« Charles Quint, Pedro de Tolède et les émeutes napolitaines de 1547 », in Fra Italia e Spagna. Napoli crocevia di culture durante il vicereame, Napoli, Liguori Editore (Critica e letteratura, 98), 2011, p. 181-209. (original) (raw)
L’analyse de la correspondance présente dans les Archives de Simancas, m’a permis d’une part de mettre en lumière le rôle de l’empereur dans l’application des réformes réalisées par l’administration napolitaine, et d’autre part de revenir sur un thème qui a fait couler beaucoup d’encre chez les historiens, à savoir, la supposée tentative de Pedro de Tolède d’introduire l’Inquisition à Naples en 1547 « à la manière espagnole ». Le deuxième aspect analysé dans cette communication concerne la thèse du complot soutenue par le vice-roi pour justifier la violente répression exercée sur les chefs de la rébellion dans la capitale et dans le royaume. Enfin, sont analysés l’attitude ambiguë de Charles Quint pendant et après la révolte, ainsi que le rôle joué par l’Église de Rome dans ces mêmes circonstances. Contraire à la destitution du vice-roi, mais aussi à l’envoi d’un commissaire extraordinaire, comme le demandaient les révoltés, l’attitude de Charles Quint offrit au vice-roi la possibilité d’utiliser la manière forte. Ce dernier accusa la ville de rébellion, la priva de tous les privilèges dont elle jouissait et mena une action répressive contre l’ensemble des classes sociales touchant aussi bien les nobles attitrés, les nobles sans titres, le patriciat citadin et la classe populaire, à laquelle il reprochait de se laisser manipuler par la noblesse. De plus, il s’acharna tout particulièrement contre les juristes ou magistrats qui défendaient les droits des institutions citadines et contre l’ensemble des litterati qui participèrent directement à la contestation. Selon la source la plus détaillée et la plus fiable de l’époque, l’Istoria du notaire Antonino Castaldo, utilisée aujourd’hui comme base de reconstruction des événements, les Académies napolitaines furent définitivement fermées par ordre du vice-roi à la fin de l’année 1547. Aux yeux du pouvoir, ces institutions culturelles étaient coupables d’alimenter les sensibilités hérétiques et une attitude anti-espagnole. Les documents présents à Simancas confirment le lien étroit entre l’opposition des différentes couches de la noblesse napolitaine à la politique absolutiste de Pedro de Tolède et la nouvelle hétérodoxie religieuse qui, surtout dans la capitale et à travers Juan de Valdès et son cercle, avait gagné beaucoup d’adeptes, y compris chez ces mêmes nobles. En effet, la nouvelle spiritualité d’inspiration réformiste eut une influence notable sur la branche la plus cultivée de l’aristocratie napolitaine. Mais il y a plus. L’analyse de ces documents montre que les mêmes personnalités, qui auparavant animaient les débats culturels, se trouvaient maintenant à la tête de la résistance au pouvoir et que les réunions politiques se déroulaient dans les mêmes lieux que ceux fréquentés par les Académies. Dans sa correspondance avec la cour, Pedro de Tolède ne cite jamais le mot « académie », mais parle tout simplement de « conventicules » et de « congrégations illicites ». Au-delà de la figure charismatique de Ferrante Sanseverino, prince de Salerne, l’article met en évidence le rôle prééminent joué par Placido di Sangro, prince de l’Académie des Sereni et défenseur de la cause napolitaine auprès de l’empereur, et par Giulio Cesare Brancaccio, un autre membre des Sereni, qui dirigeait l’opposition au pouvoir à une époque où la répression du vice-roi était déjà en action. Les documents analysés éclaircissent le rôle de premier plan d’un autre litterato napolitain engagé dans la révolte, Mario Galeota, dont le degré d’implication n’était pas connu jusqu’à maintenant. Les documents inédits permettent de mieux comprendre sa participation et expliquent le successif acharnement du vice-roi contre lui.