" Laboratorie italien " , 2015 (original) (raw)

En 1983 eut lieu à Milan un important congrès sur Federico Chabod e la " nuova storiografia " italiana dal primo al secondo dopoguerra (1919-1950), dont les actes furent publiés l'année suivante. Congrès et livre stimulèrent une exploration plus systématique des trajectoires intellectuelles et politiques des historiens au cours de décennies cruciales pour le développement de leur discipline et pour le rôle qu'elle occupa dans la vie politique et culturelle de la société italienne. Le livre de Margherita Angelini s'insère pleinement dans ce filon de recherche : il vise à reconstruire l'activité des historiens en étudiant les itinéraires de recherche personnels, les multiples réseaux de relations et le nouveau cadre des institutions culturelles. Les transformations du statut des chercheurs et des institutions de la recherche représentent en effet « un importante capitolo della storia culturale e, in senso lato, della storia politica di un paese » (p. 17). Sur le fond, on perçoit la présence, envahissante ou nuancée selon le cas, du régime fasciste, qui considère l'histoire comme un instrument fondamental de légitimation de ses propres choix de politique intérieure et internationale. D'où la juste conviction que les décennies de l'entre-deux-guerres sont « un punto di osservazione privilegiato per comprendere i cambiamenti interni alla disciplina storica poiché vi fu un progressivo assestamento delle strutture educative, che portò alla demarcazione di caratteri che divennero peculiari dell'accademia italiana nel lungo periodo » (p. 23). Gioacchino Volpe (1876-1971) et Federico Chabod (1901-1960) sont les personnalités exemplaires de cette période historiographique, dont les racines remontent, dans le cas de Volpe et de beaucoup d'autres spécialistes de sa génération (on pense aussi à Salvemini), à la phase qui va de l'époque giolittienne à la première guerre mondiale. Mais il ne fait aucun doute que les développements scientifiques et institutionnels de cette période ont pris réellement corps seulement dans les années du régime fasciste : comme en témoignent clairement de nombreuses études récentes consacrées à Volpe (par exemple les travaux d'Eugenio Di Rienzo, Barbara Bracco, Fabrizio Cossalter), c'est au cours de cette phase que l'historien occupe d'importantes fonctions comme celle de directeur de l'École d'histoire moderne et contemporaine de Rome. Tout en se concentrant sur les activités du maître et de l'élève, l'ouvrage de Margherita Angelini offre aussi des indications utiles pour reconstruire la trame complexe des relations et des initiatives scientifiques de ces années. Il reconstruit notamment les initiatives de spécialistes peut-être moins influents d'un point de vue scientifique, mais qui, néanmoins, réussirent à marquer en profondeur les paradigmes d'interprétation et les structures du pouvoir académique (on pense à Francesco Ercole, à Pietro Fedele ou à un haut dignitaire fasciste activement engagé au sein des instituts et des études historiques comme Cesare Maria De Vecchi). Les années trente marquèrent en effet un passage décisif également sur le plan législatif : entre 1933 et 1935, une vaste réforme des instituts et des études historiques déboucha sur la fondation de la « Giunta centrale per gli studi storici » et des quatre