Le Blanchiment de l'intersectionnalité (original) (raw)

L'intersectionnalité contre l'intersection

La notion d’intersectionnalité est-elle condamnée à faire partie du problème qu’elle décrit ? Le terme a permis de mettre en lumière la façon dont les systèmes de représentation de certaines catégories dominées, tant dans le droit que dans les mouvements sociaux, construisaient leur appréhension des discriminations à partir des cas particuliers des moins démunis au sein des catégories victimes, rendant la position de certaines minorités artificiellement plus complexes et juridiquement plus insaisissables. Loin de faire pléonasme avec l’idée d’intersection, à laquelle on la réduit souvent, l’intersectionnalité en porte donc la déconstruction critique. Cet article propose d’analyser les processus sociaux qui construisent certains cas comme simples et d’autres comme compliqués et de rendre compte des contraintes objectives qui en découlent pour les groupes et individus considérés. Dans un premier temps, il revient sur l’histoire des théories de l’intersectionnalité comme critiques de la hiérarchie de la représentativité au sein des mouvements sociaux et des catégories de la jurisprudence antidiscrimination. Dans un deuxième temps, il examine les questions suscitées par ces théories dans l’espace propre des sciences sociales lorsqu’elles cherchent à décrire des situations concrètes dans le langage de l’intersectionnalité. Enfin, il revient à la question politique pour examiner les débats soulevés par la perspective d’un programme normatif intersectionnel, notamment si ce dernier était constitué en impératif universaliste de prise en compte permanente de toutes les dominations. Intersectionality against intersection Is the notion of intersectionality doomed to being part of the problem it identifies? Intersectionality theory was not developed to merely point at intersections but to capture subject positions made invisible by dominant systems of normative representation. It shined the spotlight on processes that reduce disadvantaged population groups to the particular experience of the least oppressed among category members, making other members appear as if they were at the intersection with another group. Thus, rather than dividing between complex and simple oppressions, intersectionality theory invites us to undo the intersectional metaphor and problematize every subject position as complex. Yet, abstract categories and asymmetrical constructions of complexity carry real-life challenges for the individuals and groups concerned. But how can these challenges be described in the language of intersectionality without reinforcing the asymmetry? The article examines this conundrum both in the social scientific sphere of analytic description and in the normative sphere of political strategizing. We first briefly trace the history of intersectionality theory as a critique of hierarchies of representativeness both in social movements and in antidiscrimination jurisprudence. Second, we examine the social scientific challenge of describing concrete situations in the language of intersectionality without attributing intersections to the groups affected by them. Finally, we return to politics by examining the limits of turning intersectionality, originally a critique of political domination, into a positive political program, in particular if the latter would take the form of a universalistic imperative for all emancipation movements to give the same priority to all issues all the time.

Repolitiser l'intersectionnalité! (partie 2)

Rechercher fourni par Soutenir l'IRESMO: Faire un don Lettre d'information mensuelle de l'IRESMO s'inscrire Ici (Gratuit) Soumettre un article Appel à contribution Signaler une publication Depuis le 26/08/10: PAGE D'ACCUEIL PRÉSENTATION DE L'INSTITUT ACTUALITÉ DE LA RECHERCHE RECHERCHES ET ÉTUDES FORMATIONS SOUTIEN LIENS CONTACT 03 déc. Repolitiser l'intersectionnalité ! (II) Entretien · 2012 Lire la première partie DEUXIEME PARTIE DE L'ENTRETIEN: 4) IRESMO : Vous avez opposé dans vos analyses deux approches des rapports sociaux : l'une qui tend vers le monisme, l'autre vers le pluralisme. On pourrait peut-être référer cette opposition en termes philosophiques au monisme hégélien, dont Marx serait un héritier, et au pluralisme perspectiviste de Nietzsche dont le post-structuralisme assumerait la continuité. Dans ce cas, y aurait-il une ontologie philosophique qui serait selon vous à même de traduire le holisme méthodologique que vous défendez ? Sirma Bilge : Faut-il vraiment soumettre l'intersectionnalité à la loi du père? La question que vous me posez me pousse à encadrer l'intersectionnalité par la discipline philosophique -une discipline dominée par les hommes blancs alors que l'intersectionnalité est une pensée forgée par les femmes de couleur. La visée de mes propos dans l'article qui semble être à l'origine de la question que vous me posez -un article paru dans L'Homme et la société qui, je dois souligner, a été rédigé en 2007, accepté pour publication en 2008, même si le numéro en question a pu être publié seulement en 2011, n'est pas tant une volonté d'élever l'intersectionnalité théoriquement en la faisant converser avec Hegel ou Nietzche ou Marx,

Théorisations féministes de l'intersectionnalité

Diogène, 2010

Par sa prise en compte des effets concomitants des catégories sociales de race, de classe et de genre, l’intersectionnalité s’est vue hissée au rang de plus importante contribution théorique du féminisme à ce jour. Si les premiers travaux intersectionnels (états-uniens et britanniques) ont fait sortir de l’invisibilité le locus social des femmes s’auto-identifiant comme black ou de couleur, les travaux contemporains dépassent les confins de l’aire anglophone et visent de plus en plus l’élaboration d’un instrument intersectionnel en vue de transformer les politiques de justice sociale et les dispositifs de lutte contre les discriminations. Ce projet suscite deux types de débats : l’un portant sur la production des savoirs intersectionnels et la manière de mener une recherche dans ce domaine, l’autre sur l’utilisation de ces savoirs dans les combats politiques pour l’égalité. Se limitant au premier débat, le présent article s’efforce de dégager les principaux points de tension dans les théorisations actuelles de l’intersectionnalité. Son objectif est double : montrer certaines limites du pouvoir explicatif de l’intersectionnalité, et proposer des pistes à la lumière des discussions déjà engagées. Pour ce faire, quatre points y sont abordés : l’intersectionnalité comme paradigme de recherche, la question des niveaux d’analyse, le différend théorique sur le statut ontologique des catégories de différence, et la question de l’élargissement de la portée théorique de l’intersectionnalité.

« Comment rendre compte de l’« intersectionnalité » ? Réflexions sur une enquête de terrain »

Une enquête réalisée en 2008/09 en psychodynamique du travail a permit d’interroger 10 sujets sur leur parcours professionnel. L’analyse entrecroisait les points de vue des sujets et le vécu de l’auteur et révélaient des parcours et des pratiques professionnelles et institutionnelles de gestion de la diversité en milieu professionnel. Cette recherche exploratoire a montré comment se configurent les inégalités à certains échelons de la hiérarchie socioprofessionnelle. Elle se poursuit en sociologie pour dévoiler comment le genre s’articule avec d’autres marqueurs sociaux et enjeux identitaires. Mais cette étude des situations, des conditions et des relations de travail qui se veut à la fois sociologique, philosophique, anthropologique et psychologique, pose des difficultés méthodologiques. Quel modèle théorique pour penser les rapports sociaux ? Quelle méthodologie pour les données empiriques ? L’entretien biographique, le vécu de la chercheuse, l’analyse de contenu et de discours peuvent-ils restituer l’imbrication des rapports sociaux? Un terrain de femmes noires diplômées, qui partagent la condition de la chercheuse peut-il contribuer à l’interrogation des outils théoriques disponibles? L’auteur questionne son rapport à l’objet, ses difficultés et son activité de recherche. La recherche est alimentée par l’immersion de la chercheuse dans les rapports sociaux qu’elle étudie, et sa reconnaissance académique repose sur la « distance » vis-à-vis à l’objet de recherche. Les incidences des rapports de domination, des conditions de production et du contexte sociopolitique francophone sur la production d’un savoir « scientifique » posent question. Cette communication rendra compte des questionnements d’une recherche en train de se faire, des efforts de clarification d’une démarche et de techniques d’enquête et de la valeur heuristique de l’épistémologie du point de vue situé à travers l’expérience de terrain, les situations d’enquête et d’analyse et les difficultés méthodologiques que pose la question de l’intersectionalité.

Intersectionnalité

Anthropen, 2019

L’article revient sur l’histoire de l’élaboration de la notion d’intersectionnalité. L’article met en lumière également les diverses façons de travailler de manière intersectionnelle. Insistant ainsi sur l’extrême variété disciplinaire et méthodologique des travaux qui la mobilise, il montre que cette notion ne constitue pas tant une théorie unifiée qu’un vaste champ de recherche transnational.