L’Histoire et les contraintes oulipiennes (original) (raw)

Être Oulipienne : contraintes de style, contraintes de genre ?

Analyses

Résumé Sans poser l’hypothèse d’un caractère genré de l’écriture – si l’écriture oulipienne apparaît factuellement comme un métier d’homme, il n’en découle pas nécessairement qu’elle ressortisse pour autant à un genre déterminé, et stylistiquement identifiable comme tel – on se propose ici d’interroger les raisons de l’apparente difficulté à être une auteure « à contraintes », en considérant en particulier les stratégies à l’oeuvre dans quelques textes de Michelle Grangaud, Anne Garréta et Michèle Audin.

L’Oulipo ou la Nouvelle Vague du Classicisme

Theleme Revista Complutense De Estudios Franceses, 2010

L'Oulipo établit un rapport nouveau avec les Anciens qu'il ne soumet pas à une dynamique destructive mais à une réévaluation : par son orientation analytique l'Oulipo repropose les oeuvres oubliées et relit les oeuvres déjà consacrées par la tradition. En ce qui concerne son rapport aux avant-gardes contemporaines, l'Oulipo, qui soutient l'idée d'une littérature volontaire, s'oppose au Surréalisme mais partage avec Tel Quel la conception ludique de la littérature et le propos d'une même réévaluation de l'écriture en tant que pratique fondée sur une conception artisanale du travail de l'écrivain. Au désir de rupture des conventions narratives du réalisme du XIX e siècle qui anime Tel Quel et le Nouveau Roman et qui ne propose qu'une innovation des procédés narratifs, l'Oulipo substitue une nouvelle approche du réel perçu dans ses transformations nombreuses et continues.

L’utopie antillaise et hawaïenne

L’utopie a la connotation d’un rêve impossible. D’ailleurs, il faut s’y habituer, l’utopie en général finit mal : soit parce qu’elle est victime d’une société extérieure corrompue (Paul et Virginie de Bernardin de Saint-Pierre), soit parce qu’il s’agit d’une anti-utopie (Brave New World d’Aldous Huxley). Cependant, rien dans la définition du concept n’indique la fin malheureuse comme inhérente au projet utopique. Dans les littératures antillaises et hawaiiennes, la fin heureuse n’est d’ailleurs pas abandonnée, même si elle est loin d’être évidente. En ce qui concerne les littératures européennes, il faut distinguer deux types d’utopie : les utopies “ naturelles ” chantant un mode de vie plus proche de la nature, inspiré d’un bonheur “ primitif ” antérieur au besoin de conquête et les utopies “ religieuses ”, sociétés organisées sur la base d’un enseignement, d’une parole révélée, inspiration de bon nombre d’anti-utopies. Du point de vue insulaire, les catégories ne sont pas tout à fait les mêmes. En effet, l’utopie “ naturelle ” va de pair avec une sacralisation du passé, ce qui ne surprend pas dans des sociétés dans lesquelles le religieux garde son importance. A ce passé idéalisé privilégiant un milieu rural sacralisé, s’oppose une vision du futur, détachée de tout contexte religieux. Ces deux façons de penser l’utopie sont celles d’une part de Gisèle Pineau, Xavier Orville, Lois-Ann Yamanaka, Lee A. Tonouchi et d’autre part de Patrick Chamoiseau, Raphaël Confiant, John Dominis Holt, Carlos Andrade et Joe Balaz. Dans les deux cas, l’utopie se distingue par deux thèmes majeurs : le sacré et l’insularité ou la ville idéale ainsi que par la création d’un système qui englobe tous les aspects de la société afin de la rendre crédible, “ réelle ”.

Oreste del Buono ou comment on écrit l’Histoire

La réécriture de l’Histoire dans les romans de la postmodernité, 2015

La mémoire est ambitieuse et conformiste, arriviste, égocentrique et mégalomane, avec beaucoup de snobisme elle privilégie l'exception par rapport à la norme. Oreste del Buono-La nostra classe dirigente Il est assez curieux de remarquer que deux genres littéraires qu'on a vu naître et se développer de façon singulière dans la modernité-c'est-à-dire le roman historique et l'autobiographie-incluent dans leur statut de fondation un élément essentiel : le mélange de faits réels et de pure invention. Cette analogie permet, entre autres, d'aborder leurs transformations ultérieures à la lumière d'une considération : si au début de la modernité les deux visages de cette nature hybride étaient rigoureusement séparés (selon la bipartition rigide entre « vrai historique » et « vrai poétique » proposée par Alessandro Manzoni), dans la postmodernité une telle division devient plus nuancée, problématique, incertaine. Une telle « mutation génétique » non seulement met en question le principe de vraisemblance, mais déforme de manière significative le pacte de lecture et, par conséquent, ce que Roland Barthes appelait le plaisir du texte. Les narrations historiographiques, mais on pourrait dire la même chose pour les narrations autobiographiques, visent en effet à imposer un principe de cohérence formelle à des matériaux d'origine extra-littéraire : dans le premier cas en retrouvant une certaine correspondance entre « le particulier de l'histoire quotidienne » et « l'universel des grands événements 1 » politiques et sociaux ; dans le second on réévalue l'apparente causalité des vicissitudes d'une vie en les insérant dans l'horizon unifiant de leur sens existentiel ou moral 2. Qu'arrive-t-il quand, au cours du xx e siècle, les termes de cette dialectique commencent à se confondre et à se superposer ? Et quand l'autobiographie se 1