À l'écoute de La Plaine. Écologie urbaine d’une scène musicale à Marseille (original) (raw)
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Par ce texte, il est question d'insister sur une dimension particulière de l’analyse d’engagements musicaux dans le territoire, laquelle participe de manière dialectique à leur appréhension en tant qu’activités situées. Conjointement à l’examen de la circulation de formes musicales à l’intérieur d’une scène visant à faire apparaître des réseaux d’activités, il convient d’interroger les conceptions et définitions mobilisées par les acteurs (définition des activités propres notamment) à la fois autour des formes musicales mobilisées mais également à propos du territoire et du local (ville/quartier). Cette analyse permet de rendre compte des modalités relationnelles qui unissent ces collectifs d’acteurs à des objets culturels à l'intérieur d'un territoire (mobilisé par leurs activités) et de chercher à saisir les enjeux culturels et sociaux de ces événements. Il s’agit ainsi de contribuer à une écologie des formes culturelles, selon cette double modalité culturelle et urbaine de l’environnement.
Corinne à Tivoli: vers une anthropologie musicale du paysage chez Germaine de Staël
2021
Porteuse d'une mélancolie dont la harpe devient, à son époque, un instrument privilégié, mais aussi composante essentielle de la dramaturgie romanesque 1 , la musique occupe une place considérable dans l'imaginaire esthétique de Germaine de Staël, et ses représentations nourrissent les pages les plus novatrices de son écriture. C'est certainement la raison pour laquelle l'oeuvre de l'auteure de Corinne est devenue, depuis les années 90, l'un des objets d'étude importants pour les chercheurs qu'intéresse la fascination exercée par l'art musical sur les écrivains, théoriciens et artistes du premier XIX e siècle, soit à une époque de changement profond du paradigme esthétique européen 2. Nous savons, en même temps, que l'un des apports les plus durables de la pensée de Germaine de Staël est d'avoir « territorialisé » les phénomènes littéraires et culturels en les inscrivant dans la fameuse opposition Nord-Sud qu'elle réussit à imposer à l'imaginaire de son siècle. Comment, dans ces conditions, la question de l'articulation entre sa fibre musicale et les nombreuses représentations du paysage que l'on retrouve dans Delphine et Corinne, ou l'Italie, ne se poserait-elle pas ? 3 Comment, surtout, n'inviterait-elle pas à se pencher sur le rapport que Germaine de Staël entretient avec la peinture : un art dans lequel toute forme d'intérêt pour le genre mineur qu'est encore le paysage au crépuscule du XVIII e siècle devient révélateur d'un choix esthétique 4 ? C'est cette articulation complexe entre paysages et musiques que cet article analysera, en observant les formes qu'elle revêt dans Corinne ainsi que ses enjeux esthétiques et épistémologiques,
La Plaine à Marseille ou la démocratie emmurée (AOC media, 2018)
Depuis le 29 octobre dernier, la Plaine à Marseille est ceinte par un mur de béton de 2,5 m de haut. Ce qui était jusqu'à cette date la plus grande place publique de la ville a fait l'objet d'un plan de « requalification » – soit une privatisation lucrative. Alors que d'autres quartiers sont laissés à l'abandon, cet emmurement est le symbole de la violence des politiques d'aménagement urbain et de l'échec de la démocratie. À Marseille, un nouveau paysage, entre prison, état de siège, camp d'internement, est apparu. Depuis mardi 29 octobre 2018 se déploie autour de la plus grande place de la ville, la place Jean Jaurès, appelée plus communément la Plaine, une ceinture de béton de 2,5 m de haut. Ce jour-là, la pluie tombe dru, ajoutant du sinistre au monstrueux, floutant la violence disproportionnée du dispositif face à quelques dizaines de protestataires détrempés – assez peu soutenus par le gros de la population locale il est vrai. Séparés des opposants par des cordons d'agents de police et de CRS, les ouvriers disposent à l'aide de machines géantes des éléments en L, 50cm plus hauts que ceux qui ont été utilisés pour interdire l'accès au plus grand site d'enfouissement de déchets radioactifs en France, celui de Bure. Leur fonction, est-il annoncé, est de « sécuriser » le long chantier au terme duquel la place sera entièrement « requalifiée ». Serait-ce un nouveau « mur de la honte » ? La place la plus populaire, la plus vivante, la plus hétéroclite et la plus polyvalente de la ville pourra-t-elle résister au sort de « montée en gamme », de « saut qualitatif » et d'« attractivité » que la municipalité et sa société d'aménagement locale, la Soleam, lui réservent ? Dans le temps existait sur cette place un plan d'eau dont le centre accueillait une île miniature plantée de 4 magnolias, qui sont toujours là. Les enfants pouvaient naviguer dans une barque que manoeuvrait un faux matelot. Cela s'appelait « faire le tour du monde ». Pour quelques sous, on embarquait pour la Chine, l'Amérique, l'Australie, on tirait son mouchoir pour dire adieu aux parents puis célébrer les retrouvailles. La démocratie comme fin ne peut être atteinte que par des moyens eux-mêmes démocratiques. Entre la Plaine qui promettait aux enfants un beau et long voyage, et la place désormais cernée d'une barrière de béton au-delà de laquelle la circulation automobile et pédestre est compactée à l'extrême, se loge tout ce qui sépare la place publique propice aux modes de vie démocratiques de la place qui ne l'est pas. Pour qui souscrit au principe énoncé par John Dewey, selon lequel la démocratie comme fin ne peut être atteinte que par des moyens eux-mêmes démocratiques, il y a peu de chance que la Plaine le devienne.
Parcs et jardins en écoute, Points d'ouïe pour l'oreille (ou)verte
2019
Sans doute de par mes premières amours et études, mêlant le paysage (au sens d'aménagements paysagers, ou du paysagisme), et la musique, les sons, je traverse aujourd'hui, dans mes explorations urbaines, mais aussi hors cités, de nombreux parcs et jardins. Lieux que j'apprécie énor-mément, comme espaces de calme, de biodiversité, de promenades, d' explorations sensibles, de ressourcements, de rencontres, d' expérimentations sonores… Souvent, ce sont de petits, ou grands oasis urbains, au niveau acoustique en tous cas, terrains privilégiant des échanges où la parole et l' écoute peuvent se déployer sans efforts, lieux de ressour-cements apaisants, contrepoints à une densité urbaine parfois frénétique. Des lieux que je qualifie parfois de ZADs (Zones Acoustiques à Défendre). Je réfléchis, depuis déjà quelques années, à bâtir une thématique liée aux paysages sonores, dans un sens géographique et sensible du terme, s'appuyant essentiellement sur l'arpentage auriculaire, mais aussi pluri-sensorielle, de parcs, jardins, promenades urbaines, coulées vertes, qu'ils soient jardins botaniques, de curés, potagers, romantiques, à la Française, Zen, villages de charbonniers, Parcs culturels, jardins ouvriers, partagés… Si l' écoute reste le pivot centrale de mes propositions, il n' en demeure pas moins qu'un jardin, objet paysagé et quelque part architectural, reste naturellement multisensoriel et peut donc s' entendre par et dans tous les sens.
Espaces et lieux de musique : le musicien, l’architecte, le spectateur et le politique
2009
Michael Werner, directeur d’etudesDenis Laborde, charge de recherche au CNRSPatrice Veit, directeur de recherche au CNRS Espaces et lieux de musique : le musicien, l’architecte, le spectateur et le politique Dans le cadre de ce seminaire mensuel, a raison de seances de quatre heures, nous avons poursuivi l’investigation sur les differents espaces (physiques, sonores, sociaux, symboliques) qui structurent l’execution et l’ecoute de la musique. Les questions abordees ont ete de plusieurs types ...
Musique et fabrication d’espaces urbains : les sons de Belleville, Paris
2019
Cet article analyse la fabrication de l’espace social urbain par les interactions creees grâce a la musique des migrants dans le quartier de Belleville, ancien faubourg ouvrier du Nord-Est parisien. Depuis l’entre-deux guerres, ce quartier a accueilli plusieurs vagues d’immigration (Armeniens, Grecs, Juifs polonais, Algeriens, Tunisiens, Chinois, populations d’Asie du sud-est, etc.) et des arrivees plus eparses de migrants de tous pays. Sa population actuelle est un veritable kaleidoscope de differentes nationalites, cultures et couches sociales. A travers l’analyse ethnographique des pratiques musicales collectives, cet article contribue au debat ouvert sur la multiethnicite et l’integration dans le quartier ; une controverse issue d’une opposition dialectique entre ceux qui defendent l’idee qu’a Belleville il y a un veritable brassage culturel et social et ceux qui affirment l’existence d’une « societe partagee », fragile mosaique de communautes qui partagent le meme espace sans s...