Langue et insertion professionnelle de migrants africains à Barcelone : une étude ethnographique (2015) (original) (raw)

Cet article examine les processus d’insertion professionnelle d’un groupe de cinq jeunes migrants africains vivant dans la région métropolitaine de Barcelone (Catalogne, Espagne) dans la perspective du rôle et de la valeur de leur répertoire multilingue. Relatant un engagement ethnographique à long terme avec ces six personnes, cet article présente leurs trajectoires personnelles et professionnelles, et analyse les facteurs qui ont contribué à leur accès (ou non) à l’emploi. On y soutient que, dans le contexte actuel de crise économique et dans l’espace local de la ville de Sarrona, il n’y a pas d’opportunités d’emploi. Le catalan apparaît comme un capital symbolique dans le réseau local d’entraide lié à une ONG qui procure le logement et la nourriture, mais ne permet pas pour autant d’obtenir un emploi. À travers ses discours et ses pratiques, cette ONG dévalorise les ressources linguistiques non-locales des migrants, y compris la connaissance de langues d’usage planétaire comme l’anglais et le français. De fait, l’ONG gomme idéologiquement les autres langues. Seuls les migrants qui se sont aventurés en dehors de l’univers sécurisé de l’ONG et de ses réseaux, des migrants avec des études universitaires, ont trouvé des emplois dans l’hôtellerie à Barcelone, emplois leur donnant une autonomie personnelle. ------ This paper examines the processes of labour insertion of a group of five young African migrants who live in the metropolitan region of Barcelona (Catalonia, Spain) from the perspective of the role and value of their multilingual repertoires. Drawing on a long-term ethnographic engagement with them, it presents their personal and professional trajectories, and analyses the factors that have contributed to their (un)employment. It argues that, in the current context of economic crisis and in the local space of the city of Sarrona, there exist no employment opportunities for them. Catalan appears as symbolic capital in the local networks of support linked to an NGO that provides housing and food, but is unable to help with employment. Through its discourses and practices, this NGO devalues their ‘non-local’ linguistic resources, even global capitals like English or French, and ideologically erases their other languages. Only those migrants that have ventured outside the ‘safe’ environment of the NGO and its networks, both with tertiary education, have found jobs in the hospitality sector in Barcelona that grant them personal autonomy.