Analyse externe de l’intégration du tourisme alternatif dans un territoire marginalisé: le cas du Bajo Balsas au Mexique (original) (raw)

Le travail présenté dans cet article fait partie d’une recherche doctorale (Kieffer, 2014) et constitue la dernière étape de l’analyse, à travers une approche systémique, multiscalaire et participative, des conditions préexistantes d’un territoire rural pour l’intégration d’une activité touristique dans un processus de développement local-régional. Le contexte actuel de crise des territoires ruraux en Amérique Latine et particulièrement au Mexique conduit de nombreuses communautés à chercher de nouvelles solutions pour diversifier l’économie paysanne. Dans ce cadre, le tourisme, et particulièrement le tourisme alternatif, est présenté comme une solution pour lutter contre la pauvreté et pour protéger les ressources naturelles. Depuis la fin des années 1990 et le début des années 2000, le tourisme alternatif fait partie des politiques publiques et des programmes de coopération internationale pour le développement afin de répondre aux nécessités des populations locales. Une des modalités de tourisme alternatif répandue en Amérique Latine, particulièrement au Pérou, Équateur, Costa Rica, Nicaragua, Guatemala et Mexique est le tourisme rural communautaire (TRC). Cette modalité de tourisme s’est implantée dans des territoires ruraux conçus comme espaces collectifs et gérés par des communautés à travers leurs institutions traditionnelles. Il s’agit, selon Gascón (2009 : 36) « d’un type de tourisme développé dans des zones rurales dans lequel la population locale, à travers ses institutions locales collectives, exerce un rôle majeur et protagoniste dans son organisation, gestion et contrôle, offrant des activités respectueuses de l’environnement naturel, culturel, social et des valeurs de la communauté d’accueil, créant une expérience positive entre résidents et visiteurs, et dans laquelle la relation entre le touriste et la communauté est éthique et les bénéfices de l’activité répartis de manière équitable ». Ces initiatives récentes en sont à une phase de développement, voire pour de nombreuses d’entre elles en processus de planification. Cependant, certaines situations non désirées ont déjà été détectées au Mexique comme l’apparition d’effets pervers dans les structures sociales des communautés bénéficiaires, ou l’investissement erroné dans des infrastructures pour des communautés qui ne possédaient pas les conditions requises pour développer une activité touristique (Cañada et Gascón, 2007 ; Castillo, 2007 ; Kieffer, 2011 ; López et Palomino, 2008 ; Zizumbo, 2007). Dans bien des cas, le TRC a été présenté comme une panacée, sans questionner le modèle suivi et en reproduisant de manière acritique des idées reçues (Cañada, 2009 ; Gascón, 2009). Les résultats des étapes antérieures de la recherche doctorale de laquelle est extraite ce travail soulignent l’importance de l’étude des identités particulières et des représentations culturelles, ainsi que des perspectives locales et de la vision depuis l'intérieur du territoire, dans l’analyse des conditions d’insertion d’une initiative de TRC dans un territoire rural (Kieffer, 2014 ; Kieffer et Burgos, 2014 ; Kieffer et Burgos, 2015). Cependant, et c’est l’objet du présent article, l’analyse doit également être complétée par un point de vue externe (« vision de l’expert »). Cet article répond ainsi au quatrième et dernier objectif de la recherche doctorale en question et analyse à travers la vision de l’expert les enjeux et les conditions d’intégration d’une initiative de TRC dans un territoire marginalisé et vierge de tout développement touristique, le Bajo Balsas, au Mexique, ainsi que les différents aspects intrinsèques du système d’étude qui influencent, directement ou non, la mise en oeuvre d’une activité touristique.