Bruno Belhoste, Antoine Picon, Joël Sakarovitch, "Les exercices dans les écoles d'ingénieurs sous l'Ancien Régime et la Révolution", in Histoire de l'éducation, n° 46, 1990, pp. 53-109. (original) (raw)

En 1816, année de la création de l'École des Mineurs de Saint-Étienne, l'École des mines fait son retour à Paris. Il ne s'agit pas d'un simple transfert occasionné par la perte des territoires au sein desquels avaient été implantées les écoles pratiques des mines, mais bien d'une transformation pour, en marge de la consolidation du Corps des mines, indispensable à la mise en oeuvre de la loi minière du 21 avril 1810 et du règlement de 1813, disposer d'une formation capable de répondre aux besoins de l'industrie minérale. Car c'est bien à un déficit de compétences que les établissements miniers et sidérurgiques sont confrontés. Ainsi, en mai 1810, alors que l'ingénieur des Mines de Champeaux inspecte la houillère de La Machine, dans la Nièvre, il est sollicité par la compagnie exploitante : L'administrateur actuel des mines, plein de zèle pour l'entreprise dont il s'est chargé, m'a demandé s'il me serait possible de lui procurer quelqu'un d'instruit dans la théorie et la pratique de l'exploitation qui voulut diriger les travaux de La Machine. Ne connaissant personne qui puisse convenir, je vous présente cette demande, messieurs, tant au nom de l'administrateur qu'au mien propre. Vous devez voir dans les motifs qui la déterminent le désir bien prononcé de l'administrateur des Mines de soumettre ses travaux aux principes de l'art et d'adopter un mode d'extraction régulier et raisonné. Les honoraires du directeur seraient tels qu'il aurait lieu d'être satisfait. Mais la proposition d'emploi ne recevant aucun écho favorable, un simple maître-mineur continue de conduire les travaux, faute de mieux. Il y a donc bien une exigence déjà ancienne de formation qui se manifeste. Elle s'est d'ailleurs signalée, au moment de la réorganisation du Corps des mines, par l'existence d'ingénieurs surnuméraires, chargés de parcourir la France minérale avec, parmi leurs buts de mission, le conseil aux directeurs. À côté des élèves-ingénieurs, destinés à intégrer le Corps des mines, est donc créée une nouvelle catégorie, celle des élèves externes, qui doit apporter à l'industrie privée, minière et métallurgique notamment, les cadres qui lui font défaut. C'est ce que rappelle l'article XVIII du règlement du 3 juin 1817 : « Les élèves admis indiqueront, à leur entrée à l'école, l'espèce de mine ou d'usine à la conduite de laquelle ils se destinent plus particulièrement, afin que les études de chacun puissent être dirigées vers la partie qu'il aura indiquée 4 ». Pour autant, pendant les premières années, la présence de ces élèves externes au sein de l'établissement parisien de formation reste discrète. Elle semble même ne pas vraiment faire sentir ses effets. Le poids des élèves externes au sein de l'école est faible, voire négligeable. Les installations ne permettent pas un accueil de qualité. Les places de laboratoires restent rares, empêchant une participation à l'ensemble des travaux pratiques. Comme les premières promotions ne peuvent dépasser numériquement celles des élèves-ingénieurs, et que ceux-ci sont très peu nombreux, leur influence sur l'industrie française est négligeable. En outre, cette offre de formation souffre de la création, en 1829, de l'École centrale, qui détourne une partie du public dédié.