Les “Poèmes nègres” par Tristan Tzara et le mythe du primitivisme (original) (raw)

« Rythmes & sonorités. Poèmes nègres par Tristan Tzara »,

dans Christine Le Quellec Cottier et Claude Leroy (dir.), Constellation Cendrars, n°5, Paris, Classiques Garnier, 2021, p. 23-39.

Entre 1916 et 1920, Tristan Tzara mène un étonnant travail de recherche à la Bibliothèque centrale de Zurich. Il y consulte de nombreux ouvrages d’ethnologie, desquels il transcrit, traduit ou adapte des récits africains et océaniens. Cette nouvelle matière littéraire est interprétée lors des «Soirées nègres », accompagnée de musiques et de danses. Dans ce dossier, la liste complète des sources utilisées par l’auteur accompagne une sélection de Poèmes nègres. Mots-clés : Tristan Tzara, Poèmes nègres, ethnologie, chants, Zurich

Le primitivisme dans la poésie des avant-gardes historiques

2006

Le primitivisme dans la poésie des avant-gardes historiques Liminaire : Rappel contextuel La question du primitivisme a constitué, pendant cette quinzaine d'années 1905-1920, un centre de réflexion remarquablement dynamique, au point que, selon J. C. Middleton, dès 1914 elle est en passe de devenir un cliché 1. Si son importance pour la peinture a été plus d'une fois étudiée 2 , le travail reste en partie à faire en littérature où les pistes sont plus diffractées, mais où la réflexion a été menée avec la même rigueur et peut-être plus de radicalité. L'article qui suit se propose de présenter la recherche poétique, et ce liminaire de rappeler dans quel cadre plus général s'inscrit cette réflexion. Un travail précis de contextualisation exigerait bien sûr de remonter bien en amont de ce début de XX e siècle, qui n'est qu'un des jalons de l'histoire de la rencontre de l'Occident avec le reste du monde, où se construit l'imaginaire du primitif, fait d'inquiétante familiarité et d'altérité réflexive. L'expansion coloniale nourrit le goût pour l'ailleurs et remplit les cabinets de curiosités, les muséums d'histoire naturelle, bientôt les premiers musées d'ethnographie 3 et les expositions universelles 4. 1 J. C. Middleton, « The Rise of Primitivism an its Relevance to the Poetry of Expressionism and Dada », in The Discontinuous Tradition. Studies in German Literature in honour of Ernest Ludwig Stahl, P. F. Ganz ed., Oxford, Clarendon Press, 1971, p. 193. Un témoignage de Claire Goll le confirme : « Les éléments les plus sensibles de notre génération voulaient détruire l'homme citadin entraîné aux obligations mondaines, le robot soumis aux rites sociaux afin de retrouver l'être véritable, spontané, primitif. Depuis les figures grinçantes, hagardes, jusqu'au désarroi bouffon et les caricatures grotesques, toute la mythologie artistique de l'époque tournait autour du désir de réorienter le destin de l'homme. [...] D'autres trouvaient la vérité dans les arts primitifs, l'art nègre ou océanien, l'ethnologie. Carl Einstein, en pleine guerre, écrivit le premier et le plus important livre sur la sculpture noire. » (La Poursuite du vent, s.l. [Paris], Olivier Orban, 1976, p. 75-76). 2 La bibliographie est trop riche pour être présentée intégralement. Je me contenterai de renvoyer au remarquable ouvrage

Fantômas ou le mythe de l’homme moderne chez les poètes des années 1910 et 1920

Paru dans Belphégor, vol. 11, n° 1, “Fantômas dans le siècle”, Sándor Kalai et Robin Walz (éd.), 2013. À partir d’un choix de textes d’Apollinaire, de Max Jacob, de Cendrars, d’Aragon et de Robert Desnos, cet article explique l’importance conférée au personnage de Fantômas par le fait qu’il incarne pour toute une génération « l’homme moderne », dandy d’un genre nouveau, impassible et amoral, maîtrisant à merveille les technologies et les médias de son temps.

Dada et les "primitivismes", Les Cahiers du CAP, n°4, Paris, Publications de la Sorbonne, 2017.

In art history, "primitivism" usually refers to artists' attraction to the arts of Africa and Oceania. Examination of the formation of this concept shows that Dada was originally excluded from it. However, a tenuous web of facts and artworks reveals that this exclusion is unjustified. Using a historiographical and museographical approach, this article demonstrates that Dada acted as an indicator of the shortcomings of "primitivism" taken to be a reservoir of formal quotations. Dada requires the concept to be radically re-examined, with a more process-based relationship with the arts known as "primitive", a term that Tristan Tzara rejects as such and that Dada invalidates. Dada's later display in museums also poses the same problems as the arts of Africa and Oceania, and the article shows why and how the movement was perceived as a "savage" by a certain tradition in art history.

Retour sur le « roman nègre »

Cahiers d'études africaines

Pierre Halen, « Retour sur le « roman nègre » », Cahiers d'études africaines [En ligne], 212 | 2013, mis en ligne le 16 décembre 2015, consulté le 20 avril 2019. URL : http://journals.openedition.org/ etudesafricaines/17533 ; DOI : 10.4000/etudesafricaines.17533 © Cahiers d'Études africaines Pierre Halen Retour sur le « roman nègre » À propos de la réédition d'un diptyque de Jean Sermaye «COLONIES (NOS) : s'affliger quand on en parle. Dictionnaire des idées reçues », G. Flaubert.

Le primitivisme et ses territoires

Nouvelle Fribourg, n°4, « La littérature et ses espaces » [en ligne], 2018.

Le primitivisme littéraire et ses territoires Cet article s'intéresse à la représentation de l'espace des lointains dans la poésie d'avant-garde des années 1910, alors que l'intérêt pour l'art « nègre » s'affirme dans la capitale française. Il s'agira de montrer que la référence au paysage « sauvage » n'est plus lointaine mais assimilée à Paris, participant d'une forme de cosmopolitisme. L'intention de ces poètes-Cendrars, Cocteau, Soupault, Apollinaire-semble moins de décrire les territoires et cultures extraoccidentaux que de s'en servir comme impulsion pour renouveler la poésie et marquer leur marginalité dans le champ littéraire français. Mots-clés : Primitivisme-espace-Afrique-poésie-avant-garde This article focuses on the representation of remote places in avant-garde poetry of the 1910s, while the interest in "black" art is growing in the French capital. I aim to show that the reference to the "wild" landscape is no longer perceived as distant but is integrated into Paris, and that it participates in a form of cosmopolitanism. The intention of these poets-Cendrars, Cocteau, Soupault, Apollinaire-is less to describe non Western territories and cultures than to use them as an impulse to renew poetry and expose their marginality in the French literary field.

Poème sonore/chant maori. Enquête sur le « Toto-vaca » de Tristan Tzara

Gradhiva no. 38 « Paroles spoliées. Trajectoires de la littérature orale », 2024

À partir d’une recherche philologique de provenance, cet article retrace l’histoire de « Toto-vaca », un chant māori qui circule encore aujourd’hui en tant que poème sonore attribué à Tristan Tzara. Au-delà des différentes tentatives d’appropriation, de décontextualisation et de réinterprétation dont il a été l’objet, il importe surtout de considérer l’origine du texte, dont les premières traces remontent au carnet de notes d’un ethnologue. Afin de mettre sur un pied d’égalité la circulation occidentale des oratures mises à l’écrit et les interprétations autochtones du texte, la collaboration avec des acteurs locaux issus des communautés sources s’est révélée nécessaire. Exposant les résultats de cette enquête collaborative, l’article met en évidence les apports de la recherche philologique de provenance pour l’édition de littératures orales qui ont fait l’objet d’une appropriation. Using philological provenance research, this article traces the trajectories of “Toto-vaca”, a Māori song still circulating today as a supposed sound poem and alleged creation of Tristan Tzara. Alongside Tzara’s and others’ various attempts at appropriation, decontextualization, and reinterpretation, the focus is on the origin of the text, which can be traced back to an ethnographer’s notebook. To confront the Western circulation of recorded oratures with indigenous textual approaches on an equal footing, cooperation with local actors from the source communities is essential. This article reports on the results of such collaborative research on “Toto-vaca” and outlines what the findings of philological provenance research can mean for the edition of recorded oral literature.

La figure de l’Amazone et la pensée des sexes chez George Sand

MuseMedusa, no 7, 2019

Partant du principe que le mythe des Amazones est d’une grande efficace pour penser la différence des sexes, cet article étudie les convocations explicites et implicites de ce mythe dans l’œuvre de George Sand, à une époque où le féminisme n’a pas encore vu le jour et où la revendication publique de l’égalité des sexes à laquelle invitent les Amazones est périlleuse. L’usage double que Sand fait du mythe – effaçant ses origines mais empruntant certaines de ses idées fortes – montre l’efficace de celui-ci pour penser les rôles sociaux de sexe et donc la pertinence qu’il y a à interroger sa présence dans la littérature et les arts pour répondre à des questions de genre. Trois lieux d’observation sont choisis pour cette étude : la convocation explicite des Amazones dans l’œuvre fictionnelle et les écrits intimes de Sand ; ses personnages de femmes fortes ; la récurrence d’un type : la femme qui exerce une royauté morale sur un village ou une commune.