TROIS RÉVOLTES EN IMAGES la catalogne, le portugal et naples dans les années 1640 (original) (raw)
Barcelone, le 7 juin 1640 1. Il est environ 9 heures du matin. Quartier de la Ribera. Comme chaque année, des paysans saisonniers provenant de différents points de la Principauté se rendent en ville au début de l'été pour offrir leurs services au moment des moissons. La tradition se maintient malgré la crainte des autorités municipales, qui ont été alertées par les troubles enregistrés au cours des semaines précédentes. Les nouvelles concernant les abus qu'ont com-mis les soldats dans les lieux où ils sont logés se propagent comme une traînée de poudre. Les nerfs sont à fleur de peau. Les responsables de l'ordre doivent se livrer à des tours de force pour éviter les altercations. Dans les environs de l'église Santa María del Mar, dans le quartier commerçant de la Ribera, un employé de l'huissier royal Miquel de Monrodón engage une véhémente dispute avec un faucheur. Le ton monte. L'employé perd son calme : il dégaine sa dague et frappe son adversaire. La nouvelle passe de bouche à oreille. Elle arrive rapi-dement aux Ramblas où s'est rassemblé un groupe important de faucheurs. Les esprits s'échauffent : « Visca la terra i muira el mal govern! ». La foule se dirige vers la résidence du vice-roi, le comte de Santa Coloma, dans le carrer Ample, à côté de l'église de la Merced. Elle s'apprête à l'incendier. Les frères franciscains du couvent de Framenors, situé à côté, essaient de calmer les esprits en sor-tant un crucifix de grandes dimensions. Mais cette stratégie ne marche pas. Pas plus d'ailleurs que la médiation des évêques de Barcelone, Vic et Urgell qui se rendent sur les lieux. Profitant du chaos régnant à cet instant, le vice-roi prend la fuite. Un vaisseau l'attend au port. La distance est courte, mais l'homme est corpulent et se déplace de façon maladroite. Ses poursuivants le rattrapent. L'un d'eux enfonce sa dague dans son estomac. Un autre le poignarde à plusieurs reprises. Puis ils l'abandonnent. Le représentant en Catalogne de la monarchie la plus puissante au monde se vide de son sang sans qu'aucune main ne vienne le secourir. Dans les heures qui suivent, les résidences des principaux ministres royaux sont mises à sac, leurs corps ensanglantés sont traînés dans la rue et 1 Ce travail a été réalisé dans le cadre du projet de recherche « Poder y Representaciones en la Edad Moderna: la Monarquía Hispánica como campo cultural (1500-1800) » [HAR12-39516-C02-01], financé par le ministère de l'Économie et de la Compétitivité du gouvernement espagnol.
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