Esthétique mineur chez Seza Paker (original) (raw)

‘Beure je suis, opaque je resterai’ : politique de la représentation dans Shérazade, 17 ans, brune, frisée, les yeux verts

Beure je suis, opaque je resterai' : politique de la représentation dans Shérazade, 17 ans, brune, frisée, les yeux verts Shérazade, la protagoniste du roman de Leila Sebbar, est une jeune fille beure de 17 ans qui juste avant de passer son bac, décide d'abandonner sa famille pour venir à Paris. Elle commence alors une nouvelle vie dans un squat parisien où elle habite avec d'autres jeunes, tous enfants de parents immigrés. Elle travaille dans un magasin de vêtements, participe à un cambriolage et à une « auto-réduction.» A Paris elle rencontre Julien, enfants de pieds-noirs qui a passé son enfance en Algérie. Même si en tant que lecteur nous suivons Shérazade dans ses aventures parisiennes, elle reste pour nous un personnage opaque. Nous savons très peu sur elle et nous ne la comprenons pas très bien. Je voudrais suggérer qu'en créant une protagoniste opaque, Sebbar refuse de servir en tant que porte-parole d'un groupe social (la jeunesse beure), et de proposer un nouveau modèle de l'identité féminine beure. Elle se distancie de la politique identitaire afin d'élaborer un nouveau rapport entre l'écriture et le politique, fondé sur le refus de la représentation. J'appuierai mon analyse sur le concept de l'opacité, formulé par le philosophe martiniquais Edouard Glissant qui, dans son essai Poétique de la Relation, déclare: "Nous réclamons pour tous le droit à l'opacité" (p.209). La présence d'un sujet opaque permet à Sebbar de dénoncer les inégalités qui caractérisent la société française, tout en préservant la notion d'une altérité irréductible.

L'Esthétique de Beckett

1998

Oui, les mots que j'entendais, et je les entendais très bien, ayant l'oreille assez fine, je les entendais la première fois, et même encore la seconde, et souvent jusqu'à la troisième, comme des sons purs, libres de toute signification, et c'est probablement une des raisons pour lesquelles la conversation m'était indiciblement pénible. [...] Et sans aller jusqu'à dire que je voyais le monde sens dessus dessous (ç'aurait été trop simple), il est certain que je le voyais d'une manière exagérément formelle, sans pour cela être le moindrement esthète, ni artiste. Et n'ayant qu'un seul oeil, sur les deux, qui fonctionnât à peu près convenablement, je saisissais mal la distance qui me séparait de l'autre monde [...] (Mo, 74-75). On fera cependant ici le pari que l'esthétique de Beckett, entendue non seulement comme discours explicite qu'il tient sur l'art, mais aussi comme conception implicite lisible dans son écriture, permet de saisir l'unité profonde de l'oeuvre. Deux ouvrages joyciennes allusions sexuelles. Les censeurs irlandais ne s'y étaient d'ailleurs pas trompés qui interdirent le livre jusqu'en 1952.

Esthétique de la fragilité

Si la trace humaine, au sens très large du terme, indélébile et souvent hégémonique est un marqueur de l'Anthropocène, pour le sonore, nous pouvons observer une position un peu différente. Trace immatérielle, éphémère, mouvante, le son, celui de l'Anthropocène est quelque part une métaphore d'une fragilité intrinsèque, celle de notre planète en l'occurrence. Le sonore ambiant nous révèle à la fois des carences, disparitions, paupérisations, notamment dans le règne animal, comme il met en avant des expansions chaotiques, des vacarmes incontrôlés, des magmas sonores qui nous empêchent de lire et de comprendre clairement le monde par l'oreille, ou tout simplement parfois de nous parler. Entreprendre de travailler sur une esthétique liée à la fragilité peut paraître une incongruité, voire un certain non-sens, et pourtant cette gageure me semble en accord avec notre époque, y compris avec les passionnants débats que nous avons eu durant les rencontres acousmatiques 2018. Esthétique Prenons les choses dans l'ordre, est esthétique ce qui recherche la beauté, sa ou ses différentes défnitions, ce qui tend à cerner la perception, si ce n'est la fabrication du beau, avec toutes les variations culturelles et subjectives de ces notions. Le beau, ou la notion du beau, tout subjectifs et culturels qu'ils sont, constituent de ce fait une notion intrinsèquement fragile. Fragilité Est fragile tout ce qui peut se rompre, s'altérer, voire se détruire, disparaître être anéanti. Sont donc fragiles autant les choses solides matérielles que les ressentis, sentiments, expériences humaines. L'esthétique de la fragilité cherche à construire une beauté pouvant, voire devant constamment être remise en question, sans canons académiques fgés, mais plutôt dans une inconstance constructive, dans un ressenti aussi mouvant que la marche elle-même par exemple. C'est d'ailleurs enfoncer une porte ouverte que de constater la fragilité des ressentis et sentiments humains. Il en est comme de l'état d'esprit, le moral comme on dit, d'un marcheur, qui variera au fl des dénivelés, kilomètres, embûches du terrain, conditions météorologiques, forme physique… Le marcheur peut-être fétu de paille dans la tempête, mais aussi, fort heureusement, roseau résiliant, plus tenace et coriace que jamais devant les diffcultés pour atteindre son but. La métaphore de la marche est bien évidemment liée à mes travaux de promeneur écoutant, paysagiste sonore et au fnal, metteur en écoute. Des PAS Parcours Audio Sensibles Ces derniers nous ramènent au promeneur écoutant, concentré sur des espaces et périodes où les sons prennent une place des plus importantes dans sa perception du paysage. Là encore, la non matérialité et non visibilité du sonore, comme une trace vibratoire d'action énergétique, nous ramène une fois de plus à la notion de fragilité, de caractère fugace, éphémère. Le parcours, fut-il tracé, balisé, cartographié, prolongé via différents média-supports, pourra lui aussi être dans une logique de cheminement non défnitif, chemin de traverse, soumis à de multiples contraintes, aléas, modifable à l'envi par d'innombrables variantes, ou variations, obstacles, égarements, détours, impasses, impraticabilités chroniques. Si on considère le PAS comme un geste collectif, ce qu'il est intrinsèquement pour moi, vient alors s'ajouter l'aventure humaine, avec toutes ses beautés justement, mais avec aussi tous les risques de ruptures, de non collectif ou de sa dissolution, d'écoutants

« Se faire tout petit » ou la vulnérabilité sous la loupe

Revue Voix amplifiées, 2022

La vulnérabilité est un concept polysémique, défini selon une multitude d’approches. Elle est parfois sociologique, et parfois ontologique. On l’associe soit à la fragilité ou à l’ouverture, à l’agentivité ou à la passivité. D’autres amènent le concept d’autonomie pour nuancer cette dichotomie. Dans le cadre de ma thèse de maîtrise, j’ai réalisé une étude de cas au sujet de l’expérience de réussite en stage de formation à l’enseignement de deux étudiantes originaires d’Afrique subsaharienne nouvellement arrivées au Canada. Bien qu’elles aient réussi leur stage, l’élément le plus saillant des données a été leur vulnérabilité dans le cadre du stage. Ainsi, cet article constitue une recension des écrits permettant de dessiner les contours d’un cadre d’analyse pour ma thèse.