"La statistique : un outil au service de la lutte contre la discrimination", Mouvements, juin-avril 2010, n°62, p. 126-135 (original) (raw)
Dans le modèle classique du droit antidiscriminatoire, la discrimination était conçue comme le fait de traiter délibérément de manière différente, en raison de leur sexe, de leur origine, de leur couleur de peau, ou d'un autre motif prohibé, deux personnes placées dans une situation analogue. Autrement dit, l'interdiction ne visait que les discriminations directes, c'est-à-dire les distinctions de traitement explicites, dépourvues de justification légitime. Dans cette optique, la discrimination était perçue comme le fait d'individus isolés, agissant de manière délibérée, motivés par des préjugés racistes, sexistes ou autres. Or, à partir des années 1970, diverses analyses démontrèrent le caractère partiel de cette conception du phénomène discriminatoire. Aux Etats-Unis, alors que le Civil Rights Act, qui interdit la discrimination, avait été adopté en 1964, les observateurs constatèrent que non seulement les disparités de traitement à l'encontre des Noirs ou des femmes ne disparaissaient pas, mais qu'en outre, les