Alexis MARTIG et Francine SAILLANT, 2017, « Présentation. L’esclavage moderne : une question anthropologique ? », Anthropologie et Sociétés, 41-1 : 9-27. (original) (raw)

Alexis MARTIG, 2017, « Domination et servitude dans le Brésil rural contemporain. Le “travail esclave” rural migrant », Anthropologie et Sociétés, 41-1 : 69-90.

Cet article se propose d’analyser le phénomène du « travail esclave » rural migrant apparu au Brésil depuis les années soixante. Pour ce faire, il part du discours de travailleurs ruraux libérés d’une situation de « travail esclave » pour montrer les différents aspects qui caractérisent la relation de domination du « travail esclave » rural migrant (tromperie, dette économique et dépersonnalisation). Il s’agira de penser, en la mettant en perspective avec d’autres formes traditionnelles de domination en milieu rural, la spécificité et l’historicité du « travail esclave ». On montrera ensuite comment le « travail esclave » constitue un « mode d’exploitation » et une relation de servitude en termes d’excès de domination dépassant la relation de dette économique et impliquant un rapport aux droits et à la citoyenneté symbolique. Enfin, on élargira la réflexion au contexte global de l’économie capitaliste en montrant comment l’analyse du « travail esclave » rural migrant peut contribuer aux réflexions sur l’esclavage contemporain.

Fauque, Claude, et Marie-Josée Thiel—Les routes de l’esclavage. Histoire d’un très grand «dérangement»

2006

Les routes de l'esclavage de Claude Fauque et Marie-Josée Thiel offre un panorama de l'histoire de l'esclavage et de la traite transatlantique. Le livre est préfacé par Olabiyi BJ Yäi, ambassadeur délégué permanent de la République du Bénin à l'UNESCO, et Christiane Taubira-Delannon, députée de la Guyane française et auteure de la loi française 1297, qui a défini la traite transatlantique comme un crime contre l'humanité.

« Quelle place pour l’esclavage dans les cités pontiques ? », dans S. Maillot et J. Zurbach (éds), Statuts personnels et main-d’œuvre en Méditerranée hellénistique, Clermont-Ferrand, 2021, p. 93-119.

-Au-delà de ce qui peut être considéré comme un acquis indubitable, à savoir que les cités de la mer Noire ont toujours été actives dans l'acheminement d'esclaves en provenance des peuples non grecs des alentours (Scythes, Sarmates, Thraces, Bithyniens, Paphlagoniens, etc.) vers l'espace égéen, il convient de s'interroger à quel point ces cités utilisaient elles-mêmes la main-d'oeuvre servile. Il n'y a que deux sources qui semblent suggérer des masses d'esclaves, à Olbia (Macrobe, Sat. 1.11.33) et à Héraclée du Pont (Memnon, FGrHist 434, F 40.2). Mais il n'y a presque rien sur l'emploi d'esclaves dans l'agriculture. Bien au contraire, ce domaine semble avoir été dominé par la main-d'oeuvre libre. Sans pour autant nier l'existence d'un esclavage rural, au moins dans certaines de ces cités, l'auteur remarque prudemment que les esclaves au sens propre du terme demeurent peu visibles dans cette région durant l'époque préromaine. Mots-clés-Esclavage, commerce, agriculture, Olbia, Héraclée du Pont, royaume du Bosphore, époques archaïque, classique et hellénistique Abstract-Beyond the indisputable fact that cities of the Black Sea were always active in the export to the Aegean of slaves coming from non Greek people of the proximity (Scythians, Sarmatians, Thracians, Bithynians, Paphlagonians, etc.), the extent to which these cities used themselves the servile labour force should be asked. There are only two sources which seem to suggest masses of slaves, i.e. in Olbia (Macrobius, Sat. 1.11.33) and in Heraclea Pontica (Memnon, FGrHist 434, F 40.2). But there is almost nothing about the use of slaves in the agriculture. Quite the contrary, this field seems to have been dominated by free labour force. Without however denying the existence of a rural slavery, at least in some of these cities, the author cautiously remarks that slaves in the proper meaning of the word remain hardly discernible in this region during the pre-Roman period.

-« Questions et problématiques du « phénotype » dans l’approche comparative des esclavages, pour la Tunisie du XIXème siècle », in Alessandro Stella et Roger Botte (éd.), Couleurs de l’esclavage sur les deux rives de la Méditerranée (Moyen Age - XXe siècle), Ed. Kartala, Paris, Décembre 2012.

Dans le cadre des recherches historiques et anthropologiques sur le phénomène de l'esclavage, un des nombreux atouts du terrain tunisien est certainement celui d'offrir d'importantes possibilités de discuter et comparer les esclavages « Blancs et « Noirs », étant données l'histoire et le présent inhérents à cette région. Carrefour incontournable du bassin méditerranéen, point de liaison enter l'Europe et l'Afrique sub-saharienne, la Régence de Tunis avait au moins jusqu'au XIXè siècle accueilli un nombre non négligeable d'esclaves Noirs ou Blancs, les uns a priori amenés du Soudan, les autres d'Europe. Les premiers étaient désignés sous l'appellation « 'abd », ou « esclave », les seconds comme pour marquer une différence, étaient autrement nommés : c'est en tant que « captifs 1 », « renégats » ou « mamelouks » (« possédés »), selon les périodes et les contextes, que les archives et les chroniques nous décrivent le parcours et le sort de ces individus, hommes, femmes ou enfants. Or c'est entre autre cette différence d'appellation, qui nous amène à nous interpeller. Quelle en est la signification ? La différenciation entre les deux « types » d'esclaves se réalise-t-elle à partir d'une base simplement phénotypique: distinguer le « Noir » du « Blanc » ; ou au contraire, at -elle pour sens d'insister sur une différence de traitement et de condition bien notables? Aussi, notre aisance à user de ce terme générique d'« esclave » pour désigner tout à la fois ces deux types de dépendants est-t-elle légitime du point de vue de l'histoire ? Il est un fait, que partir du fondement problématique dont la base est la dichotomie Noir-Blanc, paraît dès le premier abord prometteur quant à son résultat scientifique, mais aussi et surtout il parait évident en tant que postulat: les deux « types » d'esclaves se trouvent en effet pour les premiers, « pré-pensés » comme étant ceux originaires d' « Afrique», et les seconds comme « Européens », « Chrétiens », ou « Orientaux », mais d'origine finalement tout aussi confuse. Or du fait de telles abstractions relatives à ces identités, dès lors que pour tirer des observations ou des comparaisons entre ce que l'on perçoit « spontanément » comme deux 1 Le captif est désigné en arabe en tant que « asîr » « al qarsara » (corsaires)

"De l'abolitionnisme à l'esclavagisme ? Les implications des anthropologues dans le débat sur l'esclavage des Noirs aux Etats-Unis (1840-1870)", Revue Française d'Histoire d'Outre-mer, t. 85, n. 320, 1998, p. 85-102.

[en] Anthropologists in the 1840-1860s thought their science would furnish principles of human guidance. More or less connected with abolitionism, the Ethnological Societies had declined around 1850 ; then appeared an anthropology strictly disconnected with philanthropy, sometimes fighting with pro-slavery American intellectuals looking for scientific arguments. This complicity between anthropology and anti-abolitionism coincided with the acme of polygenist raciology, whose influence lasted until the 20th century, long after the vanishing of the anti-abolitionist cause. /////////////////////////////////////////////////////////////// [fr] Les anthropologues des années 1840-1860 pensaient que leur science devait permettre un meilleur gouvernement des hommes. Liées plus ou moins au mouvement abolitionniste, les sociétés d'ethnologie ont décliné autour de 1850, laissant se déployer une anthropologie strictement dissociée de la philanthropie, qui travailla parfois conjointement avec les esclavagistes américains cherchant des appuis scientifiques. Ces connivences entre anthropologie et esclavagisme coïncidèrent avec l'apogée de la raciologie polygéniste, dont les thèmes ont perduré jusqu'au XXe siècle, bien après que la défense de l'esclavage soit devenue une cause périmée.

“Ports esclavagistes et mémoire publique de la traite atlantique des esclaves au Brésil et aux États-Unis.” Revue du Philanthrope, no. 7, 43-59.

2018

C et article, fondé sur mes deux derniers ouvrages, aborde le problème de la mémoire publique de l'esclavage et du commerce atlantique des esclaves dans les sociétés impliquées 1 . Dans cet essai, la mémoire publique est conçue comme la façon dont certains acteurs et groupes sociaux s'engagent dans le processus de commémoration et de patrimonialisation de la traite et de l'esclavage dans l'espace public en développant des discours, des activités de commémoration et des marqueurs permanents, dont des monuments et des mémoriaux. Ce travail part du principe que durant les siècles où l'esclavage a existé et la période qui a suivi son abolition, une mémoire culturelle et une mémoire collective restent vivantes chez les descendants, les propriétaires et les marchands d'esclaves. Cependant, ce n'est qu'après la fin de la seconde guerre mondiale, quand les horreurs de l'Holocauste ont été révélées au monde, qu'un nombre croissant d'initiatives visant la patrimonialisation de l'esclavage a commencé à émerger dans les sociétés ayant participé à la traite atlantique.