Sur l'authenticité de cinq épigrammes grecques de la collection Erizzo (original) (raw)

Trois techniques de vérité dans la Grèce classique

Hermès, 1995

Aristote et l'argumentation «Dans toute société, écrit Foucault (1971, p. 10-11), la production du discours est à la fois contrôlée, sélectionnée, organisée et redistribuée par un certain nombre de procédures qui ont pour rôle d'en conjurer les pouvoirs et les dangers, d'en maîtriser Γ événement aléatoire, d'en esquiver la lourde, la redoutable matérialité». Il arrive que certaines de ces procédures soient ouvertement instituées, qu'en outre leur efficacité soit consciemment visée et mesurée et leur pouvoir codifié dans des règles : elles deviennent alors de véritables techniques discursives, maîtrisables par tous et transmissibles-en droit-à chacun, comme toute autre technique. Par une technique discursive, un certain type de discours précieux se détache de la masse indéfinie des discours possibles et se trouve doté d'une puissance légitime et d'une excellence reconnue. Les règles qu'elle énonce ont pour effet de raréfier le champ des discours socialement beaux ou vrais ou efficaces, de qualifier certains d'entre eux, de les distinguer comme discours admirables ou autorisés. Le V e siècle grec est sans doute l'inventeur anonyme de multiples techniques discursives, au nombre desquelles on peut citer l'écriture poétique, la rhétorique, l'argumentation dialectique et la démonstration scientifique. Promus ainsi, par la vertu d'une technique discursive, à la reconnaissance de tous, composés selon des procédures qui en garantissent la valeur insigne, les discours du poète, de l'orateur, du dialecticien ou du mathématicien atteignent à coup sûr le but que ne peuvent atteindre que par hasard les discours ordinaires. Il revient à Aristote d'avoir fait le point sur un siècle d'histoire de ces «techniques

E. SANTIN, A. TZIAFALIAS, Épigrammes signées de Thessalie, Topoi, n° 18.1, 2013, p. 251-282

– À l’intérieur de la vaste catégorie des signatures épigraphiques, il est possible de distinguer une section spéciale aux signatures des épigrammatistes, dont les premières attestations datent de l’époque hellénistique et qui perdurent jusqu’à l’Antiquité tardive. Dans la documentation épigraphique thessalienne qui rassemble plus de 6000 inscriptions, dont 200 métriques, les épigrammes qui portent la marque de l’auteur sont au nombre de sept. Deux textes sont signés par le même poète, circonstance très rare pour ce genre de documents. La plupart des épigrammes signées sont attribuables à la cité de Larissa et s’insèrent dans une fourchette chronologique assez large allant du IIIe siècle av. J.-C. au IVe siècle apr. J.-C. Un tel cadre topographique et chronologique nous confirme la vitalité culturelle de cette importante cité grecque depuis l’époque hellénistique au moins jusqu’à l’âge romain tardif. Nous présentons dans cet article les quatre textes non funéraires qui ne rentrent pas dans le corpus que j’ai publié en 2009. À l’intérieur de ce groupe, deux inscriptions demeurent encore inédites alors que les deux autres, déjà publiées, méritent d’être reprises.

Hermès Trismégiste, Pythagore et le marin égyptien

1. Chercheuse qualifiée au Fonds national de la Recherche scientifique Belge, Université Libre de Bruxelles. 2. Sur cette tradition, voir les deux volumes L'empereur Julien (I) De l'histoire à la légende et L'empereur Julien (II). De la légende au mythe, textes rassemblés par R. Braun et J. richer, Paris, Les Belles Lettres, 1987 et 1981. 3. Vers 800 après notre ère ? Pour le texte : Migne P.G. 96. 1251 sqq, et maintenant P. B. Kotter, Patristiche Texte und Studien 29, L a tradition relative à l'empereur philosophe Julien 2 fait connaître une curieuse fiction, dans laquelle Julien raille les chrétiens d'honorer un Christ né seulement deux fois, alors que certains personnages de l'hellénisme ont connu une triple génération. La Passio Artemii, un texte difficilement datable avec précision, a pour cadre la persécution de chrétiens par Julien. L'empereur aurait convoqué à Antioche deux prêtres chrétiens, Eugenios et Makarios, et après avoir discuté avec chacun des deux, les aurait fait torturer. Artemius, présent à la Cour, les aurait défendus et pour cette raison, aurait été lui aussi torturé et mis à mort 3 . Dans le passage qui nous occupe, Julien argumente avec le prêtre Eugène sur la supériorité du paganisme sur le christianisme en ces termes : Kai ; oJ Parabav th» nomiv sa» aj paiv deuton ei\ naiv tina to ; n tou' Cristou' mav rtura, kai ; th'» ÔEllhnikh'» sofiv a» aj mev tocon, diacleuav zwn e[ fh pro ; » auj tov n: Ouj kou'n, w\ talaiv pwre, oJ Cristov » sou di ; » a[ ra gegev nhtai… Kai ; eij ej pi ; touv tw/ kompav zei», eij si ; kai ; parae"Ellhsin a[ ndre» sofwvtatoi ouj mov non di ; » gennhqev nte», aj lla ; kai ; triv »: o{ te ga ; r ÔErmh'» oJ Trismev gisto» ej pikalouv meno», triv ton h\ lqen ej n kov smw/ , eJ auto ; n ej pignou ; », kaqw ; » aiJ iJ erai ; auj tou' kai ; qaumav siai biv bloi diagoreuv ousi, kai ; dia ; tou'to Trismev gisto» oj nomav zetai. ÔOmoiv w» de ; kai ; Puqagov ra» oJ touv tou metagenev stero», kai ; auj to ; » triv ton h\ lqen ej n biv w/ : provteron me ; n Aij guv ptio» gegonw ; » nauv klhro», e[ peita dae Eu[ forbo» oJ uJ fae ÔOmhv rou mnhmoneuov meno», e[ scaton de ; Puqagov ra» Mnhsav rcou uiJ o ; », Sav mio».

Variationnisme et épigraphie grecque antique

Genres épigraphiques et langues d'attestation fragmentaire dans l'espace méditerranéen Sous la direction d'Emmanuel Dupraz et de Wojciech Sowa Presses universitaires de Rouen et du Havre, 2015

Presses universitaires de Rouen et du Havre Une première série d'études porte sur les questions d'alphabet et de graphie. L'article d'Ignasi-Xavier Adiego porte sur la normalisation d'une variété d'alphabet lycien par le pouvoir politique à des fins de centralisation. Même le choix d'une forme pour tel graphème peut être un enjeu sociolinguistique significatif. Celui de Marie-Laurence Haack s'attache à un genre précis, celui des inscriptions alphabétiques étrusques, et montre que le choix de graver l'alphabet, attesté à plusieurs périodes, avait des finalités différentes selon l'époque. Marta Muscariello aborde les débuts de l'usage de l'écriture dans le Latium : les premières inscriptions, coupées de toute finalité pratique, servent de vecteur d'auto-représentation des élites. Giulia Sarullo, quant à elle, aborde le genre des textes en boustrophedon dans l'Italie archaïque : ce mode de gravure a été privilégié pour des textes officiels, contrairement à ce qui a lieu dans les aires helléniques dont ce type de gravure provient ; il y a donc là un choix fait par les populations d'Italie et non la simple reprise d'une pratique grecque.

Après l’inscription de la coupe de Nestor : disposition du texte et formes de transtextualité dans les épigrammes de l’époque archaïque en Grande Grèce et Sicile

GAIA 16 , 2013

L'épigramme inscrite sur la coupe de Nestor ( Pithécusses, env. 735-720 av. J.-C. 2 ), qui depuis sa première publication en 1955 n'a cessé de susciter le débat autant sur ses possibles interprétations que sur leurs implications 3 , est notre point de départ pour enquêter sur certaines inscriptions métriques de l'âge archaïque provenant du milieu colonial de l'Italie 4. Dans cette contribution nous utilisons le terme « intertextualité » en suivant un usage qui s'est récemment affi rmé aussi dans l'étude des rapports entre attestations épigraphiques et tradition(s) littéraire(s) (voir par exemple Hackstein 2010). Au cours du dernier demisiècle, le terme « intertextualité » a été décliné de manière très différente et selon de nombreuses acceptions. Nous faisons référence ici, en particulier, à la systématisation de la transtextualité mise en place par Genette (1982). Dans la présente contribution, nous utilisons et adaptons le terme « intertextualité » pour indiquer toute forme de relation entre une inscription métrique et la tradition poétique (de la citation à la traduction/adaptation d'un dialecte à l'autre jusqu'à l'attestation d'une tradition indépendante), et nous utilisons et adaptons le terme « architextualité » pour indiquer tout rapport entre les textes épigraphiques eux-mêmes en tant qu'appartenant à une même typologie (par exemple celle de l'épigramme de dédicace ; voir le point 3). Il faut remarquer que -mis à part les problèmes de terminologie -les rapports entre inscriptions métriques et tradition(s) littéraire(s) sont, à notre sens, loin de pouvoir être défi nis avec certitude. 5. Bien que les inscriptions métriques soient elles aussi des textes littéraires, nous adoptons ici pour des raisons pratiques la distinction courante entre « texte épigraphique » (c'est-à-dire attesté directement par les inscriptions) et « texte littéraire » (c'est-à-dire attesté indirectement par la tradition manuscrite et par les papyrus). 6. Pavese (1996, p. 3 et 7) a montré comment la découverte depuis la première restauration de la coupe, d'un nouveau tesson appartenant à la même coupe et qui malheureusement n'a pas été bien placé dans le dessin de l'inscription (voir les fi gures 1, 2 et 3, table 2 dans l'article cité), invalide la plupart des propositions d'intégration pour la première lacune (p. 8). Avec ce tesson l'espace pour l'intégration se réduit d'un peu plus de 2 mm. Parmi les intégrations qui ont été suggérées, celles qui restent possibles par rapport à l'espace sont, selon Pavese :

Critères d'authenticité des bornes romaines limousines anépigraphes et de leurs fragments

Depuis 2003, dix-neuf bornes et fragments, dont sept inédits, ont fait l'objet d'une étude morphologique approfondie sur le territoire des Lémovices. Le présent article défi nit et détaille les caractéristiques les plus pertinentes pour ce qui relève de l'authen-tifi cation de ces vestiges : le diamètre moyen des sections et sa diminution lorsque le fût de la borne est parcouru de bas en haut ; la conicité, sa raison d'être sur des pierres taillées pour être bornes dès leur premier emploi ; les non-circularités des sections du fût et leur intérêt archéologique, notamment lors de la reconstitution de bornes fragmen-tées ; le dévers de l'embase, sa signifi cation sur des monuments routiers dont la fonction était indicative. Pour l'appréciation ou la mesure de ces différentes caractéristiques, une instrumentation simple, précise et portable a été conçue et réalisée.

« Une série d'énigmes syriaques sous le patronage d'Aristote, d'Éphrem et d'Évagre le Pontique »

Parole de l'Orient, 2023

, présenté au XIIIe Symposium Syriacum (Paris, 4-9 juillet 2022). Le texte anonyme intitulé Autres [questions et énigmes] philosophiques et leur solution se compose d’un « recueil d[e soixante-douze] énigmes à sujet philosophique, embrassant la logique, spécialement les thèmes traités par Porphyre dans l’Introduction [Isagogè], la physique et aussi quelques concepts métaphysicothéologiques », précédées par onze définitions connues par d’autres gnomologies syriaques. Il fut édité en 1919 dans la Revue de l’Orient Chrétien avec une traduction française émaillée de passages n’offrant qu’une rétroversion en grec ancien. Aucune étude n’ayant été dédiée à ce texte, il convient de présenter sommairement le manuscrit et les textes qu’il renferme en vue d’étayer la datation estimée par les éditeurs. Nous analysons ensuite trois énigmes portant sur le symbolisme des lettres, dont certains détails se retrouvent dans Les Mystères des lettres grecques et le Sefer Yeṣira, ce qui permet de nous éclairer sur le milieu de composition. Enfin, nous émettons l’hypothèse que cette série de devinettes s’articule en fonction d’une tripartition hiérarchique des connaissances. Sur le plan du contenu, ce texte fournit un échantillon privilégié des horizons de la littérature sapientiale syriaque des VIe-VIIIe siècles, en conjuguant jargon péripatéticien, eschatologie chrétienne, exégèse ésotérique et visée pédagogique.

Le déchiffrement des timbres amphoriques grecs

COMMUNICATION le déchiffrement des timbres amphoriques grecs, par m. nathan badoud* De la façade atlantique du Maroc jusqu'à la mer d'Azov, du Pas-de-Calais jusqu'à l'Inde et à l'Afghanistan, quelque 300 000 timbres amphoriques grecs ont été mis au jour. Les vases sur lesquels ils ont été apposés servaient à transporter toutes sortes de denrées et de marchandises 1 , principalement par voie maritime, et souvent sur de très longues distances 2. La moitié d'entre eux, à peu près, provient de la seule cité de Rhodes, dont le territoire embrassait une partie de l'archipel du Dodécanèse et du continent asiatique en regard. Les centres producteurs de moyenne importance, comme Cnide et Thasos en Méditerranée, ou Sinope, Héraclée et Chersonèse en * Je sais gré à Denis Knoepfler et à Olivier Picard de m'avoir invité à présenter cette communication, dans laquelle je me suis efforcé de synthétiser et de développer quelques réflexions récemment publiées. Le texte a bénéficié de la relecture de Yan Greub, l'illustration des contributions 3. J.-C. Sourisseau, « La diffusion des vins grecs d'Occident du viii e au iv e s. av. J.-C., sources écrites et documents archéologiques », in La vigna di Dioniso : vite, vino e culti in Magna Grecia.

Remarques sur la représentation des séismes dans l'Égypte pharaonique

I. Rébé-Marichal, A. Laurenti, I. Boehm, J.-Ph. Goiran (éd.), Archéosismicité et tsunamis en Méditerranée. Approches croisées. Séismes et tsunamis dans l’Antiquité : données géoarchéologiques et textuelles, Table ronde de la Maison de l’Orient et de la Méditerranée, Lyon, 25 avril 2007, 2012