La neutralité est-elle impossible aux croyants (original) (raw)

La neutralité

La neutralité axiologique est pensée comme une règle constitutive de l’activité scientifique : les sciences humaines et sociales seraient par définition ces disciplines qui étudient l’homme en s’abstenant de tout jugement de valeur, pour se limiter aux jugements factuels. Mais ce principe est aussi conçu comme une règle pratique devant orienter les usages de la science par le chercheur : il vaut alors comme recommandation morale devant guider sa conduite lorsqu’il enseigne ou intervient publiquement en tant que savant. Cette double exigence répond à l’une des plus sérieuses menaces pesant sur la prétention qu’ont les sciences humaines d’atteindre une forme de validité et de crédibilité équivalentes à celles des sciences de la nature. Cette menace résulte de ce que le chercheur appartient au même monde de valeurs que les hommes qu’il étudie, ou du moins, pour l’historien ou l’anthropologue, à un monde analogue : il peut donc être soupçonné, en amont, de déformer les faits à établir et, en aval, d’instrumentaliser les faits établis, en fonction de ses convictions personnelles. Mais pourquoi ce soupçon devrait-il obliger le savant à s’abstenir, en tant que chercheur et enseignant, de tout jugement axiologique ? À quelle forme de neutralité les sciences humaines et sociales peuvent-elles et doivent-elles aspirer ?

Le principe de neutralité comme justification des exemptions religieuses

Théologiques.Revue interdisciplinaire d’études religieuses, 2021

Supporters of neutrality as benign neglect argue that a neutral state should not grant any type of recognition to cultural or religious groups. Liberal multiculturalists argue instead that due to the non-neutral nature of public institutions, democratic states must adopt policies that recognize and accommodate the distinctive needs of ethnocultural groups. This article examines a different way of conceiving the principle of neutrality. In this conception, developed by Alan Patten in the framework of liberal multiculturalism, a state can only be neutral when it extends equivalent levels of assistance/hindrance to rival conceptions of the good. Neutrality is thus reinterpreted to become a principle justifying the religious exemptions. The article highlights some aspects of this theory that should be reconsidered.// Les défenseurs de la neutralité bienveillante soutiennent qu’un État neutre ne doit accorder aucun type de reconnaissance aux groupes culturels ou religieux. Les multiculturalistes libéraux avancent pour leur part que, en raison de la nature non neutre des institutions publiques, les États démocratiques doivent adopter des politiques visant la reconnaissance et l’accommodement des besoins distinctifs des groupes ethnoculturels. Cet article examine une manière différente de concevoir le principe de neutralité. Dans cette conception, développée par Alan Patten dans le cadre du multiculturalisme libéral, un État ne peut être neutre que s’il assiste ou entrave de manière équivalente les différentes conceptions du bien. La neutralité est ainsi réinterprétée pour devenir un principe permettant de justifier les exemptions religieuses. L’article souligne certains aspects de cette théorie qui méritent d’être repensés.

La neutralité : une vache sacrée en passe de devenir une vache folle ?

Revue Militaire Suisse, 2001

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Veut-on vraiment un État religieusement neutre?

La politique en questions, 2018

Mon chapitre dans la 2e édition du livre par les professeurs de science politique de l’Université de Montréal, La politique en questions, Montréal, Les Presses de l’Université de Montréal, 2018.

Une neutralité qui n'a plus de raison d'être

Bioethica Forum, 2010(2), p. 34-36 (peer-reviewed)

Les conséquences graves de la pénurie d’organes, du point de vue des patients en attente d’une part, et du point de vue de la société d’autre part, en font un problème de santé publique. Or, la pénurie d’organes n’est pas traitée comme d’autres problèmes de santé publique. Alors que la nécessité de lutter contre les conséquences néfastes de l’abus d’alcool, du tabagisme ou du SIDA est généralement acceptée, le rôle de l’Etat dans le domaine de la transplantation reste controversé. Les interventions étatiques en ce qui concerne la propension au don d’organes de la population sont actuellement très restreintes. Depuis l’entrée en vigueur de la loi sur la transplantation le 1er juillet 2007, c’est un véritable principe de la neutralité qui régit les actions de l’Etat relatives au don d’organes. La présente contribution décrit les origines de cette politique de neutralité de la Confédération et démontre qu’une telle politique n’a plus de raison d’être dans le cadre juridique actuellement en vigueur.

Le non lieu de la neutralité « laïque »

Anthropologie et Sociétés, 2011

En pratique, il est possible de « rester neutre », de « ne pas prendre fait et cause », « demeurer au-dessus de la mêlée ». C’est en théorie que le bât blesse. Car si, en définitive, le Réel de Référence se trouve absolument et objectivement hors culture, du côté soit de la Révélation surnaturelle, soit de la Raison naturelle, alors, pour l’essentiel, la neutralité de l’Homme moderne, chrétien et/ou scientifique, ne peut être que tactiquement provisoire. Le fondamentalisme religieux étant, en principe, dépassé, pour sortir de l’impasse d’une modernité laïque intrinsèquement intolérante à cause de son extraversion empirique et/ou essentialiste, une certaine anthropologie propose le paradigme d’un « tout culturel » qui, loin d’un relativisme absolu, implique que pour un acteur donné certaines valeurs et visions fondamentales ne peuvent qu’être, au moins momentanément, relativement absolues.

Expliquer, comprendre et débattre autour du religieux. Neutralité ou engagement ?

Presses de l'Université Laval, 2020

Le religieux est-il un objet de recherche comme les autres ? Exige-t-il une certaine sensibilité de la part du chercheur ou de la chercheuse ? Issus de disciplines diverses, les auteurs et auteures se prononcent sur les distinctions et les convergences entraînées par la mise en tension de la neutralité et de l’engagement dans l’étude du religieux. Comprise superficiellement, cette opposition peut paraître factice : l’engagement n’est pas nécessairement religieux, car la vérité comprend aussi un engagement, et la neutralité n’est pas nécessairement objective, car il y a des neutralités engagées. Qui prend au sérieux cette question n’a pas d’autres choix que d’éviter les dichotomies simplistes et d’aborder de front ce qui unit et différencie plus fondamentalement les relations entre savoir et croire. En posant la relation « neutralité ou engagement » sous forme interrogative, cet ouvrage souhaite traiter des enjeux liés au positionnement épistémologique des chercheurs et des chercheuses ainsi que de la responsabilité scientifique envers le religieux.