Marc Parmentier, Philosophie des sites de rencontres (original) (raw)
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Vous rééditez votre second ouvrage Makeup Artist paru en 2010 aux éditions Alexipharmaque. C'est dans ce livre que l'on découvrira ce que vous appelez l'hyperenfance. Pourriez-vous revenir sur la genèse du livre ? Quelles sont vos influences ? Elles sont archi-nombreuses. Une vraie foire à la saucisse à vrai dire. Les citer toutes serait ma foi bien indigeste mais j'avouerai également que je me suis amusé comme un petit fou en écrivant cette histoire. Si Les Demoiselles a été écrit en direct d'une chambre froide, Makeup Artist a quant à lui été rédigé sur les chapeaux de roues et a bénéficié d'un état d'exaltation délicieusement hors-sol. Alors que voilà bien trois ans que je me documente tel un bourricot pour mon prochain livre à venir, en ce qui concerne Makeup, je n'ai quasiment pas ouvert un bouquin durant sa rédaction en 2006-7, et me suis laissé embringuer par la joie pure et simple d'écrire. A l'époque, mes premières nouvelles (Fermons les yeux, faisons un voeu, éditions Hermaphrodite, 2008) n'étaient même pas encore publiées et j'attendais toujours les réponses des éditeurs quant à leur sort. En réalité, tout est parti d'un reportage que j'ai vu à la télé en 2005 sur un enfant atteint d'une très troublante maladie génétique rarissime, la Progéria. Ce fut un choc total. Je n'en croyais littéralement pas mes yeux. J'ai tout de suite pensé que je tenais un truc. Le projet de départ était le suivant : Faire cohabiter l'idée, cette année-là encore embryonnaire, de l'hyperenfance avec cette médusante maladie qui, visiblement, en était sa plus parfaite négation. Il est cependant à noter que si les hyperenfants sont bien omniprésents dans le livre, ils n'en constituent pas pour autant son sujet principal. J'intègre ce phénomène dans le scénario sans expliciter ni argumenter leur présence. Les hyperenfants sont une donnée sociologique qu'il faut accepter. Je ne les positionne donc pas au niveau sociétal comme j'ai pu le faire par la suite avec Les Demoiselles. D'ailleurs, comme je l'avais déjà précisé lors d'un précédent entretien, Makeup Artist n'a pas du tout le même profil que Les Demoiselles. Makeup est avant tout une sorte d'hommage aux films hollywoodiens sur la fabrique industrielle des stars. De plus, la chasse aux nymphettes n'est pas à l'origine quelque chose de fondamentalement nouveau à Hollywoodland, je ne fais pour ma part qu'abaisser sensiblement leur âge. Mais il m'avait tout de même semblé qu'Hollywood, et plus généralement Los Angeles, dont du reste je n' y ai jamais foutu les pieds, était le lieu adéquat pour faire évoluer les hyperenfants. Pour citer Ludovic Maubreuil au moment de la sortie initiale de mon livre en 2010 : « Marilyn Monroe avait un corps de femme et un sourire d'enfant, mais ce temps est révolu, c'est aujourd'hui très exactement l'inverse qui doit plaire, et la nouvelle Marilyn, la nouvelle Jean Harlow, sera bien cette créature hyperenfantine, hybride et terrifiante ». Beauté donc, superficialité, artifice, décadence, sexe, drogues, ce mélange de glamour et de sordide, d'innocence pervertie, enfin l'image que l'on connaît, tous ces clichés
Bertrand Lavier, le lieu commun et l'intime
Sociétés & Représentations, 2012
Le présent article se concentre sur la série de Bertrand Lavier dite des « objets soclés », groupe d’ œuvres où l’artiste place des objets communs, déjà utilisés, sur des socles, par l’intermédiaire d’un artisan professionnel. Inspiré de cette pratique essentiellement utilisée par les musées ethnographiques et les collectionneurs d’art exotique, le dispositif permet à l’artiste de remettre en perspective ces objets, si courants qu’ils en étaient devenus indifférents. Ici, l’ours en peluche, le taille-haie, le skateboard, le parpaing, le cône de chantier ou encore la porte de réfrigérateur prennent une nouvelle dimension. Placés sur un piédestal, ils obligent le spectateur à réévaluer son rapport avec eux. L’étude se concentre sur Teddy l’ours, et Chuck McTruck le skate – deux symboles générationnels, deux objets marqués par leurs années d’utilisation. Convoqués à la fois pour le vécu personnel qu’ils contiennent, et pour leur caractère d’universalité, ils sont le lieu d’un détournement du procédé ethnographique, opéré par l’artiste. Ce ne sont plus des fétiches exotiques, mais nos propres totems intimes.
Dialog Campus Publishing, 2010
Regardons de plus près comment se sont développés historiquement les actions compulsives accompagnées d'émotions et les comportements qui nécessitent un comportement purement extérieur. Comme point de départ de cette analyse, nous pouvons utiliser la théorie de la morale et de la moralité de Rudoph von Jhering, qui, comme nous l'avons vu, a vu l'émergence de normes différenciées dans les siècles ultérieurs à partir d'une moralité uniforme qui a commencé au début de l'ère moderne et qui se rapportait principalement au comportement externe (Jhering 1898). Il décrit ce développement comme le début d'une différenciation d'un monde moral auparavant indifférencié et largement axé sur le comportement externe et l'émergence d'une différenciation de la loi, de la moralité et des normes habituelles de comportement externe (décence, politesse) dans le développement européen moderne. Jhering décrit également la différenciation historique de l'ordre moral autrefois unifié dans les cultures européennes et la séparation de la moralité et du droit d'une moralité habituelle réduite au comportement externe. La dichotomie de Jhering dans les concepts d'éthique conventionnelle et de moralité intérieure mérite d'être comparée aux distinctions conceptuelles qui prévalent aujourd'hui. Comme indiqué précédemment, la distinction généralement acceptée est que l'éthique conventionnelle se réfère aux normes, valeurs et idéaux moraux qui existent dans la société, tandis que la moralité se réfère à la moralité intrinsèque de l'individu suite à sa socialisation par l'individu. En d'autres termes, l'éthique conventionnelle et la moralité (intérieure) sont les deux faces d'une même chose dans cette formulation. Toutefois, cela ne tient pas compte de la caractéristique soulignée par Jhering, à savoir que pour certaines normes classées comme morales, l'accompagnement par le sentiment intrinsèque est faible ou inexistant, alors que pour d'autres, il est crucial. La formulation dominante de la morale et de la théorie morale aujourd'hui tend à s'appuyer exclusivement sur l'analyse des actions accompagnées d'un sentiment intérieur, tant dans l'éthique conventionnelle que dans la morale, et à considérer la disparition des actes de devoir insensibles, l'analyse de la décence et de la politesse, comme de simples moeurs coutumières, même à la lumière du développement historique. L'analyse de ces dernières par Jhering montre cependant qu'elles n'ont pas disparu, et ne peuvent pas disparaître, mais que le degré auquel, par exemple, les normes de décence et de politesse obligatoires avaient été atteintes dans les cercles supérieurs des sociétés européennes à la fin du XVIIIe siècle a maintenant largement décliné, et que certains comportements dans les contacts sont plus librement façonnés par le choix individuel. Et le point culminant de cette déformation, comme nous l'avons vu, est la théorie morale de Habermas, qui exagère cette évolution historique en prétendant que l'éthique conventionnelle a disparu aujourd'hui et que la moralité n'existe qu'au niveau des idéaux et des valeurs que les individus "négocient" explicitement dans leurs interactions et sur lesquels ils agissent par acceptation consciente. En abordant le comportement externe, non émotionnel, il est également utile de délimiter linguistiquement le terme "comportement", qui en hongrois-comme le mot allemand "Benehmen"-met l'accent sur l'extérieur dans le contact interpersonnel, par opposition au
Penser la psychopathologie avec Marc Richir
MESNIL, 2019
in Aux marges de la phénoménologie. Lectures de Marc Richir, Sophie-Jan Arrien, Jean-Sébastien Hardy, Jean-François Perrier, Hermann , collection Rue de la Sorbonne , 2019
Sociologie d'internet (avec Eric Dagiral, Sylvain Parasie)
Comment internet modifie-t-il nos façons de se rencontrer, de travailler, de militer, de consommer ou de se cultiver ? Des questions devenues centrales, tant les technologies internet sont aujourd’hui intimement liées à nos existences. Le présent ouvrage fait la synthèse de vingt années de recherches sociologiques internationales sur le sujet. Structuré en chapitres thématiques – interactions, sociabilités, médias, politique et économie –, il revisite les promesses d’internet en matière de démocratisation, de transparence et d’empowerment des individus. Enfin, puisque sociologues et étudiants utilisent de plus en plus internet pour conduire leurs travaux, le livre fait également le point sur les méthodes d’enquête qui s’offrent à eux