L’indignation est-elle un ressort de la scandalisation ? Le ‘scandale des fiches’ en Suisse (original) (raw)
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Éthique publique, 2016
À partir d’une étude de cas portant sur le « scandale des fiches » (1989-1990), qui mit en cause les pratiques de surveillance de la police politique suisse, nous montrons que, contrairement à ce qu’affirment nombre de travaux, l’ampleur du scandale ne peut-être déduite de celle de l’indignation pas plus que cette dernière ne peut être rapportée à la gravité supposée de transgressions. Un scandale n’émerge que si des acteurs, à partir de leur évaluation de la situation et de leurs perceptions du possible, s’autorisent à exprimer publiquement une indignation, qu’elle soit feinte ou sincère, et parviennent à imposer une qualification déviante des pratiques concernées entraînant des mobilisations dans plusieurs espaces sociaux. En déplaçant la focale sur la dynamique émergente de mobilisations multisectorielles, nous plaidons pour une approche relationnelle et processuelle de la dimension émotionnelle du scandale, inséparable de sa dimension cognitive. *************************************************************************** On the basis of a case study of the "secret files scandal" (1989-1990), which challenged the surveillance practices of the Swiss political police, we show that, contrary to what many scholars claim, the extent of a scandal cannot be deduced from the importance of indignation nor the latter can be inferred from the supposed gravity of transgressions. A scandal emerges only if actors, relying on their assessment of the situation and their perceptions of what is possible, allow themselves to publicly express indignation, whether feigned or sincere, and manage to impose a deviant qualification of the regarded practices leading to mobilizations in several social spaces. By shifting the focus on the emerging dynamics of multisectoral mobilizations, we advocate a relational and processual approach to the emotional dimension of the scandal, that cannot be isolated from its cognitive one.
L’indignation, le mépris et le pardon dans l’émergence du "cadre légal" d’Occupy Geneva
Revue européenne des sciences sociales, 2018
Cet article s’intéresse au problème de la maintenance, c’est-à-dire au moment où les membres d’un collectif social tentent d’assurer dans le temps l’existence de leur collectif en instituant des règles pour réguler leurs comportements. Ce problème se pose avec acuité lorsque certains membres ne respectent pas ces règles communes. Pour maintenir la coopération sociale, les membres peuvent décider d’instituer des règles secondaires visant à sanctionner les transgressions des règles primaires déjà établies. La maintenance d’un collectif peut ainsi reposer sur l’émergence de pouvoirs déontiques qui donnent aux membres l’autorité de légitimement punir et expulser les transgresseurs. Mais d’où viennent ces règles ? On peut penser qu’elles émergent des émotions éprouvées par les membres envers les transgresseurs. Je le démontre à l’aide d’une étude de cas qui établit que, dans le collectif Occupy Geneva, l’institutionnalisation de normes pour punir, exclure et réintégrer les déviants s’ancraient respectivement dans l’indignation, le mépris et le pardon.
L’indignation morale et le dégoût : quelle homologie ?
In this paper I first examine the genealogy of indignation, which in its contemporary form is a reaction against indignity. Here indignity is the opposite of a universalist and egalitarian, rather than hierarchical, version of dignity. I then analyze two main sources of indignation in contemporary political and social discourse: pity and disgust. Finally, I consider the usages and effects of indignation and disgust, drawing attention to the negative potentialities of both emotions.
Le «phénomène sectaire» en Suisse et dans le monde
François Bellanger (ed.), L’Etat face aux dérives sectaires (Actes du colloque du 25 novembre 1999), 2000
par JEAN-FRANÇOIS MAYER Chargé de cours à ! 'Université de Fribourg «C'est une secte ou pas?» Telle est la question fréquemment entendue quand s'interroge une personne inquiète de l'engagement d'un de ses proches dans un quelconque mouvement à prétention religieuse. Apparemment, une réponse positive suffit à classer le groupe dans une catégorie suspecte. Nous nous souvenons d'un long appel qui nous avait valu de nous retrouver plongé téléphoniquement dans un psychodrame familial, avec une interlocutrice nous expliquant que, puisque nous avions cité le groupe dont il était question dans un livre sur les sectes, il s'agissait nécessairement d'un mouvement dangereux.
Espagne : de l’indignation à l’organisation
Le mouvement espagnol Podemos émane-t-il vraiment des Indignés ? Construit en tension sur deux modèles de démocratie (participative et plébiscitaire), Podemos dépend de la confluence d’une multitude de mouvements participatifs locaux et de leurs succès électoraux au cours des mois qui viennent.
Anthropologie et Sociétés, 2008
Résumé Cet article explore la transformation possible de la colère – une émotion – en indignation ou bien outrage – une passion sociale. Se pose ici la question de savoir quand et comment finissent les émotions. On considèrera le rôle attribué à la revanche (Aristote) et au ressentiment (Max Scheler). Cette transformation est traitée à travers l’expérience des harkis, ces Algériens qui prirent le parti des Français durant la guerre d’indépendance d’Algérie, et qui furent massacrés par dizaines de milliers par la population algérienne à travers le pays à l’issue de la guerre. La colère des harkis, abandonnés par les Français, est médiatisée par le sens d’un destin : celui-ci n’est pas partagé par leurs enfants, qui souffrent des blessures des pères sans les connaître exactement, à cause du silence de ces derniers. Pris dans la douleur de leur propre expérience, les enfants vivent ainsi un double traumatisme. En retrait de l’expérience directe, leurs récits et leurs revendications pol...
Le concept d'indignation dans le marxisme spinoziste
Dans cette présentation donnée à la conférence d'Historical Materialism donnée à Londres en novembre 2016, je m'intéresse à la notion spinoziste d'indignation et à son interprétation au sein du marxisme spinoziste. En effet, si ce couple Marx/Spinoza a été philosophiquement fertile dans les dernières décennies, le concept d'indignation nous oblige à trancher entre une interprétation strictement spinoziste et une interprétation plus marxiste. Ces deux positions contradictoires peuvent être lues, l'une dans Capitalisme, désir et servitude de Frédéric Lordon et l'autre dans Commonwealth de Michael Hardt et Antonio Negri. **** In the following paper, given at the conference organised by Historical Materialism in november 2016 in London, I focused on the Spinozist notion of indignation et on the use of the notion in Spinozist Marxism. Even though the couple Marx/Spinoza has been fertile in the last decades, the concept of indignation forces us to choose between a strictly Spinozist understanding of the notion and a more Marxist one. These two contradictory stances can be read in Willing Slaves of Capital by Frédéric Lordon and in Commonwealth by Michael Hardt and Antonio Negri.
L’indignité nationale en trompe-l’œil
Revue des droits de l’homme, 2015
La Revue des droits de l'homme Revue du Centre de recherches et d'études sur les droits fondamentaux Actualités Droits-Libertés | 2015
Langage et société, 2006
Distribution électronique Cairn.info pour Éditions de la Maison des sciences de l'homme. © Éditions de la Maison des sciences de l'homme. Tous droits réservés pour tous pays. La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites des conditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votre établissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie, sous quelque forme et de quelque manière que ce soit, est interdite sauf accord préalable et écrit de l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur en France. Il est précisé que son stockage dans une base de données est également interdit. Le bi-ou plurilinguisme, longtemps traité par des spécialistes relevant de différentes disciplines selon un éclairage mettant en évidence sa péjoration face à l'idéal supposé de monolinguisme, se trouve aujourd'hui en position de réévaluation, avant tout pour des raisons d'évolutions historiques et sociales qui ébranlent les conceptions traditionnelles des situations de contacts de langues. Ne serait-ce qu'en Europe (puisque tel sera le cadre essentiel où nous nous situerons dans cette livraison de Langage & Société) : éclatement de la Yougoslavie ou de l'Union Soviétique, nouvelles migrations venues de pays de l'est, fixation de migrations venues du sud, flux constant et plus ou moins instable de nouvelles arrivées. Même si les situations peuvent fortement différer, la globalisation provoque sur toute la planète des déplacements de populations, donc de locuteurs, donc de langues ; donc de nouvelles modalités de contacts. Le thème du bi-ou pluri-linguisme 1 apparaît ainsi de pleine actualité. Cependant, nous pensons que ce n'est pas seulement un objet de recherche à la mode : d'une part, en offrant de nouveaux