Cultiver d’autres expertises sur les sciences et les technologies (original) (raw)

Les controverses touchant aux sciences et aux nouvelles technologies ont, bon gré, mal gré, démontré les limites d'une expertise scientifique qui se conçoit dans les termes trop étroits d'un positivisme rationaliste. Elles ont déstabilisé, au coeur d'une des institutions centrales de la modernité -la science -l'autorité de la « chose prouvée », au sens de ces faits objectifs qui s'imposent au collectif sans autre forme de procès, précisément parce qu'il devient de plus en plus compliqué de désenchevêtrer ces entités aux multiples facettes, ces « hybrides » . Dès lors, sous l'effet de cette déstabilisation, toute une série d'ouvertures des processus décisionnels ont vu le jour, à d'autres types d'expertise, ou encore de multiples initiatives de « participation du public ». À l'heure où la question de l'expertise et de ses limites devient centrale pour le devenir de nos sociétés démocratiques (voir Bastenier, ce numéro), l'occasion est belle de revenir sur les dynamiques de l'expertise dans le domaine des sciences et des technologies. Mais avec une mise en garde préalable: il faut se garder d'en faire prématurément le récit d'une success story, et ériger les tentatives participatives qui ont vu le jour jusqu'à présent en une panacée dont les vertus suffiraient, à elles seules, à éteindre les contestations -ce qui suppose déjà qu'atteindre un tel objectif d'extinction des controverses soit louable en soi. Cette contribution propose donc de revenir sur l'expertise « traditionnelle » et de situer, dans une perspective critique, les dispositifs conçus pour élargir le spectre de la décision politique, lorsqu'elle se rapporte aux sciences et aux technologies.