, les politiques informa¬tionnelles peuvent utilement compléter et/ou préparer des transformations plus substantielles. L’expérience montre ainsi que l’étiquetage obligatoire du mode d’élevage des poules pondeuses a contribué à augmenter la demande d’oeufs élevés en plein air, et que les déports de consommation observés vers le « hors-cage » ont contribué à rendre politiquement acceptable la fin – aujourd’hui annoncée – de l’élevage en cage des poules dans l’Union européenne. Afin de généraliser un tel cercle vertueux, par lequel la communication aux consommateurs favorise une amélioration significative du traitement des animaux, le droit actuel devrait néanmoins connaître un certain nombre de transformations. Ces dernières ne se situent pas seulement au niveau – relativement superficiel – des règles juridiques, mais aussi au niveau – plus fondamental – des hypothèses et des valeurs qui irriguent nos conceptions du droit économique en général, du droit de la consommation et du droit du commerce international en particulier. Et c’est ainsi qu’après avoir évoqué la prolifération des allégations relatives au bien-être animal dans la com¬munication d’entreprise (I), je présenterai les principales transformations juridiques à opérer en vue de rendre possible une régulation par l’informa¬tion des consommateurs en matière de bien-être animal (II).

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