« Pouvoirs et autoreprésentation du prince à travers la correspondance impériale d’Auguste à Trajan (27 av. J.-C. – 117 ap. J.-C.) », dans Des rois au prince, éd. par I. Cogitore et I. Savalli-Lestrade, Grenoble, 2010, p. 123-145 (original) (raw)
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Sarah Rey
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René d'Anjou est, peut-être plus que les autres, un prince dont la vie politique et sociale fut forgée par les caprices du destin. Cadet devenu aîné, comte de Guise devenu roi de Jérusalem, de Sicile, de Hongrie et d'Aragon, chevalier de roman sur les lices et dans les livres, mais chef de guerre déconfit sur le champ de bataille, croisé retenu sur les rives, géniteur mort sans héritier, amant éploré par le veuvage. Ces déconvenues successives ou ces retournements improbables pourraient avoir encouragé René d'Anjou à développer ces multiples reflets de son pouvoir comme autant de moyens compensatoires. Des reflets d'une vaine puissance qui toutefois nous laissent encore aujourd'hui l'image d'un prince brillant, mécène munificent, esthète et talentueux. Un prince pour qui la théâtralisation du pouvoir et le développement des outils de représentation deviennent de véritables moyens pour asseoir son autorité et l'exercer. Les hasards même de son histoire l'ont conduit à sillonner l'Europe et à se nourrir des cultures curiales des antipodes de l'Occident médiéval pour réinvestir avec génie le meilleur de ces pratiques au service de son État. Car assurément, René d'Anjou excelle à mettre en scène le pouvoir, tant par devoir que par goût. Plus particulièrement encore dans l'exploitation du discours emblématique des devises et des armoiries qui sont les deux grands systèmes de signes qui ordonnent la société du Moyen Âge finissant. René d'Anjou est presque né avec la devise 1 , ce système d'emblèmes qui renouvelle les modes et les pratiques de la sémiotique médiévale. Ces figures, librement composées et choisies s'accompagnent fréquemment d'une courte sentence, le mot, d'un monogramme, de couleurs de livrées. Signes d'identité du prince, ses devises sont aussi chargées d'un message symbolique qui lui permet de faire connaître certains de ses goûts, de ses sentiments, de ses désirs. Elles donnent corps au prince-personne tel qu'il veut bien se révéler à ceux qui le servent. Mais ces devises sont aussi un outil de gouvernement qui fonctionne à des échelles 1 -Le mot devise a fait l'objet d'un glissement de sens au tournant du XV e siècle. Au temps du roi René, il désigne un emblème figuré, parfois accompagné d'une courte sentence écrite, le mot, et de couleurs qualifiées aussi de couleurs de livrée, auxquels s'ajoutent à l'occasion un monogramme ou lettres. Voir sur le sujet ma thèse à paraître : HABLOT L., La devise, mise en signe du prince, mise en scène du pouvoir, Turnhout, 2010. en plus fait du nouvel anobli une émanation directe de sa fonction et de sa personne. Les concessions héraldiques apparaissent dès lors comme un nouveau visage du souverain absolu. * * * Que déduire de ces manifestations emblématiques ? L'emblématique de René d'Anjou doit-elle être lue comme le révélateur de sa puissance ou au contraire comme celui des fragilités de ce règne ? La saturation emblématique doit-elle être perçue comme un outil de représentation ou plutôt comme une reflet d'ambitions inatteignables ? L'effet compensatoire des ambitions déçues de René d'Anjou ou l'image de sa maîtrise des outils de communication ? Si l'on compare l'expression emblématique de René d'Anjou à celles des souverains de la fin du Moyen Age, on constate un lien évident entre la profusion emblématique et le
L’étude de l’itinérance du prince consiste d’ordinaire à retracer le parcours qu’il avait choisi et à étudier les effets de cette mobilité sur les populations provinciales, ainsi que l’image que le pouvoir impérial livrait de lui-même à cette occasion. Cet article inverse l’analyse traditionnelle en présentant les effets politiques de l’absence du prince de Rome depuis Auguste jusqu’à Commode. Il ressort qu’il n’y avait pas un seul modèle en matière de mobilité du pouvoir impérial. Si certains princes ne quittèrent pas l’Italie tout au long de leur principat, d’autres voyagèrent dans l’Em- pire et jusqu’à ses frontières plus ou moins longtemps. L’objet de cette étude est de souligner à quel point la relation entre le prince et Rome était ambivalente. La décision de quitter Rome, qu’elle fût motivée par des raisons politiques ou militaires, créait au cœur même de l’Empire un vide auquel le pouvoir impérial chercha à remédier de différentes manières : d’une part en s’y faisant représenter par des hommes de confiance et en donnant à ceux-ci un statut légal (magister equitum sous César, préfet de la Ville ou préfet du prétoire par la suite); d’autre part en entrecoupant plus ou moins fréquemment ses voyages de retours à Rome afin de ne jamais délaisser en permanence la capitale de l’Empire romain – et de ne plus jamais reproduire le contre-modèle expérimenté par Tibère pendant son séjour décennal à Capri. The study of the emperor’s mobility usually consists of tracing the itinerary he had chosen and studying the effects of this mobility on the provincial populations, as well as the image that the imperial regime conveyed of itself on this occasion. This article reverses the traditional analysis by examining the political effects of the absence of the emperor from Rome in the period from Augustus to Commodus. It appears that there was not a single model for the emperor’s mobility. While some emperors did not leave Italy during their reign, others travelled within the Empire and to its borders for longer or shorter periods of time. The aim of this study is to highlight how ambivalent the relationship between the emperor and the city of Rome was. The decision to leave Rome, whether for political or military reasons, created at the very heart of the Empire a vacuum that the imperial regime sought to fill in various ways: on the one hand, by being represented by trusted supporters and by giving them a special legal status (magister equitum under Caesar, prefect of the City or praetorian prefect thereafter); on the other hand, by returning to Rome more or less frequently during his travels in order never to abandon permanently the capital of the Roman Empire – and never following the counter-model tested out by Tiberius during his ten- year stay on Capri.