Au-delà du principe de précaution (original) (raw)

L'Au-delà du principe de précaution 1

Initialement conçue par Pascal en vue de "travailler pour l'incertain", la probabilité devenue centrale dans le gouvernement de l'incertain sous la focale du paradigme de précaution, travaille désormais "contre l'incertain". C'est pourtant dans cet incertain qui s'efface aujourd'hui que s'enracine la confiance que l'homme de la précaution, sujet de contradiction enjugué à ses plus sublimes certitudes, semble malgré tout appeler de tous ses voeux. Si la grande horloge de la Nature tourne maintenant depuis longtemps sans l'homme, le mutilant dans sa tradition, et si, venant en suppléance, la civilisation industrielle, puis celle de la technologie lui ont infligé des accidents aux allures de catastrophe, on comprend que, dans son désarroi, il ait cherché refuge dans la précaution. Le principe de précaution est le revers de la démythification du savoir expert depuis que la science inquiète plus qu'elle ne pacifie ; par là, ce principe portait en lui la promesse d'une science enfin libérée de sa mise au secret dans le confinement des laboratoires. La science s'est alors mise au service « des sociétés du savoir », dès lors ouvertes à la diversité des formes de connaissance, des savoirs scientifiques et technologiques aux savoirs profanes. Sous l'injonction du principe de précaution, cette libération de la science s'est traduite par son application, dans la plus grande rigueur, à la société toute entière; ce qui ne pouvait que réjouir les Ulrich contemporains et enthousiastes, amoureux des faits et de la précision scientifique, que déjà Robert MUSIL décrivait dans « L'homme sans qualités ». D'une Nature devenue muette Avant que naissent les sciences de la Nature, l'homme pensait, bien campé dans sa tradition, que ses rituels – en somme, son action –, avaient quelque chose à voir avec l'ordre de la Nature et le maintien des choses à leur place ; il y était pour quelque chose dans cette répétition du même des choses du monde qu'on appelle le « réel ». S'il ne prétendait pas faire la loi de la Nature, l'homme pensait cependant être « indispensable à sa permanence ». L'ordre de la science a tout bouleversé ; ce nouvel ordre s'est instauré dès lors que l'homme a pensé qu'il n'était absolument pour rien dans celui de la Nature. Alors que jusque-là il célébrait la Nature, avec la science, l'homme s'est fait son « maître et possesseur » ; il n'a plus fait corps avec elle par ses cérémonies, dès lors qu'il s'en est exproprié, l'expropriant du même coup en la rendant muette.

La précaution à l'égard des principes

In the most of the cases, the expression “precautionary principle” is understood as a maxim, and not as a universal principle of action. Yet, this use is not the one that is meant by those who work on the environmental protection. The precautionary principle, as a part of the Charte de l’environnement, aspires to grasp something more important and newer in the field of contemporary science. It also wants to provide us with a tool to deal with this novelty. The following paper aims at showing that this aspiration is not valid, mostly for formal reasons: the notion of precaution cannot be translated into a constitutional principle.

Principe de précaution et progrès scientifique

L’objet de cet article est d’examiner les enjeux épistémologiques d’une application généralisée du principe de précaution. En effet, le principe de précaution fait souvent l’objet de critiques de la part de la communauté scientifique qui lui reproche de constituer un frein à la recherche, à l’innovation et au progrès technique. Après avoir identifié les points exacts sur lesquels portent ces critiques, nous tentons ici d’y répondre et de souligner la compatibilité du principe de précaution avec le progrès scientifique.