« Ceux qui ne boivent pas perdent le chemin de leurs ancêtres ». Évolution des usages sociaux de l’alcool dans une communauté indigène des Hautes Terres du Chiapas (original) (raw)

BOIRE AVEC LES MORTS ET LA PACHAMAMA Une anthropologie de l’ivresse rituelle et festive dans les Andes boliviennes

Engager une anthropologie de l’ivresse rituelle et collective dans un contexte festif – notamment funéraire - andin s’avère un champ de recherche fécond et fascinant tant la chicha, cette boisson épaisse de maïs fermenté, contient tout un monde de significations et l’ivresse, dont elle découle, favorise diverses formes de mise en relation avec le monde animé environnant et avec les morts. En ce sens, elle est performative puisqu’elle permet à ces entités d’exister et de devenir de sérieux interlocuteurs pour les humains. À partir d’une ethnographie dans la région andine de Cochabamba (Bolivie), dans la communauté paysanne quechua de Qhoari et dans le village également quechua d’Arani, l’ébriété et le boire collectif sont analysés comme une action qui consolide le lien social, renforce l’identité de groupe et rapproche du sacré. L’ivresse est alors recherchée, désirée et valorisée. En somme, elle est un moyen de communication qui permet d’établir des relations réciproques aussi bien entre les humains eux-mêmes qu’entre ces derniers et la Pachamama, tous les êtres qui peuplent la nature animée. C’est à travers la boisson alcoolisée que les hommes font entendre leurs requêtes auprès de ces entités surnaturelles car ce n’est qu’en état d’ébriété avancée que l’on peut dialoguer avec elles, qu’elles nous apparaissent en alter ego. En effet, l’humide est symbole de vie, le sec renvoie à la mort. Les offrandes de libations et les sacrifices sanglants favorisent la réhydratation et l’alimentation des entités diaboliques et des morts. Prolongeant cette réflexion, c’est à travers des mécanismes somme toute très proches de ceux à l’œuvre lors des offrandes que le corps du buveur, saccagé par l’alcool, presque moribond, prend tout son sens sacrificiel. Mots-clés : Alcool, Andes, chicha, Ivresse, jeux, Pachamama, réciprocité, rites funéraires, carnaval, sacrifice de soi, saqra. Summary An Andean anthropological focus on ritual and collective intoxication within a festive setting – in particular in funeral contexts - leads to a prolific and fascinating field of research since chicha, the thick fermented corn beverage, contains a world of meaning. The drunkenness it engenders promotes diverse ways of creating links with not only the surrounding animated world but also with the dead. In that sense, it is performative because it makes exist these entities who become serious interlocutors for the humans. This ethnography conducted in the Andean region of Cochabamba (Bolivia), in the Quechua peasant communities of Qhoari and in the nearby village of Arani, analyzes inebriation as a collective action that consolidates social ties, strengthens group identity and even brings the sacred closer. Intoxication is therefore sought, desired and valued. In short, it is a means of communication that allows the establishment of reciprocal relations among humans and between them and the Pachamama (all beings that inhabit animated nature). It is through liquor that human requests can be heard by supernatural entities who can dialogue with them only when they are inebriated, appearing through an alter ego. In fact, wetness is the symbol of life; dryness refers to death. Offerings of libations and blood sacrifices promote the rehydration and nurturing of evil entities and the dead. It is through mechanisms very similar to those at work in such offerings that the body of the drinker, wrecked by alcohol, almost agonizing, acquires its sacrificial meaning. Keywords: Alcohol, Andes, carnival, chicha, drunkenness, funeral rites, games, inebriation, Pachamama, reciprocity, Saqra, self-sacrifice.

2017, "La part des morts : Les usages de l’alcool dans le culte du palo monte afro-cubain", Civilisations, 66 (1& 2)

Alcohol is omnipresent in the practice of the Afro-Cuban initiating religion of Palo Monte. Rum, aguardiente, beer, pure alcohol fl ow during rituals, consultations, ritual cleansings and divinations; they ares drunk, shed, spat, blown, infl amed, smeared. Alcohol serves to purify the adepts, to destroy the evil, to satisfy the spirits ... Its uses are highly framed and codifi ed, they require the mastering of various techniques and gestures and presuppose the internalization of certain interpretative schemes concerning its eff ectiveness. In addition, the use of alcohol varies considerably from one initiation group to another. Some encourage a high consumption of rum, which makes the ceremonies particularly festive or convivial, others use it in moderation in order to keep participants in a state of optimal concentration. For others, alcohol is a performative lever and the mediums are seen to swallow whole bottles of rum because the dead who take possession of their bodies are “alcoholic”.

Politiques baniwa de la boisson : usages et représentations de l'alcool chez des indiens évangéliques de l'Amazonie brésilienne

Nuevo Mundo Mundos Nuevos, 2016

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L’abus d’alcool chez les peuples indigènes du Brésil : une évaluation comparative

Drogues, santé et société, 2005

Résumé Chez les autochtones du Brésil, l’alcoolisme, que l’on tient responsable des hauts taux de violence et de suicide, représente l’un des principaux problèmes de santé. Toutefois, les organismes gouvernementaux qui s’occupent de la santé des autochtones n’ont que récemment commencé à soutenir la recherche et les programmes de contrôle et de prévention. En réalité, sauf pour certains stéréotypes ou diagnostics biomédicaux, les habitudes de consommation d’alcool des autochtones sont méconnues. Des données comparatives sur l’abus d’alcool et d’autres substances ailleurs dans le monde ont été examinées dans le but de prouver que le milieu social est beaucoup plus révélateur que les critères biomédicaux universels. Le présent article se fonde sur ces données, ainsi que sur le peu de connaissances accessibles en ce qui concerne la consommation actuelle d’alcool chez les autochtones du Brésil, pour remettre en question la pertinence du terme « alcoolisme » dans la mise sur pied de prog...

"Transformation de la consommation d’alcool chez les Nanaïs du Bassin de l’Amour" in Civilisations, vol.66, numéros 1 & 2 - L’alcool rituel et les ethnographes. Usages religieux des conduites d’alcoolisations.

Civilisations, 2017

L’utilisation ancienne de la vodka dans les pratiques chamaniques, chez les Nanaïs de l’Extrême-Orient de la Sibérie, variait en fonction du rite : tantôt destinée aux esprits, souvent par le biais du chamane, lors des rites funéraires, de pêche ou encore de commémoration des morts, tantôt objet d’échange, lors des rites de mariages, la vodka soulignait le contrôle du spécialiste sur lui-même, apportait l’apaisement des esprits et affirmait le statut social. Dans le contexte moderne, dans cette population très russisée, dont les grands rites publics ne se font plus, la consommation d’alcool a changé de symbolisme, rentrée désormais dans la sphère privée, et fait même l’objet d’un combat dans l’implantation de nouveaux mouvements religieux. L’exposition de l’usage des libations dans les rites nanaïs anciens, dans un premier temps, suivi, dans un deuxième temps, de la comparaison avec sa perception aujourd’hui, permettent de montrer en quoi la consommation d’alcool depuis la disparition des chamanes est liée à ce qui a survécu des pratiques chamaniques, tout en étant aussi liée à la définition de l’alcool par le groupe culturel dominant russe.

" Libations et repentirs. Du bon usage des boissons alcoolisées dans le Venezuela colonial" , Espaces Caraïbes, Université des Antilles-Guyane, n°2, 1994.

Espaces Caraïbes, 1994

"Libations et repentirs. Du bon usage des boissons alcoolisées dans le Venezuela colonial", Espaces Caraïbes, Université des Antilles- Guyane, Pointe-à-Pitre, n°2, 1994, p. 199-214.

A la recherche de l’identité introuvable (perdue ?) chez des vitiviniculteurs latinoaméricains

A la recherche de l’identité introuvable (perdue ?) chez des vitiviniculteurs latinoaméricains , 2023

Les producteurs du nouveau monde viticole s’intéressent assez peu à l’emploi des indications d’origine (du type IGP et AOP). Et pourtant, ils savent bien qu’il faut des moyens pour rendre une identité aux produits de chaque region, afin d’ajouter de la valeur à leurs productions vitivinicoles. Voire, de dissuader la filière des risques inhérents à la logique de production de masse1 et du règne du secret industriel, encore présent parmi un nombre (heureusement) décroissant des producteurs. Si une certaine resistence s’affiche encore envers des signes de traçabilité et de transparence auprès des consommateurs, une telle réserve correspond plus à des aspects financiers (i.e., à des coûts excessifs marqués par la faute de subventions). Il n’est pas question de savoir si des tels éléments contribuent ou non à proteger l’identité de leurs unités de production, voire à apporter soudainement des avantages comparatives (que la perspective industrielle voudrait exclusives des grandes domaines viticoles). Comme idée reçue, pour parvenir à produire des vins susceptibles de certification, il faudrait des volumes plus grands.

La production d'un réseau de sur-parenté: histoire de l'alcool et désintoxication chez les Algonquins

Drogues, santé et société, 2005

L’article part de deux constats, établis à l’aide de données ethnographiques en terrain algonquin et corroborés par la littérature ethnologique. D’une part, les Algonquins ne veulent plus que leur image publique soit associée à l’abus de psychotropes ; d’autre part, l’identité algonquine repose sur l’appartenance à une communauté, qui implique pour ses membres des droits et devoirs et qui attend d’eux un dévouement à la collectivité. Les études sur les Amérindiens, sur leurs villages et leurs réseaux urbains, sont fondées sur l’idée que les communautés trouvent leur légitimation tant dans le partage d’un ethos (des valeurs et des traits culturels) que dans les relations de parenté qui existent entre ses membres, relations qui sont aussi des liens sociaux. L’article veut montrer que la prise en charge des problèmes qui affectent les communautés algonquines a donné lieu à l’émergence d’un nouveau lien social, qui remet parfois en question les contraintes requises par la parenté. Pour ce faire, je présente une vision historique de l’origine des problèmes, qui inclut les points de vue algonquins, et j’explique comment les différents recours thérapeutiques ont permis de redéfinir le système de valeurs sociales et les codes comportementaux.