Documents ou monuments ? Les textes littéraires dans la panoplie méthodologique des histoires du paysage (original) (raw)
Soit un retable dans une église d'une petite ville de Rhénanie. Soit, conservé parmi les archives de cette même ville, un contrat daté de 1471, se rapportant à l'évidence à l'exécution du dit retable. Pour l'historien de l'art, cet accord écrit est susceptible de venir éclairer le tableau qu'il étudie, tandis que de son côté, l'historien du droit aura peut-être intérêt à jeter un oeil sur la peinture pour mieux comprendre le texte en question. Tel est l'exemple auquel Erwin Panofsky avait recours pour illustrer la distinction épistémologique entre « monument » et « document » : le statut de n'importe quel matériau provenant du passé dépend ainsi de la manière dont l'aborde l'observateur, selon qu'il le considère comme « objet » ou bien comme « instrument » de sa propre investigation 1. L'opposition de ces deux niveaux d'utilisation n'est pas forcément si facile à établir, comme l'ont bien noté Michel Foucault et Jacques Le Goff 2 , depuis que l'historiographie issue de l'école des Annales s'est précisément mise à transformer les documents en monuments. « Là où on déchiffrait des traces laissées par les hommes, là où on essayait de reconnaître en creux ce qu'ils avaient été », l'histoire « déploie une masse d'éléments qu'il s'agit d'isoler, de grouper, de rendre pertinents, de mettre en relations, de constituer en 1