Journée d'Etudes à l'Université de La Rochelle 24 Novembre 2017 "Les ports d'Amérique face au défi corsaire (XVI e -XVIII e siècle)" (original) (raw)

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Les attaques corsaires sur les ports d'Amérique constituent une réalité omniprésente de la vie atlantique à l'époque moderne, aux côtés des arraisonnements de navire, en temps de guerre (course) comme en période de paix (piraterie). Qu'elles soient ou non instrumentalisées, elles représentent, pour les monarchies européennes, un moyen efficace et peu onéreux de mettre à mal – voire de détruire définitivement – les établissements des autres puissances, à un moment où s'affirment les appétits économiques, politiques et coloniaux des uns et des autres. Dans ce contexte, elles ruinent parfois les espoirs d'implantation d'une poignée de colons audacieux. Elles perturbent les circuits d'approvisionnement en produits (coloniaux, alimentaires, manufacturés) et créent leurs propres réseaux de redistribution des richesses, que les fruits du butin réalisé empruntent des voies commerciales légales ou illégales. Si les attaques de convois excitent la convoitise des corsaires, leur réussite est non seulement aléatoire dans le vaste océan mais aussi problématique en raison du dispositif défensif dont elle font l'objet. Aussi ces corsaires ont-ils rapidement porté leur attention sur les lieux névralgiques de la puissance économique que constituent les ports d'Amérique. Sites d'embarquement privilégiés de toutes les marchandises vers l'Europe, et d'arrivée des produits manufacturés (et des esclaves venant d'Afrique), ce sont de véritables entrepôts qui attirent les regards et stimulent l'appât du gain. Ces ports qui ont la haute main sur le grand commerce atlantique sont relativement peu nombreux avant l'ouverture « libérale » du dernier tiers du XVIII e siècle, quelques places concentrant l'essentiel de l'activité et faisant donc l'objet de feus nourris de la part des bâtiments corsaires qui croisent au large des côtes ennemies. À l'occasion, les marins se font piétons pour piller et brûler ces établissements. Quelques grandes attaques demeurent ainsi dans les mémoires, les raids sur Vera Cruz, Panama, Porto Bello, Carthagène, pour ne parler que des plus grandes opérations, marquent aujourd'hui encore les esprits. Elles entretiennent la crainte d'une agression tout au long de l'époque moderne, la menace corsaire étant dument ressentie et redoutée dans les ports d'Amérique. Mais que représentent vraiment ces attaques des ports américains ? Un premier axe de réflexion concerne l'organisation de ces attaques, y compris en direction des colonies françaises, anglaises ou néerlandaises. Quels sont les moyens en hommes et en matériel qu'elles ont su (ou pu) mobiliser ? Comment sont montées ces expéditions ? Au-delà des grands ports ibéro-américains (Vera Cruz, Porto Bello, Carthagène, La Havane, Rio de Janeiro), il convient ici de prendre en compte les opérations – encore trop méconnues – menées contre les ports de moindre envergure, notamment aux Petites Antilles et en Guyane, tenus par les Français, les Anglais et les Hollandais. Existe-t-il une économie corsaire, avec son ou ses « modèles » économiques propres ? Ses réseaux d'affaires et de mobilisation du capital ? De redistribution – voire de blanchiment – du butin ? La fréquence de ces attaques corsaires est une autre source d'interrogation. Il ne s'agit pas seulement de mettre en ordre une chronologie de la menace corsaire mais de replacer ces attaques dans une vision d'ensemble afin de les contextualiser, et de voir dans quelle mesure elles participent à une vision internationale du monde – notamment lors des conflits entre les puissances – et s'insèrent dans des dynamiques beaucoup plus locales. Quels objectifs visent-elles sur les plans politiques, diplomatiques, géostratégiques et géoéconomiques ?