« Les peintures de Sant Quirze de Pedret : un programme apocalyptique au service de l’eucharistie », Les cahiers de Saint-Michel de Cuxa, 47, 2016, p. 51-67. (original) (raw)

« Les Evangiles de Saint-Maur-des-Fossés et la « peinture non officielle » dans la première moitié du IXe siècle », Ars auro gemmisque prior. Mélanges en hommage à Jean-Pierre Caillet, éd. M. Jurkovic, Zagreb, 2013, p. 165-174.

In this article, we suggest to localize the production of the Carolingian Gospel Book, Paris, Bibliothèque nationale de France, latin 11959, in the abbey of Saint-Maur-des-Fossés, in the Paris region, during the first half of the IX th century. This manuscript shows at the beginning a series of illuminations, with 14 canon tables, 4 Evangelists portraits and a monumental Latin cross, and, in addition, a few ornated initials. All these illuminations show mixed influences, from insular, merovingian and Charlemagne's court arts. Like some characters of the script, most of them are seen in other manuscripts originating from the abbey of the Fossés. A notable feature of this manuscript is the cross opening the Gospel of saint Matthew, filled with insular interlacings. This cross has a strong symbolic value, at a time when theologians have launched a debate around the signification of the cross and when the Crucifixion is progressively replacing the cross in the pictures.

« Eucharistie, commémoration, adoration et dévotion : la Crucifixion dans la peinture romane de Catalogne et du nord des Pyrénées », Les cahiers de Saint-Michel de Cuxa, 52, 2021, p. 147-178.

Les églises de Catalogne et du nord des Pyrénées comportent dix-sept Crucifixions peintes entre la fin du XIe et le XIIIe siècle. L’article aborde les différentes fonctions et significations qui ont pu leur être affectées, en commençant par leur dimension liturgique suggéré par leur emplacement et plusieurs indices iconographiques. Les plus significatifs émanent du programme de Sant Pere de Sorpe où un ange diacre encense le Crucifié au-dessus d’une armoire liturgique pratiquée dans la paroi, flanquée de deux calices peints. Cet ensemble suggère par ailleurs la présence d’un autel aux deux-tiers de la nef et permet ainsi d’envisager un tel dispositif dans Sant Joan de Caselles, Cervià de Ter, Estaon et Saint-André-de-Sorède. Le thème peut également être rattaché aux différentes commémorations de la Passion accomplie à l’occasion de chaque messe et durant la semaine sainte lorsqu’il s’intègre dans un cycle narratif, comme à Montgauch et Sant Tomàs de Fluvià. À Cervià de Ter, la présence de six anges inclinés et tendant leurs mains vers le Sauveur font probablement écho au rituel de l’adoration du Vendredi saint et sans doute à ceux de l’Invention et de l’Exaltation de la croix. Enfin, toutes les œuvres du corpus ont pu servir de support visuel à la dévotion personnelle, en particulier à Ourjout où le Christ exprime ses souffrances et à Sorpe et Estaon où les témoins expriment le nouveau sentiment d’empathie qui s’est développé sur le continent au cours du XIe siècle après son émergence beaucoup plus précoce au sein du monde anglo-saxon. La Crucifixion mêlant stuc et peinture de Sant Joan de Caselles semble résumer l’ensemble de ces significations tout en mettant l’accent sur sa dimension cultuelle puisqu’il semble faire écho au crucifix miraculeux de Beyrouth ou au Volto Santo de Lucques.

Vie et Passion de Jésus Christ (Pathé, 1902-1905) : hétérogénéité des « tableaux », déclinaison des motifs

1895, 2010

Dans le cadre de la rétrospective organisée lors du colloque « Jésus en représentations » qui s'est tenu du 7 au 9 mai 2009 à Lausanne 1 , la Cinémathèque suisse a projeté, transféré sur support DVD, le film Vie et Passion de Jésus Christ édité par Pathé, dont elle conserve deux copies 2. Dans le prolongement des recherches associées à ce colloque, nous nous proposons d'étudier ici ce film en examinant ses principales caractéristiques matérielles et esthétiques 3. Au vu de l'importance quantitative des Passions filmées à l'époque du cinéma des premiers temps (ainsi qu'en témoigne notamment le catalogue Pathé), de la place que ces dernières occupent dans les discours historico-théoriques consacrés à cette période 4 et des nombreuses inconnues, ambiguïtés ou erreurs qui compliquent les recherches relatives à cet objet-rien ne ressemble plus à un Jésus qu'un autre Jésus, si bien que les confusions sont fréquentes 5-, il nous 1895 / n°60 mars 2010 études 33 1 Projet soutenu par le Fonds national de la recherche scientifique (FNS), dirigé par Alain Boillat, Pierre Gisel, Jean Kaempfer et Philippe Kaenel. Valentine Robert a été l'assistante en charge du pan cinématographique du projet (Voir http://www.unil.ch/usagesdejesus). 2 Projection du 7 mai 2009 commentée par Alain Boillat (la transcription écrite de ce commentaire est disponible sur http://www.unil.ch/usagesdejesus/page67722.html). 3 Les deux copies nitrate 35mm de ce film ont été vues les 13 et 14 janvier 2010 à la Cinémathèque suisse (site de Penthaz) sur une enrouleuse munie d'un verre dépoli (afin qu'aucun passage dans une visionneuse n'endommage le film qui, nous l'espérons, pourra bénéficier d'une restauration). Nous remercions vivement Frédéric Maire (directeur de la Cinémathèque suisse) et Caroline Neeser (directrice des collections) de nous avoir donné accès à ces copies, ainsi que Carole Delessert (conservatrice-restauratrice) pour la supervision du visionnage et les informations utiles qu'elle nous a fournies quant aux caractéristiques de ces supports matériels. 4 On sait depuis Noël Burch le rôle considérable que ces films ont joué, en raison notamment de leur ambition narrative particulière résultant de la notoriété de l'histoire qu'ils racontent (celle des évangiles, connue de la grande majorité des spectateurs), dans le processus de linéarisation du signifiant filmique (Noël Burch, « Passions, poursuites : d'une certaine linéarisation », la Lucarne de l'infini, Paris, Nathan, 1990, pp. 137-155). 5 En effet, l'identification des Passions Pathé est particulièrement complexe. Analysant une copie conservée par le NFTVA (connue sous le titre Vita e passione di Cristo, 1906) et The Life of Jesus Christ (suppo-par Alain Boillat et Valentine Robert Vie et Passion de Jésus Christ (Pathé, 1902-1905) : hétérogénéité des « tableaux », déclinaison des motifs a paru pertinent de fournir un apport à la connaissance que nous avons aujourd'hui de cette production en nous concentrant sur ce seul film. Nous l'aborderons en deux volets : le premier sera consacré aux interrogations de type philologique, qui nous conduiront à prendre la mesure de l'autonomisation de chacun des « tableaux » qui composent le film et, par conséquent, de l'hétérogénéité foncière de ce dernier ; le second nous permettra d'articuler les constats émis à propos du support matériel avec une réflexion d'ordre esthétique. Il s'agira d'examiner en quoi les caractéristiques visuelles de la Vie et Passion de Jésus Christ sont redevables d'une volonté de produire un effet-tableau qui inscrit cette production filmique dans une généalogie plus large. Ainsi pourrons-nous observer sur la base d'un cas concret les modalités selon lesquelles le « cinéma » de l'époque se fait le lieu de convergences entre diverses séries culturelles, et, de ce fait, doit être appréhendé en tant que partie intégrante d'un phénomène de « maillage » qu'André Gaudreault a décrit ainsi : Au tournant du XX e siècle, le maillage intermédial est si fécond dans le monde de la cinématographie qu'un très grand nombre de vues animées paient en quelque sorte un lourd tribut aux autres médias ou espaces médiatiques, ne serait-ce que dans le sujet même qu'elles abordent 6. Ce constat est particulièrement valable dans le cas des Passions cinématographiques, qui s'appuient sur un héritage iconographique aux ramifications multiples. L'examen de l'effettableau nous permettra en particulier d'envisager les liens entre « notre » production Pathé et une pratique jusqu'ici peu discutée dans ce contexte, celle du tableau vivant. L'historien du cinéma (des premiers temps) et le philologue Au même titre que pour tout autre corpus du cinéma des premiers temps (mais, comme nous le verrons, dans des proportions accrues), certaines précautions méthodologiques s'impo-1895 / n°60 mars 2010 34 sément daté de 1914), Ben Brewster et Lea Jacobs contestent les datations proposées. Ils estiment que les éléments contenus dans la première seraient plutôt de 1902 alors que ceux de la seconde dateraient