La voie singulière d'Alfred Sohn-Rethel (original) (raw)
Henri-Pierre Roché : A la recherche de I' unité perdue
The life of Henri-Pierre Roché (1879 – 1959), art collector, journalist, writer, finds its singular rhythm in a continual meandering between dispersion and the search for unifying harmony. This dispersion – moral and physical – appears to represent a necessary evil for him since he considers his vocation to be the gathering of human experiences from as wide a spectrum as possible in order to create a work that would be useful to society, that would lead to better understanding of issues such as political harmony, eroticism and polygamy. The dissertation consists of a detailed biographical study which covers Roché’s formative years until the publication of his first literary works (1879 – 1907). A biographical summary of the remainder of his life is followed by a chapter on his first major publication, Don Juan et... , which has not formed the subject of any literary analysis prior to this. The third chapter consists of an interpretation of Roché’s novel Deux Anglaises et le Continent as both a work of initiation and an initiation to his work, illustrating how it introduces themes that recur in two further novels, Jules et Jim and Victor. Through his way of life, Roché’s life becomes his most extensive and involved œuvre. This dissertation traces the roots of his propensity for dispersion and lack of unity, to his childhood and specifically to the form of education advocated by his mother Clara Roché. This attribute surfaces again in Roché’s keeping of a personal diary, spanning almost sixty years, in which he compulsively observes and notes his own behaviour and that of those around him. The diary emphasises and prepares the fragmentary, compressed style and open-ended writing which would later become Roché’s trademark. Abandoning his studies in political science, Roché sets out on a career which has much in common with the lives dilettante intellectuals fashion for themselves towards the end of the 19th century. His first human project, formulated around 1902, is an attempt to understand the mystery of erotic love and the possibilities of sexual relationships. To this end, he transforms his own life into a kind of laboratory. At a time when France has hostile inclinations towards Britain and Germany, Roché undertakes extensive journeys to these countries, learning the languages and opening himself to literary, social and philosophical influences. The dissertation pays particular attention to the analysis of these influences, an area which has not yet been covered by any other research. Through a detailed interpretation of Don Juan et..., the nature of seduction and desire is examined in the context of the literary myth of Don Juan and the association between fragmentation and desire is emphasised. In conclusion, the association between desire and its written expression is examined and found to be reflected in Roché’s fragmentary writing, through which he appears to find a solution/ compromise in the form of voluntary incompleteness compensating for his failure in the impossible quest for unity. ©University of Pretoria 2005
Le singulier selon Gustave Guillaume
Parmi les tâches qui incombent aux linguistes s’inscrivant dans la mouvance guillaumienne, la clarification de la terminologie demeure une préoccupation essentielle. Bien que le Dictionnaire terminologique de la systématique du langage (Boone et Joly, 1996) ait marqué une avancée significative à cet égard, le foisonnement du métalangage guillaumien, son évolution ou ses variations au cours du temps, font que de nombreuses questions restent en suspens, non seulement pour qui s’intéresse, en historien, à la genèse de la théorie guillaumienne, mais aussi et surtout pour qui considère que la systématique du langage, nullement réductible à un objet d’histoire, reste une théorie féconde et exploitable pour les linguistes contemporains. Le caractère plus ou moins nécessaire de ce genre de clarification terminologique dépend bien entendu des questions de l’on se pose, ou qui émergent à une époque donnée et c’est sans doute pourquoi certains flottements demeurent invisibles tant que personne n’a éprouvé de gêne à leur endroit. Ainsi, il semble que les lecteurs de Guillaume n’ont guère été embarrassés, jusqu’à présent, par une variation terminologique qui touche pourtant un point crucial de la théorie guillaumienne, sa marque de fabrique la plus notoire : la tension « universel / singulier », qui est explicitement thématisée dès Temps et verbe (Guillaume, 1965 [1929]), et sera symbolisée à partir des années cinquante par le fameux « tenseur binaire ». Cette variation, perçue comme insignifiante, consiste en une alternance du couple « universel / singulier » avec le couple « général / particulier », qui conduit à s’interroger sur le sens des notions de singularité ou de particularité comme sur celui des notions d’universalité et de généralité. La question qui se pose alors n’est pas tant de savoir si les oppositions « universel / singulier » et « général / particulier » sont indifférenciées pour le linguiste Gustave Guillaume1, mais de déterminer le sens de chacun de ces termes pour en délimiter l’usage possible en systématique du langage, et plus généralement en linguistique, voire en philosophie du langage. On s’attachera ici uniquement à la distinction singulier / particulier, et plus précisément au sens du singulier dans le modèle guillaumien, sujet dont on verra qu’il couvre déjà une très large matière
L’épreuve désespérante de la technique chez Bernard Stiegler. Postface à Philosophies singulières
Etudes Digitales, 2023
Retour sur la conversation publiée dans l’ouvrage Philosophies singulières afin de mettre en lumière la dimension existentielle de la philosophie de Bernard Stiegler. Cette dimension se reconnaît dans l’usage d’un concept et d’un affect, transversaux dans l’œuvre : l’épreuve et le désespoir. Leur cohérence et leur nécessité donnent à penser la raison pour laquelle la question de la technique est cruciale pour notre époque. A look back at the conversation published in the book Philosophies singulières in order to highlight the existential dimension of Bernard Stiegler's philosophy. This dimension can be seen in the use of a concept and an affect that are transversal to the work: ordeal and despair. Their coherence and their necessity give us an idea of why the question of technology is crucial for our time.
Ontologie et itinéraire spirituel chez maître Eckhart
Revue Philosophique de Louvain, 1998
La pensée de maître Eckhart retient aujourd'hui l'attention de cercles toujours plus larges. La condamnation d'une série de thèses attribuées à Eckhart en 1329, faute d'une publication officielle dans l'archevêché de Cologne, avait jeté le discrédit sur l'oeuvre entière, tant dans son volet latin et scolastique que dans sa composante allemande. Au cours des siècles, la pensée du grand Thuringien ne rencontrera qu'une poignée d'admirateurs, parmi lesquels on retiendra Suso, Tauler, Nicolas de Cuse et beaucoup plus tardivement Hegel, qui louera chez lui le souci d'unir pensée religieuse et pensée spéculative. Grâce aux efforts déployés depuis la moitié du XIXe siècle, l'oeuvre est matériellement beaucoup mieux connue et sa véritable portée philosophique et théologique émerge avec une clarté plus grande: le soi-disant panthéisme d'Eckhart s'est révélé être inexistant et les formules extrêmes que nous rencontrons dans les sermons ne peuvent dissimuler la foncière orthodoxie du propos, une fois qu'elles sont replacées dans leur contexte rhétorique et homilétique. Celui qui pénètre l'oeuvre eckhartienne ne peut manquer d'être frappé par la richesse de la personnalité dont la voix se fait entendre: c'est à la fois un mystique, un métaphysicien, un prédicateur, un professeur et un homme d'action qui nous adressent la parole. Et cette parole ne se perd pas dans la multitude des facettes qu'elle présente: elle est véritablement une. La réflexion qui s'y déploie-et avec quelle exigence-s'appuie de toute évidence sur une expérience personnelle. On est avec lui loin de cette rationalité du réel et fermée sur elle-même qui est une menace constante pour la vie de l'esprit. L'intérêt pour le grand penseur rhénan s'explique non seulement par les qualités intrinsèques de son oeuvre, mais aussi bien sûr par le contexte philosophique et théologique actuel. Citons à ce propos une série de questions actuelles où Eckhart est discuté et considéré comme un interlocuteur pertinent que nous donne la tradition:
L'autobiographie rêvée de Claude Cahun : de l'"aventure invisible" à l'autogenèse
Lorsqu'en 1919 Claude Cahun se lance corps et âme dans ce qu'elle appelle dès les premières pages une « aventure invisible » (1930 : 1) et, un peu plus loin, une « aventure sentimentale » (3), elle entreprend son projet d'écriture le plus audacieux, le plus exigeant, le plus « fou » aussi. C'est que dans les années vingt, après avoir publié un recueil de poèmes en prose, quinze nouvelles sur l'imaginaire social de la « nouvelle femme » et plusieurs articles et textes littéraires dans diverses revues de renom -le Mercure de France, Le Journal littéraire, Philosophie et Le Disque vert -qui lui ont valu une certaine reconnaissance dans les milieux littéraires de son époque, elle se rapproche peu à peu du mouvement surréaliste 1 . Son texte autobiographique, voire autofictionnel avant la lettre, Aveux non avenus, qui diffère radicalement des oeuvres précédentes, en porte l'empreinte visible. Élaboré entre 1919 et 12-Oberhuber et Papillon.qxd 12/