Arithmétique et musique en Grèce ancienne : Instruments, intervalles, nombres (original) (raw)


Dans les Lectiones Opticae, ainsi que dans l'Opticks de 1704, Newton fait référence à la gamme musicale telle qu'elle était enseignée en Angleterre au XVIIème siècle. Cet article expose les différences entre cette gamme et celle en usage en Europe continentale. Ces explications sont indispensables pour comprendre la démarche de Newton.

Nous ne disposons pas de trace écrite des théories construites et enseignées par Pythagore au VIème siècle avant notre ère. Pourtant quelques anecdotes ont traversé les siècles et ont été transmises comme autant d'illustrations des principes mathématiques développés par le savant de Samos. Parmi celles-ci, il en est une qui concerne la musique, ou plus exactement la théorie des consonances. Il s’agit de la légende des marteaux de Pythagore, rapportée notamment dans le De institutione Musica par Boèce qui l'aurait lui-même découverte lors de sa traduction des textes de Gaudence, de Jamblique et de Nicomaque de Gerase. Cette histoire a tellement accompagné l'enseignement de l'harmonie qu'il était nécessaire de s'y attarder pour en éprouver la validité.

Study of the different pythagorean cosmogonic and number models (Philolaos, Eurytos, the Pythagoreans of the Sustoichia, Archytas). Importance of the interval and of the heptacord.

Pourquoi les interrogations sur la définition du ton et des intervalles constitutifs des gammes ont-elles préoccupé tant de compositeurs et de musicologues depuis l'antiquité grecque? Le ton, la tierce, la quinte, l'octave sont-ils des données absolues? Non, bien au contraire. Au cours du temps, et cela au moins depuis l'antiquité grecque, les intervalles ont été déterminés sur des bases mathématiques et techniques, en faisant appel à la science des nombres, tout en cherchant à s'adapter aux instruments existants. La gamme tempérée a succédé à d'autres gammes, telles que la gamme pythagoricienne, la gamme de Zarlino, et divers systèmes de tempéraments. Elle est une convention passagère, correspondant à la mentalité d'une époque. L'essentiel réside dans l'effet sonore qui résulte de la gamme, et dans la façon dont elle résonne et agit sur le corps et sur l'âme. Des recherches récentes tentent de trouver une intonation qui soit juste pour le corps et pour l'Être. Mais est-ce possible de façon définitive et universelle?

L'étude des rapports de la musique et des sciences peut s'engager dans deux directions. Ou bien les sciences sont prises comme un moyen et l'on pense alors, comme c'est la mode aujourd'hui, à la composition et à l'exécution qui mettent en oeuvre des synthétiseurs, des ordinateurs, des machines à analyser et reproduire les sons; ou bien, tâche plus modeste dans ses résultats, mais plus ambitieuse dans ses principes, on rapproche sciences et musique afin de trouver un fondement théorique, sinon philosophique, à celle-ci. Le désir de savoir anime alors presque à lui tout seul le chercheur, qui n'attend aucun résultat spectaculaire, au sens propre de ce terme, puisque l'objet n'est pas de produire de la musique, mais d'en comprendre la nature par des principes scientifiques — si tant est que la chose soit possible. Aussi téméraire semble cette entreprise, il faut croire cependant qu'elle en a tenté plus d'un : des mathématiciens grecs de l'Antiquité jusqu'aux physiciens, physiologistes et psychologues de notre siècle, de nombreux savants ont proposé des «explications» de la musique. Le sujet étant vaste, je me contenterai ici d'évoquer quatre cas exemplaires, attachés à trois dates distinctes et qui, à eux seuls, permettront je crois de se faire une idée cohérente de l'évolution générale des théories musicales. Ces quatre «cas» sont les suivants. D'abord celui de la Division du canon, un texte tiré du Corpus euclidien (mais certainement pas d'Euclide lui-même 1); puis, en sautant au XVIII e siècle, celui du Tentamen novae theoriae musicae d'Euler et celui des Eléments de musique suivant les principes de M. Rameau de d'Alembert. Finalement, je dirai quelques mots des conceptions de Helmholtz (Théorie physiologique de la musique), qui datent de la fin du XIX e siècle et qui, comme j'ai tenté de le montrer ailleurs 2 , n'ont guère été «dépassées» aujourd'hui.

La philosophie médiévale de langue arabe est l’héritière de la pensée et de la science grecques, transmises par l’école néoplatonicienne d’Alexandrie. C’est une pensée éclectique, qui concilie la foi avec le savoir de Platon et d’Aristote, grâce à Plotin. Les penseurs gréco-arabes ont travaillé à partir de traductions, qu’ils ont compilées, commentées et enrichies. Cela amène à poser la question de l’orientalisme, à notre égard. Fait-on en réalité une lecture orientaliste de ces penseurs, même sans le savoir ? Ils s’enracinaient dans la pensée grecque, qu’ils combinaient avec la spiritualité musulmane, et ils estimaient même qu’ils se réappropriaient cette pensée grecque qui serait née en Orient, comme la musique. La pensée gréco-arabe est un mode de pensée de la seconde main, qui peut être créative, et qui très moderne en cela. Il existe une forme d’intelligence collective, qui est devenue celle de la troisième main, avec les techniques des réseaux numériques actuels. Mon mémoire traite d’un problème d’esthétique, qui est inséparable d’un système de pensée. Il concerne la théorie et la pratique musicales du point de vue de la philosophie. J’ai choisi pour cela un célèbre Traité de musique arabo-persan d’Al-Fārābī, datant de la période médiévale, tourné principalement vers la musique orientale. Al-Fārābī définit une seconde voie pour la science de la musique, qui est empirique et intuitive, qui s’inspire de la spiritualité et qui complète la science théorique de la musique. Cette science empirique de la musique a-t-elle la même valeur philosophique que sa science théorique, dont elle constitue l’origine ?

In Greek and Roman political thought, the myth of the harmony of the spheres was designed to offer the city’s institutions a model of harmonious organisation in order to bring the organisation of the microcosm of an « ideal city » into line with that of the macrocosm of the Universe. This theory, of Pythagorean origin, was based both on empirical observation of the sky, on acoustic and musical research and on the idea that the cosmos forms a « harmonious whole » governed by numbers whose correct proportions ensure its harmony. From Plato to Cicero, it was a means of establishing a close correlation between the harmony of the Universe and political concord in the city.

L’étude des phénomènes sonores en occident commence à la fin de la Renaissance, avec les difficultés rencontrées par les musiciens pour calibrer leur matière première, les notes organisées sous forme de gammes et d’intervalles. Ils cherchent à en énoncer les règles d’arrangements, les consonances. A cette occasion ils découvrent des phénomènes de résonances qu’on nommera par la suite, harmoniques. L’étude des sons va bientôt quitter le domaine musical pour être conquise par les savants physiciens, avant tout observateurs et expérimentateurs. On s’intéresse aux vibrations des cordes, à l’écho, à la résonance par sympathie. On cherche à définir les vibrations sonores, ce qui représente une entreprise considérable, cette notion n’est pas encore bien assimilée. On comprend bien que le son est une succession d’événements dans le temps, peut être des coups, et on cherche à définir de nouveaux concepts, la fréquence, les ondes, les battements. Puis on met le son en scène, on le compare à la lumière, on évalue sa propagation, sa vitesse, on le confronte au vide, au vent, à la nuit…