Paul Eluard: Partage et/ou solitude de la parole, sur quelques paradoxes (original) (raw)

« Le paradoxe de l'image du mur chez Eluard »

1998

Le « mur » donne le la au poème Giorgio de Chirico, dont Michèle Aquien a proposé une lecture très intéressante lors de ce colloque. La répétition litanique de « mur » confère à ce vocable une existence langagière forte et en fait une matrice phonique2. Cette importance formelle souligne la rencontre d’une image appartenant aussi bien au répertoire iconographique du peintre Giorgio de Chirico (dont les tableaux sont imprégnés d’une architecture dépouillée : les seuls éléments spatiaux, murs, tours et places désertes, donnent un contour figuratif au vide) qu’au lexique éluardien dans son versant négatif et nocturne. Le lecteur n’est pas surpris. Il n’ignore pas combien l’écriture éluardienne s’est nourrie de l’expérience picturale qui lui était contemporaine. Dans le poème Giorgio de Chirico, la pluralité des murs assimile le mur à la muraille, comme pan d’une tour de défense ou de prison : le mur multiplié offre une hyperbole propre à ranimer la valeur figurée du mot mur qui, par ex...

La parole est une affaire d'essoufflement - In "Dans la Solitude de Bernard-Marie Koltès"

L’affirmation d’un désir par nature inconcevable et inintelligible, celui que le Dealer cherche à invoquer chez le Client, devient par le même biais l’aveu, chez le Dealer lui-même, d’un désir de l'inconcevable et de l'inintelligible. La charge lui incombe de susciter chez le Client ce dont lui-même, Dealer, ne peut « avoir l'idée » ni la « volonté » de désirer. Affirmation d'une hospitalité inconditionnelle, cette conjuration intime au Client de creuser le puits de sa mémoire, d’étendre l'abîme de son désir, au delà de ce qu'il sait posséder et de ce dont il peut se souvenir. Le Client est sommé, à son tour, d'évoquer un manque que lui-même ne connaît pas, qu'il ne saura ni nommer, ni identifier. Il ne veut, à l'image du Dealer, avoir à son tour aucune « idée » de ce que cette 'chose'-là peut être. Le Client aura d’une certaine manière pris le relais, emprunté le désir du Dealer pour la 'chose' inintelligible qui fut toujours déjà en lui-même. Cette conjuration de la 'chose' se dissocie du souvenir et évoque plutôt l’anamnèse: la reconnaissance, par l'agencement du Dealer, de ce que le Client possède mais ne sait pas et ne peut se représenter. Cette perméabilité entre individus permet au Client de devenir dépositaire du désir du Dealer, faisant de ce désir le sien au sens propre, afin de reconnaitre qu’il fut toujours déjà à lui seul. Ce savoir-faire définirait le Dealer dans toute son emprise: « C'est la fortune du commerçant qu'il existe tant de personnes différentes tant de fois fiancées à tant d'objets différents de tant de manières différentes, car la mémoire des uns est relayée par la mémoire des autres ».

L’influence du stoïcisme chez Pierre Abélard: la notion de consensus

Patristica et Mediaevalia, 2013

Hamelin, Guy. Medieval thinkers have been inspired by different ancient philosophical theses, which they have partially modified and adapted to their Christian belief. Abelard is certainly no exception, since he has been under the most various pagan influences of his time without abandoning his own religious convictions. Abelard's philosophy consists mainly of ancient borrowings, which come more often from indirect sources. The authority of Plato and Aristotle is obvious in almost all philosophical topics developed by Abelard. It is however more less known that Stoicism has also played an important role in his thought; especially in ethics with notions like consensus or actions morally indifferent. Stoic physics has also influenced his moral doctrine with the concept of affinity or preservation, which refers to a certain innate capacity in man to observe the natural law and, before the advent of Jewish and Christian laws, to progress toward his own salvation. Finally the famous precept dear to all Stoics of living in agreement with nature has received a favourable reception in Abelard's ethics, as well as the attitude of serene detachment, which he has encouraged in its Plantus. In the present paper, the objective is to expound the influence of the Stoic’s notion of assent, or its equivalent consent (consensus), on Abelard’s ethics, which serves him as a fundamental component to define moral trespass. More specifically, we first see Abelard's definition of sin, found in his Ethica, which presents a decisive step in clarifying what really constitutes this notion in the history of ideas. We examine after that the main usages made by the Stoics of the term assent. we can then realize that the passage of this Stoic concept from the epistemological sphere to the ethical has been recuperated by some Latin authors like Augustine, who uses the term in both areas, and later by Abelard himself, who restricts its usage to ethics by using instead consensus. We finally arrive at the conclusion that Abelard's ethics has not only been influenced by the most notable religious and philosophical thinkers, like Plato, Aristotle, Jerome and Augustine, but also by some Stoic philosophers, who were relatively unknown at the time and sometimes accessible only by some obscure intermediaries.

Deux Poèmes, Deux Poètes: Le Regard Analogue De Rimbaud Et D’Eluard Au Monde Du Rêve

Uludağ Üniversitesi Eğitim Fakültesi dergisi, 2016

Le voyage vécu ou imaginé, sous la vague de l'exotisme, conduise, le plus souvent, les poètes et les écrivains à chercher un meilleur sort dans "un ailleurs". Or, sous la forme la plus élaborée, l'exotisme est devenu un refus de la réalité, l'expression du rêve intérieur en allant jusqu'au merveilleux, ou irréel, dans les écrits des poètes comme Rimbaud au XIXème siècle et ceux des surréalistes comme Paul Eluard au XXème siècle. Cet article, dans le cadre de la discipline de la littérature comparée, vise à étudier la représentation d'un « autre » ou d'un « ailleurs » qui se manifeste sous forme de l'image, inscrit dans l'imaginaire. Par la lecture comparative des poèmes choisis de Rimbaud et d'Eluard, on envisage donc à mettre en évidence les liens d'analogie de l'imaginaire de ces deux poètes qui se rejoignent dans un même univers de rêve à l'intervalle d'un demi-siècle.

L’espace de la parole commune, à partir d’une œuvre de Jean-Paul Thibeau

revue ACTA IASSYENSIA COMPARATIONIS n°4/2006

Mon hypothèse de départ est que la prise de parole n’est pas la saisie du pouvoir à partir du moment où elle n’est pas gardée. Pour en discuter, notre cadre sera l’objet artistique Au Bord des Protocoles méta, élaboré par Jean-Paul Thibeau en 2001. Un protocole méta est un dispositif qui réunit, lors de séminaire, des participants hétérogènes autour d’expériences extra-artistiques. L’une de ces expériences a retenu mon attention. Il s’agit des espaces de discussion qui peuvent émerger d’un récit d’expérience. Comment combler l’écart entre expérience vécue (qui ne parle qu’à soi) et expérience communiquée (qui parle aux autres) ? Comment constituer une parole commune? Que dire de l’espace qu’elle forme ?

La personne et ses modes chez Pierre Abélard

La notion de personne – radicale pour la période médiévale et transversale aux champs de la théologie, la morale, le langage et la psychologie abélardienne – est, dans les mots du philosophe, plurielle. Elle signifie différemment pour le théologien, pour le grammairien, pour le rhéteur et le comédien. Qu’est-ce que cela engage ? De quel ordre est cette différence ? Peut-on y trouver un certain dénominateur commun ? Penser la « personne » et son équivocité suppose ainsi de se rapprocher des questions majeures de la pensée abélardienne toute entière ; une pensée, probablement, aussi équivoque que le terme abordé.

Traduire les poètes surréalistes: l'écriture lyrique de Paul Eluard (I)

Anales de Filología Francesa, nº 4, 57-71, 1992

Cet article aborde l'analyse d'un aspect de l'écriture surréaliste (I'écriture «lyrique» de Paul Eluard) sous l'angle de la traduction, et envisage les différents niveaux ou se manifestent les convergences et divergences entre poemes-source et poemes-cible. Cette premiere partie aborde une étude phonographique et une étude morphosyntaxique partielle (les calques morphosyntaxiques).