« Orthodoxie, hétérodoxie et dissidence : les rapports entre la philosophie et la pauvreté dans les allégories romaines impériales », in A. Rolet (éd.), Allégorie et symbole, voies de dissidence ? De l’Antiquité à la Renaissance, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, 2012, p. 147-163. (original) (raw)
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Au XIVe siècle, Cola di Rienzo, dont la tentative révolutionnaire est rapportée par l’Anonimo Romano, sut utiliser, à des fins de communication et de propagande, la personnification allégorique de Rome : elle apparaît dans ses lettres et ses discours et il la fait figurer sur divers supports iconographiques. Cette image, d’une grande richesse symbolique, évolue au cours de la carrière politique du tribun, en fonction de la situation de la ville et au gré de ses ambitions. In the 14th century, Cola di Rienzo, whose revolutionary attempt was related by the Anonimo Romano, often used the allegoric personification of Rome for purposes of communication and propaganda : this allegory appears in his letters and speeches as well as on various iconographic supports. Rich in symbolic possibilities, it evolved throughout the tribune’s political career, depending on the situation of the town and the progress of his ambition.
Si l’espace et la médecine sont le berceau de ses significations, la dissidence nous semble toutefois plus familière lorsqu’elle prend la forme des révolutions politiques et des hétérodoxies religieuses. Mais lorsqu’elle touche aux goûts et aux mœurs, au refus du conformisme, à l’expression ouverte de l’originalité voire de la marginalité, elle nous rappelle qu’elle peut s’emparer par mille manières détournées de tous les champs épistémologiques établis ou s’attaquer à toutes les manifestations consensuelles de la vie intellectuelle, artistique et sociale. Il devient dès lors pertinent de découvrir comment elle se comporte face aux modes d’expression et d’interprétation si durablement et si largement répandus dans la culture européenne que furent, à l’instar du mythe, le symbole et l’allégorie. La dissidence a-t-elle vu en eux des voies (ou voix ?) privilégiées pour occulter des idéaux réprouvés, leur garantissant ainsi une diffusion plus sûre et une efficacité accrue, au prix d’une stratégie de séduction ? Les a-t-elle méprisés comme inaptes à traduire la violence de la sédition, comme impropres à restituer les subtilités doctrinales, comme trop sclérosés pour prendre en charge les bouleversements de la nouveauté ? Ou les a-t-elle superbement ignorés, jugeant que, sans danger pour elle, ils ne lui étaient d’aucun profit non plus ? On se demandera même si la dissidence ne serait pas au cœur même des constituants du symbole et de l’allégorie, affectant leur belle unité d’une fracture qui les déstabilise. Les études réunies dans le présent volume abordent de front ces interrogations et celles, plus nombreuses encore, que soulève l’association de ces trois notions, de l’Antiquité à la Renaissance, et qui n’avait pas, jusqu’à présent, fait l’objet d’une approche d’ensemble. Historiens, historiens d’art et historiens des religions, philologues et philosophes, spécialistes de littérature et musicologues croisent ici leurs approches.
RÉSUMÉ. – Pour traduire dans leur langue les noms d’agents du pouvoir perse, les Grecs ont rarement pratiqué l’emprunt (karanos, azabaritès, satrapès) et ils ont privilégié le recours à un équivalent (basileus, archôn) ou la création d’un néologisme (chiliarchos, eisangeleus, Œil du Roi ?), soit des termes proprement grecs plus directement intelligibles. L’effet sémantique n’est pas pour autant celui d’une assimilation, car chacun des trois procédés permet de signifier à sa manière l’altérité, voire l’exotisme des dignitaires perses. L’interprétation grecque des fonctions politiques perses est ainsi aux antipodes de celle des dieux perses, censés être, sous des noms distincts, identiques aux dieux grecs : la langue affiche ainsi clairement la dimension politique de l‘antithèse entre Grecs et Perses. ABSTRACT. – To translate into their language the titles of Persian officials, Greeks rarely borrowed words (such as karanos, azabaritès, or even satrapès), but they preferred to use an existing title of (assumed) equivalent meaning (basileus, archôn), or to create a neologism (chiliarchos, eisangeleus, The King’s Eye?), that is to say strictly Greek, and directly intelligible, terms. Nevertheless, the semantic effect is not one of assimilation, because each of the three processes allows in its own way to express the otherness, or even exoticism, of Persian dignitaries. The Greek interpretation of Persian public offices is, then, the very opposite of that of Persian gods, supposed to be identical to Greek gods while having distinct names: in that way, language clearly reflects the political aspect of the antithesis between Greeks and Persians.
Hétérodoxies croisées. Catholicismes pluriels entre France et Italie aux XVIe et XVIIe siècles, éd. G. FRAGNITO et A. TALLON, Rome, 2015, p. 359-373
Les temps posttridentins ont soudainement assisté à l'impétueuse réassurance politique d'une papauté dont l'autorité avait pu sembler un temps ébranlée sous l'effet dévastateur de la diffusion des thèses adoptées par les réformateurs protestants. Au tournant des XVI e et XVII e siècles, les théologiens défenseurs du pontificat romain se rangent derrière la doctrine -pour la première fois formulée dans les célèbres Disputationes de controuersiis christianae fidei (1586-1593) du jésuite Robert Bellarmin (1542-1621) -de la potestas indirecta du pape in rebus temporalibus, qui revendique pour le souverain pontife le droit d'intervenir au temporel pour autant que les intérêts du spirituel le requièrent 1 . D'un inquiétant projet de réaffirmation de la puissance du Saint-Siège a témoigné avec éclat la crise de l'Interdit vénitien (1606-1607) 2 , qui a été l'occasion d'une impressionnante polémique où s'est exprimé un antiromanisme catholique très virulent.
Dans l'Athènes de l'époque classique, le tyran fait figure d'épouvantail. Non seulement les dernières années de la domination pisistratide, marquées par une répression féroce, avaient laissé un douloureux souvenir 1 , mais la peur de la tyrannie avait été ravivée au moment des guerres médiques : Hippias, le fils de Pisistrate, avait alors tenté de revenir au pouvoir, en prenant le parti du Grand roi 2 . Cette alliance au sommet eut un étrange effet en retour : la tyrannie fut désormais étroitement associée à la monarchie perse dans l'esprit des Athéniens, au point qu'Euripide, dans le dernier tiers du V e siècle, pouvait définir la tyrannie comme une façon proprement « barbare » de gouverner 3 . En tant que variante du despotisme oriental, la tyrannie devint alors, pour paraphraser Pauline Schmitt, le « repoussoir idéologique par excellence » d'une cité qui se voulait isonome 4 .
« Religion et pouvoir à Rome dans l'Antiquité »
ARELAS-CNARELA, 39, 2019, p. 40-58., 2019
L'article reproduit, dans une version augmentée et savante, un précédent article de « vulgarisation » publié dans E. Winstein, M. Humm, F. Ruscher (éd.), Religion et pouvoir politique, Strasbourg, 2015, p. 25-64, sous le titre « Religion et pouvoir dans la Rome antique ». 1 Tite-Live, Histoire romaine, V, 1, 6 ; voir aussi Arnobe, Contre les nations, II, 26. Une étymologie fantaisiste prétendait que le mot latin pour désigner les cérémonies religieuses (caerimoniae) venait du nom de la ville étrusque de Caeré, à laquelle Rome aurait emprunté tout son rituel religieux (Valère Maxime, Faits et dits mémorables, I, 1, 10 ; Abrégé de Festus par Paul Diacre, p. 38 de l'édition Lindsay). 2 Cicéron, La nature des dieux, II, 8. 3 Cicéron, Sur la réponse des haruspices, 19. 4 Sur cette altérité religieuse des anciens Romains, derrière un vocabulaire apparemment identique au nôtre, voir en dernier lieu : J. Scheid, Les dieux, l'État et l'individu. Réflexions sur la religion civique à Rome, Paris : Seuil, 2013, p. 26. 5 Cicéron, Discours pour Flaccus, 28 : « chaque cité a sa religion, nous avons la nôtre. »
ABSTRACT IN ENGLISH : After underlining the complexity of the cultural contacts between Hellenism and Romanity in the North Aegean and the construction of multidimensional identities, the author analyses how the relations of power may have constituted an important factor in the choice and expression of Hellenic and/or Roman cultural practices by individuals as well as by the Roman state and the Greek cities. This analysis is based on selected case studies : on epigraphic and archaeological sources (mainly three funerary monuments from Thessalonike) as well as on Plutarch’s account of the funeral of Q. Servilius Caepio, half-brother of Caton the Younger, in Ainos. ---------------------------------------- RÉSUMÉ EN FRANÇAIS : Après avoir souligné la complexité des relations culturelles entre hellénisme et romanité dans le Nord égéen et la construction d’identités multidimensionnelles, l’auteur montre comment les rapports de pouvoir ont pu constituer un enjeu important du choix puis de l’exécution de pratiques culturelles helléniques et/ou romaines par des particuliers comme par l’État romain et les cités grecques. La réflexion s’appuie sur des études de cas : des sources épigraphiques et archéologiques (principalement trois monuments funéraires de Thessalonique) ainsi que le récit par Plutarque des funérailles de Q. Servilius Caepio, demi-frère de Caton le Jeune, à Ainos.
323 Le Portrait d'Ugolino Martelli par Bronzino : un Homère florentin ? Anne-Marie LECOQ 345 Vasari et le bouclier d'Achille Estelle LEUTRAT 361 Honneur aux vaincus : autour des Troyennes et de Polyxène sacrifiée, en France dans la seconde moitié du XVI e siècle Christiane DELOINCE-LOUETTE 383 Les « lieux homériques » de Jean de Sponde : une lecture éthique de l'Iliade à l'usage du prince Colette NATIVEL 399 Peter Paul Rubens, « l'Homère de la peinture » ?