Leopoldo Iribarren, Fabriquer le monde. Technique et cosmogonie dans la poésie grecque archaïque (original) (raw)
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Paysage et poésie dans la lyrique grecque
1998
Entreprendre une etude du paysage dans la poesie grecque peut sembler relever de la gageure, dans la mesure ou cette notion, telle que nous la comprenons, etait sans doute etrangere au mode de pensee et de representation des Grecs. Il convient en effet de remarquer qu'il n'existe pas, dans la langue grecque, de terme qui traduise veritablement le mot de paysage : ni τόπος (region, lieu), ni χώρα ("espace" fini, propre a un usage, a une fonction, a une activite, ou "campagne") n'expriment toute l'idee contenue dans notre paysage. Celui-ci implique en effet la presence d'un regard et est fondamentalement lie a une representation picturale de l'espace. Or nous ne connaissons pas de peinture grecque de paysage ou celui-ci soit traite comme le sujet veritable de l'œuvre. Cette absence a la fois lexicale et conceptuelle ne signifie pas pour autant que les Grecs aient meconnu leur milieu naturel, ni que les poetes aient dedaigne de le chanter...
L’Ovide moralisé illustré, dir. Marylène Possamaï et Marianne Beysseyre, Cahiers de Recherches Médiévales et Humanistes 30-2, 2015, p. 49-74., 2015
Le recyclage du répertoire iconographique traditionnel de la Création du monde donne lieu, dans les manuscrits de l’Ovide moralisé, à des dispositifs visuels très variés aux intentions fort éloignées les unes des autres. Placées en début de manuscrits, les images de fondation du monde et de l’In principio occupent une place visuelle stratégique dont l’analyse permet de comprendre les usages littéraires de l’Ovide moralisé. Infléchissant la lecture tantôt vers le récit fabuleux, tantôt vers le commentaire biblique, la plasticité sémantique des images hexamérales permet de faire varier considérablement les discours sur l’herméneutique et la poétique de l’Ovide moralisé. Ainsi, l’iconographie hexamérale, toujours inventive, oscille entre pastiche sérieux des décorations de manuscrits bibliques ou savants et innovation visuelle, comme dans les manuscrits Lyon 742 et BnF fr 871 où l’invention du premier Prométhée dans l’histoire de l’art médiéval réoriente les représentations de la poésie savante en les enracinant dans l’héritage mythologique antique.
«Du cosmique au cosmétique. Éros, ajusteur de parures en Grèce ancienne»
Cahiers « Mondes anciens », 2022
La polysémie de κόσμος est bien connue : outre « ordre » et « bon ordre », le terme signifie « parure », « organisation, constitution » et « gloire, honneur » (Chantraine 1968, s. v. κόσμος). C'est notamment à la suite de Michel Casevitz (1989) que ce mot a été réévalué par les historiens, philologues et philosophes comme le signifiant principal, en grec, de l'ornement, de l'ajustement et de la mise en ordre. Ainsi, dans leur récente édition des philosophes présocratiques, André Laks et Glenn Most traduisent κόσμος par « ornement or adornement » et par « the world inasmuch as it is ordered and arranged » (Laks et Most 2016, I, p. 239), rejoignant l'ancienne définition de Charles H. Kahn (1960, p. 220) et de Paraskevi Kotzia (2007, p. 1093-1094), reprise plus récemment par Philippe Horky (2019). C'est toutefois sous l'influence de l'anthropologie historique que l'appréhension de cette notion a pu prendre de nouvelles directions, apportant un regard différent sur la consécration, sur le décor architectural, sur le corps et ses artifices en Grèce ancienne (Marconi 2004 ; Prêtre 2012 ; Bodiou et al. 2011 ; Gherchanoc et Huet 2015). Ainsi, le κόσμος comme objet d'histoire s'est précisé en tant que Repräsentationsmittel ou status-marking item (Laffineur 2012, p. 15) et les études ont pu s'intéresser aux différentes représentations de la parure ainsi qu'à ses impacts dans la construction identitaire des Anciens. 2 Sans nier ou minimiser les apports des travaux consacrés au κόσμος sous ses diverses acceptions, il apparaît cependant que ceux-ci n'ont pas traité des interventions d'Éros dans ce domaine, précisément lorsque κόσμος signifie « parure à part entière » ou plus généralement « ornement ». De fait, Éros a été jusqu'à présent peu étudié pour luimême en rapport avec le domaine cosmétique : outre l'article de François Lissarrague (2011) sur l'Éros joker de beauté en iconographie, on compte une seule monographie qui lui soit consacrée, l'ouvrage de Monica Jackson (2006), qui se limite toutefois à l'étude d'Éros comme simple motif décoratif des bijoux à l'époque hellénistique. Reprenant en Du cosmique au cosmétique
Symposium, 2021
L’un des gestes distinctifs de Cornelius Castoriadis fut de rapporter l’histoire de la philosophie à un concept de création « ex nihilo », qu’il définissait comme surgissement immotivé et irréductible de nouvelles déterminations formelles de l’être dans le temps. Cet article s’intéresse à la signification d’un tel parti pris pour l’instruction de la question cosmologique, entendue comme enquête sur les principes et le devenir de la totalité de l’être. L’auteur montre dans un premier temps comment Castoriadis a justifié sa position ontologique à partir d’une réflexion sur l’histoire de la science. Il la rapporte ensuite à deux voies possibles afin de résoudre la question cosmologique : la dialectique et la complexité. Il est soutenu que l’intention de Castoriadis ne fut pas de produire une cosmologie comme telle, mais de rapporter la pratique scientifique à la création et d’expliciter les conditions de possibilité de son intellection.
Theios Homèros : du poète inspiré au poète divinisé ?
Mythos, 2020
Writers in Antiquity often called Homer “divine” (θεῖος Ὅμηρος), using an epithet they inherited from the Homeric formula theios aoidos (θεῖος ἀοιδός). But whereas, initially, the epithet referred to the figure of the aoidos as inspired by the Muses, whose poetry displayed universal knowledge and exerted a quasi-magical power over the listeners, from the Hellenistic period onwards the adjective acquired connotations associated with the divine cults devoted to Homer in several cities (most notably Smyrna and Alexandria). The epithet then became one of the forms, which could be used to formulate the deification of Homer, and it recurs in numerous epigrams dedicated to the glory of the poet. This connotation also enabled writers to reflect on the status of the poet (human, divine, or halfway between man and god?), and even to mock the pretensions of the Hellenistic cities and sovereigns who deified Homer solely to benefit from his reflected glory.