L'imaginaire de la ruine dans la littérature contemporaine : l'exemple de The Road de Cormac McCarthy (original) (raw)

« Out there the gray desolation » : l’engloutissement de l’horizon dans The Road (2006) de Cormac McCarthy

Etudes de stylistique anglaise, 2010

comme préface à toute parole, une sorte d'immense hécatombe, un déluge préalable, plongeant dans une mer complète toute la création. » Maurice Blanchot, « La littérature et le droit à la mort » (36) Abstract: The Road by Cormac McCarthy reads like a variation on a traditional motif in McCarthy's work: it describes the odyssey of two characters through the American wilderness. But unlike McCarthy's earlier novels, whose landscapes evoke magnificent frescoes, space and time in The Road turn out to be strikingly contracted and narrowed, prey to a shrinking process that contaminates the figures of speech, which are minimalist and terse. The road, which is the novel's privileged metaphor of surviving in a derelict world, has no horizon. Thus the novel's terrifying gloom describes a hopeless and horizon-less quest along a road that finally stumbles over nothingness.

Réflexions sur la figuration du livre comme ruine

Le livre au corps

Je vous construirai une ville avec des loques, moi ! Je vous construirai sans plan et sans ciment Un édifice que vous ne détruirez pas… 1 Henri Michaux Dans N'espérez pas vous débarrasser des livres 2 , un livre d'entretiens avec Umberto Eco, Jean-Claude Carrière rapporte qu'un futurologue interrogé au sommet de Davos 2008 sur les phénomènes allant « bouleverser l'humanité dans les quinze prochaines années 3 », en avait cité quatre principaux et tenus pour assurés, le quatrième 4 étant la disparition du livre. U. Eco reformule la proposition sous forme de question-« Le livre va-t-il disparaître du fait de l'apparition d'Internet ? », question qui, pertinente en son temps, relèverait désormais de l'idée fixe inlassablement reformulée 5 : De deux chose l'une : ou bien le livre demeurera le support de la lecture, ou bien il existera quelque chose qui ressemblera à ce que le livre n'a jamais cessé d'être, même avant l'invention de l'imprimerie. Les variations autour du livre n'en ont pas modifié la fonction, ni la syntaxe, depuis plus de cinq cents ans. Le livre est comme la cuiller, le marteau, la roue ou le ciseau. […] Le livre a fait ses preuves et on ne voit pas comment, pour le même usage, nous pourrions faire mieux que le livre. Peut-être évoluera-t-il dans ses composantes, peut-être ses pages ne seront-elles plus en papier. Mais il demeurera ce qu'il est. 6

Rêver ou penser l'Anthropocène ? Usages de la ruine dans la non-fiction de l'extrême contemporain Dreaming or thinking the Anthropocene? How 21 st century narrative non-fiction uses ruins

Interfaces, N°49 Ruines contemporaines, 2023

Cet article explore la manière dont plusieurs écrivains de non-fiction et artistes du réel de l’extrême contemporain pensent et figurent l’Anthropocène à l’aide des ruines contemporaines. Pour faire face à l’invisibilité relative et la complexité extrême du phénomène, ils recourent souvent à l’emprunt, celui de ruines issues d’autres catastrophes. Par un phénomène de surimpression hallucinatoire, ils projettent la catastrophe écologique sur les ruines existantes en récupérant la puissance de l’imaginaire atomique ou l’effacement idéologique de la désaffection économique. Ce « catachronisme » (Srinivas Aravamudan, 2013), parti-pris d’un certain nombre d’artistes et écrivains contemporains, fait néanmoins écran, en esthétisant le réchauffement climatique. Quels usages alternatifs de la ruine sont, à l’inverse, mobilisés par les artistes qui souhaitent cultiver un regard exempt de fascination mélancolique ? En s’appuyant sur quelques exemples (Anna Lowenhaupt Tsing, William T. Vollmann, Pierre Huyghe), nous tenterons de voir quelle ligne de partage se dessine entre esthétisation et mobilisation des ruines.

Le décor de ruines : L’espace comme promesse d'une mémoire

(for English scroll below) Si la bibliographie portant sur le motif des ruines dans le domaine pictural et littéraire s’avère pléthorique, il s’agit plus rarement d’étudier la présence et la valeur des ruines comme décor de films. Pourtant, à la suite de la Seconde Guerre mondiale, les décombres font l’objet d’une représentation filmique inédite. Montrées comme résultat des bombardements ou marqueur philosophique du néant, les ruines de Berlin et de Rome deviennent un décor insolite où les plus grands cinéastes viennent inscrire la fiction (Rossellini, Wilder, Tourneur). Mais les ruines de Varsovie sont également l’objet d’une attention singulière : le cinéaste Andrzej Wajda place les personnages de son film "Kanal" (1957) dans les ruines reconstituées de l’Insurrection de 1944. En vue de relater des événements traumatiques du passé polonais, le cinéaste puise dans les ruines une dimension mythologique pour représenter l’irreprésentable. Leur traitement atteint une puissance métaphorique inédite dans "Cendres et diamant" (1958). Combinant deux approches, esthétique et philosophique, ce mémoire propose de décrire la présence des ruines dans les deux films, de caractériser leur « climat tragique » et d’étudier le sens qu’elles acquièrent pour la mémoire. En prenant appui sur les archives du cinéaste, l’enjeu central est de saisir la façon dont l’espace imaginaire des ruines ne représente pas l’histoire mais convoque, tel un « monument », les mythes romantiques et invite à une réflexion sur le temps. CINEMATIC LANDSCAPES OF RUINS : SPACE AS PROMISE OF MEMORY Only few books focuses on ruins as a cinematic space. Yet, after the Second World War, many cities in Europe were destroyed and some directors decided to turn the rubbles into a film setting. Shown as the consequence of bombings or as philosophical sign of nothingness, ruins of Berlin or Rome became the unusual setting where great filmmakers such as Rossellini, Wilder and Tourneur wanted to shoot their films. But fields of ruins of Warsaw were also the location of a famous feature film : "Kanal" (1957) by Polish director Andrzej Wajda. Telling a traumatic event of Polish past (Warsaw Uprising), the film bestows memorial and mythological dimensions to the ruins. That specific manner to consider rubbles is also obvious in "Ashes and diamonds" (1958) by Andrzej Wajda. Combining esthetical and philosophical approaches, the magister thesis proposes to describe the singular presence of ruins in this films, to study their « tragic atmosphere » and to find their memorial meaning. Considering many documents of Wajda’s archives as a potential source of answers, the main issue is to handle the way the imaginary space of ruins does not represent history but, as a « monument », lets the spectator abandon himself inside romantic myths and reflection on time.

Esthétique des Ruines et Dystopie dans le roman Anglais postmoderne : une lecture de Riddley Walker, (1980) de Russel Hoban, Cloud Atlas, (2004) de David Mitchell et The Book of Dave (2006) de Will Self

2016

Les concepts de dystopie et de postmodernisme ont pris une dimension nouvelle depuis une vingtaine d’annees environ.Ces concepts, qui ont fait l’objet d’etudes multiples tant sur le plan litteraire qu’historique, pour ne citer que ces deuxdomaines-la, ont revele d’autres perspectives qui, de notre point de vue, n’ont pas encore ete abordees. Il s’agit parexemple du rapport entre la dystopie et les ruines. A travers cette these, nous avons etudie les concepts de dystopie et deruines tel qu’ils apparaissent dans trois oeuvres (Riddley Walker, (1980) de Russel Hoban, Cloud Atlas, (2004) de DavidMitchell et The Book of Dave (2006) de Will Self) a la lumiere des evenements contemporains et en rapport avec lepostmodernisme. Ce corpus a permis de souligner des liens entre dystopie et postmodernisme grâce a la valeuresthetique, ethique, poetique et politique des ruines dont l’ubiquite nous a fait considerer les oeuvres dystopiquescomme un portrait du monde ou nous vivons. Cette these a par ...

La littérature de la catastrophe : disparition, destruction, désastre

Colloque International des Études Françaises et Francophones des 20ème et 21ème siècles, 2019

Stéphane Mallarmé a exploré les limites de la littérature de multiples façons (disparition du poète, dépassement du livre et fin de la littérature), expérience qu’il a résumée par la sentence « la destruction fut ma Béatrice ». Maurice Blanchot s’est constamment référé à l’œuvre de Mallarmé, qui inspire les titres de ses ouvrages les plus importants comme L’Espace littéraire ou Le Livre à venir. Après les expériences cataclysmiques face auxquelles le questionnement avant-gardiste et théorique d’une fin de la littérature s’est trouvé subsumé par celui historique et concret d’une disparition de l’homme et du monde, Blanchot a défini à la fin du vingtième siècle une littérature du désastre, référence ultime une fois encore mallarméenne. Quelle différence y-a-t-il entre le désastre blanchotien et le désastre mallarméen ? Quelle signification prend le désastre blanchotien dans le contexte historique de la fin du vingtième siècle ? Comment s’illustre-t-il poétiquement ? Dans cette présentation, j’analyserai l’importance du concept de désastre chez Mallarmé pour le travail critique de Blanchot. En particulier, je montrerai dans quelle mesure l’œuvre emblématique de Mallarmé, Un coup de dés jamais n’abolira le hasard, est centrale pour la pensée de Blanchot. De plus, j’analyserai comment Blanchot a repris et déplacé ce concept mallarméen tout au long de son œuvre. Enfin, je montrerai la pertinence contemporaine de la définition blanchotienne d’une littérature du désastre en montrant comment elle s’est incarnée dans l’œuvre de poètes comme Paul Celan ou José Ángel Valente.