"Les Rubens bruxellois : une collection phare ?" (original) (raw)

Les musées ont pour mission de préserver, étudier, créer et diffuser, au travers de la société, les traces du passé. En sélectionnant certains objets et/ou en valorisant certains personnages et événements, ils participent à la construction de la mémoire collective. Cette réactualisation prend nécessairement la forme d'une fiction car la mise en scène des oeuvres n'est jamais neutre (Glicenstein , 2009 : 12-13). Bien au contraire, elle témoigne des visées de l'établissement qui la met en place. Un objet n'est pas un matériel muséal en soi, il le devient grâce à l'information, aux significations, aux connaissances et aux références qui lui sont associées par l'institution qui l'héberge (Desvallées et Mairesse, 2011 : 251). Parmi toutes les oeuvres qu'ils conservent, les musées possèdent, dans leur collection permanente, une oeuvre au statut privilégié. Bénéficiant d'une mise en valeur qui le différencie des autres, l'objet phare d'une institution devient son emblème et le porte-parole de son discours. Chefs-d'oeuvre du maître flamand Pierre-Paul Rubens (1577-1640), la collection de tableaux conservée aux Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique (MRBAB) peut être considérée comme l'attraction phare de l'institution durant son premier siècle d'existence. Plusieurs sources laissent penser qu'au fil des années, la figure tutélaire de l'école flamande va être érigée en icône par la tradition nationale belge. Ce phénomène semble se cristalliser au sein du musée de Bruxelles dont le discours participe directement à la patrimonialisation du peintre. Parallèlement, les tableaux du maître flamand sont constitutifs de la fondation identitaire du musée de Bruxelles ; la figure de l'artiste devient son plus bel atout.