Cause du voile et lutte pour la parole musulmane légitime (original) (raw)

Les féministes musulmanes en France et le voile islamique : un débat contentieux

UCLA L'Indécis au Précis, 2019

Presque rien n’est plus controversé en France aujourd’hui que le voile musulman. Depuis 1989, des factions sont pour et contre son interdiction. L’interdiction du voile soulève des différences d’opinion sur de grands sujets de société : l’intégration, le racisme, les principes de laïcité et le féminisme moderne. Les voix des femmes musulmanes elles-mêmes ont eu du mal à se faire entendre dans ce débat. Dans cet article, je décris les débats autour du voile au sein des organisations et des personnes musulmanes et féministes en France qui militent pour ou contre l’interdiction du voile. D’abord je montre comment le voile a divisé les musulmanes qui s’identifient en tant que féministes en créant deux grandes conceptions du féminisme : le féminisme musulman et le féminisme islamique. Les femmes qui soutiennent le féminisme musulman sont largement laïques et veulent « sauver » les autres musulmanes de l’oppression. De l’autre côté, les féministes islamiques sont plus disposées à utiliser la religion et clament la liberté des femmes de porter le voile ; pour ces dernières, l’interdiction du voile est une forme de néocolonialisme, de racisme et de sexisme. Cet essai explique les différents points de vue des féministes musulmanes sur cette controverse.

L'islam au coeur de la fabrique de l'identité nationale : la preuve par le voile

Cet article revient sur les débats qui ont ont propulsé la thématique de l'identité nationale au devant de la scène politico-médiatique et montre, à partir des controverses autour du voile, comment l'islam est mobilisé dans l'imaginaire national pour servir de contre-modèle dans la définition de l’identité française. Tiré de l'ouvrage "Immigration et identité nationale": une altérité revisitée, sous la direction de Séverine Dessajan, Nicolas Hossard et Elsa Ramos; l'Harmattan, 2009.

Le voile, le renversement du stigmate et la querelle des femmes

Les femmes entre violences et stratégies de liberté, Maghreb et Europe du Sud, C. Veauvy, M. Rollinde & M. Azzoug (dir.), Editions Bouchene, pp.213-222, 2004

Le voile islamique, symbole contemporain du renouveau piétiste de l'Islam dans les sociétés musulmanes, depuis la fin des années 70, est apparu depuis les années 80 dans d'autres contextes, notamment chez les jeunes issues de l'immigration en Europe, et a lancé le débat sur les limites du multiculturalisme et de la reconnaissance du fait religieux. C'est en France, à partir de 2002, que ce débat a pris une ampleur à l'échelle nationale, invitant à se prononcer l'ensemble des intellectuels représentatifs de la classe politique et de la vie associative ainsi que les portes paroles du féminisme. L'irruption du voile à l'école et au sein d'une société où priment les valeurs de la laïcité (défendue avec fierté comme une exception française) et le respect de l'égalité des sexes, a provoqué la formation d'une opinion publique en faveur de son interdiction. Ceux qui ne s'étaient jamais côtoyés jusque-là se sont retrouvés pour défendre à la fois deux principes jusqu'alors dissociés, la laïcité et l'égalité des sexes, principes qui en sont venus à s'entrelacer et à s'ériger en remparts contre l'intégrisme religieux. Au cours de ce même débat, le terme de foulard s'est vu subitement remplacé par celui de « voile », terme qui renvoie ainsi plus explicitement à l'Islam. Malgré les réticences à réduire le débat sur la laïcité à la question du foulard (« à un bout de tissu » comme l'ont dit certains , voulant relativiser sa place) ou le souhait d'élargir la définition de la laïcité dans sa relation aux différentes religions, et non simplement à l'Islam (souhait formulé par le rapport de la commission Stasi 1), c'est pourtant le foulard qui a formé le ciment de ce débat, non sans déclencher les passions collectives, voire même une « hystérie politique ». 2 Au lieu d'être ouvert, à plusieurs voix, ce débat monocorde et consensuel, dont le son s'amplifiait à mesure que gagnait la « contagion » 3 , a réassuré la cohésion sociale et l'esprit républicain par la célébration de la laïcité et de l'égalité des sexes. Ce débat est néanmoins le témoin de la rencontre entre la République et l'Islam, une rencontre où le sujet féminin est central «entre violences, incertitudes et stratégies de liberté ».

Jeunesse musulmane : de l’accès à une parole politique à un islam apaisé

Morgane Devries et Altay Manço, L’islam des jeunes en Belgique Facettes de pratiques sociales et expressives, Paris, L’Harmattan, 2018

L’analyse présentée synthétise l’ensemble des débat oraux et écrits que le travail de l’IRFAM a permis de mobiliser en 2018. Morgane Devries et Altay Manço y permettent de dégager les principales conclusions et recommandations pour une présence constructive de l’expression des jeunes citoyens issus des populations immigrées de culture musulmane dans l’espace sociopolitique belge.

Féministes musulmanes au Québec : subjectivités politiques médiatisées face à la construction des pratiques de voilement comme problème public

Mémoire de maîtrise, 2017

La question de la laïcité soulève de vives tensions au sein de la société. La proposition gouvernementale du projet de loi no 60 sur la « Charte des valeurs québécoises » (2013) en est un des exemples révélateurs. Dans le cadre de ces débats, des arguments féministes ont été fortement mobilisés, tant pour appuyer que pour rejeter l’adoption de certaines mesures politiques. Ces polémiques ont rapidement ciblé un aspect du débat : le hijab porté par certaines femmes musulmanes, ce qui a eu pour effet de mettre les rapports ethnoreligieux à l’avant-scène des débats médiatiques et de relancer celui des questions féministes autour de l’émancipation des femmes, le hijab étant sujet à des interprétations fort différentes dans ce contexte. Dans le cadre de cette recherche, nous nous sommes intéressées aux prises de position politiques des féministes immigrantes de cultures musulmanes médiatisées au Québec, et ce, dans le cadre des débats sur la place de la religion dans l’espace public. Quelle est la nature de l’opposition entre ces femmes racisées et médiatisées? Quels éléments de contexte justifient et éclairent leur argumentaire en contexte québécois? Quel rapport à la nation la conception de la laïcité qu’entretiennent ces femmes engagées dans l'espace public révèle-t-il? Dans une perspective théorique puisant dans les études sur la blanchité (« whiteness studies ») et les féminismes postcoloniaux, nos analyses prennent pour objet les discours (argumentaires et témoignages personnels) et les représentations (sur la laïcité, l’égalité des sexes, l’islam, le racisme, etc.) de ces féministes racisées, en accordant une importance aux structures et aux facteurs sociaux qui les influencent (trajectoires et positionnements sociaux), et ce, afin de rendre plus sociologiquement intelligible les prises de position individuelles de ces féministes dans les débats publics. Nous avons dégagé 4 types d'idéaux types de féministes de cultures musulmanes présentes dans l'espace public et médiatique au Québec: le type « laïciste anti-islamiste », le type « nationaliste laïque républicaine », le type « pluraliste interculturaliste » et le type « pluraliste radicale ». Cette typologie a permis de mettre en relief certaines prédominances idéologiques ainsi que certaines postures nationalistes (au sens où l'entend Ghassan Hage) sous-tendant leur perception du traitement que l’État devrait réserver aux particularismes religieux (islamiques en particulier) dans l’espace public.

Dialoguer sur l’islam en contexte de polarisation

2018

L'étude retrace les résultats d'une recherche-action réalisée pour l'IRFAM (Institut de Recherche, Formation et Action sur les Migrations) à partir d'une expérience des forums citoyens dans le cadre de l’exposition « L’Islam, c’est aussi notre histoire » (Bruxelles, 2017-2018) Le projet de forums sur l’islam met en exergue différentes balises théoriques circonscrivant l’état des lieux de méthodes de dialogue interculturel, elles-mêmes inscrites dans des dispositifs socio-éducatifs. Si ces méthodes permettent de souligner l’importance d’une éducation non formelle dans le cadre d’un processus de débat démocratique relatif à l’islam, les conjonctures contextuelles et le climat ambiant dépassent bien souvent les réalités de terrain, poussant constamment les acteurs à s’interroger sur leurs pratiques professionnelles. C’est pourquoi il a été essentiel de préciser le cadre méthodologique et empirique du dispositif avant de présenter l’analyse des échanges et des enjeux qui s’y sont dégagés. En effet, le projet n’est pas étranger à l’intention politique d’endiguer la haine, les marques de rejet et d’incompréhension réciproque qui peuvent obstruer les relations de qualité entre personnes de confession musulmane ou non, en rehaussant le débat et en offrant un espace où le citoyen peut s’exprimer, en tant qu’acteur social sur un devenir commun. Les témoignages diffusés lors des forums et analysés ici rendent compte de trajectoires de vie de musulmans belges et du rapport qu’ils ont construit avec l’altérité. Les débats issus de ces rencontres permettent alors d’égrener différents facteurs auxquels il faut être attentifs lorsque l’on appréhende la diversité religieuse, et la place de la présence musulmane, plus spécifiquement, dans notre société. Enfin, est proposée une évaluation multiniveau susceptible d’éclairer les effets et les attentes des acteurs sociaux par rapport à un tel objet et à dégager des points d’attention dans la construction ultérieure de dispositif de ce type.

Le port du foulard dit « islamique » ou l’entre-deux culturel

ALTERNATIVE FRANCOPHONE, 2015

Cela fait plus d’une décennie que le foulard dit « islamique » alimente les débats : après avoir agité la sphère politique et fait l’objet d’un battage médiatique en France, voilà qu’il vient semer l’inquiétude et la division au sein de la société québécoise. Or, dans le présent article, nous souhaiterions désamorcer cette polémique en nous penchant à la fois sur les versets à l’origine de la « prescription » du voile, sur les phénomènes ayant motivé son abandon, à une certaine époque, et sur les raisons à l’origine de sa résurgence. Pour ce faire, nous examinerons, dans une perspective traductologique, les versets en question et le contexte qui les entoure pour montrer que la conception selon laquelle le port du foulard serait une obligation « religieuse » est erronée d’un point de vue sémantique et sociohistorique. Dans cette optique, nous rappellerons la dichotomie établie déjà entre les ibadât (versets traitant de la relation de l’être humain à Dieu — relation verticale — et rég...