Les caravanes de La Mecque et l'avènement de l'Islam / Patricia Crone (original) (raw)

La Mecque avant l’islam - Rapport des auteurs Grecs

Arabie et la Mecque, 2024

La version apportée par les sources musulmanes depuis la naissance de l'islam sur la rédaction du Coran, de la tradition, de la biographie du prophète et de l'historicité de la Mecque est depuis la fin du siècle passé rejetée partiellement ou totalement en occident. Depuis quelques décennies cette tendance s'accentue, nous assistons à travers des publications dans les universités du monde à un mouvement ''hypercritique'' qui rejette tout en bloc. On considère entre autres que le Coran n'a pas été rédigé durant la période du 3ème calife Uthman, que la Mecque étant une création de l'époque abbasside ou que le temple mecquois n'a pas une existence préislamique, que le pèlerinage est une fabrication du milieu du 7 ème siècle, que la Mecque à l'aube de l'islam comme le prétend les sources islamiques n'était pas à majorité païenne (mais plutôt chrétienne), que le chapitre de l'éléphant (105) dans le Coran n'est qu'une légende…

 « Une menace venue d’Orient. Un siècle de pèlerinages à La Mecque dans l’Algérie coloniale (1840-1940) », Revue d’Histoire Moderne et Contemporaine, 2016, n° 63-2 («Désenclaver l'histoire de l'Algérie à la période coloniale »), p. 84-109.

Plutôt que de laisser leurs sujets musulmans accomplir librement leur devoir religieux dans les Lieux Saints de l'islam, les autorités coloniales françaises en Algérie ont fait le choix, dès les premières années de la conquête, d'organiser et d'encadrer les déplacements de leurs pèlerins à La Mecque. Si cette ingérence fut d'abord motivée par des raisons de police coloniale, les obstacles croissants que les autorités mirent au départ des Musulmans transformèrent bientôt l'organisation du pèlerinage algérien en un véritable contre-modèle, critiqué aussi bien en France qu'à l'étranger. Cette organisation algérienne du pèlerinage n'en connut pas moins, à partir de la Grande Guerre, des mutations importantes. L'emprise croissante du ministère des Affaires étrangères sur les pèlerinages musulmans se traduisit notamment par la tentative de faire du hajj algérien, étendu à de nombreux pèlerins de l'empire français, un instrument d'influence au Moyen-Orient. Mais si la position hégémonique des Britanniques au Hedjaz devait condamner cette stratégie, l'Algérie ne devait pas moins remettre en vigueur cette organisation pendant la décennie 1930, à la faveur du développement des mouvements nationalistes en Orient et des attaques de l'Italie fasciste elle-même soucieuse d'encadrer le déplacement à La Mecque des Musulmans de son empire. Summary Instead of letting their Muslim subjects achieve freely their religious duty in the Holy Shrines of the Islam, the French colonial authorities in Algeria chose, from the very first years of the conquest, to organize and to supervise the travels of their pilgrims to Mecca. If this intervention was motivated at first by reasons of colonial police, the increasing obstacles posed by the authorities made the organization of the Algerian pilgrimage to become a counter-model, criticized as well in France as abroad. This Algerian organization of the pilgrimage had to face important shifts from the Great War. The increasing influence of the Ministry of Foreign Affairs over the Muslim pilgrimages tried to turn the Algerian hajj, widened to numerous pilgrims of the French empire, into an instrument of influence in the Middle East. But if the hegemonic position of the British in Hedjaz had to condemn this strategy, the Algerian organization of the hajj reappared during the 1930s because of the development of the nationalist movements in the Middle-East and the attacks of a fascit empire managing itself to supervise the travels of its own muslim pilgrims to Mecca.

Panique à La Mecque. Écrire la fitna au temps des chérifs hasanides (début IXe/XVe siècle)

Désordres créateurs. L'invention politique au temps des troubles, Emmanuelle Tixier du Mesnil et Gilles Lecuppre (éd.), 2014

A partir de l'étude du chapitre 38 de l'ouvrage du savant mecquois al-Fâsî (m. 1429), Shîfâ' al-gharâm bi-akhbâr al-balad al-harâm, consacré à l'histoire du hajj, cet article tente d'identifier les modes de représentation du pouvoir mecquois dans l'oeuvre d'al-Fâsî. Il suggère que le récit récurrent des fitnas qui déchirèrent la cité sainte au moment du pèlerinage était une manière de mieux en neutraliser les effets et les traces, à un moment où s'affirmait un nouveau pouvoir local fort, autour du chérif Hasan b. 'Ajlân.

 « Trois pèlerins à La Mecque. Mutations des formes l’échange au cœur des lieux saints de l’islam », Esprit, 341/1,2008, p. 52-63.

Qu'il soit volonté d'ascèse individuelle, rupture avec le quotidien ou encore expérience unique d'une rencontre avec le sacré, le pèlerinage n'en reste pas moins un fait collectif 1 . A ce titre, le pèlerinage à La Mecque ou hajj ne fait pas exception à la règle. En même temps qu'il constitue une obligation canonique pour chaque pèlerin, il est un lieu de rencontre privilégié pour les Musulmans du monde entier, un espace propice aux échanges de toutes sortes, qu'ils soient économiques, culturels ou spirituels. A la lecture de l'historien Bernard Lewis, il semblerait toutefois qu'étudier les conséquences du hajj sur les communications et le commerce soit une tentative vaine du fait d'une information lacunaire 2 . Les récits de pèlerinage n'en constituent pas moins « l'une des sources les plus sûres pour saisir l'expérience qui se joue dans cette sortie hors de soi que représente le pèlerinage » 3 et par conséquent l'un des moyens les plus sûrs d'approcher cette dimension de l'échange. Trois récits seront présentés dans cette contribution. Chacun d'entre eux s'inscrit dans une époque spécifique : la période médiévale grâce au célèbre récit de l'Andalou Ibn Jubayr écrit à la fin du XIIème siècle 4 ; l'âge colonial quand, au début du XXème siècle, le caïd algérien Mohammed Ben Chérif décide de se rendre dans les villes saintes de l'Islam 5 ; enfin la période actuelle de mondialisation des échanges au travers du récit de pèlerinage publié en 2005 par l'anthropologue marocain Abdellah Hammoudi 6 . A défaut d'êtres proches dans le temps, ces récits sont tous le fait de pèlerins originaires de l'Occident de l'Islam -Maghreb et Al Andalus -et dont l'éloignement géographique des Lieux Saints a contribué, sinon à la création, du moins à l'enrichissement du genre littéraire du récit de voyage de pèlerinage appelé rihla. Cependant si chacune de ces expériences de pèlerinage a sa logique propre, toutes ne s'inscrivent pas moins dans une tendance de massification du hajj : dix mille pèlerins environ à l'époque d'Ibn Jubayr contre deux cent mille pèlerins au tournant du XXème siècle et près de deux millions aujourd'hui 7 . Cet accroissement continu de la fréquentation, ainsi que la volonté des puissances organisatrices de mieux la maîtriser, n'ont pas été sans conséquence sur l'évolution des échanges à l'intérieur des Lieux Saints. Comme a pu l'être un contexte économico-politique marqué par la permanence des contacts avec l'Occident chrétien. 1