“De Carl Hagenbeck à Brett Bailey. La mise en spectacle de l’animalité de l’homme” in Ligeia, eds. Hélène Singer, Dossier “Art et animalité”, XXIX: 145-148, janvier-juin 2016, pp. 28-39. (original) (raw)
En 1993, Guillermo Gomez-Pena et Coco Fusco décident de s'enfermer dans une cage dans le cadre de leur performance Couple in the Cage (1993). Entourés d'une série d'attributs ethnographiques (des masques, des objets ménagers, mais aussi une télévision), ils s'exposent eux-mêmes comme des indiens américains enfermés dans une cage, découverts sur une île imaginaire, une référence directe au phénomène des zoos humains. À côté de la cage se trouvait un écriteau informant le public de l'origine et des habitudes de la tribu concernée. Couple in the Cage devint une expérience fondamentalement troublante : pour certains spectateurs, ce persiflage n'était rien d'autre qu'un exemple de mauvais goût, alors que d'autres se faisaient piéger et considéraient le couple comme des vrais sauvages. Un documentaire réalisé sur cette performance nous montre un anthropologue américain amateur, fasciné par les tribus indigènes, de préférence pas encore découvertes, qui s'étonne de n'avoir jamais entendu parler de ces exemplaires. Par leur performance, Fusco et Gomez-Pena ont mis le doigt sur le regard anthropologique de l'homme occidental, pour qui l'inconnu est une source de plaisir, de jouissance et d'angoisse, un regard qui réduit les êtres humains à des objets de curiosité, à des animaux sauvages qui fascinent par leur « manque » présupposé de culture.
Related papers
fantasy and art studies, 2020
Esclaves des puissances du mal, monstres rejetés et bannis, les Orques sont, sans doute avec les dragons, l’altérité majeure de la fantasy. De leur création, dans la nouvelle "La Chute de Gondolin" (1917), jusqu’à la publication posthume du "Silmarillion" (1977), J.R.R. Tolkien n’aura de cesse de les faire évoluer et de modifier leur apparence et le récit de leurs origines. Pourtant, il refusera de les assimiler à des bêtes. Un projet d’adaptation se propose de représenter les Orques sous la forme d’animaux anthropomorphiques se heurta ainsi au refus de l’auteur du "Seigneur des Anneaux". Pour lui, les Orques sont, avant tout, des humains et des elfes pervertis (« Pourquoi Z ajoute-t-il des becs et des plumes aux Orques ! ? […] Les Orques sont nettement présentés comme une forme corrompue de l’humain. » » Lettres 210 – juin 1958). Pourtant, avec la généralisation des illustrations de fantasy, notamment dans les calendriers comme ceux des frères Hildebrandt publiés à partir de 1976, les traits des Orques s’uniformisent et l’on retrouve deux caractéristiques majeures dans la plupart de leurs représentations : peau sombre tirant sur le vert, mais aussi apparence porcine signifiée par l’adjonction d’un groin et de défenses. Cette représentation, qui n’a plus rien à voir avec l’image proposée par Tolkien, se diffuse notamment dans les jeux de rôle ("Advanced Dungeons & Dragons. Monster Manuel" – 1977). C’est la généalogie de la transformation des Orques « déchus » en Orques « porcins » qui sera au centre de notre communication. Pour en expliquer ce changement, nous nous proposons tout d’abord d’étudier les différents monstres de la fantasy afin de voir si certains ont connu eux aussi une pareille animalisation porcine. Ensuite, nous nous interrogerons sur la place des cochons et des porcs dans les représentations iconographiques de l’altérité en Occident, et ce depuis le Moyen Âge. Pour cela nous nous appuierons sur les travaux d’anthropologie historique. Nous tenterons enfin de mettre en relation l’image porcine des orques avec les caricatures contemporaines en Occident (et particulièrement aux États-Unis).
Loading Preview
Sorry, preview is currently unavailable. You can download the paper by clicking the button above.
Related papers
François d'Assise, 2019